Les cahiers de prothèse n° 176 du 01/12/2016

 

Du côté des internes

C. LAI   M. JACQUEMONT   O. LAVIOLE  

Question 1. Reconstitution corono-radiculaire de la dent dépulpée : critères de choix
C. Lai, O. Laviole

Une dent qui a été traitée endodontiquement voit ses propriétés biologiques et mécaniques modifiées et nécessite souvent une restauration pour redevenir un organe dentaire fonctionnel. Aujourd'hui, si l'évolution des techniques et des matériaux de collage incite le praticien à toujours davantage préserver les tissus dentaires résiduels et à reculer le...


Résumé

Présentation

Dans cette rubrique seront abordées les notions fondamentales qui fondent la pratique clinique de l'odontologie prothétique et de ses rapports avec les autres disciplines. Ces notions s'adressent notamment aux étudiants préparant le concours de l'internat en odontologie mais aussi aux internes en fonction et aux praticiens libéraux. Ils retrouveront l'essentiel de la pratique sous forme de questions/réponses rédigées de manière synthétique et efficace, dans une forme essentiellement pédagogique. Des éléments complémentaires apparaissent sous forme de tableaux synthétiques et une bibliographie utile du type « lectures conseillées » est ajoutée.

Apprendre à observer la clinique, à l'analyser, puis à classer et à organiser ses connaissances et ses idées sont des étapes capitales et essentielles au service de la réalisation d'un plan de traitement cohérent qui s'inscrira dans la pérennité.

Résumé

Items d'internat en rapport avec cet article

73. Indications et contre-indications implantaires.

74. Bilan pré-implantaire.

138. Restauration de la dent dépulpée.

145. Facteurs biomécaniques et conceptions prothétiques.

149. La prothèse fixée unitaire.

Question 1. Reconstitution corono-radiculaire de la dent dépulpée : critères de choix
C. Lai, O. Laviole

Une dent qui a été traitée endodontiquement voit ses propriétés biologiques et mécaniques modifiées et nécessite souvent une restauration pour redevenir un organe dentaire fonctionnel. Aujourd'hui, si l'évolution des techniques et des matériaux de collage incite le praticien à toujours davantage préserver les tissus dentaires résiduels et à reculer le moment de la dépulpation, il n'en reste pas moins que dans un nombre important de cas, le recours à une reconstitution corono-radiculaire (RCR) associée à une coiffe périphérique s'avère nécessaire. La prise de décision et la réalisation des reconstitutions corono-radiculaires ont beaucoup évolué depuis 20 ans.

Une reconstitution corono-radiculaire peut être directe avec tenon fibré et matériau composite, c'est la RMIPP (reconstitution par matériau inséré en phase plastique), ou indirecte, associant ancrage radiculaire et faux moignons coulés, c'est l'inlay-core ou RCRC (restauration corono-radiculaire coulée).

Peut-on systématiser par des critères décisionnels le choix de la réalisation d'une reconstitution corono-radiculaire coulée ou foulée ? Les paramètres de choix sont-ils différents selon la dent concernée (antérieure, c'est-à-dire appartenant au groupe incisivo-canin, ou postérieure) ?

Recommandations de la littérature médicale

Un rapport de l'ANAES (Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé), réalisé en 2003 au moyen d'une analyse critique de la littérature scientifique, notamment 2 méta-analyses et 6 essais cliniques, conclut qu'il n'est pas possible d'établir des recommandations professionnelles incontestables portant sur les indications ou les contre-indications des reconstitutions corono-radiculaires préprothétiques coulées ou insérées en phase plastique. Le praticien est donc seul décisionnaire de son choix thérapeutique en fonction des éléments cliniques à sa disposition.

Ce rapport souligne également que, quelle que soit la technique de mise en œuvre, le succès et la pérennité sont conditionnés par le respect des procédures opératoires.

Si aucun consensus n'a pu être établi, l'avis du groupe de travail ayant réalisé l'analyse permet d'établir des principes préalables, des contre-indications et des critères déterminants en matière de choix de la reconstitution.

Principes préalables

Quelle que soit la technique utilisée, la préservation tissulaire doit être respectée, notamment au niveau cervical.

L'ancrage radiculaire n'est pas systématique pour la reconstitution d'une dent dépulpée.

La RMIPP nécessite un champ opératoire strict.

Contre-indications (CI)

CI de l'inlay-core : si l'ancrage radiculaire est inutile ou impossible.

