Article
Kian KAR* Alon FRYDMAN** Krikor SIMONIAN***
*DDS MS, Professeur associé de dentisterie
clinique, Directeur clinique de
parodontologie avancée, École dentaire
d’Ostrow, université de Californie du Sud
**DDS, Professeur-assistant en clinique,
parodontologie avancée, École dentaire
d’Ostrow, université de Californie du Sud
***DDS, Professeur-assistant en clinique,
parodontologie avancée, École dentaire
d’Ostrow, université de Californie du Sud
L’implantologie est un outil merveilleux pour restaurer l’édentement partiel ou total des patients, ou une dentition sévèrement endommagée et dont le pronostic est compromis si l’on doit opter pour un traitement conventionnel. En dépit de la popularité et de l’utilisation croissante des implants dentaires, la réponse biologique qui se manifeste autour d’eux n’est pas encore bien élucidée. L’implantologie a évolué depuis la restauration de denture et de fonction masticatoire perdues pour devenir un outil contemporain dans le plan de traitement de dents compromises. Dans de telles situations, interviennent des considérations sur l’équilibre entre le rapport risque/coût et les avantages de la conservation des dents, et parfois, le remplacement de dents conservables qui peut représenter un véritable défi stratégique en dentisterie restauratrice. Il existe des controverses et des défis à relever en ce qui concerne le résultat thérapeutique et la maintenance à long terme du traitement implantaire. Les implants se présentent sous des formes extrêmement différentes en termes de concepts, d’états de surface et de composition. Cependant, bon nombre de ces aspects sont mis sur le marché et ne présentent pas de preuves scientifiques à long terme. Le plan de traitement et la compétence du praticien font également partie du défi. Le but de cet article est de mettre en lumière le fait que, en se fondant sur des preuves scientifiques, la décision de remplacer des dents existantes par des implants dentaires doit être envisagée avec de grandes précautions. La communication entre les professionnels de santé et le patient devrait souligner les défis à relever dans la prévision d’un résultat thérapeutique destiné à orchestrer les attentes réalistes du patient et du clinicien.
Implant dentistry is a great tool in rehabilitating fully or partially edentulous patients, or those with severely damaged dentition with questionable prognosis utilizing conventional therapy. Despite their growing popularity and use, the biologic response around dental implants is not well understood. Implant dentistry has evolved from rehabilitation of lost dentition and masticatory function, to a contemporary tool in treatment planning for compromised teeth. In such cases, considerations of risk and cost versus benefits of maintaining teeth, and on occasions, replacement of maintainable teeth that may pose a strategic challenge in overall reconstructive dentistry, come into play. There are controversies and challenges in treatment outcome and long term maintenance of implant therapy. Implants come in drastically different designs, surface characteristics and components. Yet many of these features are market-driven and lack long-term scientific evidence. Treatment planning and operator expertise also adds to the challenge. The aim of this article is to highlight the fact that based on scientific evidence; the decision for replacement of existing teeth with dental implants should be weighted with extreme caution. Communication amongst health care professionals and the patient should underscore the challenges in predicting a therapeutic outcome to orchestrate realistic patient and operator expectations.
Les implants dentaires ostéo-intégrés sont l’une des avancées les plus significatives en dentisterie clinique (Albrektsson et Sennerby 1991 ; Esposito et al., 1998). Le phénomène a été découvert fortuitement et les implants en titane ostéo-intégrés ont été initialement utilisés chez des patients totalement édentés. Les inconvénients de la prothèse amovible ont favorisé l’utilisation de prothèses implanto-portées malgré le manque d’études contrôlées en double aveugle pour juger de l’efficacité des implants dentaires en tant que modalité thérapeutique (Sennerby, 2008). Aujourd’hui, les implants dentaires ont permis des avancées en prothèse amovible pour ce qui est de la fonction, de l’esthétique et de facteurs psychosomatiques (Blomberg et Lindquist, 1983 ; Haraldson, 1983). L’efficacité des implants dentaires à procurer un support pour les restaurations en l’absence de dents en fait l’option de premier choix pour les secteurs partiellement édentés. Cependant, cette thérapeutique a évolué au-delà du remplacement de dents manquantes et est maintenant utilisée pour traiter des dents malades qui pourraient, sans être extraites et remplacées, être soignées de façon conventionnelle. Les extractions stratégiques et la décision de remplacer des dents susceptibles d’être traitées par des implants dentaires ont soulevé des controverses face aux preuves émergentes indiquant que les implants ne sont pas la panacée.
