Article
Exercice privé limité à la pratique implantaire
Expert judiciaire
Expert DGOI-AFI
Paris
RÉSUMÉ
Le traitement de la péri-implantite ne fait actuellement l'objet d'aucun consensus. La prévalence de cette pathologie est variable d'une étude à l'autre. Il s'agit d'une complication des traitements implantaires qui est multi-factorielle. L'objet de cet article est d'indiquer des pistes de prise en charge de la prévention de cette maladie. Les carences nutritionnelles sont mises en évidence et la stratégie de la maintenance professionnelle est détaillée. Anticiper l'apparition d'une péri-implantite est bien plus prévisible que les pistes thérapeutiques actuelles. Cet objectif réclame une prise de conscience globale de tous les acteurs concernés, praticiens, prothésistes, industriels.
Treatment of periimplantitis currently been no consensus. The prevalence of this disease varies from one study to another. This is a multifactorial complication of implant therapy. The purpose of this article is to indicate support tracks the prevention of this disease. Nutritional déficiencies are highlighted and strategy of professional maintenance is detailed. Anticipating the onset of periimplantitis is much more predictable than the current therapeutic approaches. This objective requires a global awareness of all stakeholders, practitioners, technicians, industrial.
En 1994, à l'issue de l'European Workshop of Periodontology, deux pathologies inflammatoires de l'environnement implantaire ont été définies. D'une part, la mucosite, inflammation superficielle sans perte osseuse associée et, d'autre part, la péri-implantite, inflammation plus profonde étendue à l'os péri-implantaire. Cette lésion en forme de cuvette (fig. 1 et 2) autour de l'implant est caractéristique de la perte osseuse observée. Une perte d'attache muqueuse est également présente. Rappelons qu'une perte osseuse annuelle moyenne de 0,1 mm est une des normes qui ont été retenues comme critère de succès (Adell et al., 1981). Autrement dit, 2 mm de perte osseuse péri-implantaire après 20 ans de fonction représente la norme.
La prévalence de la péri-implantite est très variable selon les études car les paramètres définissant ces lésions varient d'une équipe à l'autre. Ainsi, cette prévalence peut aller de 10 à plus de 44 % des implants. On retiendra l'étude de Mombelli indiquant que 1 patient sur 5 présentera une péri-implantite entre 5 et 10 ans après la pose d'un implant alors que, pendant la même période, plus de 3 patients sur 5 développeront une mucosite (Mombelli et al., 2012).
La méta-analyse présentée par Atieh et al. lors de la troisième conférence de consensus de l'European Association of Osseointegration, qui ne concerne que 9 études retenues sur 504 sélectionnées, réunissant 1 497 patients pour 6 283 implants, précise que la mucosite concerne 63,4 % des patients, soit 30,7 % des implants, alors que la péri-implantite intéresse 18,8 % des patients, soit 9,6 % des implants, proportion portée à 36,3 % des patients fumeurs (Atieh et al., 2013).
Cette maladie est multifactorielle. Compte tenu de sa fréquence, sa prévention doit être mise en place au plus vite en intervenant sur tous les facteurs locaux et systémiques.
Les facteurs de risque locaux sont bien connus (Daubert et al., 2015) : faible hygiène bucco-dentaire, absence de maintenance, antécédents de maladie parodontale ou parodontite en cours de traitement, surcharge occlusale, présence d'un corps étranger dans l'espace péri-implantaire et inadaptation du profil prothétique.
Les facteurs systémiques les plus importants regroupent l'addiction tabagique, le diabète, l'alcool et l'inflammation chronique généralisée.
Plusieurs études démontrent clairement que le tabac est associé à l'augmentation du nombre de parodontites et de péri-implantites (Rinke et al., 2015 ; Roos-Jansåker et al., 2006 ; Heitz-Mayfield, 2008). Concernant le diabète, 5 % de la population française est actuellement concernée, soit plus de 3,2 millions de personnes. Pour ces personnes, il ne suffit pas de savoir si leur diabète est pris en charge mais s'il est contrôlé. Le test sanguin Hba1c dose les hémoglobines glycolysées (Ferreira et al., 2006). S'il est supérieur à 8, le contrôle métabolique de ces patients est mauvais. Il faut surseoir à toute intervention chirurgicale non urgente. Le rôle de l'alcool a rarement été mis en évidence mais la clinique quotidienne invite à considérer ce facteur comme un risque sérieux.
