CHIRURGIE PLASTIQUE
Virginie MONNET-CORTI* Alain BORGHETTI**
*Docteur en chirurgie dentaire
Docteur de l’université d’Aix-Marseille II
**Docteur en chirurgie dentaire
Docteur en sciences odontologiques
Le frein est un repli de muqueuse tendue entre deux structures anatomiques.
La frénectomie est le terme employé en chirurgie plastique parodontale pour désigner l’élimination chirurgicale totale d’un frein. La frénotomie consiste en l’élimination partielle d’un frein.
Les objectifs de la frénectomie sont la correction ou l’élimination d’une anomalie anatomique de la gencive et/ou de la muqueuse alvéolaire [1],...
Le frein est un repli de muqueuse tendue entre deux structures anatomiques.
La frénectomie est le terme employé en chirurgie plastique parodontale pour désigner l’élimination chirurgicale totale d’un frein. La frénotomie consiste en l’élimination partielle d’un frein.
Les objectifs de la frénectomie sont la correction ou l’élimination d’une anomalie anatomique de la gencive et/ou de la muqueuse alvéolaire [1], Cette technique peut être associée ou non à un lambeau positionné latéralement ou à une greffe gingivale pour recouvrir la zone d’excision du frein.
La frénectomie concerne :
• le frein médian vestibulaire maxillaire ;
• le frein médian vestibulaire mandibulaire ;
• le frein médian lingual ;
• les freins vestibulaires latéraux.
Les freins médians vestibulaires maxillaires et mandibulaires ont été décrits par Placek et al. [2], en fonction de leur insertion par rapport au parodonte marginal. Ils ont proposé la classification suivante.
1. Attache muqueuse : l’insertion du frein labial maxillaire appartient à la muqueuse alvéolaire et se situe à la limite de la ligne muco-gingivale.
2. Attache gingivale : les insertions basses du frein labial maxillaire sont noyées dans la gencive attachée.
3. Attache papillaire : le frein labial maxillaire est inséré dans la gencive papillaire. La mobilisation de la lèvre (test de traction) entraîne dans ce cas un déplacement de la gencive marginale des incisives centrales.
4. Attache interdentaire : le frein labial maxillaire rejoint le sommet du septum gingival et se confond avec la papille bunoïde. Cette situation anatomique est généralement en relation avec la persistance du diastème interincisif.
Cette classification peut s’appliquer aussi pour distinguer l’insertion des freins latéraux et des freins linguaux. De plus, un frein peut présenter une attache simple mais aussi deux ou trois points d’insertion [3], ce qui est le plus fréquemment observé dans les freins latéraux.
Un frein n’est pas responsable de la pathologie parodontale ni de la présence d’un diastème. Il peut être considéré comme un facteur anatomique défavorable qui lui est associé.
Selon le rapport de l’Académie américaine de parodontologie [4], la frénectomie ne doit plus être considérée comme une modalité thérapeutique parodontale per se mais s’inscrire dans le plan de traitement d’autres défauts :
• problème de limitation des mouvements de la langue et des lèvres ;
• fermeture orthopédique d’un diastème ;
• problèmes purement esthétiques ;
• position sur une crête édentée gênant la réalisation d’une prothèse ;
• association à un manque de tissu kératinisé.
La frénectomie a des indications parodontales et biomécaniques.
Indications parodontales de la frénectomie :
• frein tractant la gencive marginale (ouverture du sillon gingivo-dentaire) et/ou entravant l’hygiène ;
• frein dysharmonieux pour l’esthétique du sourire gingival ;
• frein associé à une pathologie parodontale.
Indications biomécaniques de la frénectomie :
• frein hypertrophique associé à la fermeture orthodontique d’un diastème antéro-supérieur ;
• frein lingual court.
Frein exerçant une traction sur la gencive marginale et/ou entravant l’hygiène
Un frein « normal » est inséré à une distance de quelques millimètres de la gencive marginale, délimitant ainsi un bandeau de tissu kératinisé, et est attaché coronairement à l’attache du frein [5].
Si le frein s’insère dans la gencive libre ou qu’une lésion parodontale ou une récession a fait migrer les tissus jusqu’à l’insertion du frein, il n’y a plus de tissu kératinisé ni de gencive attachée à ce niveau [6]. S’il reste seulement de la muqueuse alvéolaire, l’hygiène devient difficile et l’inflammation gingivale sera susceptible de favoriser la progression d’une récession, surtout chez l’enfant [7], ou d’une poche parodontale.
