Les cahiers de prothèse n° 152 du 01/12/2010

 

Prothèse amovible partielle

Sébastien Baixe*   Étienne Olivier**   Philippe Kress***   Corinne Taddei****  


*AHU-PH
**MCU-PH
***Gérant de laboratoire
****Laboratoire Flecher
3, place de Haguenau
67000 Strasbourg
*****PU-PH
******Faculté de chirurgie dentaire
Service de soins bucco-dentaires
UF de prothèses
Hôpital civil de Strasbourg
1, place de l’Hôpital
67000 Strasbourg

Résumé

En prothèse partielle amovible à châssis métallique, les techniques de laboratoire conventionnelles sont longues, technicien-dépendantes et onéreuses. L’élaboration des châssis bénéficie de nos jours des progrès de la CFAO, pour deux étapes essentielles : la duplication du maître moulage et la modélisation du châssis. Les autres étapes restent identiques à la méthode traditionnelle de conception de châssis. Ainsi, l’axe d’insertion principal du châssis étant déterminé, le maître moulage en plâtre est numérisé par un scanner optique, et le logiciel de CFAO permet la mise en dépouille du modèle virtuel. Le châssis est modélisé à l’écran avec un bras articulé à retour de forces. Enfin, l’imprimante 3D fabrique une maquette de châssis par apposition successive de fines couches de résine calcinable sur un support en cire. Cette maquette est nettoyée, puis traitée directement selon une procédure de cire perdue. Les étapes de finition, notamment le grattage et le polissage, restent similaires à une réalisation conventionnelle.

Summary

Use of CAD-CAM for partial removable prostheses

Conventional laboratory techniques are long, technician-dependent and expensive for removable partial denture metal framework prostheses. Today the development of the framework can benefit from the progress made in CAD-CAM for two essential stages : duplication of the master mold and modeling of the framework. The other stages remain the same as the traditional method for design of the framework. Once the principal insertion point for the framework has been determined, an optic scanner digitizes the plaster master mold and a virtual digitalized model is produced using CAD-CAM software. The frame is modeled on screen via a return in strength articulated arm. Finally, a 3D printer makes a mock-up model of the framework by affixing successive fine layers of calcinable resin onto a wax support. This mock-up is cleaned, and then treated directly via a procedure of wax casting. The finishing techniques, notably sanding and polishing remain similar to those used for the conventional method.

Key words

CAD-CAM, metallic framework, 3D impression, rapid prototype, removable partial prosthesis

La CFAO est apparue dans les années 1970 et a été introduite en odontologie par François Duret qui a participé au développement des premières empreintes optiques dès cette époque [1]. Mais ce n’est que ces 10 dernières années que la CFAO a connu un essor en prothèse, grâce aux performances informatiques permettant de modéliser à l’écran les éléments prothétiques [2]. Si les innovations et les publications sont bien étoffées et de plus en plus nombreuses en prothèse fixée, la CFAO demeure très peu développée en prothèse amovible partielle (PAP). En effet, plusieurs paramètres liés au châssis métallique ont limité son essor : volume et forme complexes à reproduire, matériau trop dur à usiner… Au début des années 2000, les ordinateurs n’étaient pas assez performants pour développer des logiciels de modélisation des châssis. Par ailleurs, le coût des machines de CFAO a freiné, et limite encore l’équipement des laboratoires de prothèse. En 2005, les premiers appareils faisant appel au prototypage rapide pour la réalisation de châssis métalliques sont apparus sur le marché [3-6].

Ce n’est qu’en 2006 que les premiers logiciels de CAO ont été ouverts avec la possibilité d’exporter un fichier issu d’un scanner 3D. Un prothésiste dentaire, David Négrel, a appliqué ces dernières avancées dans le développement d’un logiciel de CAO dédié au modelage virtuel du châssis métallique (Digistell). Ce logiciel est lié à un scanner qui numérise le moulage de travail, et à une machine-outil qui réalise une maquette de ce châssis (imprimante 3D ou machine à usiner) [7].

