Journal de Parodontologie & d'Implantation Orale_Hors Série n° 360 du 01/09/2018

 

PROTHÈSE

Catherine MILLET*   Laurent MORGON**   Jean-Pierre DUPREZ***  


*PU-PH, Odontologie prothétique
Université Lyon I
**Ancien MCU-PH,
Orthopédie dento-faciale
Université Lyon I
***MCU-PH, Odontologie pédiatrique
Université Lyon I

Une patiente de 10 ans, accompagnée de ses parents, s’est présentée en consultation pour des difficultés masticatoires et un sourire inesthétique lié à un émail coloré et d’aspect piqueté. L’examen clinique mettait en évidence un émail fin et rugueux. L’examen des rapports inter-arcades révélait une infraclusion antéro-latérale avec des contacts uniquement sur les dernières molaires, un déficit transversal maxillaire, une linguo-version des incisives supérieures et...


Une patiente de 10 ans, accompagnée de ses parents, s’est présentée en consultation pour des difficultés masticatoires et un sourire inesthétique lié à un émail coloré et d’aspect piqueté. L’examen clinique mettait en évidence un émail fin et rugueux. L’examen des rapports inter-arcades révélait une infraclusion antéro-latérale avec des contacts uniquement sur les dernières molaires, un déficit transversal maxillaire, une linguo-version des incisives supérieures et inférieures et un décalage des milieux inter-incisifs (fig. 1). Les données cliniques et radiographiques nous ont orientés vers un diagnostic d’amélogenèse imparfaite (AI) de type hypoplasique. L’obtention d’un résultat final satisfaisant et pérenne impliquait une collaboration orthodontico-chirurgicale pour traiter les dysmorphoses. Ainsi, la planification proposée consistait en un traitement orthodontique combiné à une chirurgie orthognatique après le pic de croissance suivi d’une restauration complète « tout céramique » pour stabiliser les résultats et améliorer la forme et la teinte des dents.

Phase initiale

Les premières séances ont consisté en l’adaptation de coiffes préformées sur les groupes incisivo-canins et prémolaires au fur et à mesure de leur évolution (fig. 2). Débutée à l’âge de 10 ans, cette phase s’est achevée 2 ans plus tard, après l’évolution des secondes molaires.

Phase transitoire orthodontico-chirurgicale

Une décompensation orthodontique pré-chirurgicale a été réalisée par la mise en place d’un appareillage multibague bimaxillaire à l’âge de 12 ans et demi. À 14 ans, la chirurgie orthognatique a consisté en une ostéotomie maxillaire (Lefort I) pour fermer la béance, associée à une expansion maxillaire, et en une ostéotomie bilatérale sagittale d’avancée mandibulaire. Le traitement orthodontique post-chirurgical s’est poursuivi pendant 9 mois sur les anciennes couronnes préformées (fig. 3).

Confection de la prothèse d’usage et maintenance

À 16 ans, les préparations coronaires périphériques ont été finalisées avec une réduction cervicale de 0,8 mm et une limite située sous la jonction émail-cément pour limiter les risques de caries secondaires du fait de l’émail altéré (fig. 4). Les moulages obtenus ont été scannés afin de matérialiser le projet prothétique à partir d’une conception assistée par ordinateur (CAO) indirecte suivi d’un usinage de 28 couronnes en résine (fig. 5 à 7). Ces dernières, préfigurant le résultat prothétique souhaité, ont été scellées temporairement pour 3 mois (fig. 8). La fonction, l’esthétique et les préparations étant validées par la bonne adaptation des couronnes provisoires usinées, le laboratoire a procédé à l’usinage de 28 chapes homothétiques en zircone. L’unique séance d’essayage a été consacrée au réglage de l’occlusion sur la céramique de recouvrement avant glaçage. Les 28 couronnes unitaires ont été assemblées avec un ciment de scellement adhésif (ciment verre ionomère par adjonction de résine FujiCEM 2, GC) (fig. 9 et 10). Aucune anomalie n’a été détectée lors des contrôles à 6 mois (fig. 11) et 12 mois post-traitement.

Conclusion

La mise en œuvre du traitement dès le plus jeune âge est primordiale pour préserver le capital dentaire de l’enfant en assurant une fonction lui permettant de s’alimenter sans difficulté et en restaurant une esthétique qui évitera qu’il puisse se sentir « différent ».