Article
Marzieh ALIKHASI* Elaheh BEYABANAKI**
*DCD, maîtrise de science, professeur assistante Centre de recherche dentaire, Département de prothèse, université des sciences médicales de Téhéran, Iran
**Résident en prothèse, Département de prothèse, université des sciences médicales de Téhéran, Iran
Avec l’évolution des traitements implantaires, les complications sont progressivement apparues. La fracture de la vis de pilier constitue l’un des plus grands défis à relever. Bien que la meilleure façon pour éviter cette situation soit de bien connaître les situations qui conduisent à une telle fracture afin de pouvoir les éviter en amont, il est prudent d’apprendre à gérer l’élimination des parties fracturées afin de sauver le reste de la structure implantaire. Cet article insiste tout particulièrement sur la façon de résoudre les complications d’une fracture de la vis de pilier.
Along with developing implant therapy, its complications have been developed as well. One of these challenging problems is the abutment screw fracture. Although the easiest way to avoid this situation is to be familiar with the conditions that can lead to this kind of fracture, so that it could be initially prevented, it is wise to learn how to manage to remove broken part to save the rest of the implant. This article places special emphasis on how to solve the complications of abutment screw fracture.
L’échec des restaurations implanto-portées peut résulter de problèmes techniques incluant une fracture de la vis de pilier (Karabeg et Macan, 2008 ; Luterbacheret al., 2000 ; Binon, 2000 ; Satterthwaite et Rickman, 2008). La prévalence de cette situation désagréable est considérée comme étant de l’ordre de 0,5 à 8 % et n’excède pas 2,5 % au bout de 10 ans (Satterthwaite et Rickman, 2008 ; van den Broeke et de Baat, 2008). Les causes d’une fracture de la vis de pilier sont multifactorielles, mais la principale est représentée par le dévissage non détecté de la vis et les micromouvements dus à des forces latérales (Nergizet al., 2004). Le dévissage en lui-même peut être dû au bruxisme, à une suprastructure iatrogène, à une surcharge ou à une dysfonction (Nergizet al., 2004 ; Greenet al., 2002 ; Tayloret al., 2000 ; Eckertet al., 2000 ; Bakaeenet al., 2001). Il existe d’autres causes de fracture de la vis de pilier telles que des implants trop courts ou trop étroits, ou encore qui ne sont pas insérés perpendiculairement au plan occlusal, des extensions trop importantes de la suprastructure, des soins dentaires iatrogènes, un torque excessif et un défaut de fabrication de la vis (van den Broeke et de Baat, 2008). Le choix méticuleux des cas cliniques et du plan de traitement peut prévenir la plupart des complications implantaires. Il faut comprendre qu’une vis cassée entraîne un « plan de sauvetage » et qu’aucune méthode ne peut être efficace à 100 %. Il est important non seulement de retirer l’élément fracturé mais également de déterminer la cause de l’échec et de modifier la prothèse si nécessaire. Des visites de contrôle régulières peuvent prévenir d’autres fractures de vis, car elles permettent de diagnostiquer et de traiter les problèmes au plus tôt (Nergizet al., 2004).
Les cours de formation en implantologie auxquels participent les dentistes leur permettent d’apprendre comment placer et restaurer des implants. Cependant, on y aborde peu le problème du retrait d’une vis fracturée. La gravité de ce problème réside dans le fait que si la vis fracturée n’est pas retirée en toute sécurité, l’implant peut devenir inutilisable.
Plusieurs rapports ont décrit des techniques innovantes pour « sauver » des implants dont la vis était fracturée. Néanmoins, il n’existe pas de description globale des techniques permettant de déposer la vis fracturée en toute sécurité. Le but de cet article est de présenter des techniques permettant de déposer des vis de pilier implantaire fracturées et sauver l’implant endo-osseux.
Lorsqu’une vis se fracture au niveau ou en dessous de la tête de l’implant et qu’elle est visible ou qu’elle vibre sous un jet d’air, il est parfois facile d’en inverser la rotation en donnant à son sommet, avec une pointe exploratrice ou sonde, un mouvement circulaire contraire (Ho-Nang Pow et Chiu-Man Leung, 2008).
Une technique simple qui fonctionne la plupart du temps consiste à placer une précelle avec une boulette de coton à côté de la vis. L’étape suivante consiste à tourner dans le sens des aiguilles d’une montre en exerçant une légère pression le long de la vis. En général, les fibres de coton s’enroulent autour de la vis ce qui permet au clinicien de la dévisser facilement.
Si le fragment restant de la vis cassée se situe au-dessus de la tête de l’implant, il peut souvent être saisi fermement par une pince hémostatique puis dévissé (Ho-Nang Pow et Chiu-Man Leung, 2008).
Les oscillations provenant d’un détartreur ultrasonique peuvent progressivement inverser le sens de rotation de la vis et la faire émerger de l’implant. Il devient alors possible de l’attraper avec de fines précelles pour coton ou en utilisant de la cire collante. Dans ce protocole de récupération d’une vis, le clinicien doit prendre le soin de placer un embout fin de détartreur ultrasonique directement sur le sommet de la vis. Sinon, les spires de l’implant peuvent être endommagées.