Le recours à la CFAO pour la réalisation d’un châssis métallique coulé ne modifie pas la planification du traitement prothétique. Le praticien conçoit le châssis correspondant au cas clinique, discute le tracé avec le laboratoire, puis assure les étapes cliniques de façon conventionnelle [8-13].

C’est au stade du maître moulage coulé en plâtre dur à partir d’une empreinte secondaire qu’il est possible d’opter pour une technique par CFAO pour élaborer la maquette du châssis en matériau calcinable. Les étapes suivantes sont traitées selon le procédé conventionnel de la cire perdue, de la mise en revêtement à la récupération du châssis. Les étapes finales de finition sont identiques.

La CFAO requiert un ensemble d’outils et de manipulations différents des procédés conventionnels de laboratoire. Ces changements concernent certaines étapes de l’élaboration des châssis métalliques, les autres restant identiques [14].

Le châssis métallique coulé : protocole par CFAO

Dispositifs de CFAO : la station et la machine-outil

La CFAO se déroule en trois grandes étapes successives : numérisation du moulage par un scanner, conception virtuelle du châssis sur un logiciel spécialisé pour la CAO, et réalisation de la maquette du châssis à l’aide d’une machine-outil pour la FAO. Le matériel présenté dans cet article est un exemple d’assemblage de machines. En effet, il existe différents modèles de scanners et de logiciels de CAO, ainsi que différentes machines de FAO permettant de concevoir les maquettes de châssis, chacune ayant ses spécificités.

La station CAO

La station de travail dédiée à la CAO est composée :

– d’un scanner ;

– d’un ordinateur de CAO ;

– d’un bras à retour de force ou spatule virtuelle.

Le scanner optique est relié à un ordinateur et possède une chambre dans laquelle la numérisation du maître moulage en plâtre est réalisée (fig. 1). À l’intérieur du compartiment se trouve une rotule destinée à recevoir une plaquette servant de support au maître modèle.

Sur l’ordinateur sont installés les logiciels pour le scanner, la CAO et la FAO. Le logiciel du scanner (3D Dental Scanner) enregistre la numérisation 3D du moulage de travail au format STL. Le logiciel de CAO (Digistell) permet d’importer ce fichier pour pouvoir modeler à l’écran un châssis sur le modèle 3D numérisé (fig. 2). Il provient d’un logiciel issu de l’industrie, plus lourd et plus général (FreeForm® Systems de SensAble Technologies©), que la société française Digilea™ a adapté à la prothèse amovible. Digilea™ (rachetée par C4W©) propose actuellement ce logiciel dans une deuxième version (Digistell V2) plus intuitive. Le logiciel de CAO enregistre le châssis virtuel terminé au format STL. Ce fichier est ensuite exporté vers le logiciel de FAO (InVision™ de 3D Systems®) qui permet le positionnement du châssis virtuel sur un plateau d’impression.

Le bras à retour de forces, appelé aussi spatule virtuelle, remplace la souris d’ordinateur pour la modélisation virtuelle du châssis. Cet outil est manipulé par le prothésiste ; il lui transmet les sensations tactiles comme s’il palpait le moulage en plâtre dur et le châssis à la pointe d’un crayon. Il peut ressentir les reliefs muqueux, les dents, les limites des coronoplasties… Cette spatule à retour de force est un outil beaucoup plus évolué qu’une souris, mais nécessite un réel apprentissage. Toutefois, la nouvelle version du logiciel (Digistell V2) s’utilise avec une simple souris d’ordinateur.

La machine-outil de FAO

Il existe différents types de machines-outils de FAO en prothèse amovible, toutes provenant de l’industrie. Certaines préconisent une technique d’usinage direct d’un bloc de cire calcinable ; d’autres utilisent des procédés issus de la stéréolithographie pour construire couche par couche des maquettes en matériaux calcinables. La machine-outil présentée dans cet article utilise un autre procédé faisant appel à l’impression 3D. Cette technique permet de fabriquer en trois dimensions des maquettes en matériau calcinable d’éléments prothétiques modélisés par CAO : armatures de ponts, couronnes unitaires… mais également des châssis de prothèse partielle amovible.

