Journal de Parodontologie & d’Implantation Orale n° 02 du 01/05/2013

 

Article

LE POINT SUR…

Didier GAUZERAN  

Praticien Hospitalier honoraire des Hôpitaux de Paris Chargé de cours de médecine buccale à l’Université Paris Descartes Membre titulaire de l’Académie Nationale de Chirurgie Dentaire

Les relations entre le parodonte et la grossesse sont une préoccupation que les praticiens doivent prendre en compte sans frilosité. La santé bucco-dentaire de la femme enceinte représente un enjeu de Santé Publique : en témoigne une décision des organismes sociaux de prendre en charge, en principe début 2014, un examen bucco-dentaire systématique réalisé dès le 4e mois de grossesse.

Les relations entre la grossesse et le parodonte sont actuellement bien documentées.

La gestation, par les modifications physiologiques qui l’accompagnent, influe sur les tissus parodontaux : les femmes enceintes présentent une plus grande susceptibilité des gencives aux irritations du fait des conséquences de l’élévation du taux des hormones sexuelles stéroïdiennes. Le résultat en est l’aggravation des lésions gingivales initiales ou l’éclosion de pathologies telles la gingivite hypertrophique ou l’épulis gravidique.

À l’opposé, de récentes études suspectent les maladies parodontales d’interférer sur l’évolution de la grossesse : accouchements prématurés et retard de croissance fœtale essentiellement. En France, la prématurité (principale cause de mortalité périnatale) représente 6,3 % des naissances vivantes et tend à augmenter depuis plusieurs années.

Il semble actuellement reconnu que le risque de prématurité et d’hypotrophie néonatale soit pour partie lié au statut parodontal. Ce risque serait fondé sur la diffusion et sur l’action au niveau foeto-placentaire de germes paropathogènes, d’endotoxines bactériennes, de médiateurs de l’inflammation notamment des prostaglandines qui favorisent le déclenchement de contractions utérines et la dilatation du col.

L’état parodontal de la femme enceinte doit, par conséquent, être une préoccupation pour ces femmes et pour les praticiens. À cet égard, une information doit être délivrée aux femmes enceintes sur les conséquences d’un mauvais état bucco-dentaire sur la gestation. En effet, selon certaines enquêtes, ces femmes négligent leur santé bucco-dentaire. Une information doit être également adressée aux praticiens en médecine bucco-dentaire qui trop souvent redoutent voire refusent, à tort, de les accompagner lors de la prise en charge de leur santé bucco-dentaire. Or, lorsqu’il existe une maladie parodontale, des travaux très récents semblent suggérer un bénéfice de la prise en charge parodontale sur le bon déroulement de la gestation.

Ce traitement, pratiqué idéalement durant le deuxième trimestre, comportera, selon les cas, un détartrage, un curetage radiculaire, un surfaçage… La prescription ponctuelle d’un bain de bouche antiseptique à concentration bactéricide efficace et sans alcool, peut apporter une aide.

Une sensibilisation appuyée sera faite autour de l’hygiène bucco-dentaire qui doit être renforcée et adaptée à la femme enceinte : brossage dentaire atraumatique avec une brosse à dent souple, brossettes interdentaires et fil dentaire, dentifrice adapté selon le niveau de sensibilité gingivale.

En terme de Santé Publique, la détection et le traitement des maladies parodontales au cours de la grossesse doivent faire partie du suivi prénatal afin d’optimiser le bon déroulement de la grossesse.

Lecture conseillée

  • Kim A. J., Lo A. J. et al. Scalling and root planning treatment for periodontis to reduce preterm birth and low birth weight: a systematic review and meta-analysis of randomized controlled trials. J Periodontal, déc 2012;83:1508-19

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