OCCLUSION
Pour Dawson [1], la courbe sagittale décrite en 1890 par Spee fait référence à la ligne antéro-postérieure des surfaces occlusales qui, partant de la canine mandibulaire et suivant les pointes cuspidiennes des prémolaires et molaires inférieures, se termine au bord antérieur de la branche montante de la mandibule. Page [2], citant le Dictionnary of dental science and art, précise...
Résumé
L'objectif de ce travail était de connaître l'évolution de la courbe de Spee au cours de la croissance chez le sujet africain mélanoderme et d'en déduire l'intérêt sur le plan prothétique. Une étude céphalométrique a été réalisée chez 120 sujets répartis en 4 groupes selon la denture temporaire stricte, la denture mixte stable, la denture adulte jeune et la denture adulte permanente (éruption de la dent de sagesse).
L'étude montre que la profondeur de la courbe de Spee est presque nulle en denture temporaire, ce qui est conforme à la morphologie des dents et des arcades et répond d'une certaine manière aux impératifs manducateurs à ce stade de la croissance. En revanche, le rayon de la courbe de Spee est très important. Au fil de la croissance, l'éruption des molaires permanentes avec leur inclinaison progressive ainsi que la croissance des arcades induisent la formation d'une courbe de Spee de plus en plus prononcée alors que le rayon diminue. En denture adulte, les résultats confirment les observations de Djeredou qui a montré que la profondeur de la courbe de Spee chez le sujet africain mélanoderme était plus faible que celle du sujet caucasien.
Toutefois, sur le plan occluso-prothétique et notamment en prothèse adjointe, cette étude confirme que la valeur du rayon de la courbe de Spee répond à des considérations anatomiques individuelles, aussi bien chez le sujet caucasien que chez l'Africain mélanoderme, conformément aux travaux d'Orthlieb et Djeredou. Le recours à un rayon standard tel que prescrit dans la technique du drapeau n'est plus à l'ordre du jour.
Pour Dawson [1], la courbe sagittale décrite en 1890 par Spee fait référence à la ligne antéro-postérieure des surfaces occlusales qui, partant de la canine mandibulaire et suivant les pointes cuspidiennes des prémolaires et molaires inférieures, se termine au bord antérieur de la branche montante de la mandibule. Page [2], citant le Dictionnary of dental science and art, précise qu'elle aboutit au bord antérieur de la tête condylienne. Il rapporte par ailleurs que sa forme est en rapport avec l'inclinaison mésio-distale des dents, l'orientation des forces occlusales sur chaque pilier dentaire et les axes fonctionnels. Il s'agit donc d'une véritable organisation anatomo-fonctionnelle dont la signification physiologique ainsi que les rôles biomécanique et esthétique au sein de l'appareil manducateur sont admis par tous les auteurs [3]. Abjean [4] écrit d'ailleurs à ce propos que « la courbe d'occlusion doit être regardée comme la base idéale du système dentaire ».
De nombreux travaux ont ainsi été consacrés à la localisation de cette courbe [5], à sa description [6, 7], à la détermination de sa valeur (profondeur et rayon) et à ses relations avec différents paramètres occlusaux aussi bien chez les sujets caucasiens [8, 9] que chez les sujets mélanodermes africains [10-12], en vue de maîtriser son rétablissement lors des restaurations occluso-prothétiques [13, 14] ou orthodontiques [15-17].
Très peu d'études ont cependant abordé les questions de son établissement et de son évolution au cours des différents stades de la denture qui caractérisent la maturation de l'appareil manducateur. Des interrogations se posent encore et demandent des précisions : la courbe de Spee existe-t-elle chez l'enfant ? À quel âge se met-elle en place ? Comment évolue-t-elle ?
C'est pour apporter quelques réponses à ces questions que la présente étude s'est fixé pour objectif de déterminer et de comparer les valeurs de la courbe de Spee (profondeur et rayon) de plusieurs groupes de sujets africains mélanodermes répartis en fonction des différents stades caractéristiques de l'évolution de la denture.
