Journal de Parodontologie & d'Implantologie Orale n° 3 du 01/09/2015

 

Article

Yves REINGEWIRTZ*   Catherine PETIT**   Victor ANADON-ROSINACH***  


*Ancien AHU, chargé d'enseignement au service de parodontologie, faculté de Chirurgie dentaire de Strasbourg
**Interne MBD, DU de parodontologie clinique, faculté de Chirurgie dentaire de Strasbourg
***DU de parodontologie clinique, faculté de Chirurgie dentaire de Strasbourg

Résumé

La résorption osseuse est un mécanisme physiologique consécutif à toute extraction. L'objet de cet article est la description clinique associée à une revue de littérature de la greffe gingivale libre de recouvrement alvéolaire, dans le but de limiter la résorption osseuse postextractionnelle.

Les sources bibliographiques fournies par la base de données Medline-PubMed ont permis, avec les termes « gingival seal », « socket, socket preservation, free gingival graft », « extraction socket, mucosal graft » « alveolar preservation, radiographic evaluation », d'identifier 9 articles traitant de la fonction occlusive postextractionnelle d'un greffon épithélio-conjonctif.

Malgré un faible niveau de preuve de la majorité des études et d'importantes disparités au niveau des protocoles, la meilleure probabilité de réduire la résorption osseuse vestibulaire, de limiter les complications postopératoires et d'obtenir une bonne intégration chromatique du greffon nécessite de respecter les points suivants : réaliser une extraction atraumatique, un curetage alvéolaire méticuleux, une désépithélialisation de la gencive marginale alvéolaire et une stabilisation du caillot grâce à une coaptation du greffon gingival de recouvrement alvéolaire par des points de microchirurgie. Le comblement de l'alvéole à l'aide d'une xénogreffe osseuse permet d'améliorer les résultats.

La technique du scellement gingival postextractionnel, en favorisant la stabilité du caillot et la protection d'un biomatériau de comblement, contribue à limiter la résorption alvéolaire postextractionnelle.

Summary

Bone resorption is a physiological process that follows every extraction. The aim of this article consists in the clinical description and in a review of literature of the post-extraction gingival seal technique.

PubMed research with the terms “gingival seal”, “socket, socket preservation, free gingival graft”, “extraction socket, mucosal graft”, “alveolar preservation, radiographic evaluation” has led to 9 articles in relation with the alveolar occlusive function of the free gingival graft.

Despite a low level of evidence and a large disparity between the different papers, it appears that the best probability to reduce bone resorption, to limit post-operative complications and to obtain a good esthetic integration of the graft consists in: performing an atraumatic extraction, a meticulous alveolar debridement, the disepithelialization of the internal marginal gingiva, a stabilization of the clot due to a tight adaptation of the graft performed with microsurgical sutures; alveolar feeling by means of bone xenografts allows results that are significantly more favorable.

Postextraction gingival seal technique contributes to the stability of the clot and to the protection of the feeling material ; in this way, it limits the risks of resorption.

Key words

Postextraction osseous resorption, Socket preservation, Gingival seal, Free gingival graft

Introduction

La résorption osseuse postextractionnelle est un mécanisme physiologique dont les contours ont fait l'objet de nombreuses études expérimentales chez l'animal et chez l'homme (Schropp et al., 2003 ; Araujo et Lindhe, 2005 ; Fickl et al., 2008). Elle se caractérise, d'une part, par la disparition de la lame criblée, assise osseuse des fibres du ligament alvéolo-dentaire, et, d'autre part, par une fonte plus ou moins importante de l'alvéole dans sa partie coronaire. Cette résorption suit rapidement l'extraction et l'étude histologique chez le singe ou le chien a permis d'établir sa chronologie (Pietrokovski et Massler, 1971 ; Discepoli et al., 2013) : durant les quatre premiers mois, des mécanismes inflammatoires conduisent à la résorption progressive du caillot et du tissu de granulation puis à leur remplacement par un tissu osseux immature ; l'os alvéolaire subit des remaniements différents selon sa situation, importants dans sa partie vestibulaire, avec une perte moyenne de 1,67 mm en hauteur dans la zone centrale et de 3,87 mm en largeur (van der Weijden et al., 2009 ; Tan et al., 2012). Limiter cette perte osseuse présente de nombreux avantages cliniques, tant fonctionnels qu'esthétiques. La conservation des contours de la crête alvéolaire permet en effet d'envisager la mise en place d'implants positionnés de façon optimale et d'assurer ainsi un profil d'émergence prothétique favorable (Vanhoutte et al., 2014 ; Cosyn et al., 2013). L'approche clinique permettant de réduire les déficits osseux postextractionnels consiste dans un premier temps à pratiquer une extraction minimalement invasive ; dans un second temps, elle peut être suivie d'une approche régénératrice de l'alvéole grâce à l'utilisation de greffons osseux autogènes, de biomatériaux de substitution, de dispositifs mainteneurs d'espace d'origine gingivale ou de substitution, ou de la combinaison de ces différentes techniques (Horowitz et al., 2012 ; Horvath et al., 2013 ; Vignoletti et al., 2012).

