TRAITEMENT ÉTIOLOGIQUE
Sylvie MA* Valérie ORTI** Philippe GIBERT***
*Chirurgien-dentiste libéral
Cabinet dentaire
de la Madeleine, chemin de la Madeleine, bat B,
34800 Clermont l’Hérault
**MCU PH, département de
parodontologie
UFR d’odontologie,
545, avenue du Prof J.-L. Viala,
34193 Montpellier Cedex 5
***PU PH, chef du service
d’odontologie, responsable du
département de parodontologie.
UFR d’odontologie,
545, avenue du Prof J.-L. Viala,
34193 Montpellier Cedex 5
La thérapeutique étiologique en parodontologie, auparavant appelée non chirurgicale, est composée de deux parties : l’élimination, d’une part, du facteur principal qu’est le biofilm et, d’autre part, des facteurs rétenteurs de plaque. L’importance du facteur bactérien fait que les méthodes mécaniques de débridement parodontal (détartrage et surfaçage), ont été le gold standard du traitement parodontal depuis des décennies. Pourtant, ces dix dernières années,...
La thérapeutique étiologique en parodontologie, auparavant appelée non chirurgicale, est composée de deux parties : l’élimination, d’une part, du facteur principal qu’est le biofilm et, d’autre part, des facteurs rétenteurs de plaque. L’importance du facteur bactérien fait que les méthodes mécaniques de débridement parodontal (détartrage et surfaçage), ont été le gold standard du traitement parodontal depuis des décennies. Pourtant, ces dix dernières années, plusieurs nouvelles techniques ont vu le jour et elles ont fait l’objet de nombreuses études bibliographiques. En effet, tous les patients ne répondent pas positivement à cette approche dite mécanique. Le but de cette étude bibliographique est donc de faire le point sur ces nouvelles thérapeutiques en mettant en lumière leurs bénéfices mais également leurs limites et les perspectives envisageables.
Nous avons d’abord dû définir ce qu’étaient les nouvelles techniques. Après plusieurs recherches bibliographiques, nous avons décidé de limiter les recherches à cinq d’entre elles : la thérapeutique bouche complète (full mouth therapy) les lasers, la thérapie photodynamique, l’ozone et les probiotiques. Bien que ces différentes techniques aient été introduites il y a plus de 10 ans, elles ont connu un fort développement pendant la décennie qui vient de s’écouler.
Il s’agit d’études de comparaisons entre ces différentes techniques et la thérapeutique dite conventionnelle (surfaçage par quadrant ou sextant avec 1 ou 2 semaines d’intervalle entre chaque séance), ainsi que d’études descriptives et microbiologiques des bactéries parodontopathogènes principales.
La base de données électroniques PubMed de l’US National Library of Medicine a été utilisée pour effectuer un examen systématique de la littérature médicale disponible. Une recherche manuelle a également été réalisée dans les principaux journaux spécialisés suivants : Journal of Periodontology, Journal of Periodontal Research, Journal of Clinical Periodontology, Journal of Dental Research, Journal de Parodontologie et d’Implantologie Orale. Les critères d’inclusion et d’exclusion sont précisés pour chaque technique.
La recherche dans la base de données de PubMed ainsi que la recherche manuelle ont conduit à une sélection de 50 articles. La lecture de ceux-ci, ou de leur résumé s’ils n’étaient pas accessibles en ligne, ainsi que l’étude de la bibliographie nous ont amenés à n’en conserver que 11.
Les critères d’inclusion ont été les suivants :
• seules les études d’une durée de plus de 6 mois ont été retenues ;
• dans la thérapeutique bouche complète, le traitement des 4 quadrants doit être réalisé dans les 24 heures avec ou sans antiseptiques ;
• dans la thérapeutique conventionnelle, le traitement doit se réaliser en 4 séances espacées au moins de 1 semaine.
Sur les 11 articles retenus, 3 ont été exclus pour les raisons suivantes :
• durée de l’étude inférieure à 6 mois (Bollen CML, J Clin Periodontol 1998) ;
• analyse d’hybridation ADN (De Soete MJ, Periodontol 2001) ;
• analyses microbiologiques des anticorps (Apatzidou DAJ, Clin Periodontol 2004).
Introduit en 1995 par Quirynen [1], le concept de la thérapeutique bouche complète repose sur deux principes :
• la présence bactérienne dans les niches intraorales [23-4] ;
• la contamination croisée entre sites traités et niches intraorales [56-7] ,la recolonisation après traitement se réalisant au bout de 2 mois [8].