L’imprimante 3D, présentée dans cet article, dispose de deux têtes d’impression : la première délivrant une cire hydroxylée blanche, servant de support à la maquette du châssis, l’autre déposant de très faibles quantités d’une résine acrylique bleue. L’apposition de ces deux matériaux se fait couche par couche, jusqu’à la réalisation complète de la maquette et de son support. Après apposition de chaque couche, la résine est photopolymérisée et la cire est refroidie afin de pouvoir monter la couche suivante sur un matériau suffisamment dur. Chaque maquette terminée doit être débarrassée de son support avant de suivre un protocole de cire perdue pour obtenir un châssis métallique.

L’imprimante est pilotée par son propre logiciel de FAO (InVision™ de 3D® Systems) qui gère l’ensemble des paramètres d’impression, tel le positionnement des maquettes sur le plateau d’impression, le nombre de maquettes à fabriquer, et leur orientation.

Chronologie

Acquisition numérique du châssis

Le prothésiste doit positionner le maître moulage en plâtre dur sur la pâte à modeler (clay jaune), montée sur une plaquette de transfert (fig. 3 et 4). L’ensemble est positionné sur un paralléliseur, la plaquette s’y trouve verrouillée, puis l’axe d’insertion principal du châssis est recherché en mobilisant le moulage, tout en le laissant reposer sur la pâte. Quand l’axe est déterminé, la plaquette est déverrouillée et l’ensemble est repositionné dans la chambre du scanner sur une rotule qui s’emboîte avec la plaquette.

L’axe déterminé au paralléliseur est ainsi conservé (tableau I).

Tout d’abord, le scanner permet d’obtenir sur son logiciel une photographie du moulage de travail, destinée à délimiter la zone à scanner en trois dimensions. Cette zone du moulage en plâtre est ensuite scannographié pour obtenir un modèle virtuel en 3D. Ce dernier peut contenir des zones d’ombre qui n’ont pu être visualisées pendant la scannographie. Dans ce cas, une deuxième scannographie doit être réalisée dans un axe légèrement différent pour les visualiser, le logiciel réalisant lui-même les concordances entre les deux images. Ce modèle est enregistré en format STL. L’acquisition numérique du châssis prend 10 minutes en moyenne (tableau I).

Modélisation du châssis

Le fichier, importé dans le logiciel de CAO, permet d’obtenir un modèle virtuel selon la dépouille définie par l’axe d’insertion. Ce dernier peut s’orienter dans tous les sens sur l’écran de l’ordinateur pour examiner les moindres détails.

Il est important de comprendre que l’image virtuelle constituée de points a été transformée en un véritable modèle 3D, ayant une consistance perceptible par le prothésiste grâce au bras articulé à retour de forces.

À ce stade, les zones d’espacement étant délimitées, puis gaufrées (selles prothétiques, décharges, crochets) (fig. 5 et 6), la copie de ce modèle permet d’obtenir le modèle de duplication virtuel de travail.

Le prothésiste détermine les limites des différents éléments du châssis. Dans un premier temps, les appuis, crochets et potences sont tracés, puis les connecteurs primaires et secondaires sont ajoutés. Ce tracé est déterminé par une ligne continue, dessinée sur le modèle de travail virtuel (fig. 7 et 8).

Le logiciel permet de gaufrer chacun de ces éléments grâce à des outils enregistrés dans une banque de données (fig. 9). Puis, les différentes pièces du châssis sont reliées automatiquement les unes aux autres. La finition du châssis en construction sur le maître modèle s’effectue à l’aide d’autres outils du logiciel : lissage, épaississement ou rognage, déplacement, etc. (fig. 10). Des tiges de coulée virtuelles sont ajoutées à ce stade (fig. 11). Le châssis 3D est ensuite séparé du modèle de travail, et débarrassé des artéfacts de préparation (fig. 12).

