Prothèse et recherche
C. MENSE F. SILVESTRI C. MANSUY P. TAVITIAN G. STEPHAN O. HÜE
Chez le patient édenté complet, les restaurations prothétiques implantaires peuvent être fixes ou amovibles. À la mandibule, les prothèses amovibles complètes (PAC) donnent souvent de mauvais résultats et contribuent à la résorption osseuse. Les avantages des solutions implantaires ont bien été décrits et font l'unanimité de la communauté scientifique et clinique (Consensus de Mc Gill-York) [1,
Résumé
Chez le patient édenté total maxillaire, les possibilités thérapeutiques sont au nombre de trois : la prothèse adjointe classique, la restauration supra-implantaire fixe et la prothèse à complément de rétention implantaire dite PACSI ou overdenture. La prothèse adjointe classique procure au patient un certain degré de satisfaction mais avec quelques limites qui conduisent le praticien et le patient à préférer une restauration fixe sur implants. Cette dernière solution est idéale aux yeux du praticien mais moins idéale que prévue pour le patient. Ce type de restauration peut s'accompagner de difficultés telles que le maintien de l'hygiène ou la phonation. L'approche par prothèse adjointe à complément de rétention (PACSI), très largement utilisée avec succès à la mandibule, n'a pas eu le même développement au maxillaire en raison d'un taux de succès limité. Dans cet article, les données actuelles relatives à cette solution sont analysées afin de déterminer les paramètres qui conditionnent la réussite de cette thérapeutique : incidence de la chirurgie – densité osseuse, position des implants, conception des implants – et incidence de la prothèse – choix des attachements, conception de la prothèse.
Chez le patient édenté complet, les restaurations prothétiques implantaires peuvent être fixes ou amovibles. À la mandibule, les prothèses amovibles complètes (PAC) donnent souvent de mauvais résultats et contribuent à la résorption osseuse. Les avantages des solutions implantaires ont bien été décrits et font l'unanimité de la communauté scientifique et clinique (Consensus de Mc Gill-York) [1, 2].
Au maxillaire, il n'existe à l'heure actuelle aucun consensus. Les solutions fixes sont souvent décrites dans la littérature et les auteurs rapportent des taux de succès importants. Elles sont, la plupart du temps, préférées par les patients et les praticiens. En revanche, les prothèses amovibles complètes supra-implantaires (PACSI) ou overdentures au maxillaire ont moins été décrites et certaines études avancent des taux d'échecs implantaires et prothétiques importants (20-25 %) [3, 4].
À quoi ce désaveu est-il dû ? Au maxillaire, les prothèses amovibles complètes (PAC) donnent-elles des résultats assez satisfaisants ? Les taux d'échecs sont-ils vraiment si importants ? Quelles peuvent être les indications des PACSI au maxillaire ?
La réhabilitation prothétique de l'arcade maxillaire par des implants est un défi plus difficile à relever pour le praticien. Les impératifs esthétiques et phonétiques ainsi que la gestion des obstacles anatomiques vont influencer le choix de la thérapeutique [5].
Même si de plus en plus d'études abordent le sujet et donnent de véritables indications au praticien, aucun consensus n'existe concernant le nombre, la localisation, le type d'implants (longueur et forme) et le système d'attachement adapté à ce type de prothèse [6, 7].
Les critères à prendre en compte sont multiples [7] :
– le degré de résorption osseuse ;
– la qualité osseuse ;
– la fonction (mastication, phonation) et l'esthétique.
L'ensemble de ces facteurs contribue au succès de la prothèse sur implants au maxillaire [8].
Le facteur économique jouant un rôle essentiel, le nombre d'implants nécessaires à la rétention et à la sustentation prothétique d'une PACSI maxillaire doit être justifié. Si, à la mandibule, la communauté scientifique est unanime, il n'en est pas de même pour le maxillaire : à ce jour, la bibliographie ne permet pas de répondre de manière explicite à cette question [9]. Aucune directive spécifique n'existe déterminant le nombre d'implants nécessaires à la réalisation d'une PACSI maxillaire, même si de nombreux auteurs ont essayé de répondre à cette question au cours des dernières années [9-12].