L’un des fondements du protocole de Quirynen est l’utilisation de la chlorhexidine. Quirynen espère ainsi réduire le nombre de bactérie au niveau des niches intra-orales. Toutefois, l’efficacité de l’utilisation de la chlorhexidine a été remise en cause et étudiée dans plusieurs travaux [910-11]. Ces études concluent que les différences entre les groupes tests et témoins ne sont pas significatives. Nous comprenons donc que l’efficacité de la thérapeutique bouche complète est plus due au fait de surfacer dans des délais courts qu’à la désinfection complète.
D’autres études ont été menées afin de comparer l’efficacité d’un traitement bouche complète à celle d’un traitement conventionnel par quadrant. Leurs auteurs ont utilisé des groupes témoins et des groupes tests [111213-14]. Ils ont tous constaté des améliorations significatives au bout de 1 mois dans les groupes tests. Mais, mis à part Koshy [11], tous ont prouvé que les différences n’étaient plus significatives au bout de 8 mois.
Au vu de ces résultats, nous pouvons nous demander quels sont les apports du principe de bouche complète dans la thérapeutique conventionnelle.
Les apports de cette technique sont multiples.
Troil-Linden et al. [15] ont montré que le taux de bactéries parodontopathogènes présentes dans la salive augmentait avec la sévérité de la parodontite.
Dahan et al. [16] ont montré, qu’il existait une relation étroite entre nombre de bactéries et formation de plaque : 23 patients atteints de maladie parodontale avancée ont suivi des règles d’hygiène strictes après détartrage-surfaçage. Leur indice de plaque a été relevé et des prélèvements de leur eau de rinçage ont été étudiés au microscope à contraste de phase. Ces auteurs en ont conclu que l’indice de plaque était nettement meilleur après ce protocole et ont noté une baisse significative de Prevotella intermedia, Tanerella forsythensis et Peptostreptococcus micros.
Aimetti et al. [17], plus récemment, ont également constaté, dans une étude sur 27 patients réalisée pendant une durée de 6 mois, une amélioration significative des paramètres cliniques avec une réduction moyenne de la profondeur de poche de 1,4 mm en 6 mois et une diminution du nombre de poches parodontales supérieures à 5 mm de 38,1 % chez chaque patient, ainsi qu’une baisse significative des principaux pathogènes parodontaux.
C’est sur ce principe que l’on a supposé que les patients atteints de parodontite sévère pouvaient être traités par le protocole de débridement sur bouche complète. De plus, il a été montré que le taux de parodontopathogènes diminuait rapidement après ce protocole. Cette réduction serait responsable d’un ralentissement de la formation de la plaque supragingivale. Ainsi, pour ce type de patients, le protocole de débridement sur bouche complète aboutit à une réduction immédiate de la charge bactérienne qui retarde la formation de la plaque et la recolonisation bactérienne sous-gingivale [18].
Chez certains patients présentant des pathologies particulières où un risque de bactériémie est à prévoir, tels que les patients diabétiques ou avec un antécédent d’endocardite, une antibiothérapie est obligatoire lors d’un traitement parodontal étiologique. Le fait de traiter en 2 séances espacées de 2 jours permet de diminuer la période d’antibiothérapie et, ainsi, de réduire les résistances bactériennes de plus en plus fréquentes [18].
Outre le fait qu’il est plus facile pour le patient d’organiser 2 séances chez le praticien que 4, lors des études dans la clinique de Leuven [19], il a été montré que les patients suivaient mieux leur traitement lorsqu’un débridement sur bouche complète était utilisé et comprenaient mieux l’approche de cette thérapeutique, étant donné qu’en la médecine générale, toute maladie infectieuse est généralement traitée dans sa globalité.
Ainsi, il n’a pas pu être établi de réelle supériorité du débridement bouche complète sur le traitement conventionnel par quadrant en dehors des patients à risque. En effet, toutes les études de comparaison à moyen terme ont conduit aux mêmes améliorations cliniques. Néanmoins, il est nécessaire de garder en mémoire les inconvénients du traitement bouche complète : le manque de suivi du patient lors de la thérapeutique de soutien, plus important lors d’un traitement bouche complète, qui est souvent à l’origine d’une diminution de l’efficacité du traitement à long terme et l’importance accrue de l’expérience de l’opérateur pour ce traitement qui se réalise en une seule étape.
La recherche dans la base de données de PubMed ainsi que la recherche manuelle ont conduit à une sélection de 195 articles. La lecture de ceux-ci, ou de leur résumé s’ils n’étaient pas accessibles en ligne, ainsi que l’étude de la bibliographie nous ont amenés à ne conserver que 17 articles.
Les critères d’inclusion ont été les suivants :
• études ayant fait l’objet d’une publication internationale à comité de lecture ;
• utilisation du laser Erbium : YAG ;
• études randomisées et contrôlées ;
• présence d’au moins 10 patients dans les groupes tests et dans les groupes contrôles ;
• évaluation des données cliniques et microbiologiques.