Un frein mandibulaire peut entraver l’hygiène bucco-dentaire et créer des tensions de la gencive marginale, surtout quand il est associé à des insertions musculaires hautes [8].
Les freins latéraux exercent fréquemment une traction sur la gencive libre et rendent le vestibule peu profond, ce qui gêne le passage de la brosse à dents.
Ramfjord [9] fonde l’indication de frénectomie essentiellement sur la possibilité d’entretenir la santé gingivale par une bonne hygiène. Dans ces circonstances, le frein est considéré comme un facteur étiologique mineur de la pathologie parodontale [10], et/ou comme un facteur étiologique plus effectif dans les problèmes muco-gingivaux [11].
La traction exercée par le frein sur le parodonte marginal est néfaste car elle peut :
• ouvrir le sillon gingivo-dentaire ;
• permettre l’accumulation de plaque bactérienne [12] ;
• entraver l’hygiène (surtout s’il y a absence totale de gencive kératinisée) [13] ;
• tracter apicalement les tissus bordant une récession débutante ;
• exercer des tensions sur les tissus déplacés chirurgicalement.
Cette situation clinique défavorable se rencontre fréquemment avec des freins de type 3 et 4 de Placek [2, 14]. Sans intervention, les muscles oro-faciaux de la mimique et la mobilité des lèvres et des joues peuvent mobiliser la gencive libre.
En présence d’un parodonte de type IV dans la classification de Maynard et Wilson [15], la situation représente une zone de faiblesse.
Frein dysharmonieux
L’élimination d’un frein dysharmonieux a toute sa place dans la globalité thérapeutique de l’aménagement du sourire gingival et du traitement des asymétries du contour gingival (ligne des collets) [19]. Cet acte pourra être associé à toutes les techniques d’élongation coronaire.
La plupart du temps, un simple déplacement de l’insertion du frein est suffisant. Il ne doit pas laisser de cicatrice. Dans cet objectif, l’association à un lambeau positionné latéralement ou à une greffe gingivale est particulièrement indiquée.
La frénectomie à visée esthétique sera plus fréquemment associée à une technique de lambeau positionné latéralement [20] ou à une greffe gingivale [11] pour recouvrir le site excisé.
Frein associé à une pathologie parodontale
Pour Sangnes et al. [21], le frein serait un facteur secondaire fortement associé aux récessions.
Le frein mandibulaire est associé aux récessions chez 5 % des patients étudiés par Bork et Weiler [22], quel que soit leur âge.
La présence d’un frein volumineux ou inséré dans le tissu kératinisé peut compromettre la stabilité des tissus parodontaux postopératoires ; lorsque le traitement parodontal met en œuvre des déplacements tissulaires pour traiter le parodonte profond (régénération tissulaire guidée, comblement osseux, lambeau positionné coronairement) ou le parodonte marginal (lambeaux déplacés associés ou non à des greffes de conjonctif, tunnelisation).
Le frein peut être simplement déplacé apicalement, au moins 15 jours avant l’intervention. Dans certains cas, la frénectomie est réalisée pendant la thérapeutique chirurgicale.
Frein médian hypertrophique et diastème antéro-supérieur
La corrélation entre la présence d’un frein médian et d’un diastème a suscité de nombreuses controverses. Le frein est-il la cause ou la conséquence du diastème ?
Pour certains auteurs (Huret et al. [23] ; L’Hirondel et Aronowick [24] ; Marie [25]; Thévenin [26] ; Woldringh [27]), la présence d’un frein représente l’étiologie primaire du diastème et la frénectomie est recommandée avant le traitement orthodontique. Pour d’autres (Fischer et Psaltis [28]), ce serait la persistance d’un diastème qui empêcherait l’atrophie du frein par défaut de pression entre les incisives. Le frein serait ainsi la conséquence du diastème.
Taylor [29], au cours d’une étude épidémiologique sur 516 enfants âgés de 5,5 à 11 ans et 1 067 enfants âgés de 12 à 18 ans, a montré que, chez l’enfant de 7 ans, le diastème inter-incisif est physiologique (98 % à 7 ans) et qu’il disparaît au cours de la croissance (7 % à 12 ans).