CI de la RMIPP :

– si les limites cervicales de la perte de substance sont à moins de 2 mm des limites de la future superstructure préprothétique ;

– si la résistance mécanique de la reconstitution est inadaptée aux contraintes supportées par la superstructure.

Critères déterminants

Il est important de rappeler que le choix de la solution prothétique se fait en fonction du contexte clinique. Tous les critères doivent être analysés ensemble et n'ont pas de valeur s'ils sont pris isolément :

– rapport résistance mécanique/volume de la reconstitution :

• le volume résiduel de la dent est évalué après préparation périphérique : il sera pris en compte dans le contexte clinique,

• une forte perte de substance oriente vers un inlay-core ;

– sollicitations fonctionnelles. On notera :

• la localisation de la dent sur l'arcade. Si une dent antérieure maxillaire nécessite une reconstitution avec ancrage radiculaire, l'inlay-core est sélectionné du fait de l'axe radiculaire de ces dents,

• contexte occlusal. S'il y a une sollicitation importante en flexion et cisaillement ou un contexte occlusal défavorable, l'inlay-core est sélectionné,

• rôle dévolu à la superstructure. Si la dent est un support de crochet de prothèse amovible partielle ou un pilier d'ancrage pour bridge, avec une perte de substance moyenne à importante, l'inlay-core est privilégié du fait de la résistance mécanique plus faible des RMIPP ;

– anatomie radiculaire. Si l'anatomie radiculaire ne permet pas la mise en place d'un tenon suffisamment rétentif, une reconstitution par matériau inséré en phase plastique est préférée ;

– facteurs limitatifs liés au patient. Les RMIPP nécessitent des conditions de mise en œuvre et d'étanchéité très strictes. Si le patient a une faible ouverture buccale ou une difficulté à maintenir l'ouverture buccale, l'inlay-core est recommandé pour privilégier une séquence clinique plus courte ;

– possibilité de réintervention. La réintervention sur une reconstitution corono-radiculaire est toujours difficile mais plus simple avec une RMIPP et un tenon métallique scellé.

En conclusion, l'analyse de la littérature scientifique n'a pour l'instant pas réussi à définir des indications claires, validées scientifiquement pour ces deux méthodes et il est donc indispensable que le choix s'ancre dans un contexte clinique, selon l'examen du praticien, ses compétences et son plateau technique.

Recommandations cliniques

En accord avec l'Académie Nationale de Chirurgie Dentaire, les rôles d'une reconstitution corono-radiculaire, c'est-à-dire la restauration préprothétique d'une perte de substance dentaire, peuvent être définis ainsi :

– assurer la rétention de la suprastructure prothétique ;

– permettre le maintien de l'étanchéité du système canalaire (condition sine qua non du succès du traitement endodontique) :

– répartir les contraintes fonctionnelles internes et externes au sein des tissus dentaires.

Cela permet de dégager un certain nombre de principes généraux faisant intervenir les multiples facteurs à prendre en compte (fig. 1).

De nombreux auteurs ont tenté de dégager les principes décisionnels respectifs des inlay-cores et des RMIPP en s'appuyant sur le recul clinique mais, là encore, les choix sont différents selon que l'on privilégie le principe d'économie tissulaire ou des critères morphologiques (nombre et hauteur des parois...).

Cependant, quelle que soit la reconstitution corono-radiculaire, le praticien doit évaluer la possibilité de cerclage d'une zone dentinaire de 1,5 à 2 mm de haut par la coiffe prothétique. Si ce cerclage n'existe pas ou ne peut pas être créé par une intervention préprothétique, l'indication même d'une restauration par reconstitution corono-radiculaire et coiffe peut être remise en question (fig. 2 à 5).

En s'appuyant sur les indications préconisées par un certain nombre d'auteurs, il est possible de dégager des critères décisionnels pour aider le praticien dans sa réflexion selon (fig. 6) :

– la position de la dent sur l'arcade ;

– l'importance de la perte de substance ;

– le nombre de parois restantes ;

– la hauteur des parois restantes ;

– l'épaisseur des parois restantes ;

– la position de la limite cervicale ;

– les conditions occlusales ;

– le rapport racine clinique exploitable/couronne clinique.

La décision de la réalisation d'une RCRC ou d'une RMIPP ne se prend qu'après préparation périphérique pour évaluer la valeur réelle des tissus restants (fig. 7 à 10).