Trois articles ont été exclus pour les raisons suivantes :
• étude non comparative (Crespi R, J Periodontol 2005)
• étude animale (Schwarz F, J Clin Periodontol 2006) ;
• étude sur cultures de cellules humaines (Schwarz F, Clin Oral Implants Res 2000).
Le principe du laser principe repose sur la stimulation des électrons d’un atome par une source lumineuse ou électrique.
Le milieu actif du laser Er : YAG est constitué de cristal d’ytrium aluminium grenat dopé par l’erbium. Le rayon obtenu a une longueur d’onde de 2 940 nm, ce qui rend le laser très absorbé par l’eau.
Les lasers présentent plusieurs avantages qui peuvent apporter de réels bénéfices dans la thérapeutique étiologique.
Le laser Er:YAG a un effet antimicrobien, ce qui lui confère un avantage par rapport au débridement mécanique conventionnel manuel ou ultrasonore. Plusieurs études le montrent :
• Ando et al. [20] montrent qu’il a un haut pouvoir bactéricide sur les bactéries parodontopathogènes comme Porphyromonas gingivalis ou Aggregatibacter actinomycetemcomitans, à faible puissance (0,3 J/cm2) ;
• Folwaczny et al. [21] le confirment par une étude in vitro qui met en évidence une réduction de la charge bactérienne des surfaces radiculaires soumises à une irradiation laser de 10 J/cm2 et 15 Hz ;
• Schwarz et al. [22] montrent que l’utilisation du laser à 160 mJ et 10 Hz avec un temps d’application de 5 minutes sur une dent monoradiculée et de 10 minutes sur une dent pluriradiculée conduit à une réduction significative des spirochètes et à une augmentation significative des cocci et des bâtonnets immobiles à 1 an postopératoire ;
• Eberhard et al. [23] montrent une réduction des bactéries sous-gingivales parodontopathogènes (P. gingivalis, P. intermedia, Bacteroides forsythus, Treponema denticola) avec le laser KaVo Key 2 à 160 mJ et 10-15 Hz.
Cet effet bactéricide revêt un aspect important dans la thérapeutique étiologique et peut présenter un avantage par rapport à la thérapeutique étiologique conventionnelle. Toutefois, nous devons souligner qu’il se limite à la poche et à la surface radiculaire. En effet, aucun effet antibactérien sur les tissus mous n’a été démontré, ce type de laser étant moins pénétrant que d’autres lasers comme le Nd: YAG [24].
Plusieurs études ont comparé les surfaces radiculaires obtenues lors d’un traitement conventionnel et lors d’un traitement au laser.
Eberhard et al. [23] ont étudié l’état de surface de 30 dents monoradiculées traitées soit de manière conventionnelle, soit au laser. Par le surfaçage, ils obtiennent 93,9 % de surface radiculaire dépourvue de tout dépôt contre 68,4 % pour le laser, lorsque les deux traitements sont réalisés dans le même temps imparti. Il faut doubler le temps d’application du laser pour obtenir 83,3 % de surface dépourvue de tout dépôt minéralisé. Avec le surfaçage conventionnel, 73,2 % de la surface est dépourvue de cément, alors que le laser produit une surface rugueuse, avec des zones lisses de cément sans exposition dentinaire. Cette recherche pourrait démontrer la capacité, in vivo, du laser Er:YAG à éliminer le tartre des surfaces radiculaires impliquées dans une parodontite, bien que son efficacité n’atteigne pas celle obtenue avec une instrumentation manuelle. Le manque d’élimination du cément par rapport au surfaçage conventionnel pourrait permettre au laser d’être une approche de substitution pendant le traitement parodontal de soutien.
Schwarz et al. [25, 26] ont étudié des racines de dents atteintes de maladie parodontale et traitées au laser pendant 9 minutes à 120, 140, 160 et 180 mJ à 10 Hz. In vitro, les racines présentent des défauts du type cratère dont la profondeur est proportionnelle à l’intensité utilisée. De 120 à 160 mJ, les défauts se trouvent dans le cément ; à 180 mJ, ils atteignent la dentine. In vivo, les surfaces paraissent homogènes et lisses, avec des altérations de surface légères.