Enfin, il faut définir ce que signifie « l'inflammation chronique généralisée ». Une déclaration de l'Organisation mondiale de la santé (OMS), datée de 2003, résume déjà la situation : « L'évolution des habitudes alimentaires, la baisse des dépenses d'énergie, auxquelles s'ajoutent un mode de vie sédentaire, une population vieillissante – plus le tabac et l'alcool –, sont les principaux facteurs de risque responsables des maladies inflammatoires chroniques et posent un problème de santé publique de plus en plus grave. »
S'il est aisé de faire le parallèle entre les pathologies parodontales et les pathologies péri-implantaires, force est de constater que ces dernières ne se manifestent vraiment que depuis le début des années 2000, et ce sans raison particulièrement évidente. Sans doute y a-t-il des facteurs inhérents au matériel implantaire, particulièrement les surfaces rugueuses que ne connaissait pas le Pr. Brånemark, père de l'ostéo-intégration, mais il faut ici prendre en considération d'autres facteurs de nature culturelle et sanitaire.
En effet, quelque chose a profondément changé dans les habitudes de vie de nos contemporains qui n'est pas étrangère aux complications implantaires que nous rencontrons de nos jours.
Tous les intervenants en chirurgie orale font leur maximum pour optimiser leurs résultats. Lorsque ceux-ci ne sont pas à la hauteur de leurs espérances, ces praticiens peuvent mettre en cause plusieurs facteurs bien connus qui interfèrent avec le processus cicatriciel : défaut de technique chirurgicale, défaut de vascularisation, hygiène locale déficiente, non-suivi des recommandations postopératoires, consommation de tabac ou d'alcool. Cependant, il existe d'autres facteurs auxquels ces praticiens n'ont pas l'habitude de penser, en particulier le bilan nutritionnel préopératoire du patient. Ce bilan est rarement réalisé en médecine ou en dentisterie. Pourtant, dès 2004, un collège d'experts a mis en évidence, dans la revue Surgeon, le lien direct existant entre une alimentation déficiente et les complications postopératoires observées (Windsor et al., 2004). Il insiste sur la nécessité d'une évaluation nutritionnelle préopératoire des patients pour parvenir à des résultats chirurgicaux satisfaisants.
Il est essentiel d'intégrer dans les questionnaires de santé habituels des questions sur les habitudes alimentaires de ses patients. Par exemple, suivent-ils un régime particulier ? Actuellement, au moins 20 % de la population présente une intolérance au gluten et suit un régime adapté (Koch, 2012). Ces personnes sont souvent en manque de vitamine B, de fer et de divers minéraux indispensables au métabolisme osseux (Theethira et Dennis, 2015). D'autres sont végétariens ou végans et vont également présenter des troubles de la cicatrisation car ils sont déficients en vitamine B12. Par ailleurs, il faut penser que lors des phases de cicatrisation, les besoins caloriques de notre métabolisme augmentent de 25 % (Sroda, 2009).
De nos jours, de nombreux patients consultent des diététiciens, des nutritionnistes ou des naturopathes. Ces personnes consomment souvent des compléments alimentaires qui peuvent interférer avec les interventions de leur chirurgien-dentiste, causant des saignements excessifs ou interagissant avec ses prescriptions d'antibiotiques ou d'antalgiques.
La mode des régimes est devenue addictive pour de nombreuses personnes et il faut en tenir compte dans les bilans préopératoires. Aux États-Unis, il a été mis en évidence que près de 70 % des praticiens ne posaient aucune question à leurs patients sur les supplémentations adoptées (Donaldson et al., 2013). Il en est certainement de même en Europe.
Le scorbut, maladie des marins au long cours des siècles passés, est de retour dans les villes. Cette carence grave en vitamine C, que l'homme ne produit pas et qui ne lui vient que de l'alimentation, est bien connue chez les personnes en grande précarité, alcooliques ou très désocialisées mais surprend chez des sujets jeunes. Plusieurs dizaines de cas ont été récemment identifiées en Europe chez des malades qui se privaient de fruits et de légumes frais ou qui ne se nourrissaient que de fast-foods ou de lait (Roy, 2016) !