Cette étude a été réalisée au sein d'une population ivoirienne de race noire. Les sujets ont été sélectionnés selon certains critères d'inclusion et de non-inclusion.
Les critères d'inclusion regroupaient les sujets :
– de race noire ;
– en denture complète pour chaque type de denture ;
– en normocclusion de classe I d'Angle canine et molaire ;
– indemnes de lésions carieuses et de restaurations occlusales ;
– n'ayant jamais bénéficié de traitement orthodontique ;
– sans reconstruction prothétique coronaire ;
– ne présentant aucune pathologie parodontale ou articulaire.
Quant aux critères de non-inclusion, il s'agissait des sujets :
– non de race noire ;
– de race noire avec au moins une des cinq spécificités suivantes :
• dentés, en classe II ou III d'Angle,
• dentés, ayant bénéficié d'un traitement de correction orthodontique,
• dentés, avec des lésions carieuses, des restaurations ou des reconstructions prothétiques occlusales,
• dentés, présentant des troubles articulaires et des pathologies parodontales,
• édentés ou porteurs de prothèses adjointes.
Sur la base de ces critères, 120 sujets ont été sélectionnés et répartis en 4 groupes :
– 30 enfants en denture temporaire stricte ;
– 30 enfants en denture mixte stable (éruption de la première molaire permanente) ;
– 30 adolescents en denture adulte jeune (éruption de la deuxième molaire permanente) ;
– 30 adultes en denture permanente (éruption de la dent de sagesse).
Les enfants et les adolescents ont été recrutés dans un établissement d'enseignement secondaire de la commune de Cocody à Abidjan et les adultes ont été sélectionnés au sein d'une population d'étudiants de l'université de Cocody.
Ont été utilisés :
– des films Kodak® T-MAT G 18 × 24 cm ;
– un appareillage radiologique de type Odontorama PC 100 ;
– une cassette porte-film du type Kodak® X-Omatic Regular ;
– des bains de développement Kodak® X-Omat.
Pour chaque sujet, un cliché radiographique de profil en occlusion habituelle d'intercuspidie maximale, la tête orientée par rapport au plan de Francfort, a été réalisé.
L'incidence en norma lateralis perpendiculaire au plan sagittal médian a été effectuée à une distance focale de 3,5 m pour une distance objet-image fixée à 15 cm. À cette distance, la déformation est considérée comme suffisamment négligeable pour pouvoir relever des mesures fiables. Tous les clichés ont été réalisés par le même opérateur. Le repérage des structures de la base du crâne, du massif facial supérieur et de la mandibule a permis de réaliser les tracés céphalométriques.
Ont été utilisés :
– un négatoscope ;
– du papier-calque transparent du type Kodatrace, du ruban adhésif ;
– un critérium avec une mine HB de 5/10 mm de diamètre et une gomme ;
– une règle, une équerre et un rapporteur transparents.
Les mesures ont été effectuées à partir des points suivants :
– sommet des cuspides disto-vestibulaires des 4 et 5 inférieures pour la denture temporaire ;
– sommet de la cuspide disto-vestibulaire de la 6 inférieure pour la denture mixte stable ;
– sommet des cuspides disto-vestibulaires des 6 et 7 inférieures pour la denture adulte jeune ;
– sommet des cuspides disto-vestibulaires des 6, 7 et 8 inférieures pour la denture adulte ;
– point incisif inférieur pour tous les types de dentures ;
– centre géométrique de la tête du condyle (Co) mandibulaire pour tous les types de dentures.
La corde (C), ou longueur d'arcade, mesure la distance qui sépare le point incisif inférieur du sommet de la cuspide disto-vestibulaire d'une dent postérieure donnée (fig. 1). Les cordes suivantes ont été mesurées :
– en denture temporaire, C4 et C5 respectivement aux première et deuxième molaires temporaires ;
– en denture mixte stable, C6 à la première molaire permanente ;
– en denture adulte jeune, C6 et C7 respectivement aux première et deuxième molaires permanentes ;
– en denture adulte, C6, C7 et C8 respectivement aux première, deuxième et troisième molaires permanentes.