Un système de détection automatique du tartre a été proposé sur l’appareil laser Er:YAG. Le principe repose sur la fluorescence du tartre provoquée par le faisceau d’excitation laser diode caractérisé par une longueur d’onde de 655 nm (laser InGaAsp, indium-gallium-arsenide-phosphate) [27]. Toutefois, il faut préciser que ce phénomène n’est pas encore tout à fait compris et que le principe de fluorescence du tartre a été montré in vitro. Ce phénomène serait dû à la porphyrine, produit de métabolisme bactérien, hautement fluorescente à cette longueur d’onde [28]. Ce signal de fluorescence est renvoyé vers l’unité centrale et le rayon laser est activé. Celui-ci est automatiquement arrêté après disparition du signal de fluorescence. Ce système de rétroaction (feedback) permettrait une ablation sélective du tartre sous-gingival et la préservation du cément.
Schwarz et al. [29] ont montré que ce système de rétroaction permettait une élimination plus efficace du tartre sous-gingival que le surfaçage conventionnel.
Krause et al. [30] ont trouvé un taux moyen de tartre résiduel in vitro de 0 %, si on utilise le plus haut niveau de détection et un laser réglé à 140 mJ et 10 Hz.
Pourtant, on sait déjà que cette fluorescence pourrait être masquée par les dépôts bactériens ou les amas sanguins. On ne peut donc affirmer réellement l’efficacité du système de détection du tartre car trop peu d’études ont été menées. Des études supplémentaires se révèlent donc nécessaires.
Le laser Er:YAG aurait la faculté d’accélérer le processus de cicatrisation des tissus parodontaux en stimulant les cellules. Des expérimentations scientifiques ont montré que l’exposition de fibroblastes gingivaux humains à une faible radiation (de 1,68 à 5 J/cm2) stimule la prolifération cellulaire et la production de prostaglandines E2 (PGE2) par les fibroblastes [31]. L’adhésion et la croissance des fibroblastes gingivaux humains sur des surfaces traitées au laser sont plus importantes que sur une racine surfacée avec une curette [32]. Pour autant, trop peu d’expérimentations ont été réalisées et l’effet de biostimulation ne peut être affirmé sur la foi des données actuelles publiées.
Plusieurs études ont été réalisées sur l’utilisation du laser Er:YAG dans le traitement des péri-implantites. On peut citer celle de Kreisler et al. [33] qui, in vitro, a montré le pouvoir bactéricide de ce laser sur les surfaces implantaires concernant Streptococcus sanguinaris dont la charge bactérienne peut diminuer jusqu’à 99,94 %.
Les résultats cliniques préliminaires semblent montrer que le laser aurait une efficacité antibactérienne à la surface des implants, qu’ils soient lisses ou rugueux, sans endommager leur surface.
Pourtant, une étude clinique menée pendant 24 mois [34] et comprenant 12 patients atteints de péri-implantite conclut que l’utilisation du laser Er:YAG pour le traitement de cette pathologie est insuffisante pour contrer l’échec implantaire. En effet, si l’amélioration des paramètres cliniques, comme le saignement au sondage ou la profondeur des poches, est facilement visible dans les 6 mois, il n’est pas du tout prouvé que ces effets se maintiennent dans le temps. De plus, les études cliniques ne permettent pas de mettre en évidence la formation d’une nouvelle trame osseuse et, donc, d’une nouvelle ostéo-intégration pourtant recherchée dans le traitement de la péri-implantite.
L’utilisation du laser dans le traitement de la péri-implantite doit donc encore faire l’objet d’études expérimentales et de recul, même si l’effet décontaminant prouvé dans ces études peut en faire une aide complémentaire contre l’échec implantaire.
« Utilisations du laser en parodontologie : mythe ou réalité ? » voici le titre d’un article d’Ishikawa et al. [35] qui exprime bien le doute que ressentent encore les chirurgiens-dentistes face à ce nouvel outil qu’est le laser. En effet, si on lui connaît de nombreuses qualités comme ses effets hémostatiques, détoxifiants, décontaminants sans altération des tissus dentaires, les études publiées ne nous permettent pas de le considérer comme permettant le traitement de routine des maladies parodontales. De plus, les études réalisées sont peu nombreuses et les méthodes utilisées très hétérogènes : les fréquences, les niveaux d’énergie, les périodes d’observation différentes pour chaque étude ne nous permettent pas de réaliser une méta-analyse et, donc, de tirer une conclusion définitive. Il semble cependant que le laser soit un outil prometteur pour le chirurgien-dentiste dans le traitement étiologique des poches parodontales, des péri-implantites et dans la maintenance. Des études supplémentaires seront nécessaires pour établir le bien-fondé de l’utilisation de ce type d’appareils.
La recherche dans la base de données de PubMed ainsi que la recherche manuelle ont conduit à une sélection de 71 articles. La lecture de ceux-ci, ou de leur résumé s’ils n’étaient pas accessibles en ligne, ainsi que l’étude de la bibliographie, nous ont amenés à ne conserver que 9 articles avec, comme critères d’inclusion :
• les études ayant fait l’objet d’une publication internationale à comité de lecture ;
• les études randomisées et contrôlées ;
• les données cliniques et microbiologiques évaluées avec évaluation d’au moins A. actinomycetemcomitans, P. gingivalis, Fusobacterium nucleatum.