Les greffons de recouvrement des tissus mous sont les greffes gingivales libres ou les lambeaux pédiculés palatins de rotation (Landsberg et al., 1994 ; Nemcovsky et al., 2000). L'objectif de ce travail est de présenter la mise en œuvre des greffes de scellement gingival et de passer en revue la littérature scientifique liée à leur utilisation dans la gestion alvéolaire postextractionnelle.

Logique biologique du recouvrement alvéolaire par un greffon de gencive libre

La fermeture primaire des alvéoles d'extraction n'est pas un prérequis à la fermeture de l'alvéole. En revanche, cette approche présente de nombreux avantages lorsqu'on recherche une stabilité de la crête alvéolaire ou une régénération des murs osseux ayant pu être détruits de façon traumatique ou infectieuse (alvéolyse d'origine parodontale). Le recouvrement de l'alvéole par scellement d'une greffe gingivale permet, le cas échéant, la protection d'un biomatériau mis en place dans l'alvéole et réduit ainsi les risques de fuite du matériau et de colonisation bactérienne ; de plus, cette fermeture contribue à l'augmentation de la hauteur de gencive kératinisée et favorise la stabilité du niveau de la ligne de jonction muco-gingivale (Pagni et al., 2012).

En réalisant un bouchon de plusieurs millimètres de hauteur (fig. 1a), le greffon participe à la délimitation d'un espace clos, véritable chambre de régénération tissulaire. Plusieurs facteurs vont ainsi participer à une néoformation osseuse :

– la délimitation d'un espace protégeant le caillot dont la stabilité est assurée, au niveau des parois latérales, par les murs alvéolaires et, dans la partie supérieure, par le greffon gingival ;

– une vascularisation du site, au niveau latéral, par les vaisseaux alvéolaires et, dans la partie supérieure, par la partie conjonctive du greffon.

Cette anatomie particulière présente des similitudes avec le défaut critique supra-alvéolaire élaboré par Wikesjö (Polimeni et al., 2004 ; Chiu et al., 2013) ou avec les espaces sous-membranaires (membrane de Schneiderian) constitués après insertion d'implants intrasinusiens par la méthode transcrestale de Summers (Cricchio et al., 2010) : dans chacune de ces situations, c'est bien la stabilité du caillot abrité dans un espace clos et bénéficiant d'une vascularisation périphérique qui autorise une régénération osseuse en présence ou non d'un biomatériau.

Facteurs de réussite du greffon gingival libre

Pour expliquer le nombre important d'échecs inhérents à cette technique, certains auteurs n'hésitent pas à lier la qualité des résultats au savoir-faire de l'opérateur (« technique sensitive ») (Tal et al., 1999). Outre une courbe d'apprentissage, la réussite du traitement passe par le respect de plusieurs étapes :

– au niveau de l'alvéole réceptrice :

• cureter soigneusement de l'alvéole après extraction. Ce débridement peut être effectué à l'aide d'une curette mais aussi à l'aide d'une fraise boule. Le résultat doit assurer l'élimination de tout résidu épithélial ou tissu de granulation ainsi qu'un saignement abondant de façon à favoriser la présence d'un caillot dans l'ensemble de la cavité,