Les selles du châssis sont extrudées à l’aide de calques. La taille, la position et la répartition des perforations de la selle peuvent être définies pour s’adapter à la situation. L’armature palatine est tamponnée pour donner l’aspect granité. La réalisation d’un châssis virtuel prend environ 20 minutes de travail (tableau I).

Impression 3D de la maquette du châssis

Le châssis finalisé est enregistré en fichier STL et exporté vers le logiciel de FAO. Ce dernier possède une fenêtre recueillant tous les éléments prothétiques virtuels qui seront à imprimer en résine calcinable : c’est le plateau d’impression virtuel. La machine imprime un seul plateau à la fois ; chaque plateau peut contenir jusqu’à environ 12 châssis (quantité variant en fonction de leur taille et de leur position dans l’espace).

L’étape d’impression, généralement réalisée la nuit, dure environ 10 heures (tableau I). Puis la maquette est décollée du plateau, et la cire de support est éliminée dans une étuve (fig. 13 et 14) ; elle est ensuite repositionnée sur le maître moulage pour valider l’adaptation.

Coulée et finition

La maquette est positionnée dans un cylindre dans lequel un revêtement réfractaire (phosphate) est coulé. Jusqu’à trois maquettes de châssis peuvent être placées dans un même cylindre. Les étapes suivantes (cire perdue et finition) sont identiques à un protocole conventionnel. Toutefois, la phase d’ébarbage et de polissage est plus rapide à réaliser, grâce à la précision de la maquette, par rapport à une technique conventionnelle (45 min au lieu de 60 min) (tableau I).

Présentation d’un cas clinique

Un patient, âgé de 50 ans, présentait un édentement total au maxillaire, compensé depuis plus de 2 ans par une prothèse complète amovible issue d’une ancienne prothèse partielle transformée. Son édentement de classe I de Kennedy à la mandibule depuis plus de 5 ans était non compensé (fig. 15). Le patient se plaignait du manque d’esthétique et de rétention de sa prothèse.

Le projet prothétique s’est orienté vers le renouvellement de sa prothèse complète maxillaire et la réalisation de deux couronnes céramo-métalliques fraisées sur 35 et 47, supportant une prothèse à châssis métallique (fig. 16 et 17), les thérapeutiques fixées plurales et implantaires ayant été écartées pour des raisons financières.

Au laboratoire, le maître moulage issu de l’empreinte secondaire a été posé sur une pâte à modeler (clay jaune), reposant sur la plaquette de positionnement ; son axe principal d’insertion est déterminé au paralléliseur, en tenant compte notamment de l’espace encastré entre 45 et 47 (fig. 16, 17, 18 et 19). À ce stade, le protocole de CFAO a pu débuter selon la chronologie décrite précédemment (fig. 20, 21, 22, 23, 24, 25, 26, 27, 28, 29, 30, 31, 32, 33, 34, 35 et 36), les dernières étapes étant similaires à celles de la technique conventionnelle (fig. 37, 38, 39, 40, 41, 42, 43, 44, 45, 46, 47, 48 et 49).

Discussion

L’utilisation de la CFAO pour réaliser des châssis métalliques entraîne des changements dans les manipulations classiques de laboratoire : certaines sont modifiées, d’autres sont supprimées ou créées.

Avantages

1. Économie de matériaux

La CFAO permet d’économiser du revêtement réfractaire, grâce à la suppression de la duplication classique du maître moulage, et à la possibilité de positionner jusqu’à trois maquettes de châssis, dans un cylindre au lieu d’une seule. De ce fait, la consommation globale de revêtement est divisée par trois. La duplication numérique permet également de s’affranchir de la cire à modeler, de la cire de dépouille, du gaz, et du silicone ou de l’hydrocolloïde réversible de duplication.

