Les cahiers de prothèse n° 165 du 01/03/2014

 

Prothèse composite

Omar Iraqui*   Salwa Berrada**   Faiza Benfdil***   Nadia Merzouk****  


*professeur assistant au Service de
prothèse adjointe du CCTD
Rabat
**professeur de l’enseignement supérieur au Service de
prothèse adjointe du CCTD Rabat
***professeur agrégé au Service de prothèse adjointe du CCTD Rabat
****chef de département et
professeur de l’enseignement supérieur au Service
de prothèse adjointe du CCTD Rabat
*****Faculté de médecine dentaire
avenue Allal-Al-Fassi
rue Mohammed-Jazouli
BP 6212 Rabat-Instituts
Maroc

Résumé

La prothèse composite trouve souvent son indication dans la restauration des édentements partiels. En associant prothèses fixée et amovible, la gestion occlusale et l’aspect esthétique des restaurations sont optimisés. Cependant, cette prothèse a souvent la réputation d’être difficile à réaliser et son issue d’être incertaine. Le recours à un montage directeur polymérisé facilite le traitement par prothèse composite en réduisant le nombre de séances cliniques ainsi que les risques d’erreur. Le montage directeur polymérisé est la réplique de la prothèse amovible provisoire du patient en matériau rigide. Il représente le fil directeur qui guide la restauration prothétique, de l’élaboration du projet prothétique et du plan de traitement jusqu’à leur concrétisation en bouche à travers les prothèses fixée et amovible. Cet article se propose de présenter l’intérêt du montage directeur polymérisé dans la restauration occlusale par prothèse composite.

Summary

Polymerized guiding assembly of removable partial dentures: The protocol use, benefits and limitations.

The removable partial dentures (RDP) usually is indicated in oral constructions with partially edentulous ridges and remaining teeth. Combining fixed and removable partial prosthesis, occlusal management and aesthetics appearence are optimized. However, this aid often has the reputation of being difficult with an uncertain outcome. The use of a polymerized guiding assembly, makes prosthetic treatment with RDPs easier by reducing the number of clinical sessions and the risk of error. The polymerised guidind assembly is a replica of the patient’s provisional denture, realized in a rigid material. It is the principal piece that guides the prosthetic rehabilitation, during the development of the prosthetic project and the elaboration of the treatment plan, until the achievement of the removable and fixed partial dentures and their insertion. This article discusses the interest of the polymerized guiding assembly in occlusal rehabilitation by removable partial dentures.

Key words

polymerized guiding assembly, removable partial denture, diagnosis cast

La perte non compensée des organes dentaires provoque des désordres qui perturbent la répartition et l’orientation des contraintes au sein du système manducateur, altèrent la liberté des déplacements mandibulaires et compromettent ainsi la santé et les fonctions du système manducateur [1]. La restauration de ces édentements fait souvent appel à la prothèse composite qui, en associant prothèses fixée et amovible, permet de concilier principes biomécaniques et exigences occlusales. Cependant, ce type de prothèse a souvent la réputation d’être complexe. La réussite nécessite une vision globale multidisciplinaire associée à une synchronisation précise des multiples actes cliniques et de laboratoire.

L’optimisation du traitement par prothèse composite et la réduction de sa complexité imposent le recours à des outils de communication spécifiques entre clinique et laboratoire comme la mise en œuvre d’un montage directeur polymérisé (MDP) [2].

Le MDP est la prothèse amovible provisoire du patient ou sa réplique en résine, cette dernière ayant le mérite d’aborder le traitement sans jamais priver le patient de sa prothèse. Utilisé alternativement en clinique et au laboratoire, le MDP participe à de nombreuses étapes de la réalisation prothétique :

– il guide les aménagements occlusaux préprothétiques selon un concept occluso-prothétique prédéterminé.

– il fixe et transfère le rapport mandibulo-maxillaire (RMM) durant les différentes phases de traitement et permet la réalisation d’empreintes secondaires anatomo-fonctionnelles en tenant compte de la dualité tissulaire [2].

Cet article présente, à travers un cas clinique, l’apport du montage directeur polymérisé dans la gestion d’une restauration prothétique par prothèse composite.

Illustration clinique

Un patient en bonne santé a été adressé par le service de parodontologie pour une restauration prothétique. Après stabilisation d’une parodontite chronique modérée, il souhaitait améliorer sa fonction masticatrice et l’esthétique de son sourire.

Un abord du cas, étape par étape, a suivi une approche logique et systématique faisant appel à une phase d’évaluation, d’élaboration puis de concrétisation.