Comme pour l’évolution de n’importe quelle thérapie, on observe également une progression vers une meilleure compréhension grâce à la recherche scientifique et à l’expérience clinique. Les maladies implantaires montrent une certaine complexité dans leur présentation, leur diagnostic et leur traitement. Ainsi, le remplacement de dents par des implants nécessite la prise en compte de plusieurs facteurs comprenant le risque, le rapport coût/bénéfice et la pose d’un pronostic pour les options thérapeutiques. Il existe de nombreux processus biologiques et mécaniques encore méconnus qui contribuent à la réponse des tissus péri-implantaires, incluant l’association d’une grande variété de concepts et de surfaces implantaires, les facteurs de risque liés aux patients pour les maladies parodontales et péri-implantaires, et un grand défi dans notre compréhension du pronostic à long terme des restaurations implanto-portées. Les études qui publient des résultats à long terme pour un seul système ou pour un seul concept de restauration peuvent ne pas s’appliquer à d’autres systèmes implantaires, voire même à d’autres produits d’un même fabricant. De façon similaire, la compréhension de la réponse biologique autour de n’importe quel système implantaire unique peut ne pas s’appliquer à un autre. Si l’on compare nos connaissances sur les dents et les maladies parodontales à celles sur les implants et les maladies péri-implantaires, il est évident que les niveaux sont nettement inégaux. La vague de l’évolution de nos connaissances sur les implants fait pâle figure face à l’océan que représentent les connaissances parodontales. La comparaison entre le pronostic des dents et celui des implants est un jugement clinique qui semble souvent en faveur de l’implant. Pourtant, comment ce jugement peut-il être établi alors que notre compréhension du pronostic implantaire n’est pas aussi bonne ? Cette question est encore plus cruciale lorsque l’on considère le fait que nos connaissances sur l’évolution et la progression de la maladie implantaire ne sont pas aussi précises que pour les maladies dentaires. Le but de cet article est de soulever les questions suivantes : sommes-nous en train de remplacer des dents perdues ou sommes-nous en train de remplacer des dents par des implants dentaires ? Est-il possible que nous agissions dans une trop grande précipitation pour remplacer des dents par des implants et, que parfois, nous n’obtenions pas mieux que la dent remplacée ? Quels sont les facteurs qui peuvent justifier la décision de remplacer des dents par des implants ?
Lorsque l’on compare dents et implants, l’os représente leur base commune. Le contraste devient évident dès qu’on examine les interfaces dent/os et implant/os, ainsi que leurs systèmes d’attache supra-crestale respectifs. Les dents et l’interface dynamique connue sous le nom de ligament parodontal influencent les modifications osseuses à travers les forces, l’éruption, la cicatrisation et la maladie. Les implants, cependant, sont statiques par leur géométrie, les circonstances et leur chimie, et ils présentent une zone de tolérance à la place d’un ligament. Cette zone de tolérance est composée d’une couche d’oxyde de titane qui conduit à une combinaison de forces chimiques et de réactions physiologiques. Le phénomène qui en résulte, ce que l’on appelle ostéo-intégration (Albrektsson et al., 1981), est une région microscopique où la surface implantaire ne sera jamais en contact direct avec l’os. Cet espace au sein du tampon d’oxyde de titane crée un nuage de forces zwitterioniques qui sont suffisamment importantes pour créer un moment de friction qui empêche toute mobilité (Steinemann, 1998). La physiologie de l’os reconnaît le tampon d’oxyde et se développe très près, s’étendant en direction de la zone tampon grâce à des couches d’os lamellaire et de substance fondamentale (Wataha, 1996). C’est cette réaction unique au sein de l’os envers cette substance particulière qui a permis l’émergence de la dentisterie implantaire et l’arrêt de la dépendance reposant sur le ligament parodontal. Historiquement, les tentatives pour implanter des corps étrangers dans de l’os se sont heurtées à des idées et des modes concurrentes qui ont souvent influencé le matériau et l’approche. Les principes qui se sont développés par la suite ont été empruntés à d’autres disciplines, telles que la prothèse amovible, à la recherche d’un support, de stabilité et de rétention, utilisant toujours l’os comme une selle au lieu d’un habitacle. Les tentatives pour utiliser l’os comme élément rétenteur ont exploré de nombreuses substances bien avant le titane (Wataha, 1996). Les métaux nobles offraient un risque minime d’oxydoréduction. Tout en renforçant la sécurité, cela a conduit à moins d’intégration, plus de phénomènes d’encapsulation et un torque de dépose minime par rapport aux implants intégrés (Lemons, 1990). Les métaux réactifs offraient la solution inverse. Étant donné leur tendance à l’oxydoréduction, ils présentent moins d’encapsulation fibreuse mais plus de dégradation de surface et d’infiltration à l’intérieur du corps (Chrzanowski et al., 2008).