Une autre façon de retirer une vis abîmée consiste à la lubrifier avant de la dévisser. Pour ce faire, on peut utiliser quelques gouttes d’eugénol, du lubrifiant pour pièces à main ou même de l’huile minérale. Après avoir appliqué le lubrifiant, le clinicien doit attendre quelques minutes qu’il fasse son effet avant d’essayer de retirer la vis avec une sonde ou un détartreur ultrasonique dans un mouvement anti-horaire.
L’utilisation d’une fraise boule 0,25 montée sur un contre-angle à vitesse réduite et tournant en mode inverse peut aider à dévisser la vis. Dans cette méthode, la petite fraise boule agit comme un tournevis et maintient la tête du fragment (Ho-Nang Pow et Chiu-Man Leung, 2008). Une autre approche consiste à créer une gouttière ou une fente dans la tête de la vis cassée en utilisant une fraise ronde 0,25 que l’on déplace d’un côté à l’autre de la vis. Ensuite, on peut la dévisser en utilisant un tournevis à tête plate. Cette technique est surtout recommandée pour les implants à hexagone externe. Le diamètre de la vis à l’intérieur d’un implant à hexagone interne est trop petit pour pouvoir le fraiser.
Si la fracture est dans le bas de la vis du pilier, rendant impossible tout retrait avec les techniques les plus simples, il devient indispensable d’utiliser un kit de dépose (récupération) (Ho-Nang Pow et Chiu-Man Leung, 2008). Ces kits peuvent être utilisés dans n’importe quelle situation ; cependant, les vis cassées qui dépassent la face occlusale de l’implant et qui peuvent être attrapées avec une pince hémostatique ou rainurée doivent être retirées avec ce type d’instruments. Ces kits sont généralement composés de forets, de guide-forets et d’instruments évaseurs. Certains kits permettent de réparer l’implant en dévissant le fragment fracturé (fig. 1), alors que d’autres le réduisent en éclats. Il est conseillé aux débutants de s’entraîner d’abord sur un analogue d’implant afin d’être opérationnels le jour où ils seront confrontés à une telle situation. Ces kits ne garantissent pas le retrait de toutes les vis de pilier fracturées. Par ailleurs, ils doivent être utilisés avec de grandes précautions.
Plusieurs autres instruments peuvent être utilisés pour retirer une vis fracturée. Par exemple, si le pilier n’est plus en place même depuis peu de temps et que l’implant est enfoui sous les tissus mous, il faudra réaliser une intervention chirurgicale mineure pour exposer l’implant. Dans ce type de situation, l’élimination du tissu mou peut se faire à l’aide d’un laser pour tissu mou dans un mouvement circulaire. On peut procéder de la même façon par électrochirurgie. Cependant, le clinicien procéder prudemment afin de ne pas toucher le métal. Chacune de ces techniques permet de limiter le saignement, ce qui facilite la visualisation du sommet de l’implant. Le grossissement du champ opératoire à l’aide d’un microscope endodontique ou même de lunettes de lecture (correction + 3) peut également être utile.
L’un des critères de succès les plus importants pour retirer une vis fracturée est l’accès au fragment restant. Cet accès est moins facile sur les implants à connexion interne qu’à connexion externe. Une vis fracturée à l’intérieur de la connexion interne d’un implant est généralement impossible à dévisser sans une prise ferme. Or, pour cela, il faut créer un accès suffisant en découpant le plus possible du pilier ou en le sectionnant de vestibulaire en lingual. Lorsque l’on a accès à la portion de vis restante, on doit pouvoir la sortir soit en réalisant une rainure, soit en aplatissant les côtés pour pouvoir la saisir et la faire tourner.
Une fois que la vis a été retirée, il est important de vérifier que les spires internes de l’implant n’ont pas été endommagées. La meilleure méthode pour compléter cette inspection est d’introduire une tige de guidage à l’intérieur de l’implant. Le filetage ne doit opposer que peu ou pas de résistance. Une faible résistance révèle que des spires ont été légèrement abîmées. Si les spires sont très endommagées, on peut utiliser un taraud, que l’on trouve dans la plupart des kits de réparation, pour refileter les implants. Ce taraud doit être utilisé avec précaution. La déformation du filetage à l’intérieur de l’implant peut endommager les spires de façon irréversible, et peut même nécessiter la dépose de l’implant.
En résumé, en dehors du choix méticuleux des cas cliniques, du plan de traitement et d’un suivi régulier, les progrès en matière de conception des connexions implantaires facilitent la fabrication de prothèses à la longévité accrue. Cependant, même les techniques implantaires les plus perfectionnées comportent leur lot d’échecs. Les cliniciens en charge de la santé bucco-dentaire doivent être préparés à affronter des complications et en informer les patients bien avant le début du traitement.