Phase d’évaluation et de décision

La collecte des informations a permis d’établir un diagnostic, des objectifs de traitement et, après accord donné par le patient, un plan de traitement.

L’examen exobuccal a révélé une dimension verticale d’occlusion (DVO) correcte sans aucune pathologie musculaire ni articulaire. La ligne interincisive était centrée et l’exposition des dents à l’état de repos était de 0,5 mm.

L’hygiène du patient était favorable. Il présentait des édentements de classe I de Kennedy bimaxillaire (fig. 1 et ). Des abrasions dentaires généralisées étaient associées à une mobilité de degré 1 sur la 11 et de degré 3 sur les 32, 31, 41 et 42. Ces dernières étaient également le siège de récessions de degré 2. La fibromuqueuse recouvrant les crêtes était ferme, adhérente au plan profond et ne présentait pas de pathologie.

L’examen de l’occlusion a révélé un calage postérieur déficient, un bout à bout incisif et une protection canine droite et gauche.

L’examen de la radiographie panoramique a montré une lyse avancée au niveau des incisives mandibulaires associée à une couronne pathogène sur 45. La lyse touchant les dents restantes était horizontale et modérée (fig. 2).

Les objectifs thérapeutiques étaient les suivants :

– préserver la santé du parodonte ;

– rétablir le calage postérieur ;

– restaurer un guide antérieur fonctionnel et protecteur ;

– améliorer l’esthétique du sourire et éliminer le diastème antérieur.

Trois propositions thérapeutiques ont été faites :

– la première, qui comprenait des prothèses fixées implanto-portées postérieures associées à des restaurations fixées antérieures de contention des dents naturelles au maxillaire et de remplacement des dents cuspidées à la mandibule, était la solution de choix, la nécessité d’y associer un traitement orthodontique préprothétique (fermeture du diastème antérieur) pouvant se décider au moment de l’évaluation esthétique de la simulation en cire ;

– la deuxième proposition comportait une prothèse composite maxillaire et mandibulaire associant prothèses fixées antérieures et prothèses amovibles partielles métalliques (PAPM) postérieures, la proposition maxillaire faisant appel à des attachements de précision ;

– la troisième proposition incluait traitement orthodontique préprothétique, contention des dents maxillaires par fibres de verre et PAPM maxillaires et mandibulaires.

Les propositions implantaires et conventionnelles par PAPM ont été écartées par le patient pour des raisons respectivement financières et esthétiques. Le choix thérapeutique s’est donc arrêté sur :

– un bridge antérieur maxillaire de contention fraisé avec attachement et PAPM ;

– un bridge fraisé de 44 à 33 après extraction de 31, 32, 41 et 42, et PAPM mandibulaire associée à une prothèse amovible supra-implantaire sur 45.

Séquences de concrétisation du projet prothétique

« Lors du traitement des problèmes occlusaux, les phases prothétiques ne doivent pas être envisagées tant que le résultat final n’a pas été visualisé [3]. »

L’élaboration de moulages de diagnostic a permis de concrétiser le projet prothétique d’un point de vue esthétique et fonctionnel, en constituant un outil de communication indispensable à la triade praticien-prothésiste-patient et en permettant d’éviter toute controverse sur ce que doit être le résultat final. Cette étape a permis l’élaboration des prothèses provisoires, véritable test clinique du projet prothétique. Dans cet objectif, plusieurs prérequis ont été nécessaires :

– la qualité des moulages de travail a constitué un préalable indispensable à la réussite du traitement en déterminant la précision et la fiabilité de la simulation [4]. La santé des structures d’appui ostéo-fibro-muqueuses a autorisé une empreinte secondaire composée globale. La dualité tissulaire imposée par l’édentation terminale a pu ainsi être maîtrisée et ses effets sur les stabilités prothétique et occlusale anticipés [5]. En effet, ce type d’empreinte garantit à la fois la reproductibilité des rapports occlusaux établis sur articulateur, la précision du transfert du RMM emporté par le MDP durant les différentes phases de traitement et la stabilité des prothèses amovibles sur leur surface d’appui [6, 7] ;

– le choix du simulateur. Les moulages de travail ont été transférés sur un articulateur semi-adaptable Quick Master B2 en s’aidant de son arc facial. Le guidage antérieur assuré par les dents naturelles et les enregistrements du rapport intermaxillaire réalisés à la DVO correcte ont autorisé ce choix de simulateur ;