Toutes les substances expérimentées autres que le titane ont finalement montré certaines formes de réaction aux corps étrangers. Les rapports actuels portant sur l’augmentation des cytokines et l’infiltration du titane montrent que ces phénomènes sont plus courants lors de la pose de prothèses de hanche implanto-portées, où il y a une mobilisation constante des composants du titane les uns contre les autres dans un environnement totalement clos. Autour des implants dentaires, il y a peu de preuves d’une réaction envers un corps étranger, comme on aurait pu s’y attendre avec le tampon d’oxyde de titane. Cependant, il y a des preuves émergentes d’une augmentation de la production de cytokines pro-inflammatoires autour d’implants dentaires cliniquement sains, malgré un défi bactérien (Nowzari et al., 2008, 2010). Le principal défi biologique en dentisterie implantaire vient des facteurs écologiques et physiologiques entourant l’implant, conduisant à des conditions pathologiques autour des tissus péri-implantaires. Les modifications pathologiques autour des tissus péri-implantaires peuvent être liées à une rupture de l’équilibre entre un corps étranger bien toléré et ses composants à la fois biologiques et bactériologiques environnants. Cette interface, qui fonctionne si bien en état de santé, peut se comporter différemment en présence d’une maladie, possibilité qui doit être prise en compte lors du choix des implants au détriment des dents.
Il existe actuellement toute une panoplie de classifications pour les implants allant de la santé à l’échec. Les dénominations succès implantaire (Albrektsson et al., 1986), santé implantaire, mucosite péri-implantaire (Mombelli, 2002), survie satisfaisante, survie compromise (Misch et al., 2008), péri-implantite, implant en voie d’échec et échec implantaire sont toutes utilisées pour décrire différents états physiologiques ou pathologiques d’implants situés dans la bouche. Mais pourquoi existe-t-il tant de classifications avec des définitions aussi variées ? C’est à cause des connaissances partielles sur le déroulement de la maladie elle-même et sur une expression clinique encore plus complexe. La plupart des éléments cliniques souvent utilisés pour déterminer l’état pathologique des dents sont perdus au niveau des implants. Il faut un jugement avisé lorsque l’on interprète la signification des profondeurs de sondage autour des implants, car ils sont dépendants du positionnement de l’implant, des dents environnantes et de l’interface prothétique. Le saignement au sondage est plus objectif, mais il doit être associé à la perte osseuse radiologique qui est elle-même liée aux positions particulières le long de l’implant (Misch et al., 2008). La quantité d’os perdu autour de l’implant ainsi que le processus doivent également être discernés pour pouvoir distinguer la surcharge occlusale de l’infection. La présence de douleur ou de pus doit également être prise en compte pour pouvoir ensuite faire la différence entre les classifications (Albrektsson et al., 1986). Pour le clinicien, cela conduit invariablement à une interprétation subjective.