2. Réduction de matériaux néfastes

Une technique conventionnelle produit beaucoup de déchets, notamment les matériaux réfractaires qui contiennent du phosphate, néfaste pour l’environnement, ainsi que de la silice, nocive pour la santé. D’autres matériaux utilisés dans la technique conventionnelle sont dangereux lors de la manipulation (produits inflammables, explosifs ou corrosifs).

Enfin, la réduction de consommation de ces matériaux, apportée par la CFAO, a un impact écologique positif important dans la durée.

3. Rattrapage des échecs de fonderie

Il arrive que des cylindres se fracturent dans le four pendant le cycle de chauffe, ou que la coulée de l’alliage dans la fronde soit incomplète (raté de coulée). Dans la méthode conventionnelle, un tel échec oblige le prothésiste à reprendre les étapes à partir de la duplication du maître moulage. La CFAO permet de gérer plus facilement une telle situation : il suffit de réimprimer la maquette en résine et de reprendre le protocole de mise en cylindre. Moins d’étapes sont à recommencer, et moins de matériaux sont utilisés. Le retard est rattrapé plus facilement.

4. Confort au travail

La CFAO diminue la pénibilité du travail du prothésiste : moins de matériaux dangereux à manipuler, moins de matériaux lourds à porter, moins de déplacements et moins de stress. Toutefois, une bonne posture doit accompagner ces nouvelles méthodes de travail, afin d’éviter les pathologies dorsales.

D’une façon générale, le confort apporté par la CFAO (pénibilité, maîtrise des logiciels et machines-outils) n’est appréciable qu’après une longue phase d’apprentissage, variable selon le prothésiste de laboratoire, mais de l’ordre d’une année.

5. Risques d’erreurs diminués

Le processus de duplication du maître moulage génère des imprécisions liées aux variations dimensionnelles des matériaux. La suppression de cette étape diminue le risque d’un mauvais ajustage du châssis métallique. Par le même principe, la réduction du nombre de manipulations de laboratoire permettra de diminuer ce risque.

Les logiciels de CFAO sont de plus en plus intuitifs : ils mettent en évidence des paramètres pouvant interférer avec une réalisation correcte du châssis (contre-dépouilles en rouge sur le maître modèle virtuel…). Ces aides informatiques permettent de mieux maîtriser la réalisation du châssis et, par conséquent, de limiter le risque d’erreur.

6. Gain de précision

La qualité du format STL pour ce type de travaux, associée aux machines de CFAO, permet d’obtenir une maquette en résine d’une très haute précision. De ce fait, les temps de finition des châssis sont diminués.

7. Gain de temps

Par rapport aux techniques conventionnelles, l’application de la CFAO à la prothèse amovible apporte un gain important en temps de travail, et en temps morts (l’impression 3D est réalisée la nuit) :

– les étapes de duplication du moulage secondaire sont supprimées (espacement du moulage de travail, réalisation du moule, et coulée de la réplique réfractaire) ;

– les nombreux temps d’attente de prise des différents matériaux (revêtement, gel) lors de la duplication sont également diminués, voire supprimés ;

– les temps de modelage et de finition du châssis sont légèrement réduits.

Au total, le temps de travail est diminué d’environ 30 % (tableau I).

8. Délais de fabrication diminués

L’organisation globale du temps au laboratoire pour la réalisation de châssis métalliques coulés par CFAO permet de terminer un châssis 2 jours 1/2 après la coulée du maître moulage, au lieu de 4 jours en moyenne pour une technique conventionnelle. Ce gain de temps permet de livrer au praticien le châssis (montage des dents compris) d’une semaine à l’autre, avec davantage de souplesse.

9. Polyvalence des machines

L’investissement par un laboratoire dans une machine de CFAO est stratégique. En effet, certaines seront des systèmes fermés, ne travaillant qu’avec un seul type de scanner, qu’une seule machine à usiner ou qu’un seul fabricant.