La profondeur de la courbe est définie par la flèche (F) qui est la distance mesurée à partir du point au milieu de la corde (longueur d'arcade) à partir duquel une perpendiculaire est abaissée jusqu'au point dentaire occlusal (fig. 1).
Les flèches suivantes ont été mesurées :
– en denture temporaire, F4 et F5 respectivement aux première et molaires temporaires ;
– en denture mixte stable, F6 à la première molaire permanente ;
– en denture adulte jeune, F6 et F7 respectivement aux première et deuxième molaires permanentes ;
– en denture adulte, F6, F7 et F8 respectivement aux première, deuxième et troisième molaires permanentes.
La détermination céphalométrique du rayon de la courbe de Spee (fig. 2) s'inspire de la méthode géométrique proposée par Orthlieb [18] et passe par les étapes suivantes :
– repérage de l'axe charnière (centre géométrique du condyle) et du point incisif inférieur ;
– tracé du grand axe du pilier postérieur (GAP) qui varie selon le type de denture :
• en denture temporaire, la deuxième molaire (C5),
• en denture mixte stable, la première molaire permanente (C6),
• en denture adulte jeune, la deuxième molaire permanente (C7),
• en denture adulte, la dent de sagesse (C8).
Sur le GAP, le point de contact occlusal postérieur (COP) est repéré ;
– tracé des segments COP-axe charnière et COP-point incisif inférieur. De ces deux segments, deux médiatrices sont tracées et sont sécantes en un point. Ce point d'intersection est le centre d'un cercle qui passe par les trois points précédemment repérés (axe charnière, COP et point incisif inférieur) ;
– rayon de la courbe de Spee, qui est alors immédiatement mesuré.
Les rayons de tous les sujets ont été ainsi déterminés et le calcul de R (rayon moyen pour chaque groupe de sujets) a été effectué.
Sur chaque téléradiographie, ont été effectuées :
– en denture temporaire, 5 mesures linéaires (C4, C5, F4, F5, R), soit 150 mensurations pour les 30 sujets ;
– en denture mixte stable, 3 mesures linéaires (C6, F6, R), soit 90 mensurations pour les 30 sujets ;
– en denture adulte jeune, 5 mesures linéaires (C6, C7, F6, F7, R), soit 150 mensurations pour les 30 sujets ;
– en denture adulte, 6 mesures linéaires (C6, C7, C8, F6, F7, F8, R), soit 180 mensurations pour les 30 sujets.
Tous les tracés ont été effectués par le même opérateur et soumis à une vérification.
Pour l'ensemble de l'échantillon, 570 mensurations ont été effectuées.
Les données recueillies ont été saisies et traitées sous Epi Info version 6. Chaque variable a été soumise à une analyse statistique descriptive qui a permis de déterminer :
– les valeurs minimale et maximale qui sont respectivement la plus petite et la plus grande valeur de la série statistique ;
– l'amplitude (différence entre le maximum et minimum) ;
– la moyenne ;
– l'écart type (qui donne la dispersion autour de la moyenne).
Les tableaux 1 et 2 détaillent cette mesure.
En denture temporaire, la longueur d'arcade moyenne :
– à la première molaire temporaire (C4), est de 19 ± 1,8 mm ;
– à la deuxième molaire temporaire (C5), est de 28 ± 2,2 mm.
Pour les autres stades de denture :
– la longueur d'arcade à la 6 (C6) :
• en denture mixte stable, est de 40,71 ± 2,1 mm,
• en denture adulte jeune, est de 40,21 ± 3,1 mm,
• en denture adulte, est de 38,60 ± 2,3 mm ;
– la longueur d'arcade à la 7 (C7) :
• en denture adulte jeune, est de 51,96 ± 3,5 mm,
• en denture adulte, est de 49,06 ± 5,9 mm ;
– la longueur d'arcade à la 8 (C8), en denture adulte, est de 62,48 ± 1,2 mm.
