Physiologie
La mastication est une des fonctions de la manducation qui s'inscrit dans le premier temps de la fonction, plus générale, de la digestion et, plus largement encore, dans celle de la nutrition.
Elle consiste, grâce aux dents et à des mouvements coordonnés des lèvres, des joues, de la langue et de la mandibule, à réduire l'aliment en un bol alimentaire pouvant être dégluti.
En dehors de considérations esthétiques, la mastication est probablement la fonction la plus...
Résumé
L'objectif de cet article est, au travers d'une revue de la littérature, de tenter d'apporter des éléments de réponse pour savoir s'il est possible d'améliorer l'efficacité masticatoire d'un patient présentant un édentement, et, si oui, comment.
Après une recherche sur PubMed/MEDLINE, 82 articles ont été obtenus puis, après lecture des titres et des résumés, 32 ont été retenus ainsi que 4 retrouvés par recherche manuelle, soit un total de 36 articles analysés.
Cette analyse montre que :
– l'édentement influencerait bien l'efficacité masticatoire, notamment en dessous de 10 couples de dents en occlusion ;
– l'édentement peut donc avoir un impact négatif sur la qualité de l'alimentation et, par corollaire, sur la nutrition et la santé générale ;
– le traitement « efficace » de l'édentement postérieur pour améliorer l'efficacité masticatoire serait de remplacer au moins les premières molaires ;
– le nombre de dents manquantes mais aussi l'asymétrie de l'édentement sont des facteurs significatifs influençant la demande de traitement prothétique ;
– la prothèse amovible apporterait l'amélioration de la mastication la plus faible alors que la plus grande amélioration serait favorisée par la prothèse fixée dento-portée ou implanto-portée ;
– l'importance de l'édentement et l'atteinte cognitive sont des facteurs qui interviennent dans l'altération de la qualité de vie orale ;
– le port d'une prothèse amovible partielle améliore l'efficacité masticatoire mais ne la restaure pas complètement ;
– par rapport à la prothèse amovible conventionnelle, l'efficacité masticatoire est nettement améliorée lorsqu'une thérapeutique implantaire est choisie ;
– l'association prothèse amovible partielle et implants est considérée par certains auteurs comme une solution peu onéreuse pouvant remplacer la prothèse fixée implanto-portée.
Ces éléments de réponse devraient permettre d'aider chaque praticien à résoudre les questions qu'il se pose face à un patient présentant un édentement, surtout lorsque celui-là se plaint d'une déficience de sa mastication.
La mastication est une des fonctions de la manducation qui s'inscrit dans le premier temps de la fonction, plus générale, de la digestion et, plus largement encore, dans celle de la nutrition.
Elle consiste, grâce aux dents et à des mouvements coordonnés des lèvres, des joues, de la langue et de la mandibule, à réduire l'aliment en un bol alimentaire pouvant être dégluti.
En dehors de considérations esthétiques, la mastication est probablement la fonction la plus perturbée par la perte des dents, dans le sens de la diminution de son rendement.
C'est donc en termes de réduction de l'efficacité masticatoire, liée à la notion d'édentement, qu'il est possible de poser le problème et d'envisager de le traiter.
Un édentement diminue-t-il vraiment l'efficacité masticatoire et est-il possible d'améliorer celle-ci chez un patient présentant un édentement ? Si oui, comment ?
C'est grâce à une revue de la littérature que nous nous proposons de répondre à ces questions ou de tenter d'apporter des éléments de réponse.
La recherche sur PubMed, qui s'inscrit dans le concept de médecine fondée sur la preuve, consiste à retrouver dans la littérature médicale les articles traitant d'un sujet particulier au moyen de mots clés (MeSH Terms) et de critères précis (date de parution, type de publication...).
Pour notre recherche, nous avons utilisé les mots clés MeSH correspondants aux mots français suivants : mastication et édentement (mastication [MeSH Terms] AND edentulous jaw [MeSH Terms]), force de morsure et mâchoire partiellement édentée (bite force [MeSH Terms] AND jaw, edentulous, partially [MeSH Terms]).
Nous avons exclu l'édenté complet NOT (Complete denture [MeSH Terms]) et limité notre recherche aux cinq dernières années et à l'espèce humaine (« last 5 years » [PDat] AND Humans [MeSH]) (tableau 1).
Les critères d'inclusion retenus étaient :
– les études cliniques ;
– les revues de la littérature.
Étaient considérés comme critères d'exclusion :
– l'édentement complet ;
– les rapports de cas ;
– les études pédagogiques, de développement de questionnaire, de mise en charge implantaire, sur les mini-implants, sur la mastication sans édentement, biologiques et épidémiologiques.