– le schéma occlusal. La valeur fonctionnelle de la simulation dépend du schéma occlusal adopté et s’appuie sur l’analyse des données recueillies lors de l’examen du patient [8]. Pour ce cas clinique, le capital osseux réduit des dents résiduelles a imposé une réduction de la valeur du guidage pour la réduction de la composante horizontale des forces, associée à une fonction antéro-latérale pour une répartition des charges sur un plus grand nombre de dents [9, 10]. Parallèlement, le respect du principe de désocclusion postérieure minimale (levier de troisième genre) a imposé d’atténuer la valeur des courbes de compensation (Spee et Wilson) et a indiqué la programmation des boîtiers condyliens sur articulateur : l’utilisation d’un Axioquick® a fourni une programmation plus précise (fig. 3) des boîtiers condyliens [11]. Ceux-ci ont été réglés comme suit : trajectoire condylienne = 40° ; angles de Bennett = 15°.

Le projet prothétique esthétique et occlusal a été matérialisé par des wax-up correspondant aux prothèses fixées et un montage directeur préfigurant la future prothèse amovible (fig. 4). La situation des dents postérieures sur le montage directeur a fixé des courbes occlusales en harmonie avec le principe de désocclusion postérieure minimale [4].

La validation du projet en cire par le patient a été suivie de l’élaboration des prothèses provisoires fixées et amovibles. La duplication de cette dernière par mise en moufle a permis d’obtenir le montage directeur polymérisé (fig. 5) [2]. Associé à d’autres outils de communication, il va garantir ainsi le respect du schéma occlusal désiré lors de l’élaboration des prothèses d’usage en intervenant dans quasiment toutes les étapes du traitement prothétique.

Phase de concrétisation

« L’établissement d’une occlusion physiologique chez des patients candidats aux restaurations complexes est généralement envisagé lors de la réalisation des prothèses provisoires, c’est-à-dire au stade de temporisation [12]. »

Durant une phase de temporisation, les prothèses provisoires permettent de tester en bouche le projet prothétique. Leur validation réciproque par le praticien et le patient légitime le passage aux prothèses d’usage. Le positionnement précis des prothèses provisoires fixées et amovibles sur leur surface d’appui doit préserver à l’identique leurs rapports réciproques établis sur articulateur (fig. 6).

La proposition a ainsi été affinée en bouche et harmonisée avec la physiologie masticatoire du patient durant une phase dite de « rodage » clinique. La validation fonctionnelle du projet associée à la qualité des prothèses provisoires permet de dissocier les restaurations d’usage maxillaire et mandibulaire, chacune pouvant être menée à bien en se référant au plan d’occlusion matérialisé et validé par les prothèses provisoires. La prothèse d’usage mandibulaire a été abordée avec, en premier lieu, la réalisation de la prothèse fixée suivie de celle de la prothèse amovible.

Réalisation de la prothèse fixée

La réalisation de la partie fixée est soumise aux exigences de conception de la PAPM et respecte le tracé prospectif du châssis ainsi que son axe d’insertion. Elle répond à une séquence opératoire bien codifiée.

Le protocole décrit ci-après est préconisé par plusieurs auteurs [2, 13] et permet simultanément la prise d’empreinte et l’enregistrement du RMM.

Séquences cliniques

Le contrôle du MDP en bouche a porté d’abord sur la précision de son adaptation et son innocuité par rapport à la surface d’appui ; toute douleur ou gêne se traduirait par des réflexes d’évitement générateurs d’un positionnement mandibulaire erroné [14]. La reproductibilité des rapports occlusaux préalablement testés et validés en bouche durant la phase de test a également été contrôlée par l’utilisation d’un papier marqueur.

L’enregistrement du RMM a été effectué par l’affrontement du MDP à l’arcade antagoniste, complété par un mordu en cire Moyco® surfacé au Temp-Bond® sur les préparations de 42-43, ce qui permet d’élargir l’aire de sustentation en évitant tout risque de bascule du moulage de travail mandibulaire lors du transfert sur articulateur (fig. 7 ).

L’empreinte secondaire des préparations en double mélange (deux viscosités en un seul temps) a entraîné le MDP (fig. 7 ). Pour un maximum de sécurité, de l’adhésif pour prothèse (Corega®) a permis une meilleure rétention du MDP sur sa surface d’appui. En effet, tout mouvement du MDP durant cette phase aurait induit une imprécision dans les rapports occlusaux difficilement rattrapable par le prothésiste.

La teinte de la céramique a été choisie en référence avec celle donnée par le teintier utilisé pour les prothèses amovibles.