Conclusion

La prise de décision et la réalisation des reconstitutions corono-radiculaires ont beaucoup évolué ces dernières années et privilégier l'économie tissulaire maximale, la suppression de l'ancrage radiculaire et l'exploitation des matériaux d'assemblage sont devenues des priorités cliniques.

Toutefois, les RCRC conservent encore des indications bien précises et l'utilisation, dans ce cas, de tenons anatomiques plutôt que calibrés limite les contraintes radiculaires. Un ciment verre ionomère modifié par adjonction de résine (CVIMAR) est souvent préféré au protocole de collage jugé aléatoire au niveau des tissus radiculaires.

Restaurer sans tenon ni couronne les dents postérieures dépulpées et favoriser les restaurations partielles collées indirectes telles que les onlays, les overlays ou une endocouronne, caractérise l'évolution de la dentisterie contemporaine où la notion de gradient thérapeutique doit diriger la réflexion et la décision du praticien.

Question 2. Première consultation implantaire
M. Jacquemont

Vous recevez un patient en première consultation implantaire, décrivez la séance (fig. 11 et 12).

Le bilan préliminaire est une étape clé du traitement implantaire. L'adéquation chirurgie/prothèse est essentielle pour le succès thérapeutique, notamment dans le secteur antérieur où l'impact esthétique est important. L'objectif de la première consultation est de relever les contre-indications évidentes, d'évaluer la faisabilité et le bénéfice de la solution implantaire et, enfin, de faire le choix des examens complémentaires. Ce bilan préliminaire permet au praticien d'établir le projet prothétique qui guidera le protocole chirurgical.

Entretien clinique

L'entretien clinique est une phase d'échange avec le patient. Il permet :

– de cerner la demande du patient (esthétique et/ou fonctionnelle) ;

– d'établir son profil psychologique et de confirmer la faisabilité de sa demande ;

– de connaître son âge (croissance osseuse en cours ou terminée) ;

– de déterminer l'origine et l'ancienneté de l'édentement (remodelage osseux en cours ou terminé, résorption plus ou moins importante à anticiper telle qu'agénésie, traumatisme, lésions carieuses, maladie parodontale...).

Anamnèse médicale

L'anamnèse médicale est essentielle pour la phase chirurgicale. Elle permet de révéler :

– les contre-indications absolues à la réalisation du traitement :

• patients à haut risque d'endocardite infectieuse (AFSSAPS, 2011),

• forte irradiation des maxillaires, supérieur à 50 Gy (risque d'ostéoradionécrose),

• traitement de l'ostéoporose ou de certains cancers par bisphosphonates par voie intraveineuse (risque d'ostéochimionécrose),

• maladies immunologiques, traitements immunosuppresseurs ou par corticoïdes au long cours, SIDA déclaré, transplantation d'organe en attente,

• pathologies du métabolisme osseux (maladie de Paget, ostéomalacie...),

• accidents ischémiques de moins de 6 mois ou non stabilisés ;

– les contre-indications relatives. Pour celles-ci, l'indication de la pose d'implant se fera au cas par cas avec la plus grande prudence :

• pathologies systémiques non contrôlées (diabète de type 1 ou 2),

• angine de poitrine,

• patients immunodéficients (séropositifs par exemple),

• pathologies auto-immunes,

• radiothérapie cervico-faciale (en fonction de la zone, de la quantité de rayons, de la localisation de la lésion cancéreuse...),

• certaines maladies psychiatriques,

• grossesse,

• hygiène de vie (tabac, éthylisme, toxicomanie...) ;

– les allergies connues à prendre en compte.

Une fois connus le contexte pathologique et comportemental du patient ainsi que la faisabilité médicale de l'acte envisagé, l'examen classique exobuccal et endobuccal est orienté en fonction de la localisation de la zone édentée.