Une recherche manuelle dans les revues anglophones a également été réalisée et, après lecture des titres et des résumés, 4 articles supplémentaires ont été retenus, ce qui porte le total des articles analysés à 36.
Existe-t-il une relation entre la diminution du nombre de dents et celle de l'efficacité masticatoire ?
A priori, le rendement de la mastication pourrait être en rapport avec le nombre de dents présentes sur les arcades.
En effet, il est généralement admis que les sujets édentés ont une activité masticatoire moins efficace que les autres, montrant qu'il existe bien une relation entre la diminution du nombre d'unités occlusales et celle de l'efficacité masticatoire [1].
De même, les études d'Ikebe et al. [2, 3] montrent bien que, chez la personne âgée, la diminution du nombre de dents (notamment avec l'absence bilatérale des dents cuspidées) et la baisse de la force de morsure et du flux salivaire sont en rapport avec une réduction des performances masticatoires.
De même, Moriya et al. [4] constatent que la perte d'une occlusion postérieure est significativement reliée à une diminution de la capacité masticatoire et ils concluent que celle-ci est donc influencée par l'état dentaire et parodontal.
L'étude de Fueki et al. [5], qui s'intéresse aux arcades courtes (absence des molaires), constate aussi que plus l'édentement est important, plus les particules du bol alimentaire sont volumineuses.
Ces publications montrent donc que la diminution de la surface occlusale et la réduction de la force de morsure qui en résulte agissent négativement sur la préparation du bol alimentaire.
Enfin, pour Zhang et al. [6], il existe bien une forte corrélation entre l'efficacité masticatoire et l'état dentaire. Ils relèvent même que la présence d'au moins 10 dents au maxillaire et 10 dents à la mandibule est de la plus haute importance.
Dans une autre étude, Zhang et al. [7] proposent d'ailleurs une méthode permettant de classer les patients dans des catégories « fonctionnelles » selon l'importance de leur édentement et du remplacement ou non de leurs dents (cf. infra, « Influence de la prothèse »).
Cette classification peut aider les praticiens à traiter les personnes âgées, notamment en institution, en déterminant le besoin de traitement et en évaluant la mastication possible pour chaque patient.
Seuls Kreulen et al. [8], dont l'étude porte aussi sur les arcades courtes, trouvent que le remplacement des molaires uniquement pour optimiser la mastication n'est pas conseillé. Malgré tout, leur travail montre que ces sujets ont besoin de nettement plus de cycles mais aussi de davantage de temps de mastication avant la déglutition que les sujets à denture complète.
Par ailleurs, il faut retenir qu'une arcade courte a des conséquences sur la pérennité des dents restantes, comme le montre l'étude par éléments finis de De Oliveira et al. [9].
Les résultats exprimés en termes de déplacements montrent que plus l'édentement est important, plus les contraintes sont élevées sur les dents restantes. C'est alors la dent terminale de l'arcade qui supporte le plus de contraintes. Lorsqu'il ne reste plus que les incisives et les canines, c'est l'ensemble des dents qui subit des contraintes considérablement plus élevées.
L'édentement influencerait donc bien l'efficacité masticatoire, notamment en dessous de 10 dents présentes à chaque arcade (10 couples de dents en occlusion).
La conséquence de l'inefficacité masticatoire se traduit-elle par une dénutrition avec des conséquences sur la santé générale ?
La publication de Mann et al. [10] montre bien un lien entre dénutrition et difficulté à mastiquer. Ces auteurs rappellent aussi qu'une nutrition optimale est essentielle pour maintenir une réponse immunitaire efficiente et une bonne santé générale, surtout chez la personne âgée.
Ce dérèglement nutritionnel est bien mis en évidence par les travaux de Sánchez-Ayala et al. [11], qui montrent que les personnes avec une efficience masticatoire faible voient leur masse grasse augmenter. Les mêmes résultats sont obtenus par De Marchi et al. [12], dans une étude chez les personnes âgées avec un édentement important qui affichent un pourcentage élevé et préoccupant de masse grasse. Les auteurs insistent alors sur l'importance de la prise en charge nutritionnelle de ces patients.
Kshetrimayum et al. [13] trouvent aussi que le déficit nutritionnel des personnes âgées est en rapport avec la qualité de la santé orale et, comme les auteurs précédents, ils insistent sur les liens existant entre dentisterie au sens large et nutrition pour la promotion de la santé des personnes âgées.