• désépithélialiser la gencive marginale bordant l'alvéole. Ce geste peut être réalisé également à l'aide d'une fraise ou en utilisant une lame de bistouri ;

– lors du prélèvement du greffon :

• choisir un bistouri circulaire (Biopsy punch®, Miltex Inc.) ou elliptique (Acu-Exisor® 6 × 12 mm, Acuderm Inc.) en fonction de la section de l'alvéole à recouvrir de façon à en faciliter l'adaptation (fig. 1b),

• utiliser les mêmes sites de prélèvement que pour la greffe épithélio-conjonctive : zone rétromolaire de la tubérosité maxillaire ou région du palais située entre le bord distal de la canine et le bord mésial de la seconde molaire 3 mm en direction apicale par rapport au collet des dents. Si l'épaisseur moyenne d'une greffe épithélio-conjonctive est d'environ 1,5 mm, le greffon de recouvrement gingival a une épaisseur plus importante (fig. 1a). Alors que dans le premier cas le résultat escompté est l'induction épithéliale destinée à accroître la hauteur de gencive kératinisée (fig. 1c), on recherche dans la seconde approche non seulement la nature et l'influence épithéliale du greffon mais aussi la hauteur de sa partie conjonctive susceptible d'améliorer la qualité du joint périphérique lors des sutures,

• protéger le site donneur par 1 ou 2 points de suture ; la cicatrisation du site est rapide et n'occasionne que peu de douleurs (fig. 1d et 1e) ;

– adaptation du greffon :

• réaliser une suture bord à bord du greffon par une succession de points simples 5/0 ou 6/0 (6 à 8 points) (fig. 1f),

• améliorer éventuellement la stabilité du greffon par une assise sur un lacis de suture, ce dernier jouant le rôle de support du greffon habituellement dévolu au biomatériau (Mousques et Hounkanrin, 2009) ;

– prescrire, en postopératoire, un antalgique (ibuprofène 400 mg toutes les 5 heures tant que durent les douleurs) et des bains de bouche à la chlorhexidine 0,10 % pendant 14 jours.

Il existe un cas particulier, celui de la gestion alvéolaire postextractionnelle associée à un renforcement conjonctif vestibulaire. Un biotype fin dans le secteur esthétique maxillaire ou la destruction partielle d'un mur osseux vestibulaire peut poser l'indication d'un greffon de scellement gingival modifié. Une enveloppe est réalisée en regard de la zone vestibulaire par dissection en épaisseur totale en cas de défaut osseux et en épaisseur partielle lorsque le renforcement d'un biotype fin est visé ; le greffon épithélio-conjonctif de recouvrement alvéolaire est modifié afin de permettre le traitement simultané du défaut vestibulaire. Le prélèvement ne peut plus être réalisé dans ce cas à l'aide d'un bistouri circulaire, mais nécessite une lame classique, 15C ou 63M. La partie épithélio-conjonctive destinée à assurer le recouvrement de la zone osseuse vestibulaire détruite est désépithélialisée de façon à pouvoir être glissée sous le lambeau vestibulaire (fig. 2a et 2b). Le greffon peut être mis en place par traction selon la technique de tunnélisation (fig. 2c et 2d).

Revue de littérature : matériel et méthode

Aucune méta-analyse n'est disponible quant à l'influence de la greffe épithéliale de recouvrement sur un site d'extraction. Cependant, plusieurs études animales et humaines analysent son rôle. Leur identification a été réalisée par une recherche sur le site de données Medline via PubMed jusqu'en 2013 en utilisant, successivement, les termes « gingival seal » (scellement gingival), « socket, socket preservation, free gingival graft » (alvéole, préservation de l'alvéole, greffe gingivale libre), « extraction socket, mucosal graft » (alvéole d'extraction, greffe muqueuse) et « alveolar preservation, radiographic evaluation » (préservation alvéolaire, évaluation radiographique).

