Clinic n° 12 du 01/12/2017

 

ACCÈS PARTIEL

ACTU

Marie Luginsland  

Le décret(1) relatif à la reconnaissance des qualifications professionnelles dans le domaine de la santé est paru le 3 novembre au Journal Officiel. Il entérine l’ordonnance de la transposition de la directive européenne, publiée le 19 janvier dernier(2) et adoptée par l’Assemblée nationale en juillet puis par le Sénat en octobre. Toutefois, un jugement de la Cour de justice de l’Union européenne reconnaît à chaque État ses conditions d’exercice spécifiques.

Depuis le 4 novembre, tout professionnel de santé ressortissant de l’Union européenne peut se voir reconnaître sur le territoire français un accès partiel à une activité professionnelle, toutefois s’il remplit les trois conditions suivantes. Ce professionnel devra être pleinement qualifié dans son état d’origine pour exercer l’activité professionnelle qu’il revendique sur le territoire français. Dans le cas où cet exercice lui est accordé, le professionnel dispose des mêmes droits, est soumis aux mêmes obligations et encourt les mêmes responsabilités que les professionnels exerçant en France. L’intéressé doit, de plus, informer clairement les patients sur les actes qu’il est habilité à effectuer dans le champ de son activité. Le tableau de l’Ordre concerné comporte, du reste, une liste distincte mentionnant les actes que les intéressés sont habilités à effectuer dans le champ de la profession.

L’intérêt général préservé

Pour autant, stipule le texte, au cas où les différences entre l’activité professionnelle légalement exercée dans l’État d’origine et la profession correspondante en France sont trop importantes, « Il serait imposé au demandeur de suivre le programme complet d’enseignement requis en France ». Par ailleurs, troisième point, « l’activité professionnelle pour laquelle l’intéressé sollicite un accès peut objectivement être séparée d’autres activités relevant de la profession en France ». En clair, l’autorité compétente française se réserve le droit de tenir compte du fait « que l’activité professionnelle peut ou ne peut pas être exercée de manière autonome dans l’État membre d’origine ». De même, autre restriction, l’accès partiel peut en outre être refusé pour des raisons impérieuses d’intérêt général.

Le législateur français prévoit une large part au traitement au « cas par cas » de cet accès partiel à d’autres professionnels de santé ressortissants de l’Union européenne.

Il ne fait que rejoindre un récent jugement de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE). Tout au moins dans l’esprit. Le 21 septembre dernier(3), la CJUE donnait raison aux autorités maltaises qui refusaient à un prothésiste dentaire clinique, également nommé denturologue, formé dans un autre État membre, d’exercer sa profession à Malte dans les mêmes conditions que prévues dans le pays d’origine du diplôme, c’est-à-dire au fauteuil. L’État maltais s’y opposait, arguant que sur son territoire, les chirurgiens-dentistes sont seuls habilités à traiter le patient. Certes, la CJUE n’a pas tranché sur le fond, à savoir sur l’accès partiel. Mais elle a confirmé qu’une règle nationale, relevant a fortiori de la garantie de la santé publique, n’était pas incompatible avec le droit européen. Elle reconnaît par conséquent, à chaque État, le droit de traiter les demandes à l’aune de leurs spécificités propres.

(1) Décret n° 2017-1520 du 2 novembre 2017. Code de la Santé publique article L 4002-3 à L 4002-6. Texte relatif à la reconnaissance des qualifications professionnelles dans le domaine de la santé

(2) Ordonnance 2017-50 du 19 janvier 2017

(3) Arrêt de la Cour (troisième chambre) du 21 septembre 2017. http://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/?uri=CELEX:62016CJ0125