L'étude de Iwasaki et al. [14], qui a pour objectif de comparer l'état dentaire et la variété alimentaire de la personne âgée, montre que, pour les hommes, il n'y a pas de relation nette entre ces deux facteurs mais que cette relation existe bien pour les femmes. C'est également ce que montre une autre étude de De Marchi et al. [15], qui s'intéresse à la consommation de légumes et de fruits en fonction de l'édentement. Ses auteurs montrent combien il est important de rétablir cette consommation pour prévenir l'apparition de maladies chroniques.
Parallèlement à cela, Carretero et al. [16] ont mis en évidence la relation qui existe entre les troubles digestifs fonctionnels et l'inefficacité masticatoire.
L'édentement aurait même une incidence sur l'activité cérébrale : une étude récente de Shoi et al. [17] porte sur la relation entre l'activité cérébrale et l'absence des molaires (arcade courte) remplacées ou non par une prothèse amovible. L'activité cérébrale est mesurée par imagerie par résonance magnétique. Les résultats suggèrent que les arcades courtes affectent l'activité cérébrale dans l'aire frontale moyenne durant la mastication et que la diminution de cette activation peut être associée à la réduction de l'efficacité masticatoire.
Pour aller dans le même sens, la récente revue de littérature réalisée par Teixeira et al. [18] rappelle que plusieurs études ont démontré que la mastication aidait au maintien des fonctions cognitives, notamment dans des régions cérébrales incluant l'hippocampe, une région essentielle du système nerveux central pour la mémoire et l'apprentissage. Elle montre qu'il existe bien une corrélation positive entre le déficit masticatoire et les déficits cognitifs et que plusieurs mécanismes peuvent être impliqués dans cette association sans que, pour autant, ceux-ci soient encore bien connus.
L'édentement peut donc avoir un impact négatif sur la qualité de l'alimentation et, par corollaire, sur la nutrition et la santé générale.
Faut-il remplacer toutes les dents manquantes ? Les arcades courtes permettent-elles une mastication suffisante ?
L'étude d'Arce-Tumbay et al. [19]), qui compare des patients aux « arcades courtes » (absence des molaires) avec et sans traitement par prothèses amovibles, montre que si la prothèse amovible améliore les performances et diminue la durée de la mastication, elle ne permet pas de retrouver l'efficacité masticatoire de sujets dentés.
Celle d'Ikebe et al. [20] est encore plus catégorique car elle conclut que l'abstention est l'option la moins satisfaisante alors que les traitements par une prothèse fixée ou partielle amovible à châssis métallique sont les plus recherchés par les patients. Elle précise aussi que les facteurs de choix sont très variés (par exemple, en fonction du coût, du sexe, de l'âge et de l'esthétique). Le principal biais de cette étude est que l'évaluation est faite par le patient au moyen d'un questionnaire et d'une échelle analogique.
Une autre étude considère que la force de morsure maximale est un critère objectif révélateur de l'efficacité masticatoire. Al-Omiri et al. [21] comparent cette force de morsure chez des patients présentant un côté denté et un côté restauré par des prothèses implanto-portées. Ils remarquent d'abord qu'elle est le plus élevée chez les hommes et notamment pour les individus les plus lourds et les plus grands. Ils relèvent surtout que cette force de morsure maximale du côté denté est très légèrement (3 %) mais significativement plus importante que celle du côté implanté.
De la même façon, Meena et al. [22] s'intéressent à l'action de la prothèse implanto-portée sur la force de morsure, mais aussi à l'efficacité masticatoire des patients à arcade courte. Chez leurs patients, édentés molaires, ils ne remplacent que la première molaire et ils constatent qu'au bout de 3 mois, la force de morsure et l'efficacité masticatoire sont redevenues comparables à celles de sujets dentés.
Enfin, lorsque les patients à arcade courte sont traités par prothèse implanto-portée, leur surface occlusale de mastication évolue-t-elle ?
C'est à cette question que Goto et al. [23] essayent de répondre. Ils constatent que la localisation principale de cette surface occlusale de mastication se situe au niveau de la première molaire chez le sujet denté et que cette localisation se déplace de la région prémolaire à la région de la première molaire après un traitement prothétique implanto-porté. Cela est confirmé par l'étude de Tanigawa et al. [24] comparant ce traitement par prothèse implantaire fixée avec une thérapeutique par prothèse amovible partielle : ces auteurs montrent que la surface occlusale de mastication est plus postérieure chez les patients avec prothèses implanto-portées que chez ceux traités par prothèse amovible.
Le traitement « efficace » de l'édentement postérieur pour améliorer l'efficacité masticatoire serait de remplacer au moins les premières molaires.
Quel est l'apport des différents types de prothèses ?