L’intérêt des imprimantes 3D (type InVision™ 3D HR) est qu’elles sont ouvertes : différents modèles de scanners, via différents logiciels, peuvent lui transmettre les informations pour qu’elle réalise les maquettes en résine, le format de fichier transmis restant le STL. Cela permet au prothésiste de sélectionner la machine qui correspond le mieux à ses besoins, lorsqu’il s’équipe.

Par ailleurs, en cas de panne d’une machine, les fichiers STL peuvent être transférés, via Internet, dans un autre laboratoire possédant une machine-outil. Les laboratoires ne souhaitant pas s’équiper d’une imprimante 3D peuvent également sous-traiter les impressions.

La polyvalence de cette imprimante 3D s’exprime aussi à travers la diversité des éléments qu’elle peut prototyper, allant des maquettes de châssis aux armatures de prothèse fixée.

10. Simplicité d’utilisation

Certes, les logiciels de CAO nécessitent un apprentissage, mais ils sont de plus en plus faciles à utiliser, en particulier les imprimantes 3D : très peu de réglages à faire, souvent une simple mise sous tension de la machine.

11. Gestion du temps au laboratoire

Dans un procédé de fabrication de châssis conventionnel ou par CFAO, les différentes étapes sont constituées d’un temps de travail, pendant lequel le prothésiste intervient directement sur les étapes de réalisation du châssis, et de temps morts (prise du plâtre, du gel, du revêtement…) qui libèrent le prothésiste pour d’autres tâches. Ces deux procédés possèdent des étapes communes et des étapes qui leur sont propres. Parmi ces dernières, l’impression 3D. Cependant, cette étape particulièrement longue (8 à 10 heures) est un temps mort spécifique qui peut être programmé le soir, pour être effectué la nuit. D’autres protocoles de FAO, comme l’usinage des maquettes sur cire, sont plus courts et peuvent être intégrés de jour plus facilement.

Aussi, l’utilisation de la CFAO nécessite une gestion du temps différente d’un procédé conventionnel de réalisation de châssis métalliques. Même si les temps morts sont beaucoup plus longs par CFAO, ils sont concentrés sur l’impression 3D qui, étant réalisée la nuit, ne retarde pas la fabrication du châssis.

Inconvénients

1. Déformation de la maquette

Lors d’une technique conventionnelle, la maquette en cire est modelée sur un support dur (modèle réfractaire) et le revêtement que l’on rajoute dans le cylindre vient plaquer cette maquette contre cette réplique. Par opposition, lors de la mise en revêtement dans le cylindre de coulée d’une maquette en résine, les contraintes liées à l’expansion de prise du revêtement peuvent parfois la déformer : il n’existe pas de support rigide pour la stabiliser comme dans une méthode classique. La maîtrise de la technique permet de mieux faire face à ces déformations occasionnelles.

2. Coût d’acquisition des machines et des logiciels

Les différentes machines utilisées pour la CFAO représentent un investissement initial conséquent (80 000 à 200 000 € pour un système complet). À cet investissement, il faut inclure le coût de la mise en œuvre et de la formation du personnel.

3. Fragilité

Ces machines-outils utilisent des micro-mécanismes et de l’électronique particulièrement fragiles et sensibles qui peuvent tomber en panne. Elles nécessitent des contrats de maintenance particuliers pour éviter le blocage de la chaîne de production (immobilisation des machines), ou de doubler l’appareillage de production.

4. Maintenance et mises à jour

Ces machines-outils doivent être entretenues régulièrement. Leur maintenance, nécessaire, est onéreuse, les laboratoires n’étant pas formés à ce type de réparation, qui doit être assurée par le fabricant. Les différents logiciels ont aussi un coût de licence particulièrement élevé, et des mises à jour coûteuses sont indispensables.

Le tableau II résume ces avantages et ces inconvénients.

