Restaurations fixées unimaxillaires
Quel que soit le motif de la consultation, l'anamnèse, l'observation clinique et les examens complémentaires doivent permettre de poser un diagnostic pour chaque patient [1]. À partir de celui-ci, différentes options thérapeutiques apparaissent. Le devoir du praticien est de les exposer au patient et, avec lui, de choisir la solution la plus adaptée à sa situation personnelle. Ensuite, le traitement global doit être scindé en phases...
Résumé
Lorsqu'une reconstruction prothétique globale est nécessaire, l'élaboration d'une étude de cas structurée en amont est impérative. Grâce à cette exigence, un choix thérapeutique approprié peut être mis en œuvre. Ainsi, lors de la réalisation de traitements pluridisciplinaires complexes, il est indispensable de planifier chaque séquence thérapeutique non seulement pour simplifier le traitement du point de vue technique mais aussi pour obtenir la bonne compréhension du patient qui lui permet d'adhérer pleinement au traitement, donc au résultat.
Au travers de la présentation détaillée d'un cas clinique abordant aussi bien l'implantologie et l'esthétique que les restaurations tout céramique, l'objectif de cet article est de préciser l'abord rigoureux qui doit être envisagé dans la prise en charge d'un patient, tant en matière de réflexion en amont sur le problème clinique que dans la mise en œuvre de chaque séquence thérapeutique.
Quel que soit le motif de la consultation, l'anamnèse, l'observation clinique et les examens complémentaires doivent permettre de poser un diagnostic pour chaque patient [1]. À partir de celui-ci, différentes options thérapeutiques apparaissent. Le devoir du praticien est de les exposer au patient et, avec lui, de choisir la solution la plus adaptée à sa situation personnelle. Ensuite, le traitement global doit être scindé en phases thérapeutiques intermédiaires simples pour être conduit à son terme dans le respect d'un plan de travail parfaitement codifié.
Une patiente âgée de 61 ans, sans problèmes de santé générale, a consulté pour des descellements répétés de sa couronne provisoire sur la canine maxillaire droite (dent 13). Cette situation s'accompagnait d'un inconfort fonctionnel et d'un refus psychologique liés au port d'une prothèse amovible partielle transitoire au maxillaire. La patiente, lassée par cette situation provisoire, souhaitait une solution prothétique pérenne conciliant confort, esthétique et fonction.
L'interrogatoire de la patiente et les renseignements recueillis par le questionnaire médical n'ont pas révélé de pathologie générale. L'historique bucco-dentaire était marqué par la perte des premières molaires mandibulaires et de la seconde prémolaire mandibulaire gauche, restaurées par des bridges depuis une dizaine d'années. Au maxillaire, il a été noté l'absence ancienne de la première molaire gauche et, plus récente, des prémolaires maxillaires droite et gauche. Le suivi bucco-dentaire était régulier à raison d'une visite de contrôle annuelle en dehors des périodes de soin.
La patiente était motivée pour s'investir dans un plan de traitement global qui, selon ses dires, ne lui avait pas été proposé les années précédentes.
La patiente ne présentait pas d'asymétrie faciale. L'examen musculaire asymptomatique et la palpation des articulations temporo-mandibulaires n'ont pas révélé de pathologie musculaire ou articulaire, tout en mettant en évidence une forte musculature, en particulier au niveau des masséters. La cinématique mandibulaire n'était pas perturbée. La forme des trajets et les amplitudes d'ouverture, de fermeture et de diduction étaient normales. La patiente présentait un sourire symétrique et harmonieux, avec une lèvre supérieure qui découvrait totalement les dents antérieures en exposant 1 mm de hauteur de gencive attachée.
L'étude prothétique a révélé, au maxillaire, un édentement de type classe III subdivision 1 de Kennedy-Applegate, avec des crêtes larges et un parodonte sain. Le biotype parodontal était épais selon Selbert et Lindhe et de type I d'après Maynard et Wilson.
À la mandibule, il existait des reconstructions des secteurs postérieurs par prothèses fixées dento-portées de type bridges (fig. 1 à 4).