Un seul article a été exclu, celui de Sigush (J Periodontol 2005), pour cause d’étude animale.
La thérapie photodynamique et ses propriétés anti-infectieuses sont décrites en médecine depuis le début du siècle dernier. Cette thérapie est utilisée en dermatologie et en ophtalmologie, mais son application la plus reconnue scientifiquement concerne les traitements contre les cancers. Son action anti-infectieuse a récemment connu un regain d’intérêt.
La thérapie photodynamique repose sur la combinaison de deux éléments [36] :
• la lumière. La lumière rouge dont la longueur d’onde se situe entre 630 et 700 nm est le plus souvent utilisée notamment grâce à son efficacité et à sa capacité de diffusion dans les tissus humains. La lumière est transmise par une fibre optique courbe et de faible diamètre s’insérant ainsi facilement dans les poches parodontales. Les lasers à diode sont majoritairement utilisés ;
• un agent photosensibilisant. Il s’agit de composés cationiques, car ils sont efficaces sur les bactéries à Gram positif et à Gram négatif, comme le bleu de toluidine et le bleu de méthylène. Cet agent est activé et interagit avec les molécules biologiques environnantes par transfert d’électrons (réaction de type I) et avec l’oxygène présent localement par transfert d’énergie (réaction de type II). Ces réactions aboutissent à la formation de radicaux libres, très réactifs et responsables de l’effet létal sur toutes les cellules proches, par altération soit de l’ADN, soit de la membrane cellulaire ce qui provoque sa rupture ou l’inactivation des systèmes membranaires protéiques de transport.
La thérapie photodynamique a été étudiée chez des patients présentant des parodontites chroniques :
• Andersen et al. [37] ont évalué l’efficacité de la thérapie photodynamique sur 622 patients présentant une parodontite chronique modérée à sévère ;
• Braun et al. [38] ont évalué 20 patients présentant une parodontite chronique non traitée.
Dans les deux études, le but était de comparer l’efficacité du surfaçage accompagné d’une thérapie photodynamique au surfaçage seul. Les résultats concernant les paramètres cliniques comme la profondeur de poche, le saignement au sondage et le gain d’attache clinique montrent, au bout de 3 mois, une amélioration plus importante pour les dents traitées par le surfaçage + thérapie photodynamique que pour les autres.
Mais d’autres études contredisent ces résultats en montrant que la thérapie photodynamique n’offre pas d’effet bénéfique additionnel : dans les études de Christodoulides et al. [39] et de Chondros et al. [39], les patients ont reçu un traitement de surfaçage conventionnel avant de recevoir un traitement photodynamique (groupe test) ou un autre surfaçage seul (groupe contrôle). Ces deux études n’ont pas montré de différences significatives en termes de profondeur de sondage et de gain d’attache ; en revanche, le saignement au sondage était significativement diminué.
Du point de vue microbiologique, des études ont montré l’efficacité de cette technique sur plusieurs bactéries parodontopathogènes :
• Chondros et al. [40] ont noté une réduction significative de F. nucleatum et d’Eubacterium nodatum au bout de 3 mois ;
• l’étude in vivo de Qin et al. [41] a montré que la thérapie photodynamique était capable de détruire de façon significative les principaux pathogènes parodontaux tels qu’A. actinomycetemcomitans, P. gingivalis, F. nucleatum, P. intermedia, Prevotella nigrescens et Campylobacter rectus.
Au vu de ces résultats, la question de l’efficacité de la thérapie photodynamique comme solution de remplacement de l’antibiothérapie dans la parodontite agressive a été posée, et ce afin de limiter les résistances bactériennes ainsi que les différents effets indésirables cutanés, gastriques ou allergiques.
Ainsi, De Oliveira et al. [42] ont comparé l’efficacité de la thérapie photodynamique seule au surfaçage chez des patients atteints de parodontite agressive. Au bout de 3 mois, la réduction de la profondeur de poche et le gain d’attache clinique étaient semblables pour les deux traitements. Ces auteurs ont conclu que la thérapeutique photodynamique pouvait être une solution intéressante concernant les parodontites agressives.
De même, Novaes et al. [43] ont montré une réduction plus importante d’A. actinomycetemcomitans dans le groupe test au bout de 90 jours. Toutefois, on remarque que la réduction des bactéries du complexe rouge est plus importante dans le groupe contrôle, ce qui peut indiquer que ces deux traitements ne s’adressent pas aux mêmes groupes de bactéries. Leur combinaison serait alors plus judicieuse qu’un traitement unique dans la thérapeutique des parodontites agressives.