Les critères retenus pour la sélection des articles sont les suivants :

– types d'études : séries de cas ou études contrôlées randomisées ;

– critères d'inclusion : sujets en bonne santé ayant bénéficié d'une technique de préservation de crête après extraction dentaire à l'aide d'une greffe conjonctive ou épithélio-conjonctive ;

– critères d'exclusion : études concernant le scellement gingival sans rapport avec la technique de préservation alvéolaire postextractionnelle ;

– critères de qualité des études : fondés sur les recommandations proposées par deux équipes (Ten Heggeler et al., 2011 ; Vignoletti et al., 2012), elles-mêmes issues des recommandations de Cochrane pour évaluer les risques de biais du RCT-checklist du Dutch Cochrane Center, des CONSORT statements (Schulz et al., 2010), MOOSE statements (Stroup et al., 2000), STROBE statements (Von Elm et al., 2007) et des recommandations de Needelman et d'Esposito et al. (Needelman, 2002 ; Esposito et al., 2001). Six critères permettent de définir la qualité d'une étude : la définition des critères d'inclusion et d'exclusion pour la population, la randomisation des patients, les mesures prises pour rendre l'étude en simple ou double aveugle, la sélection d'un groupe représentatif de la population générale, la mise en œuvre de traitements identiques entre les groupes d'étude hormis le groupe test et les rapports détaillés de chaque rendez-vous de suivi. L'étude est dite à risque faible de biais si ces six critères sont retrouvés dans l'étude, à risque modéré si l'un de ces critères est absent et à risque de biais élevé si deux ou plus de ces critères sont absents (Ten Heggeler et al., 2011).

Résultats

La recherche sur le site de données Medline jusqu'en 2013 a permis d'identifier :

– pour les termes « gingival seal », 148 références dont 4 en rapport avec la fonction occlusive recherchée ;

– avec les termes « socket, socket preservation, free gingival graft », 16 références dont 5 expérimentations animales et 5 indications concernant notre recherche ;

– avec les termes « extraction socket, mucosal graft », 10 références dont 2 retenues.

Ajouter les termes « alveolar preservation, radiographic evaluation » » a donné accès à 31 articles et 1 étude correspondant à notre recherche (tableau 1).

Parmi ces études retenues, 2 ne présentent qu'un intérêt descriptif auprès de 1 sujet (Landsberg et Bichacho, 1994 ; Thalmair et al., 2010). Les 7 autres études permettent d'évaluer les résultats de cette technique à différents niveaux (tableau 2) :

– rôle dans la limitation de la résorption évaluée par la mesure de la différence des volumes avant et après traitement (Oghli et Steveling, 2010 ; Thalmair et al., 2013 ; Jung et al., 2013) ;

– rôle dans la limitation de la résorption par la mesure de la largeur de la crête osseuse au moment de l'insertion de l'implant (Stimmelmayr et al., 2012) ;

– rôle dans la limitation de la résorption en présence d'un défaut vestibulaire associé (Raghoebar et al., 2009) ;

– qualité de l'intégration chromatique du greffon (Jung et al., 2004) ;

– analyse de la qualité de la cicatrisation ou des complications afférentes à ce protocole (Tal, 1999 ; Jung et al., 2004 ; Raghoebar et al., 2009 ; Oghli et Steveling, 2010 ; Stimmelmayr et al., 2012 ; Jung et al., 2013).

Les résultats mettent également en évidence de fortes disparités entre les études tant en ce qui concerne le niveau de preuve que les protocoles expérimentaux. Ainsi, et pour le premier point, seuls 2 articles (Thalmair et al., 2013 ; Jung et al., 2013) présentent un risque de biais faible, alors qu'il est élevé pour les autres. Concernant les variations entre les protocoles, les études diffèrent notamment :

– par le nombre de patients traités, par le nombre de dents extraites, par le nombre de groupes comparés et par la durée des études ;

– par l'existence de facteurs de confusion (tabac, état parodontal, morphologie, localisation et intégrité des alvéoles) ;

– par le type de chirurgie (débridement postextractionnel de l'alvéole manuel ou par instrumentation mécanisée, scellement gingival parfois associé à la réalisation d'un lambeau, utilisation, pour les publications les plus récentes, d'aides visuelles et de micro-instrumentation, site de prélèvement gingival tubérositaire ou palatin) ;