Une autre déclaration de l'OMS, de 2011, met les choses en perspective : « En décrivant les moyens de diminuer la charge que représentent des maladies chroniques comme l'obésité, le diabète de type 2, les maladies cardio-vasculaires, le cancer, les pathologies bucco-dentaires et l'ostéoporose, l'OMS propose que la nutrition soit placée au premier rang des politiques et programmes de santé publique. »
Lors des rencontres médicales annuelles de l'hôpital Tenon, en 2014, les organisateurs ont indiqué que l'on assistait à une pandémie mondiale de maladies liées à l'alimentation, au premier rang desquelles on retrouve le syndrome métabolique, l'inflammation et les cancers.
Dans une recherche sur Google portant sur les cinq dernières années, il a été montré que plus de 17 000 articles publiés dans des revues médicales ont relié carence nutritionnelle et hypertension artérielle, diabète, problèmes immunitaires, fibromyalgie et cancer (Moldovan, 2015).
Il est devenu indispensable d'actualiser les questionnaires de santé en évaluant mieux l'état physiologie des patients (traitements en cours, diabète, cholestérol...) et leurs modes de vie (végan, régimes...) mais également leur état psychologique, tant il est vrai qu'un patient au chômage, dépressif ou travailleur stressé ne s'impliquera pas au mieux dans les traitements ou simplement dans son hygiène buccale quotidienne. Tous ces éléments vont inviter le praticien à supplémenter spécifiquement ces personnes en prévision d'une future intervention, voire à la différer tant qu'il n'y a pas retour à la normalité.
La vitamine D provient pour 20 % d'origine alimentaire (ergocalciférol, ou vitamine D2) et pour 80 % d'origine solaire (cholécalciférol, vitamine D3). Les UV B absorbés par la peau entraînent la transformation de la vitamine D3 en calcidiol après oxydation dans le foie puis en calcitriol [25(OH)D3] après passage dans les reins. Sous cette forme, la vitamine D3 joue un rôle majeur dans la fixation du calcium par les os.
La vitamine D2 se retrouve dans les poissons gras (saumon, sardine et thon), dans les œufs et les shiitakés (variété de champignons). La vitamine D3 est sous le contrôle de l'ensoleillement. Sa synthèse se fait avec une longueur d'onde de rayonnement inférieur à 313 nm. Le soleil émet un rayonnement entre 250 et 2 500 nm. Aucun rayon de moins de 313 nm n'est émis sur la France entre octobre et mars. De plus, la pollution absorbe les rayons entre 290 et 300 nm. C'est ainsi que 80 % de la population française est en déficit en vitamine D, selon les données de l'Institut de veille sanitaire de 2012.
Il faut également savoir que l'obésité réduit son stockage par les graisses et que, à exposition égale, on stocke 4 fois moins de vitamine D à 70 ans qu'à 30 ans. Enfin, un indice de protection solaire supérieur à 15 diminue de 99 % les photons entrant dans la peau.
Sur le plan général, le déficit en vitamine D favorise l'apparition de l'ostéoporose, de l'hypertension, des troubles cardiaques, du rhume, de la grippe et des troubles psychologiques.
La vitamine D3 est fortement impliquée dans la défense immunitaire (Liu et al., 2006) et la réduction de l'inflammation (Olsen et al., 2012 ; Grimnes et al., 2012). La carence en vitamine D est étroitement associée à la perte d'attache parodontale (Dietrich et al., 2004). Un apport optimal en vitamine D et en calcium diminue la résorption osseuse et contribue à une meilleure minéralisation osseuse (Dixon et al., 2009).
Le niveau de concentration sanguine en calciférol [25(OH)D3] se définit selon 3 paliers :
– la carence, soit une concentration inférieure à 10 ng/mL ;
– le déficit, soit une concentration entre 10 et 30 ng/mL ;
– la normalité, soit une concentration entre 30 et 100 ng/mL.