Comme pour toutes techniques innovantes, le manque d’informations sur la thérapie photodynamique ainsi que la variabilité des sources lumineuses et des agents photosensibilisants rendent difficile une synthèse des résultats. Toutefois, on peut déjà dire que l’utilisation de cette forme de thérapeutique pourrait permettre non pas de remplacer une antibiothérapie si elle s’avère nécessaire mais d’en limiter les indications et, ainsi, de diminuer le risque de résistances bactériennes. Les résultats cliniques de l’étude de Novaes et al. [43] sont intéressants car ils montrent bien que si la thérapeutique photodynamique agit de manière significative sur la croissance d’A. actinomycetemcomitans, elle agit moins sur les bactéries qui forme le complexe rouge que le surfaçage radiculaire conventionnel. Les deux thérapeutiques sont donc complémentaires sur le plan microbiologique. Reste à réaliser d’autres études, ce qui est indispensable pour confirmer ces résultats mais aussi pour poser les différentes indications de cette thérapeutique.
La recherche sur la base de données de PubMed ainsi que la recherche manuelle ont conduit à une sélection de 96 articles. La lecture de ceux-ci, ou de leur résumé s’ils n’étaient pas accessibles en ligne, ainsi que l’étude de la bibliographie nous ont amenés à ne conserver que 3 articles.
Les études sur l’ozone étant très récentes, les 3 articles consultés ont été retenus car pertinents. Ce sont des études surtout microbiologiques, réalisées in vitro. Les évaluations microbiologiques doivent comprendre l’étude d’A. actinomycetemcomitans, P. gingivalis et T. forsythensis.
L’ozone a longtemps été utilisé comme désinfectant de l’eau en raison de sa qualité d’oxydation fiable des impuretés chimiques, organiques et biologiques. En raison de sa puissance comme agent oxydant et d’une décomposition rapide des ions métalliques par catalyse, avec formation intermédiaire d’oxygène et de radicaux hydroxyles, il est idéal pour la réduction de la contamination bactérienne.
L’ozone a fait l’objet de nombreuses études en dentisterie restauratrice ainsi qu’en dentisterie endodontique :
• Nagayoshi et al. [44] ont étudié l’effet de trois concentrations d’eau ozonisée (0,5, 2 et 4 mg/ml dans de l’eau distillée) sur l’inactivation des bactéries cariogènes, parodontopathogènes et endodontopathogènes (Streptococcus, P. gingivalis, Porphyromonas endodontalis, A. actinomycetemcomitans et Candida albicans) en fonction du temps dans la culture ou dans les films bactériens. Les bactéries ont été inactivées au bout de 10 secondes selon la dose. Les anaérobies ont été particulièrement sensibles à l’ozone. Le Candida a mieux résisté ;
• la même équipe a étudié les effets de l’ozone sur les bactéries endodontiques et cariogènes [45]. Des colonies d’Enterococcus faecalis et de Streptococcus mutans ont été incubées pendant 6 jours avec des blocs de dentine stérilisés. Les canaux radiculaires des blocs de dentine infectés ont été soit irrigués pendant 10 minutes avec de l’eau ozonisée, soit traités à l’eau ozonisée et aux ultrasons puis, en guise de contrôle, traités à l’eau distillée avec et sans ultrasons. L’hypochlorite de sodium (NaCl 2,5 %) a servi de désinfectant de référence. Il élimine toutes les bactéries vitales de la dentine. L’eau ozonisée a réduit la quantité de streptocoques et d’entérocoques dans les tubules dentinaires ; lorsque l’ozone a été associé au traitement par ultrasons, plus de 90 % des bactéries ont été détruites. D’après ces résultats, les auteurs ont conclu que l’eau ozonisée pouvait être considérée comme un désinfectant de canal radiculaire potentiel, moins cytotoxique que le NaCl. Ce dernier peut causer des nécroses alors que l’eau ozonisée est extrêmement biocompatible.
Toujours dans l’optique de traiter la cause bactérienne de la maladie parodontale et au vu des résultats de l’ozone sur les bactéries cariogènes, l’application de l’ozone dans le traitement des parodontites et des péri-implantites a été très récemment étudiée.
Le Prozone®, commercialisé par W & H, est le matériel utilisé dans le traitement des parodontites et des péri-implantites. Il est composé d’un générateur d’ozone médical qui produit de l’air avec une concentration spécifique d’ozone. Selon les données du fabricant, 140 ppm d’ozone sont produites par minute, ce qui correspond à 2,24 mg d’ozone en 24 secondes. En parodontologie, le fabriquant recommande une utilisation de 18 secondes.
