Journal de Parodontologie & d'Implantation Orale_Hors Série n° 360 du 01/09/2018

 

CHIRURGIE IMPLANTAIRE

Frédéric CHAMIEH*   Alice PALLIER**  


*DU approfondi en parodontologie
et implantologie
Université Paris 7
**Ancien interne des Hôpitaux de Paris
DU approfondi en parodontologie
et implantologie
Université Paris 7

La restauration des secteurs postérieurs mandibulaires fortement résorbés constitue un réel défi face aux limitations anatomiques et aux difficultés techniques. Le recours à des implants courts permet, dans certaines situations cliniques, de s’affranchir de techniques de reconstruction osseuse. Les augmentations verticales sont délicates et sujettes à des complications per et postopératoires qui réduisent la prédictibilité de ces thérapeutiques, comparé aux implants courts. Différentes techniques chirurgicales visant à potentialiser la prédictibilité de ce type de reconstruction sont proposées dans la littérature mais leur succès thérapeutique reste à évaluer à long terme.

Certaines situations anatomiques ne permettent pas la mise en place d’implants (fig. 1 à 3), même courts, et nécessitent le recours à des techniques plus invasives. La régénération osseuse de défauts verticaux ne peut se faire que par le maintien d’un espace de régénération stable pendant l’intégration osseuse des matériaux de greffe puis, à plus long terme, une fois des implants mises en place.

La stabilité mécanique semble avoir un intérêt fondamental dans ces procédés chirurgicaux.

Les augmentations verticales peuvent être réalisées par des blocs autogènes, cortico-spongieux, ou des lames corticales. Le recours au prélèvement d’os autogène augmente la morbidité du traitement et la résorption cicatricielle dépend de la densité minérale des tissus prélevés.

La technique de régénération osseuse guidée (ROG) a été également décrite pour ce type de reconstruction. L’utilisation de membranes non résorbables est largement documentée. Ces polymères synthétiques poreux, en polytétrafluoroéthylène (PTFE) dense ou expansé, n’induisent pas de réaction immunitaire et résistent à la dégradation enzymatique par les tissus de l’hôte. Lorsque ces membranes sont associées à une armature en titane et stabilisées à l’aide de clous chirurgicaux, leur stabilité mécanique est largement optimisée et leur manipulation facilitée. Une des complications majeures rapportées réside dans l’exposition précoce de la membrane associée à une infection des tissus mous environnants, bien que la prévalence de ce risque semble diminuée par l’utilisation de membranes en PTFE dense.

Pour limiter le risque d’exposition, certains auteurs préconisent l’utilisation de membranes résorbables (fig. 4) associées à des dispositifs de maintien et de stabilité tels que les vis d’ostéosynthèse utilisées comme « piquets de tente » (fig. 5) ou des plaques d’ostéosynthèse. Ces dispositifs permettent, d’une part, de stabiliser les matériaux de substitution osseuse et, d’autre part, de réduire les forces appliquées par les tissus muqueux et musculaires environnants dont l’impact sur le volume régénéré est significatif (fig. 6). Le recul clinique et bibliographique ne permet pas de privilégier une technique par rapport à une autre.

Le choix du matériau de substitution osseuse semble aussi impacter le succès des régénérations osseuses verticales, compte tenu du potentiel ostéogénique limité de ces sites fortement résorbés (fig. 7). Un mélange d’hydroxyapatite bovine faiblement résorbable et d’os autogène ou allogène ostéo-inducteur semble promouvoir la régénération osseuse et maintenir un volume stable dans le temps.

Enfin, la fermeture hermétique et sans tension constitue une autre clé de la prédictibilité de ces thérapeutiques. Une connaissance de l’anatomie et de la physiologie est indispensable à la bonne manipulation des tissus.

Une technique, décrite par Ronda et Stacchi en 2011, vise à obtenir une laxité du lambeau lingual (fig. 8). Celle-ci consiste à récliner le lambeau jusqu’à l’insertion du muscle mylo-hyoïdien sur la ligne oblique interne. Puis la muqueuse est séparée du muscle, à l’aide d’un décolleur à bords émoussés, au niveau de l’aponévrose recouvrant le muscle mylo-hyoïdien. La gestion du lambeau lingual a également été étudiée par Urban et al. en 2017 : ils décrivent 3 zones - antérieure, médiane, postérieure - dont la manipulation est différente afin d’obtenir la laxité (fig. 9).

En 2015, Ronda et Stacchi décrivent une technique similaire, appliquée au niveau du lambeau vestibulaire. Les études, principalement rétrospectives, montrent peu de conséquences délétères de ces techniques. Aucune paresthésie définitive n’a été décrite et quelques paresthésies transitoires de 1 à 4 semaines ont été constatées, dues, selon les auteurs, à l’étirement du nerf mentonnier pendant l’intervention.

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