La définition de la péri-implantite comme étant une perte osseuse continue due à une inflammation induite par la plaque a été établie avec des modèles animaux (Isidor, 1997 ; Alboui et al., 2008, 2009 ; Hürzeler et al., 1998). Cependant, cela n’a pas été universellement confirmé ou établi dans des études chez l’homme. La perte osseuse péri-implantaire, même en présence d’inflammation, ne peut pas être considérée de facto comme une péri-implantite. Il y a des situations où la perte osseuse péri-implantaire se produit initialement à cause de facteurs non liés à l’inflammation induite par la plaque puis, secondairement, elle se produit indépendamment ou même a contrario. Certains considèrent qu’une perte osseuse supérieure à 1,8 mm en présence de saignement et de suppuration est un signe de péri-implantite (Roos-Jansåker et al., 2006). D’autres considèrent toute résorption osseuse survenant après la première année comme étant un signe de maladie péri-implantaire (Fransson et al., 2005). Certains auteurs considèrent qu’un total de 4,1 et 5,3 mm de perte osseuse est dans la normalité à long terme (14-20 ans) (Jemt et Albrektsson, 2008), en se fondant sur des critères publiés précédemment sur des implants dentaires fonctionnant avec succès (Albrektsson et al., 1986, Albrektsson et Isidor, 1993). Face à tant d’interprétations et d’opinions différentes, il est difficile de dire ce qui est et ce qui n’est pas un état pathologique au niveau des implants. D’un autre côté, notre compréhension des dents et du parodonte s’est améliorée et il existe des classifications et des définitions qui sont acceptées de façon universelle pour la pathologie et la santé (Armitage, 1999). Donc, la question cruciale est la suivante : pourquoi est-il acceptable d’avoir une perte osseuse autour des implants à des niveaux qui ne sont pas acceptés autour des dents ? Si les implants sont la solution, quelle est la gravité du problème ? Récemment, lors d’une étude longitudinale, Lindhe a étudié une population où l’on observait une inflammation de la muqueuse péri-implantaire chez 80 % des sujets et dans 50 % des sites. La péri-implantite était notée comme présente chez 28 à 56 % des sujets et dans 12 à 40 % des sites (Lindhe et Meyle, 2008). La complexité et la variabilité dans le diagnostic des maladies péri-implantaires sont indéniables. Les données émergentes de la science nous rappellent qu’il faut faire une nette différence entre les lésions des structures environnant les dents malades et les implants malades avant de se prononcer pour les unes ou les autres.
Les facteurs de risque tels qu’une mauvaise hygiène buccale, des antécédents de parodontite, le diabète et le tabac augmentent tous la susceptibilité à des réponses indésirables au niveau des tissus péri-implantaires (Lindhe et Meyle, 2008). Ces facteurs de risque sont les mêmes que ceux observés pour les maladies parodontales. Cependant, les similitudes entre les maladies parodontales et péri-implantaires ne sont pas aussi marquées que les différences. En général, les critères utilisés pour évaluer la santé parodontale sont plus stricts et plus fondés que ceux utilisés pour évaluer la stabilité de la santé des tissus péri-implantaires. Par exemple, en ce qui concerne l’examen de la progression de la maladie parodontale, Papapanou rapporte une perte osseuse crestale de 0,3 mm par an en 10 ans de suivi (Papapanou et al., 1989). En revanche, les sites implantaires présentant un taux de perte osseuse de 2 mm durant la première année et jusqu’à 3 mm 3 ans après l’insertion ou, dans certains cas, de 4 à 5 mm au bout de 14 à 20 ans sont considérés comme du « remodelage normal » (Jemt et Albrektsson, 2008). En revanche, Lindhe et Nyman ont montré des niveaux stables d’attache osseuse, même après une reconstruction complète de la bouche, chez des patients présentant une parodontite très avancée pendant 20 ans de suite (Lindhe et Nyman, 1975 ; Nyman et Lindhe, 1979). Dans la littérature parodontale, un niveau de perte d’attache supérieur à 2 mm en 3 ans est considéré comme un site parodontal instable (Teles et al., 2008 ; Craig et al., 2003). Ironiquement, un niveau de perte d’attache considéré comme un signe de maladie parodontale incontrôlée semble être tenu pour être un « remodelage normal » de l’os dans la littérature implantaire. Pour mettre cela en perspective, en s’appuyant sur la longueur initiale de l’implant, cette quantité de perte osseuse peut se traduire en une perte de 30 à 50 % du niveau osseux initial. En ce qui concerne la parodontite chronique, il faut en général de 30 à 40 ans après l’éruption pour que les dents perdent une quantité comparable de support. Pourtant, il y a une tendance à attribuer un mauvais pronostic à ces dents. On devrait alors se demander : pourquoi les implants ne sont-ils pas soumis aux mêmes standards que les dents naturelles ?