La concentration moyenne chez les adultes français est de 23 ng/ml. La zone de toxicité concerne des taux supérieurs à 200 ng/ml, soit 40 000 UI/j.
Il faut préciser que 78 % des patients déficitaires sont des femmes (Bertrais et al., 2004). Une étude menée en 2011 au sein de l'hôpital de Besançon montre que 91 % des patients sont en déficit et 10 % sont en carence (Malpica et al., 2011).
En juin 2012, l'Académie de médecine a conseillé de doubler les doses habituellement prescrites. Le consensus est actuellement le suivant : toute personne de plus de 65 ans doit être systématiquement supplémentée en vitamine D (Salle, 2012). Pour rendre les choses plus simples, plus besoin de prescrire un dosage sanguin.
De fait, cet examen a été volontairement déremboursé en France en août 2014.
Une étude réalisée en 2016 à l'hôpital de Francfort, portant sur 238 patients en consultation pré-implantaire, montre que 78 % d'entre eux sont en déficit et 4,6 % sont carencés et que, parmi le personnel médical, 45,8 % sont gravement carencés et 20 % sont déficitaires (Choukroun et al., 2016). Ses auteurs rappellent : « Toute opération chirurgicale entraîne un stress oxydatif aboutissant à une surconsommation de vitamine D. Cela pourrait expliquer pourquoi certains patients, dosés immédiatement après une chirurgie, voient leur taux diminuer en postopératoire ! »
Ainsi, là encore, la supplémentation va s'imposer en phase préopératoire.
Pour la vitamine D3 impliquée dans le métabolisme osseux, on prescrira de l'Uvédose®, en dose buvable de 1 000 000 UI ou du ZYMA D® (80 000 et 200 000 UI) ou encore du Dédrogyl®.
Ainsi, pour rétablir la normalité :
– si le patient est en déficit (20-30 ng/ml), on prescrira, pour 2 mois, 10 à 15 gouttes de Dédrogyl® par jour (1 goutte = 200 UI = 5 μg) ou une ampoule d'Uvédose® (1 000 000 UI) tous les 15 jours ;
– si le patient est carencé (< 20 ng/ml), on prescrira 25 gouttes de Dédrogyl®, soit 5 000 UI par jour, ou 2 ampoules d'Uvédose® (100 000 UI) chaque quinzaine.
L'étude de Mangano et al., portant sur 1 625 implants posés sur 822 patients, fait la relation entre échec implantaire et vitamine D : chez les patients carencés, le taux d'échec est de 9 %, chez les patients en déficit, il est de 3,9 % et chez les patients à la normalité, il est de 2,2 % (Mangano et al., 2016).
Il est donc fortement recommandé de supplémenter en vitamine D3 les catégories de la population suivantes (HAS, 2013) : patients de plus de 60 ans, diabétiques, en échec d'implant, en reprise d'échec, programmés pour des greffes osseuses, peu ou pas exposés au soleil, en obésité, en situation d'ostéoporose avérée, en cas de ménopause précoce, d'hyper(para)thyroïdie, d'addictions, de cancer du sein ou de la prostate (médicaments inducteurs d'ostéoporose) et femmes devant accoucher en hiver.
Nous avons évoqué la vitamine C dont on sait depuis longtemps que la carence est un catalyseur de la maladie parodontale (Glickman, 1948 ; Kuzmanova et al., 2012 ; Yan et al., 2013).
La vitamine B9, ou acide folique, influence positivement le gain d'attache parodontale dans les thérapies parodontales (Neiva et al., 2005).
La vitamine E améliore également la cicatrisation des tissus parodontaux (Singh et al., 2014).
Les acides gras oméga-3 réduisent l'inflammation parodontale (Iwasaki et al., 2010) et limitent la perte osseuse alvéolaire (Bendyk et al., 2009).
Magnésium (Merchant, 2006), zinc cuivre et fer (Orbak et al., 2007 ; Tamura et Ochiai, 2009) influencent tous directement la santé des tissus parodontaux.
Là encore, une supplémentation ciblée peut être nécessaire et prescrite. Plusieurs laboratoires ont élaboré des complexes multivitaminés prêts à l'emploi (ActivPharma...).