– L'étude de Bergendal et Engquist (1998) [13], une des études les plus anciennes et qui a été à l'origine de ce travail, rapporte un taux de survie implantaire de 75,4 % à 7 ans. Analysant de manière précise leur recherche, on constate, et c'est un fait important, qu'il s'agit de PACSI maxillaires sur 2 implants de longueur réduite (entre 7 et 10 mm) et placés dans un os de mauvaise qualité, présent en faible quantité (type IV de Lekholm et Zarb). De plus, dans cette étude, les overdentures maxillaires d'urgence ne sont pas exclues.
– Sadowsky (2007) [14] a conduit une étude systématique sur les PACSI maxillaires. Il conclut que 4 implants au minimum sont nécessaires pour réaliser ce type de prothèse et qu'il est recommandé d'en mettre 6 en cas de situation « défavorable » (os peu dense, présent en faible quantité). Cependant, il n'existe pas de méta-analyse complète sur les overdentures maxillaires prenant en compte tous les critères importants, par exemple la nature de l'arcade antagoniste [8].
– Selon Mericske-Stern (2008) [15], pour les PACSI maxillaires, la mise en place de 2 implants n'est pas conseillée en tant que traitement définitif mais, parfois, cela peut constituer une solution transitoire. Dans ces cas-là, le recouvrement palatin est obligatoire. Une barre sur 2 implants n'est pas envisageable et n'apporte pas assez de stabilité. Cette étude suggère 4 ou 5 implants avec barre, sans recouvrement palatin et avec châssis métallique.
– Plus récemment, en 2018, Dimililer et al. [16] ont étudié l'influence du nombre d'implants et de leur diamètre sur les contraintes appliquées sur l'os péri-implantaire et sur les implants. Ils concluent que plus le nombre d'implants augmente plus les contraintes diminuent sur l'os péri-implantaire et les implants, l'excès de contraintes étant l'une des principales causes d'échec. Cependant, le diamètre des implants n'influence pas de manière significative ces contraintes. Ils recommandent la pose de 4 implants pour réaliser une PACSI maxillaire.
– En 2019, di Francesco et al. [12] ont réalisé une revue systématique et une méta-analyse concernant le nombre d'implants requis pour réaliser une PACSI maxillaire. Selon ces auteurs, la question est toujours ouverte car les études manquent de méthodologie et de standardisation. D'après cette étude, un lien fort existe entre le taux de survie implantaire et le nombre d'implants utilisés : en accord avec les études de Raghoebar et al. (2014) [11] et de Kern et al. (2016) [17], un minimum de 4 implants semble être requis. Les résultats de taux de survie obtenus sont en relation directe avec le nombre d'implants mis en place (tableau 1).
Les études concernant la localisation et le positionnement des implants dans le traitement des overdentures maxillaires sont rares. Lors de la réalisation d'une PACSI maxillaire, deux positionnements implantaires sont possibles :
– 4 implants placés dans la région antérieure de l'arcade. Cette localisation présente des avantages : les implants sont plus accessibles pour les patients, le maintien d'une bonne hygiène orale est plus aisé et, de plus, cela évite la réalisation de greffes osseuses [24] (fig. 1 et 2) ;
– 6 ou parfois 8 implants répartis de manière harmonieuse sur l'arcade (fig. 3).
Le choix concernant la localisation des implants (antérieurs ou postérieurs) ne doit pas se faire seulement en fonction de l'anatomie du maxillaire ou des caractéristiques des implants mais aussi en fonction des résultats prothétiques attendus [25]. En présence d'un décalage antéro-postérieur entre les bases osseuses (classe II ou classe III), la position des implants peut créer des problèmes phonétiques comparables à ceux décrits avec les restaurations fixes supra-implantaires [26, 27]. Face à une telle situation anatomique, le concept d'implants postérieurs est à privilégier même si, au préalable, la réalisation de greffe est requise [25]. La mise en place d'implant ptérygoïdien proposée par Tulasne en 1992 [28] demeure une solution clinique qui permet aussi d'éviter les greffes et d'étendre le polygone de sustentation prothétique avec succès [29].