Bien qu’il y ait une variabilité importante en termes de prévalence (11,3-47,1 %), lorsque l’on évalue la péri-implantite à différents niveaux de sévérité, l’inflammation péri-implantaire est une observation fréquente avec et sans perte osseuse péri-implantaire (Koldsland et al., 2010). Si l’on considère la présence d’une maladie péri-implantaire et le prix à payer par l’os environnant, les cliniciens se retrouvent confrontés à des problèmes qu’ils ont déjà observés avec les dents. Dans le traitement des maladies parodontales, il y a un point où le pronostic de la dent et le prix payé par l’os environnant accélèrent la décision d’une extraction stratégique. Cette option thérapeutique est maintenue lorsque l’on n’a pas de résultats prévisibles et, souvent, lorsque la préférence va à l’implant dentaire. Cependant, de plus en plus d’implants dentaires présentent des pathologies évolutives, des pertes osseuses et même une perte tout court, avec des traitements dont la valeur prédictive est limitée. Il n’en reste pas moins que bien souvent, l’apparition des maladies péri-implantaires pourrait être due à un mauvais plan de traitement, à une exécution technique mal gérée lors de la pose ou à une déficience de la géométrie et des propriétés du matériau de l’implant.
L’une des difficultés dans le plan de traitement est d’attribuer un pronostic précis à des dents malades. La survie des dents est influencée par le résultat des traitements parodontal, endodontique et restaurateur. Les dents nécessitant des options thérapeutiques différentes, et dont certaines ont un pronostic hasardeux, sont continuellement comparées aux implants. Souvent, les taux de succès élevés rapportés pour les prothèses implanto-portées ont conduit à des extractions stratégiques et au remplacement de dents par des prothèses implantaires (Kao, 2008).
Avec l’acceptation croissante du remplacement de dents au pronostic réservé par des implants, nous devons examiner de près la synthèse du pronostic dentaire lui-même. Lorsque le résultat se mesure en perte dentaire, l’évaluation pronostique des dents atteintes de maladie parodontale lance un défi. McGuire a rapporté que les dents au pronostic sans espoir montrent une variabilité importante en termes de résultats. Dans une étude d’Hirschfeld et Wasserman, la prévisibilité du pronostic des dents compromises est meilleure que dans les groupes où les dents sont bien maintenues (susceptibilité plus faible) par rapport aux patients des groupes compromis et extrêmement compromis (groupes dont la susceptibilité est plus élevée). Parmi ces derniers, bon nombre de dents, même avec un pronostic initialement favorable, ont été perdues (Hirschfeld et Wasserman, 1978). Les patients qui respectent la régularité des séances de maintenance parodontale ont des prévisions pronostiques bien meilleures que ceux qui ne la respectent pas. Dans une étude de Becker, la prévisibilité pour des dents au mauvais pronostic diminue de 80 % chez les patients suivis en maintenance contre 33 % chez les patients sans maintenance (Becker et al., 1984).
Le résultat du pronostic des dents va généralement s’améliorer après l’élimination de l’infection parodontale et des forces occlusales nocives dans un contexte de suivi et de maintenance stricte. Lindhe et Nyman ont montré que les dents atteintes d’une parodontite sévère et une perte d’attache précoce peuvent être conservées à long terme lorsque les facteurs étiologiques et d’aggravation peuvent être contrôlés. Les traitements parodontaux non chirurgicaux et chirurgicaux ainsi que le contrôle de l’inflammation avec une maintenance parodontale fréquente sont efficaces pour conserver les dents au support parodontal réduit mais assaini (Lindhe et Nyman, 1975, 1984 ; Nyman et Lindhe, 1979). Dans leur rapport, Kwok et Caton suggèrent que les facteurs qui influencent la santé et la stabilité parodontales – tels que les facteurs associés systémiques et locaux, la coopération du patient ainsi que les forces occlusales et parafonctionnelles – influencent l’évaluation du pronostic. Celle-ci peut aider à identifier les patients qui sont le plus susceptibles de développer une atteinte parodontale et, de ce fait, pour lesquels les résultats sont le moins prévisibles (Kwok et Caton, 2007).
Le pronostic final de la survie des dents est tout aussi dépendant du parodonte que de la pulpe. Aussi bien l’infection endodontique qu’une structure dentaire affaiblie influencent le pronostic de restauration d’une dent. Sachant que les infections endodontiques sont traitées de façon routinière avec un taux de succès élevé pour le traitement endodontique précoce, le pronostic des dents ainsi atteintes ne pose pas de problème.