– par le choix de biomatériaux associés ou non (alvéole laissée vacante ou comblée par un biomatériau avant d'être recouverte par la greffe de scellement gingival ; variation dans la nature du biomatériau utilisé, soit greffe autogène, xénogreffe, os sec lyophilisé et décalcifié, DFDBA – demineralized freeze-dried bone allograft – ou DBBMX – deproteinized bovine bone mineral xenograft) ;

– par l'utilisation d'antibiotiques (prescription associée d'amoxicilline par voie générale à doses et durée variables ou de gentamycine par voie locale combinée au biomatériau) ;

– par les méthodes et moyens de mesure (mesure de la crête cicatrisée réalisée avec ou sans lambeau, mesure par lecture optique des modèles ou évaluations par cone beam).

Discussion

L'objet de cette revue a consisté à présenter le protocole clinique ainsi que les résultats des différentes études consacrées à la greffe épithélio-conjonctive de recouvrement alvéolaire postextractionnel. Le but de cette technique est de prévenir la résorption osseuse consécutive à toute extraction. Une preuve histologique a été apportée par Fickl en 2008 (Fickl et al., 2008) dans une expérimentation animale portant sur 5 chiens beagle ; dans cette étude, les alvéoles après extraction des troisièmes et quatrièmes prémolaires étaient comblées par du Bio-Oss Collagen® (Geistlich Biomaterials) seul (T1), ou recouvertes par une greffe épithélio-conjonctive (T2) ; le groupe contrôle était comblé par le caillot seul (T3). L'histologie réalisée au bout de 4 mois concluait, d'une part, à l'influence mécanique du biomatériau dans la stabilité des tissus (perte osseuse verticale vestibulaire respectivement de 2,8, 3,3 et 3,2 mm) et, d'autre part, au rôle de la greffe gingivale dans la prévention de l'effondrement des tissus mous (largeur horizontale à 1, 3 ou 5 mm de profondeur selon les traitements) :

– T1 : 4,4, 6,1 et 7,2 mm ;

– T2 : 4,8, 6,0 et 7,1 mm ;

– T3 : 3,7, 6,2 et 7 mm.

Avec une valeur de 4,8 mm, la mesure réalisée dans le groupe T2 au niveau coronaire de l'alvéole traitée par comblement à l'aide du biomatériau et scellement par greffe gingivale libre montre une stabilité des tissus mous favorable à une solution implantaire et à un meilleur profil d'émergence prothétique.

Les études humaines rapportées dans le tableau 2 sont peu nombreuses et disparates : 2 d'entre elles sont descriptives, portent sur la méthodologie opératoire et ne concernent que 1 patient (Landsberg et Bichacho, 1994 Thalmair et al., 2010). Cinq études montrent l'influence de la greffe gingivale libre sur la réduction de la largeur de crête après extraction (Raghoebar et al., 2009 ; Oghli et al., 2010 ; Stimmelmayr et al., 2012 ; Thalmair et al., 2013 ; Jung et al., 2013). En présence d'une alvéole intacte, Oghli ne montre pas de différence significative ente les groupes contrôle (comblement par caillot) et le groupe test (greffe gingivale de scellement alvéolaire). Thalmair et al. (Thalmair et al., 2013), en revanche, concluent à une influence significativement positive de la greffe de scellement alvéolaire ; il est par ailleurs intéressant d'observer que le groupe recevant la greffe de scellement alvéolaire présente une moindre résorption que le groupe traité par comblement d'os xénogénique seul ; cette observation plaide en faveur de la logique biologique de création de l'espace clos réservé au caillot, favorisant d'une part la stabilité de ce dernier et d'autre part la prévention de migration épithéliale au sein de l'alvéole et, enfin, la propension à permettre une régénération osseuse facilitée par la vascularisation des parois latérales de l'alvéole. En présence d'un défaut osseux vestibulaire associé, l'étude de Raghoebar montre l'intérêt à associer le temps osseux (greffon cortical tubérositaire et copeaux d'os autogène) au temps muco-gingival (greffe conjonctive vestibulaire et gingivale libre de scellement alvéolaire) puisque cette solution est la seule à apporter un gain de largeur de crête par rapport à la situation de départ. Avec une résorption limitée en moyenne à moins de 1,2 mm, Stimmelmayr apporte des résultats identiques quant à la limitation de la résorption, mais moins importants que dans l'étude précédente, du fait peut-être du comblement alvéolaire réalisé à l'aide d'une association greffe alloplastique-os autogène et non xénogreffe-os autogène (Stimmelmayr et al., 2012).