De manière générale, afin que les forces occlusales soient transmises dans leur grand axe, Brånemark, dans son protocole chirurgical initial, recommande de placer les implants perpendiculairement au plan d'occlusion. De ce fait, face à une résorption importante du maxillaire postérieur, le praticien doit alors réaliser des greffes osseuses pour pouvoir poser des implants. Une alternative à cette procédure a alors été proposée : l'angulation des implants. Cela permet d'avoir une longueur implantaire souvent supérieure à 10 mm, d'augmenter la surface de contact avec l'os, d'obtenir plus facilement un ancrage bicortical qui améliore la stabilité primaire et de contourner le sinus maxillaire sans réaliser une augmentation osseuse verticale [30].
– Krennmair et al. [25] ont réalisé une étude comparative concernant deux types d'overdentures maxillaires sur barre de conjonction. Entre les deux groupes, c'est le positionnement des implants qui varie : groupe I, 4 implants placés dans la région antérieure du maxillaire ; groupe II, 6 à 8 implants placés dans les régions postérieures du maxillaire. Ils évaluent plusieurs critères : les taux de survie implantaire, les conditions des tissus péri-implantaires (perte osseuse, indice de plaque, saignement au sondage) ainsi que l'incidence et le type de maintenance prothétique dans les deux groupes. Pour tous ces critères, il n'existe pas de différence significative entre les deux groupes : le taux de survie implantaire global est de 97,8 %, la perte osseuse péri-implantaire est faible (légèrement plus prononcée dans le groupe 1), l'indice de plaque est faible dans les deux cas, la satisfaction des patients est très haute dans les deux groupes. De plus, on ne note pas de différence concernant la maintenance prothétique.
– Peñarrocha et al. [31] ont réalisé 12 overdentures maxillaires sur barre de conjonction avec des implants angulés le long de la paroi antérieure du sinus. La période de suivi était de 12 mois. Le taux de survie implantaire était de 97,9 % avec un implant perdu. À la fin de l'étude, le niveau de satisfaction des patients concernant la stabilité, la phonation, la facilité de nettoyage et l'esthétique était élevé, le score moyen s'établissant à 8,5 sur 10.
Il faut considérer les implants antérieurs comme placés dans le prémaxillaire et les implants postérieurs comme des implants répartis de manière uniforme sur l'ensemble de l'arcade (tableau 2).
Au maxillaire, la forme conique doit être privilégiée aux dépens de la forme cylindrique. En effet, dans les régions postérieures où l'os est peu dense, cette forme entraîne une compression osseuse latérale lors de la mise en place de l'implant, ce qui favorise une meilleure stabilité primaire [33, 34]. De plus, les implants doivent présenter un état de surface rugueux. Des taux d'échecs implantaires ont été rapportés lors de l'utilisation d'implants lisses dans des os de faible densité. En effet, la rugosité accroît la surface de contact entre l'os et l'implant, entraînant donc une augmentation de l'adhésion de cellules du caillot sanguin sur la surface implantaire et améliorant ainsi l'ostéo-intégration et la stabilité secondaire [33, 35].
Du fait des caractéristiques de l'os maxillaire, les implants d'une longueur égale ou supérieure à 10 mm doivent être privilégiés, permettant une meilleure stabilité primaire, et éventuellement la réalisation d'un protocole de mise en charge immédiate [6, 36].
En résumé, pour la partie implantaire concernant les PACSI maxillaires, il faut retenir que les implants doivent :
– être de forme cylindro-conique ;
– avoir une longueur minimale de 10 mm ;
– présenter une surface rugueuse ;
– être au nombre de 4, répartis de manière harmonieuse ;
– être placés en fonction d'une planification réalisée préalablement en accord avec le projet prothétique ;
– ne pas être utilisés comme moyen de rattrapage synonyme d'échec.