Les tableaux 3 et 4 détaillent cette mesure.
En denture temporaire, la profondeur moyenne de la courbe de Spee :
– à la première molaire temporaire (F4), est de 0 mm ;
– à la deuxième molaire temporaire (F5), est de 0,72 mm.
Pour les autres stades de denture, la valeur moyenne de la profondeur de la courbe de Spee :
– à la 6 (F6) :
• en denture mixte stable, est de 1,7 ± 0,2 mm,
• en denture adulte jeune, est de 1,5 ± 0,1 mm,
• en denture adulte, est de 1,21 ± 1 mm ;
– à la 7 (F7) :
• en denture adulte jeune, est de 2,3 ± 0,1 mm,
• en denture adulte, est 1,9 ± 1,1 mm ;
– la profondeur de la courbe de Spee à la 8 (F8), en denture adulte, a une valeur moyenne de 3,9 ± 1 mm.
Cette mesure est présentée dans le tableau 5.
Les résultats de cette étude montrent qu'en denture temporaire, les flèches sont nulles (F4 = 0 mm) ou presque (F5 = 0,72) : la courbe de Spee n'existerait donc pas à ce stade de denture.
Une telle observation est conforme aux résultats de plusieurs auteurs [15, 19]. Pour Albanel [15], l'occlusion doit être plane en denture temporaire pour permettre tous les mouvements mandibulaires.
Pourreyron [19] précise que la courbe de Spee n'existe pas en denture temporaire à cause de la réduction et de la platitude des tables occlusales, mais également du fait de la brièveté des arcades dans le sens antéro-postérieur. Les arcades dentaires sont encore petites et comportent des dents aux reliefs atténués [20]. De plus, pour Nyström [21], la morphologie des tables occlusales des molaires temporaires, initialement peu prononcée, subit une abrasion très précoce à cause du faible degré de minéralisation de ces dents. Cette usure occlusale donnerait à la mandibule une certaine liberté latéro-antérieure favorable à son développement.
Delachapelle [22] pense que, en réalité, la prétendue absence de la courbe de Spee en denture temporaire n'est due qu'à l'existence d'une courbe de grand rayon. Les résultats de l'étude présentée dans cet article vont dans le sens de cette observation et montrent que, en denture temporaire, le rayon de courbure (R moyen = 142,3 mm) est le plus important par rapport à celui des dentures mixte stable (R moyen = 100 mm), adulte jeune (R moyen = 96,5 mm) et adulte (R moyen = 94 mm). Cette tendance évolutive du rayon se fait en sens inverse de celui de la profondeur du plan sagittal d'occlusion.
C'est en denture mixte stable que la courbe de Spee commence à se dessiner selon les résultats de cette étude. En effet, la valeur moyenne de la flèche au niveau de la première molaire (F6) est de 1,7 mm avec une amplitude de 1,3 mm.
Toutefois, F6 diminue chez l'adulte jeune (1,5 mm) et se stabilise chez l'adulte à 1,2 mm. Cette diminution de la profondeur de la courbe de Spee à la première molaire est probablement liée au mouvement de translation vertico-sagittal de la dent de 6 ans après la chute des molaires temporaires. À ce propos, Laude et al. [23] observent que « c'est au cours de la transformation de l'articulé mixte en articulé définitif que les déplacements des premières monophysaires sont les plus importants ». Cette évolution peut s'effectuer, selon Demoge [24], dans le sens vertical. Dans ce cas, elle est la conséquence de la croissance en hauteur des procès alvéolaires.