Les taux de complications montrent une forte variabilité cette hétérogénéité, qui est en rapport avec la chronologie de publication des études, peut être le fait d'améliorations apportées au protocole opératoire. Ainsi Tal, avec un taux de nécrose partielle ou totale de la greffe gingivale de scellement représentant près des deux tiers de l'échantillon, conclut à une imprévisibilité de la technique (Tal, 1999). Jung et al., en revanche, en amenant au service de ce protocole les techniques de microchirurgie plastique parodontale et en associant à l'approche antiseptique (chlorhexidine 0,2 % pendant 15 jours) une antibiothérapie à large spectre durant la phase initiale de cicatrisation (amoxicilline 750 mg 1 heure avant l'intervention puis 3 fois par jour durant 3 jours pour l'étude de 2004 et 5 jours pour l'étude de 2013), obtiennent au bout de 6 semaines une intégration proche de 100 % (Jung et al., 2004, 2013). Ils notent par ailleurs une bonne intégration colorimétrique avec un ΔE = 2,91. Ces résultats, soulignant un excellent taux de succès, sont repris par Thalmair en 2013 mais non par Oghli (greffe non vitale dans 9 cas sur 39) ni par Stimmelmayr (2 cas de nécrose partielle sur 13) ; cette disparité s'explique dans ce dernier cas par la difficulté liée au défaut osseux vestibulaire associé et, plus généralement, à une probable courbe d'apprentissage à acquérir. À noter que si l'alternative à la greffe gingivale libre de scellement alvéolaire est la greffe de rotation pédiculée palatine, des signes de morbidité sont également fréquemment associés à cette dernière approche (Nemcovsky et al., 2000).

Dans toutes ces études, la capacité variable de la greffe gingivale de scellement à empêcher la résorption osseuse postextractionnelle va dans le sens des conclusions du rapport de consensus proposé en 2012 par Hämmerle (Hämmerle et al., 2012). Le consensus recommande d'associer la réalisation d'un lambeau au comblement de l'alvéole par un biomatériau à résorption lente ; l'étude systématique ne privilégie pas une technique de fermeture primaire de l'alvéole (punch de tissu mou, greffe conjonctive, dispositif membranaire ou de tissu mou). Les recommandations plaident en faveur de recherches sur de nombreux paramètres : la fermeture des tissus mous, l'influence de l'anatomie des tissus durs et des tissus mous après extraction, la présence, l'absence ou l'épaisseur des murs osseux, la surface, la couleur ou le volume des tissus mous ainsi que les effets des différents biomatériaux et dispositifs membranaires dans la conservation ou l'établissement du contour de la crête alvéolaire.

Conclusion

Bien que le niveau de preuve soit faible (seules deux études présentent un niveau de biais faible), les résultats portant sur les situations cliniques favorables (absence de défauts osseux touchant l'alvéole d'extraction) et sur les cas traités par microchirurgie plastique parodontale montrent que le scellement d'une alvéole d'extraction par une greffe gingivale libre offre un taux de réussite favorable qui se traduit par une limitation des phénomènes de résorption et une meilleure disponibilité tissulaire (notamment la gencive kératinisée propice à un profil d'émergence implantaire esthétique et fonctionnel). En cela, cette technique mérite d'être intégrée à nos thérapeutiques ; elle nécessite néanmoins d'autres études complémentaires visant à améliorer le niveau de preuve et, notamment, la nature, la chronologie et l'importance de la mise en place de biomatériaux ou de dispositifs mainteneurs d'espace associés.

Déclaration d'intérêts

Les auteurs déclarent n'avoir aucun conflit d'intérêts concernant cet article.

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