L'hygiène bucco-dentaire était correcte, le tartre peu abondant. Les muqueuses exemptes de lésions ulcéreuses ou carcinomateuses n'étaient pas inflammatoires. Aucune dent ne montrait de mobilité, mais un décalage du point interincisif mandibulaire vers la droite était noté. Les dents naturelles présentaient une couleur jaune orangé saturée.
À l'arcade maxillaire (fig. 5) :
– 18 était absente ;
– 17 était traitée endodontiquement et restaurée par une couronne céramo-métallique ;
– 16 révélait une lésion carieuse mésiale ;
– 15 était absente ;
– 14 était absente et son extraction récente montrait une alvéole en cours de cicatrisation ;
– 13, traitée endodontiquement, était restaurée par une couronne provisoire ;
– 12 présentait une abrasion du bord libre et un composite disto-vestibulaire infiltré avec reprise carieuse ;
– 11, abrasée, présentait de volumineux composites infiltrés reconstituant la portion mésio-vestibulo-distale ;
– 21, absente, avait été restaurée par une solution implanto-prothétique avec couronne céramo-métallique ;
– 22 présentait une lésion carieuse cervicale ;
– 23 était traitée endodontiquement et reconstituée par un composite volumineux infiltré ;
– 24, 25 et 26 étaient absentes, l'extraction récente de 24 montrait une alvéole en cours de cicatrisation, les sites de 25 et 26 étant parfaitement cicatrisés ;
– 27, traitée endodontiquement, était une couronne céramo-métallique auparavant pilier de bridge mais sectionnée récemment de son intermédiaire mésial du fait de l'extraction du pilier antérieur 24 de ce même bridge avec comme conséquence une dépose obligatoire de toutes les dents intermédiaires du bridge ;
– 28 était absente.
À l'arcade mandibulaire (fig. 6) :
– 38 était absente ;
– 37 et 34, traitées endodontiquement, étaient les piliers d'un bridge céramo-métallique remplaçant les dents 36 et 35 en position d'intermédiaire de bridge ;
– des dépôts de tartre étaient présents sur la face linguale des incisives et des canines qui ne faisaient par ailleurs l'objet d'aucune restauration conservatrice ni prothétique ;
– 44, 45 et 47, traitées endodontiquement, étaient les piliers d'un bridge céramo-métallique remplaçant la dent 36 en position d'intermédiaire de bridge ;
– 48 était absente.
Comme au maxillaire, le biotype parodontal pouvait être classé comme épais selon Selbert et Lindhe et de type I d'après Maynard et Wilson.
La radiographie panoramique réalisée initialement (fig. 7) a mis en évidence :
– l'absence d'atteinte parodontale horizontale maxillaire et mandibulaire ;
– des traitements endodontiques sur 13, 17, 23, 27, 34, 37, 44, 45 et 47 ;
– des reconstructions corono-radiculaires avec ancrages radiculaires de type Screw-Post® coiffés par des couronnes céramo-métalliques sur 27, 34 et 44 ;
– une procidence du sinus maxillaire au niveau de 16 et 17 mais pas à celui de 27.
Les clichés rétroalvéolaires ont confirmé l'absence des atteintes parodontales horizontales, les lésions carieuses en révélant également des traitements endodontiques avec des sous-obturations sauf pour 17 et 27 récemment retraitées, d'après les dires de la patiente.
À ce stade, l'examen clinique a été complété par la réalisation de deux jeux de moulages maxillaires et mandibulaires dont l'un a été conservé intact pour servir de référence initiale et médico-légale.
Les moulages d'étude ont été transférés sur articulateur à l'aide d'un arc facial et d'une maquette d'occlusion (fig. 8 à 11). L'examen interarcade en occlusion statique a montré un fort recouvrement et un surplomb important. Le plan d'occlusion était parallèle au plan de Camper. Lors de la fermeture buccale, l'occlusion d'intercuspidie maximale (OIM) était assurée par les dents antérieures et par le calage postérieur. La relation maxillo-mandibulaire en OIM était reproductible. L'analyse occlusale dynamique menée sur le patient a permis, en diduction droite et gauche, de noter une fonction canine stricte. La propulsion était symétrique, sans interférences [2].
Pour les deux arcades, le contexte parodontal est sain avec un biotype épais.