Le succès du traitement endodontique initial a été établi par de nombreuses études avec des taux de survie à long terme de 92 % au bout de plus de 6 ans (Torabinejad et al., 2007). Les critères de succès d’un traitement endodontique résident dans la prévention ou l’élimination de la parodontite (Setzer et al., 2011). Dans une étude épidémiologique réalisée à Taïwan portant sur 1,56 million de dents traitées avec une approche endodontique non chirurgicale, Chen rapporte un taux de survie à 5 ans de 93 % (Chen et al., 2007). Une autre étude portant sur 44 613 dents rapporte un taux de survie de 94 % en 3,5 ans pour des dents ayant reçu un traitement canalaire (Lazarski et al., 2001). En général, le pronostic endodontique devient problématique après des tentatives préliminaires de traitement de la pathologie. Lorsqu’il persiste une lésion péri-apicale, le traitement canalaire est considéré comme un échec. La cause de l’échec est attribuée à une infection intra-radiculaire continue en raison de l’omission du traitement de certains canaux ou d’une instrumentation insuffisante des canaux, de lésions kystiques ou de réactions à des corps étrangers provenant de matériaux endodontiques ayant dépassé l’apex (Nair, 2006) et, quelquefois, d’un traitement insuffisant ou inadéquat (Cheung, 2002). Le pronostic des dents pluriradiculées est moins bon que celui des monoradiculées en termes de succès du traitement endodontique (Friedman et al., 2003). Les obturations canalaires débordantes ou insuffisantes ont également une influence négative sur les résultats du traitement (Stoll et al., 2005).
En présence d’un échec du traitement canalaire, le clinicien se retrouve face à un dilemme : retraiter avec une approche endodontique chirurgicale ou non chirurgicale ou alors opter pour une extraction avec ou sans pose d’implant.
Les pronostics du retraitement endodontique et de la chirurgie apicale se sont révélés moins favorables que celui d’un traitement canalaire (Farzaneh et al., 2004). Dans une revue systématique, Torabinejad et al. trouvent un taux de succès fonctionnel de 83,0 % pour le retraitement non chirurgical et de 71,8 % pour la chirurgie endodontique après 4 à 6 ans de suivi (Torabinejad et al., 2009). Ces auteurs notent que le traitement chirurgical donne de meilleurs résultats à court terme mais que ce taux de succès décline avec le temps alors que les dents traitées avec des approches non chirurgicales montrent un taux de succès croissant à long terme. D’autres facteurs peuvent compliquer le pronostic du retraitement, tels que les lésions apicales (Farzaneh et al., 2004), anatomie canalaire complexe (molaires) (Imura et al., 2007) et la présence de perforations (Farzaneh et al., 2004).
Pour essayer de résumer les facteurs significatifs et pour justifier une prise de décision, Avila présente un diagramme comme guide prenant en compte plusieurs facteurs locaux liés aux dents, à l’atteinte des furcations, à la structure dentaire résiduelle ainsi qu’aux antécédents de maladie parodontale et de défauts osseux parodontaux (Avila et al., 2009). En bref, pour attribuer un pronostic fondé sur un rapport risque/ bénéfice et/ou coût/bénéfice, il faut prendre en considération non seulement le résultat parodontal mais aussi la possibilité de restaurer et le résultat endodontique du traitement.
Lorsqu’il faut anticiper le résultat à long terme d’un traitement en devant choisir entre l’extraction des dents atteintes et l’extraction stratégique de dents saines pour les remplacer par des implants, il peut s’avérer important de tenir compte de notre capacité à comprendre et à traiter les maladies comme partie intégrante de la prise de décision. Lorsque l’on étudie les différences de la réponse immunitaire, on constate qu’il y a des différences histopathologiques entre les lésions parodontales et péri-implantaires. L’extension apicale d’un infiltrat de cellules inflammatoires est plus prononcée lors d’une péri-implantite et s’observe plus près du niveau osseux, alors que dans la parodontite, cet infiltrat est situé dans la région apicale de l’épithélium de poche. Bien que plasmocytes et lymphocytes prédominent dans les deux types de lésions, dans la péri-implantite, les granulocytes neutrophiles et les macrophages sont retrouvés en plus grand nombre que dans la parodontite (Berglundh et al., 2011). Des études expérimentales portant sur la péri-implantite et la parodontite ont montré que, lors de l’élimination des ligatures induisant la maladie, il existe un processus d’autolimitation autour des dents lorsque le tissu conjonctif sépare les cellules inflammatoires de l’os. Sur les implants, cependant, cet infiltrat s’étend jusqu’à l’os où l’on observe une progression spontanée de la maladie même après la dépose des ligatures (Berglundh et al., 2011). Cette perte osseuse spontanée semble plus prononcée autour des surfaces implantaires rugueuses que des surfaces implantaires usinées (Berglundh, 2007). La différence entre l’ostéo-intégration et le parodonte s’étend bien au-delà de la réponse inflammatoire. Ces comparaisons se sont concentrées sur l’expression d’une maladie primaire et, pourtant, nous voyons des patients qui se présentent avec des antécédents de maladie parodontale. Ces antécédents peuvent également influencer le développement et l’orientation de la maladie implantaire.