Conclusion

La CFAO trouve des applications en prothèse fixée depuis plus de 10 ans ; elle se développe à présent en prothèse amovible. Le perfectionnement des machines et la maîtrise de ces nouveaux procédés permettent de s’affranchir progressivement d’étapes de laboratoire fastidieuses. La CFAO est un outil qui bouleverse les habitudes de travail des laboratoires de prothèse, tout en apportant un grand nombre d’avantages. Les conséquences pour le cabinet dentaire se répercutent en termes de coût moindre et de délai de fabrication plus court, plus facile à respecter. L’évolution en prothèse amovible ira vraisemblablement, comme en prothèse fixée, vers un traitement d’empreintes optiques au fauteuil, mais aussi vers une fabrication directe de châssis par microfusion, peut-être à l’aide d’autres matériaux que les alliages de chrome-cobalt.

Remerciements à Xavier Jamet, étudiant en T1 et aux prothésistes Delphine Trompeter du laboratoire Flecher et Christian Klingler-Bui pour leur implication dans ce travail.

Bibliographie

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  • 8 Schittly J, Schittly E. Prothèse amovible partielle, clinique et laboratoire. Paris : Éditions CdP, collection JPIO, 2006.
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  • 10 Borel JC, Schittly J, Exbrayat J. Manuel de prothèse partielle amovible. Paris : Masson, 1994.
  • 11 Begin M. La prothèse partielle amovible – conception et tracés des châssis. Paris : Quintessence International, 2004.
  • 12 Santoni P. Maîtriser la prothèse amovible partielle. Paris : Éditions CdP, collection JPIO, 2004.
  • 13 Bien N. Conception et tracé des prothèses partielles amovibles. Paris : Éditions Prostho, 1996.
  • 14 Pourreyron L. Nouvelles techniques de mise en forme de céramiques pour CFAO. La Revue des Praticiens Hospitaliers Universitaires. Le Cercle Dentaire, Février 2008, n° 35.

Lexique

La conception et la fabrication assistées par ordinateur ou CFAO constituent une synthèse de la CAO (conception assistée par ordinateur) et de la FAO (fabrication assistée par ordinateur). La CAO permet de concevoir virtuellement une structure en la modélisant sur un ordinateur, via un logiciel spécialisé. Grâce à ce logiciel, les données informatiques correspondant à cette structure sont transmises à une machine-outil afin de la réaliser : c’est la FAO. Aujourd’hui, l’ordinateur intervient dans tout le cycle de production.

Extruder : action de faire passer un matériau à travers une filière afin de lui donner sa forme perforée définitive. En CFAO, l’extrusion permet d’obtenir les perforations de la selle prothétique virtuelle.

Gaufrer : action de donner un relief à un dessin. En CFAO, le gaufrage permet de donner un volume aux éléments du châssis tracés sur le modèle.

Tamponner : action de donner un relief de surface à une forme. En CFAO, le tamponnage sert à donner, par exemple, l’aspect granité de l’armature palatine d’un châssis maxillaire, ou la forme des selles prothétiques.

Usinage : technique de fabrication directe soustractive. Un bloc de matériau est fraisé dans la masse par les machines-outils afin d’obtenir un élément défini au préalable (armature de couronne ou onlay, par exemple).

Prototypage rapide : regroupement d’outils qui, agencés entre eux, permettent d’obtenir une étape intermédiaire du produit final. En prothèse amovible, l’association scanner, ordinateur, logiciel de CAO et machine de FAO permet d’obtenir une maquette d’un châssis dans un matériau calcinable. Cette maquette est obtenue soit par usinage, soit par une technique additive comme l’impression 3D.

Imprimante 3D : machine de FAO permettant de produire un objet réel, à partir d’un fichier de CAO représentant cet objet, en le découpant en tranches, puis en déposant ou en solidifiant de la matière, couche par couche, pour obtenir la pièce terminée (maquette d’armature de pont, de châssis métallique…).

Format STL : format de fichier informatique contenant les informations sur la géométrie de surface d’un objet en 3D. Lors de la numérisation du modèle, les machines de CFAO utilisent les fichiers STL, soit en les exploitant, soit en les convertissant dans un autre format.