Les problèmes rencontrés avec les prothèses amovibles complètes, surtout dans les cas de forte résorption, comme le manque de stabilité, de rétention et une faible efficacité masticatoire, peuvent être solutionnés en faisant appel aux thérapeutiques implantaires. Dans le cadre des overdentures (PACSI), les prothèses sont reliées aux implants par un système d'attachement. Il existe une discussion concernant le choix des types d'attachement (barre, boules, Locator®, attachements magnétiques) et leurs indications [37]. On pourra également se poser la question des indications, avantages et inconvénients des PACSI maxillaires, des prothèses sur coiffes télescopes ou des bridge fixes de type All-on-four.
Pour répondre au cahier des charges, le système d'attachement doit être :
– simple dans sa conception, pour le praticien, pour le prothésiste mais également pour le patient (insertion prothétique aisée et entretien quotidien facile de ce dispositif) ;
– efficace : il doit apporter le complément de rétention nécessaire et suffisant souhaité par le patient. D'après la littérature, pour retenir efficacement une prothèse amovible pendant sa fonction, une force de rétention de 10 à 20 N serait nécessaire. Il est essentiel de connaître les caractéristiques rétentives des attachements utilisés : 16 à 20 N pour deux cavaliers sur barre de conjonction, 6 à 10 N pour deux attachements axiaux sphériques (boules) et 1 à 5 N pour deux attachements magnétiques [38]. Les inserts plastiques Locator® existent sous différentes rétentions : insert bleu 1,5 lbs, soit 6,7 N ; insert rose 3 lbs, soit 13,4 N ; insert transparent 5 lbs, soit 22,2 N. Concernant la taille de l'attachement, il doit être le plus volumineux possible dans l'espace qui lui est disponible ;
– fiable : le comportement du système d'attachement au cours du temps dépend, entre autres, des caractéristiques des matériaux le constituant. Les phénomènes de fatigue mécanique, thermique et hydrique au cours de la fonction vont amener une usure des pièces du dispositif se traduisant par une diminution, plus ou moins rapide et importante, de la valeur de rétention. À ces facteurs de « fatigue » il convient de rajouter les produits d'hygiène prothétique qui ont action délétère sur certains composants non métalliques des attachements.
Stoumpis et al. (2011) [36] ont établi une revue systématique, concernant le type d'attachement (boule ou barre) à utiliser avec les PACSI maxillaires et mandibulaires. Les critères évalués dans cette étude sont le taux de survie des implants, les paramètres péri-implantaires, les complications prothétiques et la satisfaction du patient. Les études de Närhi et al. [18] et de Kiener et al. [19] aboutissent aux mêmes conclusions.
Après analyse de cette revue systématique, concernant le choix du type d'attachement (barre ou boules), il faut retenir qu'il n'existe :
– aucune différence significative concernant le taux de survie implantaire entre les attachements boules et les barres de conjonction ;
– aucune différence significative concernant les paramètres péri-implantaires, quel que soit le système d'attachement choisi (boules ou barres). La présence de plaque dentaire n'est pas non plus liée à un type d'attachement [40]. Cependant, l'hygiène est plus facile avec les PACSI sur attachements boules et les hyperplasies gingivales autour des barres sont fréquentes [37]. Ces hyperplasies peuvent être diminuées avec une bonne hygiène mais, parfois, elles sont dues à un espace insuffisant sous la barre [19].
Concernant la maintenance prothétique, il n'y a pas de différence significative entre les deux systèmes d'attachements (boules ou barres). Cependant, les attachements boules nécessitent plus de maintenance prothétique. Entre autres, leurs parties mâles s'usent plus rapidement que les barres et perdent donc leur rétention plus vite.
Quel que soit le système d'attachement, il n'existe pas de différence significative concernant la satisfaction du patient. Concernant la rétention de la prothèse, on constate plus de satisfaction des patients avec les barres [36].