Popovich et al. [30] étudient 230 patients présentant un diastème de plus de 0,5 mm à l’âge de 9 ans. À 16 ans, 159 diastèmes (83 %) s’étaient fermés spontanément sans différence selon le sexe. Les cas où la fermeture ne s’était pas faite spontanément révélaient la présence d’une suture intermaxillaire « en pelle ou en W » et d’un frein à insertion « basse » (attache papillaire ou transpapillaire). Selon ces auteurs, la frénectomie ne serait indiquée que dans environ 20 % des cas.
Pour Wilson [31], le diastème central se réduit grâce à la croissance de la région du prémaxillaire en bas et en avant, à l’éruption des dents et au mouvement mésial des incisives centrales résultant de la pression exercée par les incisives latérales et les canines en éruption. Seuls les rares cas de freins épais et larges pourraient être considérés comme un facteur de l’étiologie du diastème et nécessiteraient une élimination chirurgicale.
À l’heure actuelle, il est admis que les diastèmes représentent un stade physiologique du phénomène de mise en place des dentitions temporaires et permanentes [30]. Et, dans de nombreux cas, le diastème interincisif se ferme spontanément [18, 32, 33].
Cependant, l’indication d’éliminer un frein associé à une fermeture orthopédique de diastème est fondée sur les études d’Ewen et Pasternak [34], et de James [35]. Les premiers ont montré que lors de l’élimination de la contention après fermeture du diastème interincisif, l’espace s’ouvrait à nouveau. Après nouvelle fermeture et frénectomie, à la dépose de la contention, l’espace restait fermé. James, pour sa part, a sélectionné 10 cas avec diastème médian et une denture complète et stable chez des patients âgés de 12 à 22 ans. Un an après frénectomie totale, la mesure des diastèmes montrait une diminution chez 8 patients, une stabilité chez 1 patient et une augmentation chez le dernier.
La frénectomie en présence d’un diastème a les indications suivantes :
• incisives centrales divergentes ou en rotation ;
• incisives latérales maxillaires absentes, l’espace entre les incisives centrales devant être fermé avant la prothèse fixée ;
• persistance du diastème pendant la rétraction du bloc antérieur dans les classes II division 1 d’Angle ;
• apparition d’un diastème interincisif en cours d’un traitement orthodontique (fréquemment associé à l’extraction des premières prémolaires) ;
• absence d’une incisive centrale dont le choix thérapeutique est la fermeture de l’espace [35].
Même si l’indication de frénectomie associée à la fermeture d’un diastème est réduite, elle reste consensuelle. Par contre, la polémique concerne la détermination du moment le plus opportun dans le plan de traitement pour intervenir. Pour certains, la frénectomie doit précéder la fermeture du diastème [36]. Pour d’autres, le diastème doit être d’abord fermé et la frénectomie réalisée lors de la contention orthodontique [37, 20], si possible en fin de croissance. Certains cas ont même montré une fermeture spontanée du diastème après l’élimination du frein [38].
Delaire [39] préconise d’attendre l’âge de 8 ans pour intervenir sur un frein maxillaire car avant cet âge, le frein labial maxillaire, par les insertions fibreuses qu’il exerce au niveau de la suture inter-prémaxillaire, représente un facteur de disjonction suturale et un facteur de croissance sous l’influence de la traction des muscles labiaux supérieurs, et par conséquent un facteur d’expansion active.
En fonction des critères liés à la croissance osseuse, il semblerait logique d’intervenir le plus tard possible. En effet, la hauteur d’insertion d’un frein dépend en grande partie du développement vertical des procès alvéolaires [40]. Ainsi, un frein peut apparaître hyperplasique par manque de développement en hauteur des structures alvéolaires [41]. Il faudra donc tenir compte de l’âge réel du patient, de l’éruption des six dents antérieures mais aussi du développement osseux alvéolaire pour décider d’intervenir. Il a été constaté que l’insertion du frein interincisif maxillaire a tendance à s’apicaliser pendant la croissance de l’enfant et que, pour cette raison, il ne faut pas intervenir trop précocement [42].
Mais, ici encore, le sens clinique et le dialogue entre l’orthodontiste et le praticien permettront, au cas par cas, de déterminer la date adéquate de l’intervention.
Frein lingual court
Le frein lingual peut être court, épais ou fibreux et même, rarement, soudé au plancher de la bouche [44].