Toutefois, pour Dellaguardia [25], les déplacements les plus intéressants se déroulent dans le sens sagittal où l'on observe fréquemment une translation mésiale associée ou non à une version des dents de 6 ans. Cette mésialisation est le fait d'un mouvement pur de la première monophysaire qui a pour but de combler une partie de l'espace laissé libre devant elle par la chute de la dent temporaire. Cet espace de dérive molaire, ou leeway space de Nance, est lié à la différence de taille des segments postérieurs permanents et temporaires. Ce leeway space est mis en évidence dans l'étude présentée ici par les résultats obtenus au niveau des cordes ou longueurs d'arcade :
– C6 = 40,71 mm en denture mixte, 40,21 mm en denture adulte jeune et 38,69 mm en denture adulte ;
– C7 = 51,96 mm en denture adulte jeune et 49,06 mm en denture adulte.
Ces valeurs moyennes diminuent au fur et à mesure que la dentition évolue. Dans ce sens, Moorres [26] a montré que, avec la deuxième transition qui correspond au remplacement des canines et molaires temporaires par leurs homologues permanentes et à la mise en place des deuxièmes molaires définitives, survient un raccourcissement d'arcade avec une moyenne de diminution allant de 1,5 à 1,9 mm au maxillaire (respectivement filles et garçons) et de 1,7 à 1,8 mm à la mandibule. Ce raccourcissement peut continuer graduellement jusqu'à l'âge de 26 ans. Ainsi, l'arcade mandibulaire est plus courte à 18 ans qu'à 4 ans selon Sinclair, pour qui ce phénomène est dû à la croissance, à l'influence de l'environnement musculaire et à l'usure interproximale.
C'est véritablement avec l'éruption de la deuxième molaire permanente que la courbure du plan sagittal d'occlusion s'établit. Dans l'étude présentée ici, F7 mesure 2,3 mm chez l'adulte jeune. Il est cependant intéressant de noter que, de la denture adulte jeune à la denture adulte, F7 diminue, passant de 2,3 à 1,9 mm.
Cette diminution de la flèche peut s'expliquer par le fait que, de 12 à 15 ans, l'éruption de la deuxième molaire permanente n'est pas complète. Elle se termine avec l'éruption de la dent de sagesse dont la mise en place sur l'arcade va accentuer la courbure du plan sagittal d'occlusion. Dans notre étude, la valeur moyenne de F8, qui atteint 3,9 mm, est la plus élevée. Ce résultat va dans le sens des observations de Djeredou [10, 11] qui a également relevé que c'est avec la présence de la dent de sagesse que la courbe de Spee s'approfondit (F8 = 3 mm) chez le sujet africain mélanoderme.
Dans tous les cas, la comparaison de nos résultats avec ceux des études antérieures permet de faire les constatations suivantes :
– valeur moyenne de la courbe de Spee chez l'adulte :
• à la première molaire, F6 est égal à 1,3 mm ; ce résultat est proche de celui d'Orthlieb [18] qui a trouvé que F6, chez le sujet caucasien, était égal à 1,49 mm. Djeredou [10, 11] avait également montré que le F6 moyen de son échantillon (1,5 mm) était comparable à celui d'Orthlieb [18]. Il en avait conclu que la profondeur de la courbe de Spee à la première molaire n'était pas une caractéristique du sujet noir mais serait plutôt en rapport avec l'inclinaison droite des dents cuspidées de cette région,
• à la deuxième molaire, F7 moyen est égal à 1,9 mm ; à l'instar de Djeredou [10, 11] et Paas et al. [12], qui ont respectivement trouvé, pour F7, une valeur moyenne de 2,1 et 2,2 mm, les résultats de l'étude présentée illustrent bien que la courbe de Spee est de faible profondeur chez le sujet négro-africain si on les compare à ceux des travaux de Ghezzi et al. [8] qui ont rapporté une valeur moyenne de F7 égale à 3,66 mm dans une population caucasienne ;
– pour ce qui est du rayon de courbure, la valeur moyenne obtenue chez l'adulte est de 94 mm avec un écart type de 15 mm et une amplitude de 74 mm. Ce résultat est inférieur à celui de Djeredou [10, 11] qui a trouvé un rayon moyen égal à 109 mm, avec un écart type de 23 mm et une amplitude de 93 mm. Il est cependant supérieur à celui d'Orthlieb [18] qui est de 75 mm, avec un écart type de 19 mm et une amplitude de 100 mm.