Séquences de laboratoire (moulage de l’empreinte, transfert du RMM et réalisation de la prothèse fixée)

Le MDP solidaire du moulage complété par la cale en cire Moyco® (fig. 8) a permis le transfert du RMM sur articulateur (fig. 9) par simple affrontement à l’antagoniste [2, 4]. La mise de dépouille préalable à la cire de l’intrados du MDP a garanti sa désinsertion sans risque de fracture du moulage de travail.

Lors du montage de la céramique, le MDP a ainsi pu guider le prothésiste lors du positionnement des contacts occlusaux de la prothèse fixée en rapport avec la prothèse amovible [15].

Séquence clinique (essai du bridge)

Au stade du biscuit de céramique, le bridge a été contrôlé en bouche, MDP en place, pour une harmonisation des contacts occlusaux dans le cadre du schéma occlusal préalablement validé. L’harmonie des sculptures et la continuité de l’arcade ont ainsi été contrôlées (fig. 10 et ). Le glaçage et le maquillage de la céramique ont été réalisés ultérieurement.

Réalisation de la prothèse amovible

En prothèse composite, la restauration de l’édentement terminal par PAPM impose le recours à une empreinte anatomo-fonctionnelle [5, 16] qui, en présence de restaurations plurales fixées, a pour particularité d’entraîner celles-ci lors de la désinsertion [2], l’objectif étant d’obtenir un moulage de travail unique où sont parfaitement positionnés les éléments fixés pour une réalisation précise de la PAPM. Dans ce but, le MDP est transformé en porte-empreinte individuel fenêtré occluso-porté [17] pour effectuer simultanément l’enregistrement dynamique des structures d’appui en tenant compte de la dualité tissulaire et la fixation du rapport mandibulo-maxillaire testé par les prothèses provisoires.

Plusieurs étapes cliniques et de laboratoire ont été nécessaires.

Transformation du MDP au laboratoire

L’élaboration du porte-empreinte individuel fenêtré occluso-porté a imposé une modification antérieure par ajout de résine chémopolymérisante. Une bande en résine vestibulaire, distante des dents antérieures, a assuré le soutien d’un couvercle amovible en résine. Des chevrons en V ont favorisé un repositionnement précis de ce couvercle (fig. 11 et ).

Séquence clinique (contrôle clinique du MDP)

Le contrôle du MDP a suivi le protocole classique adopté lors de l’essai du porte-empreinte individuel [18, 19]. La situation des bords par rapport à la ligne de réflexion muqueuse et la qualité d’adaptation de l’intrados ont été contrôlées par un élastomère fluide (Xantopren®), ainsi que la passivité de l’insertion du porte-empreinte individuel et son espacement par rapport au bridge.

Empreinte secondaire

De type empreinte composée globale, l’empreinte secondaire s’est déroulée dans les mêmes conditions qu’en prothèse amovible complète classique [16, 20] et a entraîné la prothèse fixée.

Séquences cliniques

Préparation du porte-empreinte individuels

Le MDP a joué le rôle de porte empreinte individuel. Ayant été élaboré sur la base d’une empreinte secondaire, aucune adaptation de ses bords à la physiologie musculaire du patient n’a été nécessaire. Il a été enduit d’adhésif et, parallèlement, le bridge garni de Xantopren® L (Heraeus) a été mis en place (fig. 12). Cette précaution va préserver l’intégrité des moulages positifs unitaires tout en préfigurant l’espace réservé au ciment de scellement.

Surfaçage

Le choix du matériau de surfaçage s’est porté sur l’Impregum™ F (3M ESPE) en raison de son caractère hydrophile, de sa stabilité dimensionnelle et de sa rigidité après la prise. Ses propriétés thixotropiques en font un matériau idéal pour la réalisation des empreintes monophases [21].

De l’Impregum™ a été spatulé puis chargé dans une seringue à élastomère, il a été injecté sur les selles du porte-empreinte placé en occlusion et autour des prothèses fixées à travers la fenêtre du porte-empreinte. Enfin, le couvercle garni d’Impregum® spatulé a complété l’empreinte composée globale (fig. 13), le patient ayant été invité à réaliser des mouvements des joues, des lèvres et de la langue pour animer les structures périphériques [22].

Contrôle de l’empreinte

Après la prise, l’empreinte a été désinsérée et sa qualité contrôlée [22]. Elle a été coffrée puis moulée au plâtre extra-dur.