Plus récemment, en 2019, di Francesco et al. [41] ont réalisé une revue systématique comparant les taux de survie implantaire des PACSI maxillaires sur boules et barres de conjonction, la longévité de ces overdentures maxillaires et la satisfaction des patients porteurs de ces prothèses. Le type d'attachements ne semble pas influencer de manière significative tous ces paramètres. Cependant, les auteurs notent un manque de standardisation des études. Et il faut noter que 4 études sur 14 rapportent un taux de survie des prothèses inférieur à 95 % ; elles concernent toutes des prothèses sur barre mais la différence n'est pas significative.
En 2019, Boven et al. [42] ont comparé les PACSI sur barre et sur Locator®, avec une absence de recouvrement palatin. Pour les Locator®, c'est l'insert plastique medium rose qui a été utilisé (force de rétention : 13,4 N). Il est montré que les PACSI maxillaires améliorent l'efficacité masticatoire et la satisfaction des patients dans les deux cas ; cependant, pour ces deux critères, il existe une différence significative en faveur des barres [42]. Concernant les barres, il faut noter que, à partir de 4 implants, les extensions distales sont autorisées. Celles-ci permettent d'augmenter le comportement rigide de la prothèse ainsi que l'efficacité masticatoire, tendant à se rapprocher de celle des prothèses fixes (fig. 4). La mise en place d'implants distaux augmente le polygone de sustentation et la rigidité de l'ensemble de la restauration supra-implantaire (fig. 5).
Concernant les contraintes appliquées aux implants, Takahashi et al. [43] ont montré que les attachements magnétiques réduisaient les contraintes appliquées aux implants, en comparaison aux attachements boules ou aux Locator®. Cependant, les attachements magnétiques présentent des problèmes d'usure et de corrosion, ce qui entraîne par la suite des pertes de rétention et donc une maintenance importante pour changer ces attachements (fig. 6).
Malgré ces conclusions, ce sont aussi les critères cliniques qui vont orienter ou même parfois imposer le choix d'un type d'attachement, axial ou barre de conjonction.
L'examen clinique initial et la réalisation prothétique pré-implantaire permettent de déterminer avec précision la situation des futurs implants ainsi que le volume disponible au sein de la base prothétique. Dans l'espace prothétique, déterminé par la dimension verticale d'occlusion (DVO), le niveau du plan occlusal, les organes para-prothétiques et les crêtes édentées, il faut insérer la prothèse bi-maxillaire et le système d'attachements. C'est pourquoi il est important de connaître les dimensions précises des pièces mâles et femelles constituant les différents attachements afin de sélectionner les plus adaptées aux conditions cliniques [38].
Les barres nécessitent plus d'espace que les attachements axiaux.
En effet, selon Andreiotelli [37], l'espace nécessaire à la réalisation d'une barre au maxillaire varie entre 12 et 15 mm : en effet, il faut compter 4 à 5 mm de hauteur pour la barre (plus précisément pour le cylindre de la barre), 1 mm pour le cavalier et environ 2 mm d'espacement entre la fibro-muqueuse et la partie inférieure de la barre. À ces 7 mm s'ajoute la hauteur représentée par la prothèse (3 mm de résine) et le châssis métallique inclus dans la résine (2 mm). La réalisation d'une PACSI sur attachement axial nécessite moins d'espace : 10-11 mm [37].
La forme de l'arcade (ovalaire, carrée...) et la localisation des implants sont des paramètres qui contribuent au choix du système d'attachement. En effet, une arcade curviligne impose une barre curviligne et, donc, la création d'un bras de levier défavorable [38]. En revanche, avec la même forme d'arcade, si une barre rectiligne est choisie, l'espace dévolu à la langue sera réduit avec des risques non négligeables de gênes phonétiques.
En présence d'un os de type IV, fréquent dans les zones postérieures maxillaires, ou d'un os basal fortement résorbé, il est préférable d'augmenter le nombre d'implants mais aussi d'utiliser une barre de conjonction qui permettra de rigidifier le système implantaire [44].