Au maxillaire, on note la présence d'un édentement de classe III subdivision 1 de Kennedy-Applegate, avec un aspect inesthétique du bloc incisivo-canin du fait de l'abrasion des bords libres et de l'existence de plusieurs types de restaurations à revoir (prothèses provisoires et composites infiltrés).
À la mandibule, l'arcade est restaurée et fonctionnelle avec un plan d'occlusion parallèle au plan de Camper garantissant un calage occlusal reproductible et des fonctions occlusales dynamiques, harmonieuses et symétriques.
Du fait de la complexité de la situation clinique, les objectifs du traitement ont pu être hiérarchisés selon le schéma suivant :
– sur le plan fonctionnel, compensation des édentements maxillaires :
• pour rétablir un calage optimal des dents en interarcades,
• pour retrouver une fonction masticatoire efficace et confortable qui préserve l'équilibre du système manducateur,
• pour maintenir la dimension verticale d'occlusion existante, tout cela dans le respect de la santé musculo-articulaire et parodontale ;
– sur le plan esthétique, reconstruction des dents antérieures maxillaires par réalisation de nouvelles restaurations ;
– sur le plan psychologique, écoute et analyse des demandes de la patiente pour lui apporter des réponses adaptées et pérennes et soulager sa fatigue psychologique désormais installée du fait des inconforts masticatoires et des problèmes esthétiques et fonctionnels.
La patiente est motivée pour la réalisation d'une thérapeutique globale. Deux éléments ont été pris en compte :
– la motivation de la patiente pour une solution esthétique, fonctionnelle et confortable ;
– le biotype parodontal épais.
Des cires de diagnostic (céraplasties prospectives) ont été élaborées au maxillaire selon les objectifs de départ, afin de combler les édentements et d'améliorer les formes des dents antéro-supérieures. Ces différents moulages avant/après, montés sur articulateur, ont été présentés à la patiente accompagnés de vues cliniques endobuccales facilitant la communication [4] et pour recueillir son consentement éclairé puisqu'elle était ainsi parfaitement informée.
À ce stade, plusieurs propositions thérapeutiques ont été envisagées (fig. 12) en détaillant avantages et inconvénients de chacune d'entre elles et en insistant non seulement sur les facteurs de risque spécifiques mais aussi sur la durée des différents traitements et sur leur coût.
Cette solution comporte :
– des soins conservateurs sur 12, 11 et 22, pulpées ;
– des reprises des traitements endodontiques sur 13, 23 et 27 ;
– des prothèses fixées unitaires intégrant des fraisages occluso-palatins sur 13, 23 et 27 ;
– des coronoplasties préprothétiques sur 16 et 17 ;
– la compensation des espaces édentés par une prothèse partielle amovible à châssis métallique (PPAM) remplaçant 14, 15, 24, 25 et 26.
Avantages :
– durée de traitement la plus courte ;
– absence d'intervention chirurgicale (pas de pose d'implants) ;
– coût le moins élevé de toutes les solutions.
Inconvénients :
– la présence des crochets de la PPAM sollicite mécaniquement les dents supports avec risque de mobilités ;
– caractère inesthétique de la présence des crochets ;
– amovibilité de la PPAM, source d'éventuelles difficultés psychologiques d'acceptation et d'adaptation.
Pour le secteur denté antérieur, cette solution est similaire à la première, avec toutefois l'absence de fraisages sur les couronnes 13, 23 et 27.
La gestion des secteurs édentés fait appel à la mise en place d'implants sous réserve d'examens complémentaires permettant d'apprécier le volume osseux disponible. La procidence des sinus, en particulier au niveau de 15, doit être évaluée. Si la mise en place des implants est validée, il peut être proposé :
– des prothèses fixées sur 2 implants en place des 14 et 15 ;
– des prothèses fixées sur 3 implants en place des 24, 25 et 26.