Le cholestérol total (< 1,5 g/l) a un effet direct sur le métabolisme osseux et l'ostéo-intégration. S'il est élevé, cela favorise l'ostéoclasie et freine le remodelage osseux (Krieger, 1998 ; Luegmayr et al., 2004). Cholestérol LDL (low density lipoproteins) et résorption osseuse sont liés (Tomofuji et al., 2013 ; Bastos et al., 2012). Un cholestérol LDL élevé diminue la densité osseuse (Brodeur et al., 2008 ; Brodeur, 2009), inhibe les phosphatases alcalines et favorise l'apoptose des ostéoblastes (Parhami et al., 1997 ; Klein et al., 2003).
Chez les patients à risque (de plus de 60 ans, diabétiques, hypertendus, en échec ou en reprise d'implant ou en cas de greffe osseuse), un dosage s'impose et le cholestérol total doit être ramené sous le seuil de 1,5 g/L.
Le risque de survenue d'une mucosite ou d'une péri-implantite impose de mettre en œuvre une maintenance adaptée au profil de chaque patient selon son évaluation médicale initiale.
La nature de l'hygiène bucco-dentaire devra être adaptée à celle des tissus péri-implantaires. La fragilité de l'épithélium de jonction et les fibres parallèles à la surface des tissus favorisent la propagation de l'inflammation. Le fil dentaire est très agressif et devrait être réservé aux dents naturelles. Le jet dentaire peut être recommandé s'il offre un réglage de la puissance que l'on préférera minimale et des embouts à touffe souple permettant d'éliminer le biofilm des surfaces prothétiques implanto-portées. Le WaterPik® et son embout Plaque Seeker Tip® (fig. 3) paraissent particulièrement bien adaptés à la maintenance personnelle des patients porteurs d'implants dentaires. Les études comparatives opposant la brosse associée au fil et le WaterPik® avec embout spécifique montrent une efficacité à réduire l'inflammation et le saignement, passant de respectivement de 30 % à 145 % après 30 jours d'utilisation (International Association of Dental Research, 2013). Nous conseillons d'ajouter 2 cuillères à café de solution antiseptique aux huiles essentielles, du type Listérine®, à l'eau du réservoir.
Le rythme des séances de maintenance professionnelle doit être individualisé en fonction des résultats observés en matière d'élimination du biofilm. Il sera, bien entendu, adapté également à l'état des tissus péri-implantaires.
Ces séances comprendront, outre l'évaluation des méthodes de nettoyage, une évaluation radiologique rétroalvéolaire qui sera impérativement réalisée à l'aide de porte-films permettant de visualiser l'implant dans son axe et la position du niveau osseux. Ces clichés seront superposables dans le temps, facilitant ainsi le diagnostic radiologique (fig. 4). Le cone beam est inutile pour la maintenance implantaire. La radiographie permet d'objectiver le maintien de l'os au niveau du col implantaire.
Le sondage complète cet examen radiologique. Il n'a de valeur qu'en comparaison à la mesure initiale réalisée lors de la pose de la prothèse. Il faut donc noter cette première mesure dans le dossier du patient. La mesure se fait en engageant très délicatement la sonde le long du pilier implantaire jusqu'à buter contre l'épithélium. La force de pression est très légère, de l'ordre de 0,25 Nm, soit le poids d'un papillon sur le manche. L'apparition d'un saignement au sondage est sans rapport avec une perte d'os péri-implantaire (Sanz et al., 2012). La profondeur moyenne standard est de 3 à 5 mm selon les sites. L'aggravation de cette profondeur mesurée à J0 va entraîner la mise en œuvre d'une procédure d'assainissement qui sera détaillée plus loin.
Enfin, l'examen est toujours complété par un bilan occlusal afin de contrôler l'absence de surcharge sur la restauration implanto-portée. Celle-ci risquerait à moyen terme d'entraîner une souffrance osseuse indolore pour le patient mais qui ferait le lit de la future cratérisation de l'implant. Les retouches occlusales seront immédiatement réalisées si cela s'avère nécessaire.