Le non-parallélisme des implants influence le choix du système d'attachement. Une divergence importante entre les attachements axiaux (5 à 10 degrés) ne compromet peut-être pas l'insertion prothétique mais augmente l'usure des différentes pièces du dispositif rétentif [37]. Le fait de réaliser une barre de conjonction permet de résoudre ce problème car chaque pilier prothétique intermédiaire (de type MUA) supportant la barre est transvissé dans son axe. Cependant, il faut noter que, depuis quelques années, le rattrapage d'axe sur attachements axiaux est possible, notamment avec les Locator® (fig. 7 et 8).
Les patients porteurs de prothèses amovibles conventionnelles sont souvent demandeurs d'implants dans le but d'obtenir une meilleure rétention de leur prothèse mais également une amélioration du confort en réduisant ou en supprimant le recouvrement palatin de la prothèse [45].
La réduction du recouvrement palatin laisse plus d'espace à la langue et entraîne une exposition plus importante de la muqueuse palatine permettant une meilleure appréciation de la texture des aliments par les patients [20] (fig. 9). De plus, ce type de prothèse comporte de nombreux avantages pour les patients : leur confort est amélioré, surtout pour ceux ayant un réflexe nauséeux important ou encore en présence d'un torus maxillaire. De plus, cette conception a un effet positif sur le débit salivaire ainsi que sur la fonction de phonation [45, 47].
De nombreuses études portent sur le choix des attachements des PACSI maxillaires mais peu évaluent de manière spécifique la nécessité du recouvrement palatin de ces prothèses [20].
La satisfaction des patients a été évaluée en s'appuyant sur plusieurs critères : les limitations fonctionnelles, la présence de douleur, le confort, la vie en société, la facilité de nettoyage, l'esthétique, la phonation, la stabilité et l'efficacité masticatoire. Avec ou sans recouvrement palatin, les résultats ne montrent pas de différence significative pour la stabilité et la limitation fonctionnelle, représentée par exemple par la difficulté à mastiquer [20, 26, 47]. Les seules différences significatives rapportées concernent l'esthétique et la perception du goût [40].
Concernant l'esthétique, la réduction de la couverture palatine ne change certes pas l'apparence extérieure du patient mais cette conception a pu offrir aux patients un sentiment « de plus naturel » qui, à son tour, pourrait influencer de manière positive leur perception de l'esthétique.
Il n'y a pas de directive spécifique concernant le nombre d'implants à poser pour réaliser une overdenture maxillaire. Cependant, pour une architecture sans palais, un minimum de 4 implants est requis [48]. Mais, en dépit des recommandations, en présence de facteurs de risques tels qu'une diminution de la qualité/quantité d'os, des relations inter-arcades défavorables ou une transmission importante des forces, le recouvrement palatin peut être indiqué et permettre une amélioration du pronostic implantaire [48].
Pour Takahashi et al. [49], la pose d'implants en secteur molaire est indispensable lors de la réalisation de PACSI maxillaires sans recouvrement palatin. Avec des implants postérieurs, il n'y a pas de différence significative concernant les contraintes appliquées sur la prothèse quel que soit l'attachement utilisé (boules, Locator® ou attachements magnétiques).
Les renforts mis en place dans l'intrados des PACSI sont souvent utilisés afin de prévenir la fracture de la base prothétique qui est une des complications les plus fréquentes [50]. Une épaisseur inadéquate de résine acrylique, l'absence d'espacement entre l'attachement et la base, des pressions occlusales excessives ou, encore, la résorption postérieure entraînant une surcharge entre la base prothétique et les attachements sont les causes les plus fréquentes des fractures. Plusieurs types de renfort ont été proposés : le fil de jonc métallique, la fibre de verre, la fibre composite, le châssis métallique [51]. Les études montrent que le meilleur renfort possible est le châssis métallique car, en englobant les attachements, il les protège des contraintes excessives par rapport aux autres renforts disposés en lingual [51]. L'intégration d'un châssis permet également de mieux répartir les contraintes engendrées par les forces occlusales et d'éviter leur concentration, synonyme d'augmentation de la résorption osseuse, dans certaines zones [50].
En résumé, un renfort par châssis métallique est toujours recommandé car il permet non seulement d'éviter la fracture mais également de prévenir la douleur et la formation d'ulcérations en améliorant la robustesse de la prothèse et la répartition des forces sur la base (fig. 10 à 12).