Au laboratoire

Après dépose du couvercle antérieur, le transfert du moulage mandibulaire sur articulateur a été réalisé par simple affrontement des moulages (fig. 14). Le MDP ne doit en aucun cas être désinséré à ce stade. La précision du RMM est ainsi garantie sans avoir recours à une quelconque maquette d’occlusion ni à toute autre séance supplémentaire.

Le MDP a ensuite été désinséré pour obtenir un moulage de travail avec les éléments fixés parfaitement positionnés (fig. 15 ).

La réalisation de la PAPM a adopté une conception rigide [15, 16]. Le montage des dents prothétiques a été réalisé classiquement, dents cuspidées situées dans l’aire de Pound (fig. 15 ) [23]. Un essai du montage au stade de cire, suivi du glaçage de la céramique, a précédé la polymérisation de la PAPM. Le scellement du bridge a été effectué PAPM en place en prenant soin de contrôler la position correcte simultanée des deux types de prothèses.

La réalisation des prothèses au maxillaire a suivi un protocole identique avec recours à un montage directeur polymérisé, adoptant comme références antagonistes l’arcade mandibulaire restaurée (fig. 16 et ).

Montage directeur polymérisé

Intérêts

Le montage directeur polymérisé intervient lors des différentes étapes du traitement prothétique :

– au stade de l’élaboration du projet prothétique, il guide le choix des systèmes d’attachement en fonction de leur encombrement, et ce, dès la phase de l’élaboration du projet prothétique. Au niveau de la dent prothétique englobant l’attachement, il matérialise la hauteur occlusale et le volume prothétique disponibles. Il permet ainsi de poser l’indication de l’aménagement de son espace par chirurgie, orthodontie… [24, 25] ;

– lors de la phase de concrétisation, il permet le transfert en bouche du schéma occlusal établi sur articulateur en dirigeant les corrections occlusales des dents antagonistes En effet, lorsque le montage directeur remplace les dents postérieures, il matérialise une position du plan d’occlusion, une hauteur cuspidienne et une orientation des courbes occlusales en harmonie avec le concept occluso-prothétique déterminé. Lorsqu’il comporte des dents antérieures, il permet de fixer les paramètres esthétiques incluant forme, dimension, positionnement de la ligne interincisive, bords libres et collets, ainsi que les valeurs fonctionnelles de guidage ;

– il fixe le RMM et le matérialise sur les moulages destinés à la réalisation des prothèses fixées ou amovibles, évitant ainsi tout nouvel enregistrement ;

– au moment de la réalisation de la partie fixée, et en association avec d’autres outils de communication, il guide la mise en place des attachements de précision lors de l’élaboration de la prothèse fixée.

Limites d’utilisation

L’utilisation du MDP peut, dans certains cas, se révéler fastidieuse :

– en cas d’édentement de courte portée avec perte de 1 ou 2 dents, le MDP offre une aire de stabilisation réduite engendrant une bascule des moulages lors de la fixation du RMM ;

– dans d’autres cas de forte résorption ou d’asymétrie de répartition des organes dentaires, l’instabilité de l’artifice en bouche peut compromettre toute perspective d’utilisation, notamment durant la phase de réalisation des prothèses fixées, et imposer une association à des techniques complémentaires.

Discussion

Le MDP guide la réalisation prothétique au cours des différentes étapes d’élaboration vers un résultat prédictible. En remplaçant les dents absentes, il fixe le schéma occlusal prothétique et, a priori, la valeur fonctionnelle de la proposition thérapeutique. La rigueur de son élaboration prend alors toute son importance. Elle doit se fonder sur l’analyse des informations recueillies lors de l’examen clinique et doit être précédée d’une simulation sur articulateur. La fiabilité de cette simulation conditionne la stabilité de l’artifice sur sa surface d’appui et respecte la dualité tissulaire. En cas d’appui mixte, et lorsque la qualité des structures d’appui le permet, le MDP est élaboré sur un moulage issu d’une empreinte secondaire. Il peut également être obtenu par duplication d’une prothèse amovible transitoire à l’issue d’une période de reconditionnement tissulaire.

Lors de la réalisation de la prothèse fixée, le MDP est entraîné dans l’empreinte pour transposer le RMM. Il est ensuite transformé en porte-empreinte fenêtré occluso-porté pour permettre à la fois de réaliser une empreinte globale emportant la prothèse fixée et de transférer le RMM.

Conclusion

L’utilisation du MDP pour les restaurations globales des arcades par prothèse composite permet une optimisation du traitement grâce à la réduction du nombre de séances ainsi que du nombre d’allers et retours entre clinique et laboratoire, tout en optimisant la précision et en diminuant les risques d’erreurs (tableau I).

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