Les relations entre la parodontite et l’apparition d’une maladie péri-implantaire en tant que facteur étiologique ne sont pas encore bien comprises. De nombreuses études ont rapporté que des antécédents de parodontite sévère ou de parodontite agressive étaient un facteur de risque de maladie péri-implantaire (Lindhe et Meyle, 2008 ; Esposito et al., 1997 ; Heitz-Mayfield et Lang, 2010 ; Karoussis et al., 2003 ; Roos-Jansåker et al., 2006 ; Heitz-Mayfield, 2008). Il n’en reste pas moins qu’à ce jour, aucune corrélation directe entre la perte osseuse et la perte d’attache autour des dents et des implants d’une même mâchoire n’a pu être démontrée (Quirynen et al., 2001). Cependant, les études animales, les observations d’études croisées et longitudinales chez l’homme ainsi que des études associées indiquent que la péri-implantite est caractérisée par une microflore comparable à celle que l’on trouve dans les parodontites (Quirynen et al., 2002). Les facteurs de risque de parodontite tels que le tabac et la mauvaise hygiène buccale semblent augmenter le risque de péri-implantite. Certains défendent la possibilité d’une translocation bactérienne des sites atteints de parodontite vers les sites de péri-implantite et suggèrent qu’en rétablissant la santé parodontale au niveau de la denture restante et en utilisant des piliers et des surfaces implantaires relativement lisses, on peut réduire la translocation bactérienne (Quirynen et al., 2002). Dans une étude de suivi à 3 et 5 ans, Mengel montre que la restauration orale avec des implants peut être envisagée avec succès chez les patients édentés partiels traités pour une parodontite agressive et pour une parodontite chronique généralisée. Cependant, le taux de succès du traitement implantaire est de 88,8 % pour le groupe de la parodontite agressive par rapport à 100 % pour le groupe de la parodontite chronique (Mengel et al., 2001), suggérant qu’il peut exister une relation entre la parodontite et la péri-implantite.
Étant donné que les patients avec des antécédents de parodontite semblent avoir plus de risques de développer une maladie péri-implantaire, il faut prendre en considération la prévisibilité du traitement de la péri-implantite et la comparer à celle de la parodontite au moment de choisir entre la conservation des dents ou leur remplacement par des implants dentaires. Cortellini a rapporté que 92 % des dents au mauvais pronostic initial ont été conservées durant 5 ans après un traitement parodontal de régénération, et que 85 % d’entre elles n’ont pas présenté d’autres complications biologiques par la suite (Cortellini et al., 2011). En revanche, il n’y a aucune preuve solide montrant qu’un traitement de régénération donne des résultats bénéfiques autour des implants atteints de péri-implantite (Lindhe et al., 2008). Les sites atteints de maladie parodontale pour lesquels l’inflammation ne peut pas être contrôlée et où il subsiste des poches profondes conduisent à une perte d’os parodontal et à une progression de la maladie, alors que le traitement de la maladie parodontale avec contrôle de l’inflammation et réduction de la profondeur des poches permet d’obtenir un gain d’os et d’attache (Papapanou et Wennström, 1990). Cependant, il n’y a pas de données démontrant des résultats favorables similaires pour les cas de péri-implantites, une fois que l’inflammation est contrôlée. Dans les modèles expérimentaux, le traitement de la péri-implantite ne permet pas d’obtenir une réintégration sur des surfaces implantaires initialement contaminées. Les implants d’origine qui n’ont jamais été exposés à la péri-implantite et qui sont placés dans des défauts osseux créés par la péri-implantite se sont pourtant ostéo-intégrés (Persson et al., 1999, 2001). Cette étude argumente en faveur de la dépose d’implants ayant des antécédents de péri-implantite et leur remplacement par de nouveaux implants.