Malgré la différence importante entre les rayons moyens de chacune de ces études, on peut observer qu'elles ont en commun des écarts types et des amplitudes élevés autour de la moyenne. Cela indique clairement la forte dispersion de la population, qu'elle soit caucasienne ou négro-africaine, et conforte ainsi l'existence d'une variation individuelle de la courbe de Spee quelle que soit la race.
Cela semble également se vérifier à chaque stade de la dentition : 142,3 ± 20,4 mm (amplitude = 73 mm) en denture temporaire ; 100 ± 13,6 mm (amplitude = 53,5 mm) en denture mixte stable ; 96,5 ± 12,2 mm (amplitude = 51 mm) en denture adulte jeune et 94 ± 15 mm (amplitude = 74 mm) en denture adulte.
Ainsi, la technique de la détermination et de la reconstruction de la courbe de Spee, fondée sur la méthode du Broadrick occlusal plane analyzer, encore appelée technique du drapeau [13], qui utilise le rayon standard de 104 mm de Bonwill et Monson, ne peut être appliquée ni chez le sujet adulte, ni chez l'adulte jeune, ni chez l'enfant en denture mixte ou temporaire.
Cette étude montre que la profondeur de la courbe de Spee est presque nulle en denture temporaire. Ce qui est conforme à la morphologie des dents et des arcades et répond d'une certaine manière aux impératifs manducateurs à ce stade de la denture. En revanche, le rayon est très important. Au fil de la croissance, l'éruption des molaires permanentes, leur inclinaison progressive et la croissance des arcades induisent la formation d'une courbe de Spee de plus en plus prononcée alors que le rayon diminue.
En denture adulte, les résultats présentés ici confirment les observations de Djeredou [10, 11] qui a montré que la profondeur de la courbe de Spee chez le sujet africain mélanoderme est plus faible que chez le sujet caucasien.
Dans tous les cas, selon Mesnay [3], la courbe de Spee est un facteur d'amélioration de l'efficacité mandibulaire. Sa restauration est donc un impératif et doit être un objectif thérapeutique aussi bien en prothèse qu'en orthodontie. D'après Gola et al., le plan d'occlusion idéal est indissociable de la courbe de Spee [28].
S'agissant spécifiquement des traitements occluso-prothétiques, cette étude confirme, à la suite des travaux d'Orthlieb [18] et de Djeredou [10, 11], aussi bien chez le sujet caucasien que chez l'Africain mélanoderme, que la valeur du rayon de la courbe de Spee répond à des considérations anatomiques individuelles et que le recours à un rayon standard tel que prescrit dans la technique du drapeau n'est plus à l'ordre du jour. Pour Kumar et Tamizharasi [29], les cliniciens devraient être conscients que, avec l'âge, les changements occlusaux modifient progressivement la courbe de Spee de jeunesse vers une courbure occlusale individuelle plus favorable.
Les auteurs déclarent n'avoir aucun lien d'intérêts concernant cet article.
Assiéhué Claude N'Dindin
Koffi Alexandre Kouame
Nambé Yacouba Konate
Kouadio Benjamin Djeredou
Koffi Delman Assi
Département de prothèse et occlusodontie
UFR d'odonto-stomatologie, université Félix Houphouët-Boigny, Abidjan (Côte d'Ivoire)
El Hadj Babacar M'Bodj
Moctar Gueye
Service de prothèses dentaires, Département d'odontologie, faculté de médecine université Cheick Anta Diop, Dakar (Sénégal)
Bernard Giumelli
Kouakou Kouadio
UFR d'odontologie, université de Nantes