La proposition qui consiste à ne mettre que 2 implants au niveau des 24 et 26 avec 25 en intermédiaire ne semble pas raisonnable en raison du contexte occlusal. En effet, l'arcade antagoniste est restaurée par prothèse fixée, situation très favorable à la transmission de forces masticatoires très importantes sur les piliers implantaires, et ce d'autant plus que l'examen exobuccal a mis en évidence une forte musculature, en particulier au niveau des masséters, révélant un bruxisme ou serrement de dents. Si l'antagoniste était une prothèse amovible, son caractère amortisseur avec dispersion des forces occlusales au niveau muqueux lors de la mastication limiterait l'intensité des forces mécaniques défavorables sur les piliers implantaires dont le nombre pourrait être réduit à 2 au lieu de 3, indiquant la réalisation d'un bridge. Le contexte occlusal du cas clinique ne le permet pas et chaque unité dentaire remplacée doit être mécaniquement soutenue par un implant.
Avantage : proposition fixée et confortable.
Inconvénients :
– coût nettement plus important que la première proposition ;
– durée du traitement augmentée avec plusieurs mois d'attente pour l'ostéo-intégration ;
– contrôles occlusaux réguliers pour corriger toutes dysfonction et forces nocives pouvant être à l'origine de la perte des implants à moyen ou long terme, ceux-ci ne possédant pas de système ligamentaire ;
– absence d'amélioration esthétique du bloc antérieur.
Cette proposition est identique à la deuxième en ce qui concerne la gestion des édentements, mais le plan de traitement au niveau de bloc incisivo-canin est modifié :
– reprise des traitements endodontiques sur 13 et 23 ;
– réalisation de prothèses fixées du type couronnes tout céramique collées sur dents pulpées sur 12, 11 et 22 ;
– réfection de la prothèse fixée implanto-portée sur 21.
Avantages :
– restauration fixe ;
– restauration globale (harmonisation esthétique et fonctionnelle).
Inconvénients :
– coût le plus élevé des trois propositions ;
– durée du traitement plus importante que la proposition 2, mais les travaux sur le secteur antérieur pourront être effectués pendant la phase d'ostéo-intégration ;
– maintenance occlusale stricte, à l'identique de la solution 2.
L'état parodontal sain associé au caractère esthétique et fonctionnel du bloc antérieur et des bridges restaurant les secteurs postérieurs mandibulaires a orienté vers la conservation en l'état de l'arcade mandibulaire. Un traitement d'assainissement parodontal initial a été prescrit pour cette arcade.
La décision thérapeutique est issue de la réflexion et de l'analyse commune du praticien et du patient, en adéquation avec les désirs exprimés par le patient, mais elle doit toujours être assortie d'un pronostic. Celui-ci implique deux notions primordiales mais difficiles à évaluer : la compétence du praticien et la maintenance du patient. Dans le cas présent, il a été rappelé à la patiente qu'un traitement global était souhaitable. Aussi, après exposé des différentes propositions thérapeutiques et en accord avec elle, la solution no 3 a été retenue : au maxillaire, couronnes tout céramique sur 13, 12, 11, 21, 22 et 23 associées à des prothèses implanto-portées remplaçant 14, 15, 24, 25 et 26. L'arcade mandibulaire est conservée en l'état.
Une sensibilisation au contrôle de plaque et un nouvel apprentissage des manœuvres d'hygiène bucco-dentaires ont été effectués, suivis par deux séances de détartrage pour compléter la thérapeutique initiale et tester l'observance de la patiente. Cette étape primordiale a permis d'aborder sereinement les phases chirurgico-prothétiques.
Une prothèse amovible partielle transitoire résine de 5 dents au maxillaire a été réalisée pour remplacer 14, 15, 24, 25 et 26 (fig. 13 à 16). Cette prothèse transitoire a permis de rétablir l'esthétique et la fonction et de valider le concept occlusal.
Une réplique de la prothèse amovible partielle réalisée en résine transparente a servi de guide radiologique (fig. 17 à 29) [5]. Après réalisation de l'examen d'imagerie, le positionnement des sites implantaires a été validé grâce au guide radiologique [6]. Les sites implantaires retenus, sans avoir recours aux techniques correctrices, ont été localisés au niveau des sites 14, 15, 24, 25 et 26. Par ailleurs, l'analyse du scanner a mis en évidence une faible densité osseuse [7] (fig. 30 et 31).