Examen clinique

L'examen clinique comporte :

– le contrôle de l'ouverture buccale, afin d'évaluer la facilité d'accès pour les instruments chirurgicaux et prothétiques ;

– la vérification d'une hygiène bucco-dentaire satisfaisante (indice de plaque < 20 %) ;

– la recherche d'une maladie parodontale et carieuse, stabilisée ou non ;

– l'estimation de l'espace prothétique disponible, c'est-à-dire l'espace mésio-distal correspondant à la place requise pour la (ou les) dent(s) à remplacer (appréciation de la version des dents adjacentes) et un rapport intercrêtes suffisant en hauteur (analyse de l'égression des dents antagonistes) ;

– l'analyse de l'occlusion statique et dynamique, soit l'occlusion d'intercuspidie maximale stable ou à restaurer dans un plan de traitement global, la valeur des fonctions de calage, centrage et guidage ;

– la recherche de parafonction(s) et l'analyse des facettes d'usure éventuelles. Une parafonction telle que la bruxomanie peut induire un risque de surcharge fonctionnelle néfaste pour l'implant ainsi qu'un risque de fracture de la céramique prothétique. L'importance de ce paramètre est à évaluer en fonction du nombre et de la localisation des implants projetés ;

– l'appréciation du volume osseux disponible par palpation de l'épaisseur de la zone édentée et l'évaluation de sa morphologie externe ;

– l'appréciation des facteurs esthétiques. Le soutien des lèvres, le type de sourire (gingival ou pas), la ligne générale du sourire avec asymétrie éventuelle et le rapport interlabial sont des éléments relevés dès l'examen exobuccal. Au niveau endobuccal, sont particulièrement importants l'existence de diastèmes interdentaires, l'alignement initial des collets et la présence de papilles interdentaires normales en forme et volume. Comme souvent lorsque le facteur esthétique entre en jeu, l'examen de photographies antérieures du patient donne des indications sur les caractéristiques du sourire ;

– l'analyse de la qualité des tissus mous de soutien (quantité en hauteur et épaisseur de gencive attachée, présence de brides freinales ou cicatricielles au niveau de la crête).

Examens complémentaires systématiques

Les examens complémentaires systématiques sont à réaliser dès la première séance.

Examens radiographiques

L'orthopantomogramme permet d'avoir une vue d'ensemble de la situation clinique et, outre les dents, permet de visualiser également les obstacles anatomiques majeurs (foramen mentonnier, canal mandibulaire), lacunaires (sinus) ou imprévus (ostéocondensation, dent incluse...).

Les radiographies rétroalvéolaires, avec angulateur, induisent moins de déformation que la radiographie panoramique. Elles révèlent :

– l'orientation des racines adjacentes, la présence de courbures... ;

– le niveau osseux de la zone édentée elle-même et la valeur du support parodontal des dents adjacentes.

Moulages d'études montés sur articulateur

Ces moulages permettent une meilleure appréciation des éléments intrabuccaux et la préparation du projet prothétique avec ses facteurs favorables ou défavorables :

– mesure de l'espace disponible en hauteur et largeur ;

– visualisation de l'orientation des dents naturelles ;

– analyse précise de l'occlusion ;

– prévision d'un montage directeur (principalement pour les édentements antérieurs et tous types d'édentements pluraux) pour analyser taille, position et rapports occlusaux précis de la future restauration prothétique. Une fois validé, ce montage permet la réalisation d'un guide radiologique donnant au praticien l'axe prothétique souhaité lors de l'analyse de l'imagerie 3D.

Ce projet prothétique est obligatoire puisqu'il guidera la phase chirurgicale.

Bilan photographique

Le bilan photographique, facultatif mais souvent très utile, permet, dans le secteur antérieur, d'analyser le sourire par rapport aux lignes de référence exobuccales (bipupillaire et bicommissurale) et les lignes esthétiques de celui-ci (contour des lèvres, alignement des collets...). Ce bilan n'est qu'une première approche esthétique ; dans le cas d'une restauration de grande étendue à fort impératif esthétique, le projet prothétique pourra être affiné et personnalisé à l'aide des outils informatiques actuels.

Projet implantaire et information du patient

Après cette analyse, le praticien met en évidence les contre-indications initiales : niveau osseux insuffisant en hauteur ou en épaisseur, proximité sinusienne, aménagement parodontal nécessaire. Certaines peuvent être levées par des interventions d'aménagement pré-implantaires, d'autres non ou difficilement. Le praticien estime si le rapport bénéfice/risque est favorable au projet implantaire et en discute avec le patient.

Il lui remet un devis informatif (délai de réflexion de 2 semaines au minimum) afin qu'il connaisse le coût global estimé du traitement avant de s'engager.

Le clinicien doit également informer le patient de toutes les solutions thérapeutiques pouvant se substituer à la réhabilitation implanto-portée en expliquant clairement les avantages, les inconvénients et les indications de chacune d'elles.