La différence essentielle de fonctionnement d'un implant par rapport à une dent naturelle oblige à reconsidérer les principes classiques. Les PACSI ont un comportement spécifique car elles ont deux types d'appuis différents : implantaire et fibro-muqueux. Les deux critères les plus importants dans le choix du concept occlusal sont :
– le type de prothèse ;
– la nature de l'arcade antagoniste.
Les revues bibliographiques concernant le schéma occlusal à adopter en cas de prothèses sur implants, y compris les overdentures maxillaires, sont rares [52, 53]. À ce jour, il n'existe pas de concepts occlusaux spécifiques reposant sur l'évidence scientifique pouvant être idéalement appliqués aux prothèses sur racines artificielles [54].
Mericske-Stern et al. [55] recommandent l'occlusion bilatéralement équilibrée. En conclusion de leurs études, ce schéma occlusal apporte la meilleure répartition des forces sur les implants et améliore la stabilité de la prothèse durant la fonction.
Kim et al. [56] ont souligné l'importance de l'occlusion en implantologie. Une occlusion bilatéralement équilibrée permet d'assurer la longévité des implants. Pour ces auteurs, c'est le schéma occlusal qui doit être utilisé dans le cas d'overdentures [57].
Il est essentiel de concevoir ces prothèses selon un schéma occlusal rigoureux. L'évolution des tissus de soutien est constante alors que la position des implants et leur environnement sont quasiment figés. Il est essentiel, au cours des contrôles annuels, d'inclure l'analyse méticuleuse de l'occlusion, ceci sur le plan statique et sur le plan dynamique. Ainsi, le praticien pourra corriger régulièrement les modifications qui apparaîtront avant que celles-ci n'engendrent de véritables problèmes sur les implants et les prothèses implanto-portées [54].
Quand on compare les taux de succès des PACSI au maxillaire, il est important de faire la distinction entre les overdentures planifiées et celles dites d'urgences. Une overdenture planifiée résulte d'un plan de traitement parfaitement élaboré à l'avance. À l'inverse, celles d'urgences sont des solutions de secours quand, par exemple, un certain nombre d'implants prévus pour réaliser une prothèse fixe sur implants ont échoué.
Des tentatives de protocoles de réalisation des PACSI maxillaires ont été décrites par Krennmair et al. (2008) [25], Sanna et al. (2009) [58] et Mangano et al. (2011) [59]. La littérature rapporte un meilleur taux de succès pour les overdentures planifiées que pour celles d'urgences : Palmqvist et al. (1994) [4], Widbom et al. (2005) [60], Sanna et al. (2009) [58] (fig. 13).
Dans l'analyse des résultats à long terme des overdentures maxillaires, il est important d'inclure aussi des critères relatifs au patient tels que le confort, l'efficacité masticatoire, la satisfaction esthétique. Cela est encore plus vrai pour les PACSI qui, habituellement, requièrent un important besoin de maintenance et d'ajustements comparées aux prothèses fixes [5].
Des taux de satisfaction élevés sont rapportés avec les overdentures mandibulaires mais les études concernant la satisfaction des patients porteurs de PACSI au maxillaire sont rares [5, 6, 37].
En 2019, Park et al. [61] ne rapportent pas de différence significative concernant la satisfaction des patients entre les PACSI sur barre ou sur boules pour la phonation et la mastication. La seule différence significative constatée concerne l'esthétique et est en faveur des boules.
Une des études les plus importantes concernant l'évaluation de la satisfaction des patients porteurs de PACSI maxillaire est celle de Heydecke et al. [26]. De nos jours, cette étude est encore celle qui fait référence car les patients ont eu la possibilité de tester les deux types de prothèses (fixe et amovible). Les résultats de cette étude indiquent que les prothèses amovibles sur barre sans recouvrement palatin apportent aux patients une satisfaction générale supérieure à celle offerte par les prothèses fixées. Les patients ont reconnu que la phonation et la facilité d'entretien étaient bien meilleures avec les prothèses amovibles [26, 62]. Cette conclusion rejoint les résultats de l'étude de Feine à la mandibule [63].