Son efficacité sur les bactéries parodontopathogènes a été testée in vitro par Eick et al. [46]. Ces auteurs ont mesuré le diamètre d’inhibition de chaque bactérie posée sur un gel d’agar après exposition à l’ozone (2 sessions de 24 secondes). Vingt-trois souches bactériennes ont été étudiées dont P. gingivalis, A. actinomycetemcomitans, à Gram positif comme à Gram négatif. Les résultats de l’étude sont les suivants :
• P. gingivalis a été éradiqué dès la première application de l’ozone ;
• A. actinomycetemcomitans l’a été après 18 secondes d’application ;
• les souches capnophiles ainsi que les souches anaérobies à Gram négatif ont été très sensibles à l’ozone,
• F. nucleatum n’a disparu qu’au bout de 24 secondes d’application d’ozone ;
• Candida albicans et Enterobacter cloacae ont fait partie des souches les plus résistantes.
Les auteurs concluent donc que l’ozone est actif contre les principales souches parodontopathogènes, en particulier contre P. Gingivalis, et de ce fait, c’est un adjuvant efficace au débridement mécanique dans la thérapeutique parodontale. Ces résultats confirment l’étude de Nagayoshi et al. [44] qui avait également relevé une extrême sensibilité de P. gingivalis à l’ozone.
Kshitish et Laxman [47] ont comparé l’utilisation de l’ozone liquide à la chlorhexidine 0,2 %, sous forme d’irrigation supragingivale, pendant 18 jours. Le premier objectif a été de comparer l’effet des deux molécules sur les paramètres cliniques tels que l’indice de plaque, l’indice gingival et l’indice de saignement papillaire. Le second objectif a été d’étudier, par PCR, l’évolution de la flore microbienne incluant les bactéries A. actinomycetemcomitans, P. gingivalis et T. forsythensis, l’Herpes simplex virus, le cytomégalovirus et le virus Epstein-Barr ainsi que le champignon C. albicans. Les résultats de cette étude in vivo sont les suivants :
• la réduction de l’indice de plaque, de l’indice gingival et du saignement papillaire est plus importante chez les patients traités par l’ozone que chez les autres, ce qui confirme l’étude de Guentherman et al. [48] qui montre une amélioration des paramètres cliniques après des irrigations répétées d’oxygène supragingivales ;
• la PCR montre une réduction d’A. actinomycetemcomitans pour l’ozone contrairement à la chlorhexidine pour laquelle il n’y a aucun changement. En revanche, il n’y a pas de diminution pour P. gingivalis et T. forsythensis dans les deux procédés ;
• l’ozone n’apporte pas un effet antifongique supplémentaire, la concentration de C. albicans étant la même dans les deux cas ;
• il ne montre pas d’effet antiviral. La chlorhexidine en présente même un qui lui est supérieur.
Considérant les limites de cette étude en termes de temps, l’ozone peut tout de même être considéré comme un agent antimicrobien prometteur dans la thérapeutique parodontale étiologique, notamment grâce à des interventions moins invasives et à une diminution des douleurs postopératoires. Toutefois, des études à long terme devront être menées afin d’établir l’efficacité réelle de l’ozone in vivo, d’évaluer la fréquence et la durée d’application nécessaire de l’ozone, ainsi que de déterminer la concentration spécifique pour lutter contre les bactéries parodontopathogènes.
L’utilisation de l’ozone dans les cas de péri-implantite devra également être étudiée car cette nouvelle technique pourrait permettre de désinfecter le site tout en respectant l’état de surface. De nouvelles études devraient permettre d’explorer cette voie thérapeutique.
La recherche sur la base de données de PubMed ainsi que la recherche manuelle ont conduit à une sélection de 257 articles. La lecture de ceux-ci, ou de leur résumé s’ils n’étaient pas accessibles en ligne, ainsi que l’étude de la bibliographie nous ont amenés à ne conserver que 5 articles.
Sur 5 articles consultés, un seul a été exclu, celui d’Hedberg (Anaerobe 2006), car c’est un article court sans résumé (tableau I).
Le mot probiotique vient du grec pro-bios qui signifie « en faveur de la vie ».
Les probiotiques sont définis par l’OMS comme « des microorganismes vivants qui, lorsqu’ils sont ingérés en quantité adéquate, ont des effets bénéfiques sur la santé de l’hôte ». Ils sont retrouvés soit dans des aliments, comme les produits laitiers fermentés, soit dans des médicaments ou des compléments alimentaires.