Un lambeau de pleine épaisseur a été décollé et les points d'émergence prédéterminés à l'aide du guide chirurgical ont été plus nettement localisés. Les forages réalisés ont confirmé la faible densité osseuse mais les implants positionnés dans leur site respectif ont acquis une stabilité primaire satisfaisante. Après mise en place des vis de couverture, le lambeau a été repositionné et suturé [8]. La prothèse transitoire a fait l'objet d'un rebasage à la résine à prise retardée et a été mise en place après la période de cicatrisation (fig. 32 à 56).
Au bout de 4 mois, les implants ont été découverts par visualisation des vis de couverture qui ont été remplacées par des vis de cicatrisation autour desquelles le lambeau a été adapté puis suturé. Le déplacement vestibulaire du lambeau a permis d'augmenter significativement la hauteur du tissu kératinisé en périphérie des sites implantaires (fig. 57 à 59).
Sur le moulage d'étude initial, une clé antérieure en silicone lourd a enregistré les céraplasties prospectives élaborées précédemment pour établir les différentes propositions thérapeutiques. Cette clé antérieure, garnie de résine, a été repositionnée en bouche pour confectionner un mock-up. Une fois celui-ci validé par la patiente, les préparations antérieures ont été entreprises, le mock-up servant de guide de préparation pour une réduction optimale des tissus dentaires (fig. 60 et 61). Après la dépose des couronnes sur 13 et 21 et préparation de 12, 11, 22 et 23, des prothèses transitoires élaborées d'après la clé en silicone ont été mises en place sans modification de la dimension verticale d'occlusion [9].
Une séance a été consacrée aux retraitements endodontiques sur 13 et 23. Des reconstructions pré-endodontiques ont permis la mise en place d'un champ opératoire et la création d'un réservoir pour l'hypochlorite de sodium servant à la désinfection des canaux.
Les séances suivantes ont été consacrées aux reconstructions de 13 et 23 par des inlay-cores. Leur morphologie a été dictée par la forme et la position des couronnes transitoires dont ils étaient une réduction quasi homothétique, la gestion de la future occlusion débutant à ce stade. Pour ce faire, une empreinte à l'alginate des prothèses transitoires validées en bouche a été effectuée et fournie au prothésiste. Après confection au laboratoire puis mise en place des inlay-cores, les prothèses transitoires à tenon initialement réalisées pouvaient être utilisées à nouveau à condition de retirer les tenons provisoires, de les évider puis de les rebaser et de les équilibrer conformément au respect de l'occlusion statique et dynamique.
Sur les implants maxillaires, les piliers de cicatrisation ont été déposés pour transvisser les transferts d'implants spécifiques. Pour le secteur dentaire antérieur et après dépose des couronnes transitoires, une mise en condition gingivale utilisant des cordonnets rétracteurs a été décidée (fig. 62 à 67). Afin d'enregistrer simultanément les préparations antérieures et la position des transferts d'implants postérieurs, une empreinte au silicone en un temps et en double viscosité a été effectuée à l'aide d'un porte-empreinte « à ciel ouvert » uniquement en regard des transferts d'implants [10]. Après retrait de l'empreinte, les analogues d'implants ont été transvissés dans les transferts (fig. 68 à 70). Cette empreinte a ensuite été traitée classiquement au laboratoire pour permettre l'élaboration du moulage de travail fractionné, chaque préparation dentaire ayant été détourée pour en dégager les limites.
L'enregistrement clinique de la position du maxillaire a été effectué par utilisation d'un arc facial qui a permis secondairement de positionner le moulage de travail maxillaire sur articulateur. Au maxillaire, des maquettes d'enregistrement occlusal ont été confectionnées en cire extra-dure de type Moyco® pour enregistrer la position clinique de la mandibule par rapport au maxillaire et pour transférer cet enregistrement sur le moulage maxillaire déjà monté sur articulateur afin de monter le moulage mandibulaire. Une maquette occlusale sur les incisives et les canines a assuré un calage efficace pendant l'enregistrement postérieur [11].