Le matériel de décontamination de l'environnement péri-implantaire comprend des curettes manuelles en titane et des inserts ultrasoniques en polyétheréthercétone (PEEK, polyetheretherketone) (fig. 5) permettant d'éviter de rayer la surface des piliers prothétiques. Le recours à l'aéropolissage n'a aucun intérêt s'il n'y a pas de lésion muqueuse mise en évidence (Tastepe et van Wass, 2012). Si une poche est en rapport avec une perte d'attache péri-implantaire, l'aéropolissage est une méthode qui peut contribuer à améliorer la situation clinique. Il faut impérativement utiliser des poudres sans effet abrasif, à base de glycine (Augthun et al., 1998).
Les pâtes à polir sans fluor (danger d'oxydation du titane) associées à des cupules en caoutchouc permettront d'éliminer efficacement le biofilm des surfaces prothétiques.
L'analyse des profils prothétiques a permis à Serino et Ström de confirmer que le risque de survenue d'une péri-implantite augmentait de 65 % si la conception prothétique était erronée (Serino et Ström, 2009). Dans leur étude, 48 % des implants atteints sont porteurs d'une prothèse empêchant l'hygiène. Seuls 4 % des implants atteints supportent une conception prothétique favorable.
La présence de ciment de scellement sous-gingival résiduel entraîne une perte d'os marginal systématique. L'induction de ciment doit se faire avec parcimonie et ne pas dépasser l'épaisseur de celle d'un spray de ciment.
Il paraît donc raisonnable d'adopter la réalisation de prothèses transvissées autant que possible et de privilégier des limites prothétiques supra-gingivales au maximum. Le démontage des prothèses facilitera le sondage péri-implantaire.
En 2017, il faut préférer les piliers prothétiques personnalisés par CFAO aux piliers préfabriqués à profil standard, ne permettant pas la réalisation d'un profil d'émergence optimisé. Un tel profil permet de mettre en accord le diamètre de l'implant posé avec celui de la dent remplacée, sans favoriser les bourrages alimentaires et l'inflammation gingivale qui les accompagne. Dans le cas des restaurations fixes de plusieurs dents (bridges), il faut faciliter le nettoyage au jet et le passage des brossettes les plus fines possible, grâce à des embrasures judicieusement réalisées, limite la stagnation des bourrages alimentaires sans empêcher le nettoyage en étant trop fermées.
Les profils des embrasures de la prothèse implanto-portée doivent être plus fermés que dans le cas de la prothèse parodontale.
En cas de restauration de grande étendue, il faut impérativement éviter les surfaces concaves, lieu de concentration de tous les débris alimentaires, et réduire la largeur vestibulo-linguale ou palatine des zones intermédiaires qui contribuent également à cette stagnation. Enfin, chez l'édenté total, l'accessibilité à l'hygiène doit être pensée au stade initial du plan de traitement. Les spoilers vestibulaires destinés à soutenir la lèvre ne doivent pas être associés à des prothèses vissées indémontables pour le patient (fig. 6 et 7). Dans ces cas, la réalisation de prothèse amovible stabilisée par un système de double barre s'impose (fig. 8).
Un groupe de 7 experts français en implantologie a publié des recommandations issues de l'analyse de plus de 12 000 articles récents, dont 1 000 traitaient de péri-implantite, parmi lesquels seuls 11 (études réalisées chez l'homme) ont été retenus pour leur niveau de pertinence et d'indication (Khayat et al., 2015). Leurs directives sont les suivantes :
– vérifier systématiquement si le patient est à risque de maladie parodontale ;
– s'il l'est, l'intégrer dans un programme de maintenance rigoureux avant le traitement implantaire ;
– envisager :
• une surface usinée pour chaque patient à risque de péri-implantite,
• une surface usinée si le patient est peu rigoureux en matière de maintenance,
• le choix d'une surface usinée quel que soit l'état parodontal du patient.
Cette partie s'inspire d'une communication personnelle de Paul Fletcher (Seattle Study Club).
En introduction, partons du principe que la profondeur de sondage initiale est de 3 mm.
L'examen de routine se déroule (radiographie rétroalvéolaire avec angulateur, contrôle de l'hygiène et de l'occlusion) puis est complété par l'élimination du biofilm à la pâte à polir à l'aide d'une cupule en caoutchouc.