Le praticien doit également informer son patient :

– des délais chirurgicaux et prothétiques ;

– des différentes étapes du traitement, notamment des solutions prothétiques de temporisation envisageables lors de la phase d'ostéo-intégration de l'implant (indispensable dans le secteur esthétique) ;

– des risques d'échec (tabac, obstacles anatomiques ou dentaires) ;

– de la conduite à tenir en préopératoire et postopératoire.

L'objectif de cette information est d'obtenir le consentement éclairé du patient pour la solution la plus satisfaisante.

Conclusion

La prise en charge implantaire trouve sa place dans un plan de traitement global. Une fois le patient en accord avec la proposition thérapeutique (signature du consentement), le praticien prescrit les examens complémentaires spécifiques (CBCT) pour une analyse précise des tissus osseux si cela n'a pas été indispensable auparavant. Il pourra alors réaliser son bilan pré-implantaire (prise en compte d'éventuelles difficultés révélées par l'imagerie, choix de la position et du type d'implant) et informer le patient de la planification exacte de son traitement.

Exemple clinique

Un patient de 64 ans, en bonne santé générale, consulte pour une remise en état de sa cavité buccale longtemps négligée. Cette situation clinique prouve que l'implantologie trouve toute sa place dans un plan de traitement global (fig. 13 à 17).

Un bilan long cône et une évaluation clinique des restaurations sont réalisés, ainsi que des moulages d'étude, indispensables pour évaluer les différents paramètres cliniques à modifier.

Au niveau maxillaire :

– de nombreuses coiffes prothétiques sont présentes, plus ou moins adaptées. Du fait des édentements mandibulaires non compensés, les courbes occlusales sont à revoir, ainsi que l'alignement des dents sur l'arcade ;

– sont absentes les 25, 26, 27 et la 28 est extraite en urgence. L'édentement n'est pas favorable à une restauration par prothèse amovible du fait de sa topographie et de sa faible étendue, la solution implantaire est la première étudiée ;

– en secteur 2, la hauteur d'os, appréciable sur la radiographie panoramique, est trop faible pour la mise en place d'un ou de plusieurs implants. Une élévation de sinus sera nécessaire (mais la voie d'accès ne pourra être définie que d'après le CBCT).

Au niveau mandibulaire :

– la 48, incluse, n'est pas un obstacle à la restauration prothétique ;

– l'édentement de classe 1, très classique, peut être traité par une prothèse composite ou par une prothèse fixée implanto-portée.

Dans ce cas, la première consultation permet de dégager différentes solutions prothétiques mais aussi la nécessité de phases d'assainissement et d'aménagement ostéo-muqueux et occlusaux préprothétiques. L'analyse occlusale sur articulateur, la réévaluation des différents soins endodontiques et coiffes existants ainsi que la stabilisation de la maladie parodontale définiront les séquences thérapeutiques et le plan de traitement global ; la prothèse guidera la position des implants avec nécessité de réaliser un wax-up puis un guide radiologique ou une procédure de chirurgie guidée.

Illustration clinique. Reconstitution corono-radiculaire et décision implantaire : analyse globale
M. Jacquemont

Une patiente de 35 ans, en bonne santé générale, n'est plus suivie depuis l'âge de 20 ans mais elle ne se plaint actuellement d'aucune douleur. Elle souhaite retrouver un sourire esthétique mais la prise en charge sera obligatoirement globale afin de restaurer le calage postérieur et d'assurer une répartition des contraintes occlusales.

Le bilan clinique révèle :

– sur le plan parodontal, la présence d'une gingivite d'origine bactérienne ;

– sur le plan dentaire :

• une maladie carieuse active avec un risque carieux individuel élevé,

• la présence de lésions carieuses primaires et secondaires avec réponse positive aux tests de sensibilité ;

– sur le plan ostéo-muqueux, une image radio-claire en regard de 12 (décision d'extraction du fait de l'importance de l'atteinte carieuse et de la faible longueur radiculaire) ;

– sur le plan fonctionnel :

• la perte du calage postérieur, l'absence de perte de dimension verticale,

• un édentement encastré au maxillaire (classe III division 1 de Kennedy-Applegate),

• un édentement bilatéral postérieur en extension (classe I de Kennedy-Applegate) ;

– sur le plan esthétique, une ligne du sourire basse ;

– sur le plan implantaire :

• une perte du volume osseux mandibulaire,

• une hauteur sous-sinusienne qui semble suffisante,

• un volume osseux vestibulaire réduit au maxillaire,

• une hauteur de gencive attachée minime avec des interférences freinales.

