Un projet d’ordonnance du ministère de la Santé prévoyait de rétablir une demande d’agrément pour toute création de centre de santé. Mais face à l’opposition des organismes de centres de santé, le texte a été retiré le 31 mars et des négociations ont été ouvertes avec la Direction générale de l’offre de soins (DGOS).
Au mois de juin dernier, alors que l’on découvrait l’ampleur des conséquences de l’affaire Dentexia pour les patients, la ministre de la Santé saisissait l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) d’une double mission : trouver des solutions pour soigner les anciens patients et éviter qu’une telle situation ne se reproduise. La première partie du rapport, rendue publique au mois de juillet, a été suivie de mesures destinées à permettre de soigner les victimes. Quant à la seconde partie du rapport, selon la Mutualité Française, la ministre de la Santé en a pris connaissance au mois de janvier mais ne l’a pas rendue publique.
Et plus d’un an après la mise en liquidation de l’association Dentexia, un centre de santé peut toujours ouvrir en adressant une simple déclaration à l’Agence régionale de santé (ARS), conformément à la loi Bachelot de 2009. L’Ordre et la Confédération nationale des syndicats dentaires (CNSD) plaident depuis des années en faveur du rétablissement de la demande d’agrément. À la mi-mars, un projet d’ordonnance du ministère de la Santé a rétabli l’agrément. La CNSD s’est alors félicité de cette mesure qui promettait de mettre les centres dentaires « enfin sous contrôle » alors que, depuis 2009, ils ont « proliféré […] sans avoir à justifier de leur conformité aux obligations sanitaires et à leurs missions sociales ».
Mais les centres de santé se sont opposés à cette ordonnance « discriminatoire et infamante ». « Prenant prétexte des pratiques de quelques escrocs, c’est 1 650 centres de santé qu’on assassine. […] Les centres deviendraient la seule forme d’exercice ambulatoire à relever d’un régime d’autorisation », se sont insurgés la Fédération nationale des centres de santé (FNCS), l’Union syndicale des médecins des centres de santé (USMCS) et le Syndicat national des chirurgiens-dentistes des centres de santé (SNCDCS). Tandis que la Mutualité Française s’inquiétait aussi de ce texte « imposé » par le ministère ! Dans la foulée, la commission permanente de la Conférence nationale de santé (CNS), organisme consultatif placé auprès de la ministre de la Santé, s’est saisi de l’affaire et a adopté le 24 mars, en procédure d’urgence et par vote électronique, un avis s’opposant au projet d’ordonnance. Dans cet avis, elle propose une alternative : soit les centres de santé conservent un régime déclaratif et, en contrepartie, reçoivent des visites de conformité et l’ARS peut prendre des mesures de police sanitaire ; soit l’agrément est retenu mais il s’applique aussi aux maisons de santé pluriprofessionnelles (MSP) et aux cabinets isolés. Cette même CNS précise aussi que l’agrément serait alors délivré sur avis d’une commission composée de « l’ARS, des représentants des gestionnaires et des professionnels des centres de santé, des MSP et des usagers ».
Face à cette levée de boucliers, le ministère de la Santé a fait marche arrière le 31 mars et a reporté la publication de l’ordonnance à la fin de l’année. Des négociations sont par ailleurs ouvertes avec la DGOS.
La CNSD juge « grave » le « recul » du ministère, mais aussi et surtout « l’autosaisie en urgence » de la question par la CNS et l’avis rendu. Ils n’ont pas fait l’objet « de débats ouverts au sein du “parlement de la santé” qu’est censée être la CNS, mais sont uniquement le fait des membres de la Commission permanente », remarque le syndicat. « L’opposition des libéraux de santé n’a rien changé, tant leur poids est négligeable dans cette instance, comme dans tant d’autres », constate encore la CNSD !