Un examen de routine et un débridement délicat ultrasonique avec curette en PEEK sont réalisés, suivis d'un aéropolissage à la glycine.
Le diagnostic de péri-implantite est porté par la présence d'une lésion osseuse cupuliforme débutante autour de l'implant.
L'examen de routine puis un débridement ultrasonique sont effectués. Une irrigation antiseptique de l'environnement implantaire est réalisée par trois fois : avant et après le débridement et après l'aéropolissage. Cette triple irrigation correspond au renouvellement du fluide de l'espace muqueux péri-implantaire qui se fait toutes les 90 secondes et qui véhicule des germes en permanence, comme le fluide créviculaire péridentaire. La quantité de fluide augmente avec l'inflammation.
La dernière irrigation est suivie d'une pression digitale forte de la muqueuse péri-implantaire, entre pouce et index, pendant 60 secondes, destinée à favoriser la restauration des hémi-desmosomes, autrement dit la réattache de la muqueuse péri-implantaire et, donc, la réduction de la profondeur de la poche.
Le patient est revu de 3 à 6 mois plus tard suivant son degré d'exposition au risque.
Après examen de routine, la dépose de la prothèse s'impose. Les surfaces de titane doivent être détoxifiées et repolies. Les suprastructures prothétiques seront désinfectées et les profils modifiés s'il y a lieu. Une triple vague d'irrigation antiseptique est mise en œuvre, en alternance avec un curetage délicat de l'espace péri-implantaire, suivie d'un aéropolissage à la glycine puis de la pose de la prothèse et d'une compression digitale de 1 minute.
La solution antiseptique peut être une simple solution de Bétadine® verte.
Ces irrigations faites au cabinet peuvent être judicieusement complétées par des irrigations à domicile. À cet effet, nous préconisons l'utilisation de seringues Monoject® sans aiguille (fig. 9) et donc sans danger. On prescrit au patient une formule de solution antiseptique simple à réaliser et facile à conserver, à base d'eau de Javel de ménage disponible en bidon (concentration 2,6 % d'hypochlorite de sodium) et non en berlingot (9,6 %) : 1 cuillère à café de cette solution d'hypochlorite de sodium est à diluer dans 500 ml d'eau pour donner un demi-litre de solution d'irrigation prête à l'emploi. Cette irrigation de l'espace péri-implantaire concerné sera réalisée chaque jour après les soins d'hygiène habituels. La Bétadine® peut également être employée mais va s'avérer plus coûteuse (Kalkwarf et al., 1982 ; anonyme, 1986).
En usage professionnel, la solution d'irrigation se compose de 10 ml d'hypochlorite de sodium (NaOCl) de ménage dans 125 ml d'eau, soit le volume d'un verre à dent, et permet d'obtenir une solution de NaOCl à 25 %. Une aiguille endodontique de 23-25 G permet d'atteindre le sillon pré-implantaire sans difficulté. Dans notre pratique quotidienne, nous désinfectons systématiquement l'intérieur de tous les implants lors des différentes étapes thérapeutiques et également le sillon péri-implantaire après élimination du biofilm, lors des examens de contrôle (fig. 10).
La prise en charge la plus efficace de la péri-implantite reste sa prévention.
Optimiser la prévention de cette pathologie implique :
– d'actualiser régulièrement l'état de santé du patient ;
– de le supplémenter en vitamine D et autres nutriments ;
– de prendre en charge la maladie parodontale avant toute pose d'implant ;
– de privilégier les implants à col lisse chez les patients à risque ;
– d'optimiser l'hygiène bucco-dentaire quotidienne en prescrivant WaterPik® et embouts implants ;
– d'établir un programme d'entretien personnel quotidien individualisé ;
– de mettre en place un planning de contrôles sur mesure en fonction du profil médical du patient ;
– de désinfecter l'intérieur de l'implant chaque fois que possible ;
– de stériliser ou de désinfecter les suprastructures prothétiques ;
– de combiner les techniques pour maximiser le résultat ;
– de détoxifier la surface du titane si elle est exposée.