Des clichés photographiques (fig. 18 à 20) et un bilan rétroalvéolaire sont effectués (fig. 21).

La première phase du traitement consiste à stabiliser la maladie parodontale et carieuse. Par la suite, le calage postérieur sera rétabli avec les prothèses transitoires.

Inlay-core ou RMIPP ?

L'exemple pris concerne la reconstitution corono-radiculaire de la 23 (fig. 22 et 23).

Il est important d'analyser un ensemble de critères dans un contexte clinique :

– évaluation du tissu résiduel : perte de 3 parois après curetage et traitement endodontique, probablement perte de 4 parois après préparation périphérique ;

– étanchéité : la distance entre le joint dento-prothétique et le joint entre la dent et la reconstitution corono-radiculaire est inférieure à 2 mm (risque de perte d'étanchéité si collage) ;

– dent antérieure : si la canine fait partie du guidage antérieur, elle sera sujette à une plus grande déflexion qu'une dent bicuspidée ou plus postérieure ;

– anatomie radiculaire : elle permet ici un tenon d'une longueur suffisante pour ne pas avoir recours à une technique adhésive.

Cet ensemble de critères tend vers une reconstitution corono-radiculaire coulée type inlay-core.

Phase implantaire

Le traitement prothétique global doit guider la phase chirurgicale (fig. 24 et 25).

Il faut procéder à l'analyse du volume osseux et du parodonte.

À l'issue de la première consultation implantaire :

– le nombre d'implants est envisagé

– en ce qui concerne l'aménagement pré-implantaire :

• le bilan rétroalvéolaire renseigne sur la hauteur sous-sinusienne,

• l'aménagement osseux (en épaisseur) et parodontal semble nécessaire sur l'ensemble des sites ;

– extraction-implantation immédiate de la 12 ou avulsion-comblement puis, après délai de cicatrisation, pose de l'implant ;

– prédevis.

Il sera nécessaire de réaliser un montage directeur pour valider courbes occlusales et esthétique (ce montage pourra être utilisé en prothèse amovible partielle provisoire pour la temporisation).

Les logiciels de chirurgie guidée fusionnent le montage directeur et le CBCT, le praticien sélectionne et positionne les implants dans l'axe idéal. Par la suite, un guide chirurgical est réalisé.

Cette étape permet d'aborder au mieux la phase prothétique.

Lectures conseillées

Bartala M, Lastrade A. Les reconstitutions corono-radiculaires en 2016. Inf Dent 2016;15/16:20-27. Baudoin C, Bennani V. Un projet prothétique en implantologie. Paris : Quintessence international, 2003. Bert M, Missika P. Les clés du succès en implantologie. Rueil-Malmaison : CdP, 2009. Bolla M. Restaurer la dent dépulpée Paris : Espace ID, 2014. Davarpanah M. Les implants en odontologie : l'essentiel de la pratique. Malakoff : CdP, 2015. Descamps F, Étienne O. Inlay-core, une technique encore d'actualité. Cah Prothèse 2010;150:59-68. Dietschi D, Duc O, Krejci I, Sadan A. Biomechanical considerations for the restoration of endodontically treated teeth : a systematic review of the literature – Part 1. Composition and micro-and macrostructure alterations. Quintessence Int 2007;38 :733-743. Gaillard C. Restauration implanto-prothétique antérieure. Le projet prothétique, élément clé de la thérapeutique. Cah Prothèse 2016, no 175:8-16 Laplanche O, Leforestier E, Medioni E, Bolla M. Les reconstitutions corono-radiculaires : principes généraux et critères de décision. Strat Prothet 2008;8:255-268.

Liens d'intérêts

Les auteurs déclarent n'avoir aucun lien d'intérêts concernant cet article.

Auteurs

Cécilia Lai - Interne en médecine bucco-dentaire

Hôpitaux universitaires de Strasbourg

Mathilde Jacquemont - Interne en médecine bucco-dentaire

CHU de Bordeaux

Unité de médecine bucco-dentaire Xavier Arnozan

Odile Laviole - MCU-PH

UFR d'odontologie de Bordeaux

Unité de médecine bucco-dentaire Xavier Arnozan