La prévalence d’un frein lingual anormal est inférieure à 1/2 000 [45]. Dans une population présentant des troubles du langage, la prévalence a été estimée à 0,2 à 0,3 % [46]. Une étude récente [47] montre, sur 1 402 patients (âgés de 5,8 à 62 ans), une prévalence de 9 % de frein linguaux insérés anormalement. Parmi ces 127 patients, 62 (48,81 %) présentaient des troubles du langage, ce qui représente une corrélation statistiquement significative entre troubles du langage et frein lingual inséré anormalement.
Un frein lingual très court peut avoir une incidence non seulement sur la phonation et la déglutition [48] mais aussi sur la croissance mandibulaire. Il existe peu de cas où le patient a fait de nets progrès phonétiques après frénectomie linguale [49, 50]. L’« ankyloglossie » empêche de positionner la langue au sommet du palais et maintient le stade de déglutition infantile [51].
Certains auteurs ont associé le frein lingual court au prognathisme mandibulaire [51], mais le manque de recherche clinique sur le sujet ne permet pas d’affirmer cet effet sur la croissance mandibulaire. L’impression clinique semble montrer une accélération de la croissance mandibulaire et de l’éruption dentaire après la libération de la poussée linguale.
La traction sur la gencive marginale rétro-incisive représente les mêmes méfaits qu’en vestibulaire, y compris l’aggravation d’une récession.
L’insertion large d’un frein et la présence de la pointe de la langue derrière les incisives mandibulaires constituent une entrave à l’hygiène, permettant l’accumulation de plaque et le développement d’une inflammation.
Afin de mieux poser l’indication de frénectomie linguale, Williams et Waldron [48] proposent d’enregistrer des paramètres quantitatifs de différents aspects anatomiques et fonctionnels de la langue. Ce sont des mesures anatomiques, selon Fletcher et Meldrum [52] de :
• la distance entre le point d’insertion de la base de la langue à la mandibule et la glande sublinguale (mesure A) ;
• la longueur du frein mesurée de la glande sublinguale au point d’insertion dans la langue (mesure B) ;
• la partie libre antérieure de la langue du point d’insertion du frein au point médian auquel la muqueuse de la langue se change en papilles filiformes (mesure C).
Ainsi, sur les mesures enregistrées chez 210 enfants âgés de 11,5 ans, Fletcher et Meldrum [52] réalisent un rapport de C/A + B + C qui représente la longueur de la partie libre linguale ramenée à la dimension totale sublinguale. Deux groupes ont pu être discernés : celui où la langue présente une liberté limitée (rapport de 0,14 à 0,22) et celui où la langue est totalement libre (rapport de 0,39 à 0,51).
Les autres paramètres évalués sont des mesures de la fonction linguale fondées sur l’élévation de la pointe de la langue, le test d’articulation phonétique et les mouvements répétitifs linguaux rapides.
Marchesan [53] compare trois méthodes quantitatives pour distinguer le mieux possible un frein lingual normal d’un frein anormal. Sur les 98 patients évalués, la méthode la plus pratique et la plus significative consiste à faire ouvrir grand la bouche et à faire placer la pointe de la langue sur la papille rétro-incisive.
Les indications de la frénectomie linguale sont :
• la présence d’un frein lingual anormalement court ;
• la gêne de la langue dans l’amplitude des mouvements linguaux (impossibilité de propulser la langue au-delà des bords incisifs mandibulaires) ;
• les tractions tissulaires excessives des tissus marginaux rétro-incisifs mandibulaires ;
• l’association avec une récession évolutive rétro-incisive ;
• l’accumulation de plaque du fait de l’impossibilité de nettoyer.
Cette intervention peut être pratiquée dès le plus jeune âge puisqu’elle fait partie des gestes réalisables dès la naissance (d’une manière très expéditive, par simple section). Cependant, elle peut être indiquée chez l’adulte lors d’une découverte tardive. En général, selon la maturité psychomotrice de l’enfant, elle pourra être envisagée vers 5 ou 6 ans.
Selon le type d’attache du frein, on pourra réaliser une frénotomie ou une frénectomie. La frénotomie suffira pour traiter un frein à insertion superficielle. La frénectomie permettra de traiter un frein à insertion périostée profonde et pourra éliminer un frein inséré dans la suture intermaxillaire.
L’anesthésie est para-apicale en vestibulaire et un rappel palatin peut être envisagé si l’insertion du frein est palatine. Le frein est mis en évidence par une forte préhension de la lèvre et immobilisé par des précelles autobloquantes.