Dans l'étude de Brennan et al. [64], les patients porteurs d'overdentures et de prothèses fixes avaient globalement un haut niveau de satisfaction. Ils étaient respectivement « très satisfaits » et « totalement satisfaits » de leur prothèse. Mais la différence entre les groupes n'était pas significative. Les patients porteurs de PACSI étaient plus satisfaits que les patients porteurs de prothèses fixes concernant la phonation et la facilité des mesures d'hygiène et moins satisfaits concernant l'efficacité masticatoire. Mais, une fois de plus, la différence n'était pas significative.
En 2016, Martín-Ares et al. [65] ont comparé la satisfaction des patients porteurs de prothèses amovibles complètes, de PACSI et de bridges fixes complets ostéo-ancrés. Les résultats obtenus sont les mêmes. La prothèse fixe amène la plus grande satisfaction en termes de fonction mais elle obtient la satisfaction la plus basse concernant l'accès à l'hygiène. Ces résultats rejoignent ceux d'une étude plus ancienne de Zitzmann et Marinello [66].
Ces résultats peuvent servir d'arguments auprès des patients mais également des praticiens qui, en 2020, ont tendance à proposer des solutions fixes, notamment depuis l'avènement du protocole All-on-four de Paolo Malo. Puisque les prothèses complètes fixes sont réalisables sur 4 implants, pourquoi continuer à faire des PACSI ? Il est donc prouvé par ces résultats que les PACSI gardent toutes leurs indications, surtout chez les patients privilégiant l'accès à l'hygiène au confort mais aussi chez les patients à dextérité plus réduite par exemple. De plus, comme cela a été souligné précédemment, les PACSI sont à privilégier chez les patients présentant des décalages des bases.
La prothèse complète supra-implantaire au maxillaire a eu, depuis longtemps, la réputation d'être une solution présentant des risques élevés d'échecs. Comme souvent, cette information obtenue à partir de quelques études dans la littérature a été mal interprétée.
L'analyse de la littérature nous a permis de constater que, probablement en raison de l'image négative véhiculée par ces prothèses, les études étaient rares. Nous avons pu mettre en évidence, au travers des études existantes, que les prothèses amovibles complètes supra-implantaires au maxillaire affichaient des résultats comparables aux autres solutions thérapeutiques en termes de survie des implants.
Les paramètres pouvant influencer le taux de survie des implants sont nombreux (concept occlusal, présence d'un châssis métallique, nombre, longueur et localisation des implants...) et, souvent, les données ne sont pas fournies de manière systématique dans ces études. Il est souvent alors difficile de tirer des conclusions lorsque les protocoles diffèrent.
Les prothèses amovibles complètes supra-implantaires au maxillaire représentent une alternative viable chez nos patients même si, comme leurs homologues mandibulaires, elles nécessitent une maintenance accrue par rapport aux solutions fixes.
Les auteurs déclarent n'avoir aucun lien d'intérêts concernant cet article.
Chloé Mense - MCU-PH associée prothèses
UFR Odontologie, Hôpital de la Timone AP-HM, Aix Marseille Université, CNRS, EFS, ADES, Marseille
Charlotte Mansuy - AHU prothèses
UFR Odontologie, Hôpital de la Timone AP-HM, Aix Marseille Université, CNRS, EFS, ADES, Marseille
Frédéric Silvestri - AHU prothèses
UFR Odontologie, Hôpital de la Timone AP-HM, Aix Marseille Université, CNRS, EFS, ADES, Marseille
Patrick Tavitian - MCU-PH prothèses
UFR Odontologie, Hôpital de la Timone AP-HM, Marseille
Grégory Stephan - MCU-PH prothèses
UFR Odontologie, Hôpital de la Timone AP-HM, Marseille
Olivier Hüe - Professeur émérite
UFR Odontologie, Aix Marseille Université, CNRS, EFS, ADES, Marseille