La publication de Fueki et al. [25] s'est intéressée à certains critères pour le choix de différentes options prothétiques chez des patients présentant de 2 à 12 couples de dents antagonistes manquantes. Plus de la moitié des patients ont choisi un traitement par prothèse amovible ou prothèse implanto-portée plutôt que l'abstention. Seuls 3 % des patients avec absence unique des secondes molaires ont souhaité bénéficier de la confection d'une prothèse. Ce pourcentage est monté à 58 % pour l'absence associée des premières et secondes molaires, et à 93 % si l'absence des prémolaires s'ajoutait.
Le nombre de dents manquantes mais aussi l'asymétrie de l'édentement sont des facteurs significatifs influençant la demande de traitement prothétique.
Beaucoup d'autres études font appel à la notion d'évaluation par le patient (autoévaluation), notamment pour décrire la qualité de vie orale.
Fueki et al. [26] utilisent cette autoévaluation pour apprécier la relation entre la mastication et la qualité de vie orale chez des patients porteurs de prothèses amovibles partielles. Par le questionnaire de la qualité de vie orale, ils ont fait apparaître une signification moyenne de la perception de la capacité masticatoire et une signification faible de l'efficacité masticatoire, concluant que l'analyse de la capacité masticatoire par ce questionnaire était critiquable et qu'il était préférable de s'intéresser à l'efficacité masticatoire proprement dite.
L'étude de Swelem et al. [27] porte sur la qualité de vie orale de patients partiellement édentés et traités indifféremment par prothèses amovibles, fixes, mixtes ou implanto-portées. Tous les traitements quels qu'ils soient ont provoqué une amélioration de la qualité de vie des patients.
La prothèse amovible apporterait l'amélioration de la mastication la plus faible alors que la plus grande amélioration serait favorisée par la prothèse fixée dento-portée ou implanto-portée.
Cependant, il faut noter que l'impact de chaque option varie en fonction de l'âge du patient et du type d'édentement mais aussi de l'importance de la restauration occlusale.
Le travail de Sánchez-Ayala et al. [28] relatif au traitement des édentements postérieurs mandibulaires par prothèse amovible partielle montre logiquement que le remplacement de l'ensemble des dents est le traitement le plus efficace (même si, après un temps d'adaptation, il est possible d'obtenir une capacité masticatoire correcte avec une occlusion limitée aux prémolaires).
Comme l'a démontré l'étude de Zuluaga et al. [29], le problème de l'évaluation par questionnaire sur la qualité de vie réside dans l'état cognitif du patient, particulièrement chez ceux ayant une atteinte cognitive modérée, montrant une baisse des facultés liée au vieillissement, avec possibles altérations neurodégénératives diverses. Dans ces cas, ces patients rapportent une meilleure qualité de vie orale que les autres alors que leur état dentaire est moins bon. Les auteurs admettent cependant qu'il y a bien corrélation entre la santé orale, la diminution cognitive et la qualité de vie orale.
Il peut être avancé que l'importance de l'édentement et l'atteinte cognitive sont des facteurs qui interviennent dans l'altération de la qualité de vie orale.
Comme cela a été envisagé précédemment, le traitement par prothèse amovible partielle apparaît le moins satisfaisant mais il reste pourtant largement prescrit.
L'étude de Yamazaki et al. [30] a confirmé d'ailleurs cette moindre satisfaction en montrant que le taux de survie des dents restantes était plus élevé lorsque les édentements étaient compensés par des prothèses implanto-portées (40 %) que lors qu'ils l'étaient avec des prothèses amovibles partielles (24,4 %). En revanche, ses auteurs n'ont pas trouvé de différence de taux de survie entre les dents adjacentes et les dents antagonistes. Ils ont suggéré cependant que les traitements implantaires avaient une influence pour réduire la perte des dents restantes dans les cas d'édentement important.
Dans le même contexte, Bessadet et al. [31] ont cherché à estimer l'impact réel de la prothèse amovible partielle sur l'activité masticatoire, en évitant tout a priori négatif et en se situant sur un plan plus objectif.
Les études ont conclu que le port d'une prothèse amovible partielle améliore l'efficacité masticatoire mais ne la restaure pas complètement.
Pour augmenter les performances des prothèses amovibles, il a été proposé d'utiliser depuis quelques années des implants en complément de rétention.
Gonçalves et al. [32, 33] ont publié deux études pour évaluer l'efficacité masticatoire de patients édentés partiels en comparant les traitements par prothèse amovible conventionnelle, par prothèse amovible implanto-retenue et par prothèse fixée implanto-portée. La première étude s'intéressait à la mesure de la force de morsure par imagerie ultrasonique, tandis que la seconde portait sur l'analyse d'un questionnaire et d'une échelle analogique associés de façon plus objective à un kinésiographe.