Les incisions dans la gencive attachée, à 1 mm de part et d’autre de l’attache du frein sur la gencive, délimitent les deux côtés d’un triangle dont le sommet gingival peut être éventuellement dans l’espace interdentaire ou sur la face palatine. Puis un second triangle à sommet opposé est disséqué sur la face interne de la lèvre, dans la muqueuse labiale, à l’aide d’une lame ou de ciseaux à gencive. La base commune des deux triangles correspond à la ligne muco-gingivale des dents adjacentes.
La totalité des tissus du losange (fig. 1) est réséquée. L’attache du frein est décollée en épaisseur totale si l’objectif est une frénectomie ou en épaisseur partielle si l’objectif est une frénotomie. Le résultat est l’obtention d’une plaie en losange. En présence d’un frein inséré en palatin, il est conseillé de désinsérer les fibres situées dans la suture intermaxillaire à l’aide d’une curette parodontale. Lorsque le frein est associé à un diastème, il était préconisé de sectionner la papille et le tissu interdentaire [36, 18] qui auraient pu être responsables de la récidive du diastème. Cependant, Baum [54] a montré histologiquement que les fibres ne traversent pas l’espace interincisif mais s’insèrent dans la suture intermaxillaire. Ainsi, actuellement, surtout lorsqu’on connaît les difficultés de la chirurgie plastique parodontale appliquée à la restauration des papilles, il est conseillé de respecter la papille [55].
Les berges du losange sont rapprochées par une série de points discontinus ou un surjet en partant de la lèvre vers la gencive. La zone triangulaire d’excision du frein dans sa partie gingivale est protégée par une suture en croix.
Si le frein est très volumineux et à insertion papillaire, et la zone laissée à nu très étendue, ou si le site est impliqué dans l’esthétique du sourire, une greffe gingivale triangulaire (fig. 2, 3) prélevée sur un site donneur interdentaire vestibulaire adjacent peut être adjointe [11]. Un lambeau positionné latéralement [20] peut aussi jouer ce rôle protecteur.
À la mandibule, la frénectomie est fréquemment associée à une greffe gingivale classique pour réaliser dans le même temps un renforcement du complexe mucogingival et un approfondissement vestibulaire [56]. Vanarsdall [33] préconise de désinsérer la partie coronaire des muscles du menton et la mise en place de la greffe gingivale.
Les freins latéraux maxillaires et mandibulaires sont la plupart du temps repositionnés par frénotomie car ils sont moins volumineux que les freins médians, mais les indications de frénectomie restent les mêmes.
L’intervention doit permettre l’allongement suffisant du frein lingual ou sa suppression (fig. 4).
Simple et bénigne, elle demande une grande attention car de nombreuses structures anatomiques nobles telles que les muscles génioglosses, les vaisseaux ranins, l’artère linguale, le nerf lingual et les canaux salivaires sont très proches.
Après anesthésie para-apicale linguale rétro-incisive, la base de la langue est infiltrée en surface. Les acini des canaux salivaires de Wharton sont visualisés et doivent être scrupuleusement respectés au cours de l’incision. Si le frein est fin, une incision horizontale à la base peut être suffisante [57]. Quand le frein est épais et la langue attachée au plancher buccal, une des techniques les plus simples consiste à réaliser une frénectomie en losange associée ou non à des incisions horizontales à la base de la langue si le frein est très volumineux.
La langue est tendue en haut et en arrière par l’aide-opératoire ou à l’aide d’une sonde cannelée ou encore à l’aide d’une compresse maintenue entre le pouce et l’index de l’assistant(e) opératoire (fig. 4a).
Le frein est sectionné en partant de la zone rétro-incisive (sommet du premier triangle) jusqu’à la pointe de la langue (sommet du second triangle), délimitant ainsi un losange. Tous les tissus du losange sont éliminés.
La partie rétro-incisive du frein est traitée de la même manière qu’un frein médian vestibulaire selon son type d’attache (fig. 4b).
Les berges de la plaie sont rapprochées et suturées par un surjet ou des points simples séparés (fig. 2). Selon la taille du frein dans la région rétro-incisive, dans la gencive attachée, la petite zone périostée sera protégée par un point en croix ou par une greffe gingivale ou du Surgicel® [57].