On distingue quatre grands groupes de probiotiques :
• les ferments lactiques, capables de produire de l’acide lactique par la fermentation de certains sucres comme le lactose. Ils sont regroupés en deux catégories en fonction de leur morphologie, les lactobacilles et les coques ;
• les bifidobactéries, qui appartiennent à la flore intestinale normale et possèdent une résistance aux sucs gastriques. Elles diminuent avec l’âge et leurs espèces varient selon l’âge également ;
• les différentes levures de type Saccharomyces principalement utilisées par l’industrie agroalimentaire ;
• les autres bactéries sporulées, dont Bacillus subtilis et cereus.
Les principaux mécanismes d’action des probiotiques sont :
• la production de substances antibactériennes ;
• l’inhibition des bactéries indésirables ou pathogènes ;
• la limitation de la croissance des bactéries pathogènes ;
• la compétition avec des germes pathogènes au niveau des sites de colonisation ou des nutriments ;
• la consommation des nutriments nécessaires au développement des souches pathogènes ;
• la dégradation des toxines produites par les germes pathogènes ;
• la modulation de la réponse immunitaire locale ou systémique.
L’objectif final du traitement parodontal est de restaurer une flore compatible avec la santé parodontale de l’hôte. Pour cela, certains auteurs se sont intéressés au facteur « absence de bactéries protectrices » en restaurant le nombre de bactéries protectrices par des probiotiques. En effet, Köll-Klais et al. [49] ont montré qu’il existait une prévalence plus élevée de lactobacilles, plus particulièrement Lactobacillus gasseri et Lactobacillus fermentum, dans la cavité buccale de patients sains par rapport aux patients atteints de parodontite chronique. Cette même étude a révélé que les lactobacilles sont capables d’inhiber la croissance de P. gingivalis, P. intermedia et A. actinomycetemcomitans.
Ces observations permettent de dire que les lactobacilles pourraient jouer un rôle dans la restauration de la santé parodontale de l’hôte, notamment L. reuteri.
L. reuteri a été découvert par l’allemand Gerhard Reuter. C’est le seul probiotique à produire de la reuterine, laquelle est un antibiotique à large spectre qui serait capable d’inhiber la croissance de certaines bactéries à Gram négatif et à Gram positif pathogènes mais aussi certaines levures et certains champignons et protozoaires.
Une des premières études menées sur la souche probiotique L. reuteri a été menée par Krasse et al. [50]. Son objectif était de déterminer si la souche L. reuteri était efficace dans le traitement des gingivites. Ses auteurs ont également évalué l’indice de plaque et le taux de L. reuteri dans la salive.
Caglar et al. [51] ont étudié les conséquences de deux modes d’administration de L. reuteri ATCC 55730 sur le taux salivaire de Lactobacilli et de Streptococcus mutans chez de jeunes adultes.
Dans une seconde étude, Caglar et al. [52] ont observé la présence de L. reuteri ATCC 55730 dans la cavité buccale au cours du temps durant un traitement discontinu par la bactérie.
Twetman et al. [53] ont étudié l’effet de chewing-gums contenant des L. reuteri ATCC 55730 et ATCC PTA5289 sur l’inflammation gingivale et sur le niveau de médiateurs de l’inflammation dans le fluide créviculaire. Cette étude en double aveugle s’est réalisée auprès de 42 patients présentant un niveau modéré d’inflammation.
Les résultats et les conclusions de ces différentes études sont résumés dans le tableau I.
Ces études nous laissent entrevoir l’existence d’effets bénéfiques de l’utilisation des probiotiques sur les maladies parodontales. Cependant, il existe un manque réel de preuves scientifiques étant donné le peu d’essais réalisés jusqu’à maintenant. De même, les effets à long terme devront être étudiés.
Ces quelques essais laissent tout de même ressortir le problème du temps de contact des probiotiques qui vont influencer les deux principales qualités requises pour un probiotique : la capacité à adhérer et la capacité à coloniser les niches buccales.
L’intégration des probiotiques pourrait être envisagée sous forme de complément, mais de nombreuses investigations sont encore à réaliser.
Ces nouvelles techniques ne peuvent prétendre remplacer le débridement mécanique mais sont toutes complémentaires du traitement conventionnel : elles ont toutes pour but de maîtriser le facteur bactérien de la maladie parodontale.
Elles ont comme points communs :
• des interventions moins invasives que les techniques plus anciennes ;
• une diminution des douleurs et de l’inconfort du patient ;
• une amélioration des conditions de travail pour l’opérateur ;
• une limitation des indications du traitement parodontal symptomatique.
Toutefois, comme pour toutes les nouvelles techniques, il paraît essentiel de réaliser d’autres études cliniques afin de préciser l’efficacité réelle en termes de gain d’attache et de réduction de la profondeur de sondage, ainsi que des études microbiologiques afin de définir les indications de chaque traitement.