Par rapport à la prothèse amovible conventionnelle, l'efficacité masticatoire est nettement améliorée lorsqu'une thérapeutique implantaire est choisie (prothèse amovible implanto-retenue ou prosthèse fixe implanto-portée).
De Freitas et al. [34] explorent la solution de la prothèse partielle implanto-retenue pour des édentements terminaux en réalisant une revue de la littérature. Celle-ci révèle un taux élevé de succès implantaire et une bonne satisfaction des patients même si quelques complications prothétiques ont été rapportées.
Pour ce type de prothèse, ne sont pas encore clairement définis la position idéale des implants ni le succès à long terme.
L'association prothèse amovible partielle et implants est considérée par certains auteurs comme une solution de remplacement peu onéreuse de la prothèse fixée implanto-portée. Toutefois, il n'existe aucune preuve de succès à long terme.
Nissan et al. [35] ont cherché à déterminer quel est le côté préférentiel de mastication pour savoir s'il est affecté par la réalisation d'une prothèse implanto-portée. Ils ont constaté une prédominance du côté droit (environ 80 %) qui ne semblait pas être affectée par l'édentement ni par le traitement prothétique implanto-porté. Ces auteurs ont cependant proposé que la détermination du côté préférentiel de mastication soit un élément de l'analyse préopératoire pour établir un meilleur plan de traitement.
Enfin, Zhang et al. [8] ont mis au point et validé, grâce à l'essai clinique de Nguyen et al. [36], un système de classification (tableau 2) en 5 niveaux reflétant l'état fonctionnel oral qui prend en compte le nombre de dents, leur localisation et le nombre de paires postérieures en occlusion.
Ils ont aussi élaboré des indicateurs pour mesurer l'efficacité du traitement prothétique en termes de valeur ajoutée du statut dentaire fonctionnel initial :
– la valeur 1 pour une promotion à la catégorie « région molaire satisfaisante » ;
– la valeur 2 pour une promotion à la catégorie « région prémolaire satisfaisante » ;
– la valeur 3 pour une promotion à la catégorie « région antérieure complète » ;
– la valeur 4 pour une promotion à la catégorie « au moins 10 dents pour chaque arcade ».
Pour faire accéder les patients à un niveau supérieur, les valeurs sont ajoutées : de 1 à 10 pour une restauration complète.
Ils proposent finalement une notion de « promotion » par le remplacement prothétique (≥ 10 dents par arcade) permettant d'apprécier l'intérêt d'un traitement prothétique pour promouvoir l'efficacité masticatoire d'un cas considéré.
La « promotion » consiste donc à faire passer le patient d'un niveau à un autre par le « remplacement » partiel ou total des dents absentes (fig. 1).
Ces auteurs constatent que la prothèse amovible est plus fréquente lorsque le nombre de dents à remplacer est élevé alors que la prothèse fixée est plus efficace pour chaque dent ajoutée et que la valeur moyenne de la promotion par dent ajoutée est plus élevée par prothèse fixée que par prothèse amovible.
Ils prétendent que ce système est capable de quantifier l'efficacité du traitement prothétique remplaçant les dents.
Il nous semble que, s'il permet bien d'évaluer la promotion de l'état dentaire du patient – c'est-à-dire le passage à un niveau supérieur – il ne permet cependant pas d'évaluer réellement l'amélioration de l'efficacité masticatoire due à cette promotion.
Nous n'avons pas retenu, dans cette revue de la littérature médicale, les traitements proposés pour améliorer l'efficacité masticatoire des édentés complets car ils constituent, à eux seuls, le sujet de nombreuses publications.
Nous n'avons pas pris en compte, non plus, des éléments tels que les notions de maintenance prothétique et d'hygiène bucco-dentaire et prothétique car si ces facteurs sont évidemment des déterminants importants des choix thérapeutiques et de leur pronostic, ils font déjà l'objet de multiples études.
Nous avons essayé de dégager de ces lectures des éléments de réponse aux questions que chaque praticien se pose face à un patient présentant un édentement, surtout lorsque celui-là se plaint d'une déficience de mastication.
Nous conclurons en disant que :
– ne pas compenser un édentement important, c'est favoriser son développement et amener à l'édentement complet ;
– la thérapeutique prothétique est bien un moyen d'améliorer l'efficacité masticatoire d'un patient présentant un édentement.
Les auteurs déclarent n'avoir aucun lien d'intérêts concernant cet article.
Michel Postaire - PU-PH discipline de prothèses
Université Paris Descartes
Adeline Boittin - AHU discipline de prothèses
Université Paris Descartes
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