La difficulté opératoire réside dans la section totale de la bride fibreuse tout en se tenant à distance raisonnable du plancher de la langue. Dans certains cas, l’allongement obtenu ne libère pas totalement la pointe de la langue. Il permet cependant d’éliminer les tractions sur le parodonte marginal rétro-incisif et d’augmenter l’amplitude des mouvements musculaires linguaux.
Si des troubles de l’élocution sont associés, il peut être nécessaire de prescrire une rééducation orthophonique de la langue [45].
La frénectomie a plusieurs indications, mais le succès de la technique est dans tous les cas dépendant des mêmes paramètres.
La frénectomie est efficace dans le rétablissement de conditions anatomiques favorables au maintien à long terme de la santé parodontale.
Pour l’esthétique du sourire gingival, c’est un geste cosmétique efficace si l’on prend soin de ne pas laisser se développer de cicatrice disgracieuse propre à la technique opératoire. Parfois, la cicatrisation de la frénectomie sans apport tissulaire peut laisser une fine cicatrice qui s’estompe dans le temps tandis qu’en associant la frénectomie à une greffe gingivale triangulaire prélevée en vestibulaire, le résultat esthétique est optimal.
Cette frénectomie correspond à un prérequis essentiel pour la réalisation de techniques chirurgicales déplaçant les tissus et/ou nécessitant une immobilisation parfaite pendant la cicatrisation. La frénectomie aide la réalisation technique et la stabilité tissulaire postopératoire immédiate.
Edwards [18] montre qu’en présence de freins anormaux associés à des diastèmes, il existe une forte tendance à la récidive après fermeture orthodontique.
Pour Naves [58], la frénectomie a, dans certains cas, un rôle thérapeutique sur le diastème. En effet, des diastèmes ont été totalement réduits au bout de quelques semaines par cette seule intervention. Mais que penser de la participation de la croissance et de l’éruption, même de quelques semaines seulement, si ce sont des périodes très actives ?
Cependant, pour éviter la récidive du diastème, il semblerait plus important d’avoir un bandeau de gencive attachée le long de la ligne médiane et que les incisives centrales aient été déplacées dans leur ensemble (couronne et racine) [20].
La désinsertion d’un frein lingual à insertion rétro-incisive de types 3 et 4 [2] permet d’éliminer les tractions sur la gencive libre. La section d’un frein court permet de libérer la langue dans ses mouvements et d’obtenir, pendant l’intervention, une propulsion au-delà des bords incisifs mandibulaires (fig. 4c).
Les avantages et les inconvénients sont résumés dans le tableau I.
La frénectomie est un acte simple et de routine, en chirurgie plastique parodontale, qui doit être réalisé à bon escient, en connaissant bien les indications.
Les signes cliniques associés permettant d’indiquer une frénectomie [16] sont :
• le blanchissement de la papille interdentaire [17], ou de la gencive libre lors de la traction ;
• la limitation des mouvements labiaux ou linguaux (frein court et tendu) ;
• la proximité d’insertion avec la gencive marginale libre ;
• la largeur du frein au niveau de son insertion [18] ;
• l’ouverture du sillon gingivo-dentaire lors de la traction.
Note : l’expérience clinique montre que la cicatrisation des chirurgies parodontales est améliorée par l’absence d’un frein à attache gingivale ou papillaire.
La frénectomie en présence d’un diastème chez l’enfant peut être indiquée :
• après l’éruption des six dents antérieures maxillaires [43, 9] ;
• après l’âge de 8 ans [39] ;
• si le développement osseux alvéolaire vertical est normal [41],
Note :
• la frénotomie laisse une plaie périostée ;
• la frénectomie expose une zone d’os dépériosté :
– jusqu’à la ligne muco-gingivale au cours de la frénectomie totale ;
– uniquement sur la base du frein dans la frénectomie partielle.
Conseil : il convient de biseauter les incisions du premier triangle dans la gencive kératinisée pour éviter les cicatrices et permettre un meilleur fondu entre les berges de la plaie et le tissu de cicatrisation de deuxième intention.
Conseil : chez l’adulte, il est conseillé de respecter la papille interdentaire pour des raisons esthétiques.
Conseil : pour les frénectomies vestibulaires et linguales, il est préférable d’utiliser un fil de suture synthétique résorbable très fin (5/0 ou 6/0) et une aiguille demi-cercle courte (16 mm) pour préserver l’intégrité des berges de la muqueuse alvéolaire labiale et sublinguale, très fragiles, faciliter le positionnement des sutures et, le cas échéant, ne pas déposer les points.