Le fait de tenir compte du contexte de l'occlusion dès le stade des préparations permet de gérer la morphologie et les épaisseurs des armatures [12]. Pour les piliers dentaires antérieurs, des chapes en céramique IPS e.max Press® (Ivoclar Vivadent), vitrocéramique à base disilicate de lithium, ont été confectionnées au laboratoire (fig. 71). Pour les implants, les piliers anatomiques transvissés (NobelProcera) ont été confectionnés puis installés cliniquement sur les implants à l'aide d'une clé de repositionnement en résine DuraLay® (fig. 72 à 75). Les armatures des couronnes céramo-métalliques ont été élaborées simultanément. L'ensemble des armatures a été essayé pour vérifier leur épaisseur et leur adaptation cervicale par l'utilisation d'un silicone de précision qui permet de mettre en évidence les éventuels défauts au niveau des bords des chapes en céramique (surextension, sous-contour, surcontour, joint ouvert). Un second enregistrement occlusal a ensuite été réalisé à l'aide d'une résine autopolymérisante (Pattern Resin®, GC) placée directement sur les armatures (fig. 76 à 82). Par rapport à l'utilisation plus classique de la cire, la résine est choisie pour sa précision d'enregistrement des impacts occlusaux opposés, pour sa stabilité dimensionnelle, pour sa rapidité de prise et pour sa rigidité. Ce nouvel enregistrement a apporté encore plus de précisions sur la relation maxillo-mandibulaire précédemment établie car effectuée sur des chapes rigides, stables et adaptées à l'identique sur les préparations cliniques et sur celles du moulage de travail, garantissant un transfert optimal et des adaptations à l'identique donc de qualité.
Après mise en place définitive des piliers implantaires postérieurs, les couronnes céramo-métalliques ont été scellées. En antérieur, les biscuits des couronnes tout céramique ont été essayés en bouche (fig. 83) pour valider les formes et les couleurs conformément au relevé initial (fig. 84), les réglages occlusaux ont été également finalisés pour affiner les fonctions de calage, de centrage et de guidage [13]. Une fois les glaçages réalisés au laboratoire, ces prothèses ont été scellées à leur tour, à l'aide d'un ciment de scellement auto-adhésif (RelyX Unicem®, 3M ESPE) [14, 15], l'indication du tout céramique sur dents pulpées restant d'un apport esthétique indiscutable de nos jours [16] (fig. 85). À ce stade, la reconstruction du maxillaire était achevée (fig. 86 et 87).
Le rôle de la maintenance reste primordial dans les reconstructions de grande étendue. Des visites semestrielles autorisent les contrôles parodontaux, implantaires et endodontiques. L'importance du contrôle de plaque et des manœuvres d'hygiène doit être répétée à chaque séance aux patients. Pour le cas clinique présenté ici, des contrôles radiologiques des implants ont été mis en place de façon trimestrielle la première année, puis semestrielle à partir de la deuxième année.
Pour tout cas clinique pluridisciplinaire, une analyse clinique raisonnée et construite permet d'établir un diagnostic et de lister les objectifs thérapeutiques correspondant à une situation clinique. Dans un second temps et après réflexion et validation par le patient, une séquence thérapeutique correspondant à la proposition de traitement choisie est établie. Dans la plupart des cas, le choix d'un matériau de reconstruction prothétique antérieur ne se discute plus lorsque l'esthétique est requise : entre d'autres, le système céramo-céramique IPS e.max Press® participe à la biomimétique et permet de rendre un sourire harmonieux et naturel aux patients. En effet, la lumière incidente est transmise de façon optimale du fait de la translucidité de cette vitrocéramique associée aux techniques adhésives.
L'établissement d'un plan de traitement adapté ainsi que la qualité de réalisation des séquences cliniques et le choix judicieux des matériaux de reconstructions sont des exigences qui garantissent la réalisation d'un traitement pérenne conforme aux exigences du patient. La maîtrise et l'exigence technique des réalisations au laboratoire de prothèses restent des prérequis indispensables.
L'auteur déclare n'avoir aucun lien d'intérêts concernant cet article.
Vincent Séguéla - Docteur en chirurgie dentaire
Formateur au sein de l'Association Aquitaine de Prothèses
Attaché Universitaire à la faculté d'Odontologie de Bordeaux
Enseignant au CES de Prothèse Fixée à la faculté d'Odontologie de Bordeaux