La thérapeutique parodontale résectrice autour des dents donne des résultats prévisibles à long terme en maintenant la santé et en réduisant les besoins de retraitement (Lindhe et Nyman, 1984 ; Kaldahl et al., 1996, 1996). L’approche résectrice dans le traitement des maladies péri-implantaires comprend en général la modification de la surface implantaire pour tenter de réduire la rétention de plaque sur les spires exposées qui compromettent l’esthétique. Dans une étude de Romeo, il a été rapporté que la thérapeutique résectrice associée à une implantoplastie améliorait la profondeur de poche et l’inflammation muqueuse, et semblait influencer positivement la survie des implants dentaires touchés par un processus inflammatoire (Romeo et al., 2005, 2007). Les modalités thérapeutiques des approches résectrices ou régénératrices de la péri-implantite montrent un faible taux de succès à long terme, des résultats variables et elles impliquent souvent des compromis esthétiques (Aljateeli et al., 2012 ; Ata-Ali et al., 2011).
À la lumière des données disponibles présentées plus haut, on peut conclure qu’en présence d’une péri-implantite avec plus de 50 % de perte osseuse, la meilleure stratégie serait de déposer l’implant pour empêcher une aggravation de la perte osseuse qui pourrait compromettre la future reconstruction du site. Un autre point à prendre en considération lorsque l’on compare le taux de succès du traitement parodontal au taux de succès du traitement implantaire est le fait que les taux de survie et de succès du traitement parodontal sont mesurés après avoir détecté la maladie, lorsque les lésions du parodonte sont déjà installées, alors que le point de départ de l’évaluation du traitement implantaire se fait au moment de la pose. Cela peut sembler une comparaison déséquilibrée étant donné que la dent a déjà été présente, fonctionnelle et a survécu au processus de la maladie parodontale durant de nombreuses années, bien avant la détection de la maladie. Par conséquent, pour pouvoir faire une comparaison raisonnable de la survie des dents ou des implants, les taux de survie et de succès doivent être évalués dès le moment de l’éruption, lorsque le parodonte est encore intact, jusqu’au moment où la dent est estimée compromise et/ou non conservable et symptomatique à cause de maladies dentaires et parodontales.
En dépit des différences au niveau de l’architecture sous-jacente, les dents et les implants ont de nombreux défis en commun à relever dans l’environnement buccal. La présence de biofilm sur des restaurations implantaires avec ou sans facteurs d’aggravation liés à l’hôte peut conduire à une maladie péri-implantaire. Les principales classifications des maladies péri-implantaires sont nommées selon le type de tissu atteint et l’étendue de cette atteinte (Mombelli, 2002). La santé implantaire, la mucosite péri-implantaire, la péri-implantite et l’échec implantaire sont les catégories les plus fréquemment utilisées. La gestion ou la maintenance de la santé pré-implantaire tourne autour du détartrage supra-gingival ou du polissage, comme pour n’importe quelle autre surface coronaire usinée (Trejo et al., 2006). La classification clinique et la prise de décision pour la mucosite péri-implantaire et pour l’échec implantaire forment des notions émergentes. Parce que la péri-implantite est le diagnostic le plus difficile et le plus imprévisible à gérer, l’attention s’est déplacée vers la thérapie préventive. Le traitement énergique de la mucosite péri-implantaire avec des visites de contrôle fréquentes pour la détection et la maintenance prophylactique sous-gingivale ainsi que l’utilisation de traitements complémentaires améliorent la prévisibilité à long terme (van Winkelhoff, 2010).
L’objectif de cette présentation de cas cliniques n’est pas d’apporter une conclusion sur la façon de formuler une conception thérapeutique. Néanmoins, l’objectif est de donner quelques exemples de résultats thérapeutiques inattendus malgré un plan de traitement global.
Il s’agit d’une patiente d’environ 55 ans qui ne présente aucun problème d’ordre systémique. Elle explique qu’elle a perdu ses dents essentiellement à la suite de lésions carieuses et en raison de difficultés financières l’empêchant de recevoir un traitement de substitution. Après une évaluation diagnostique, elle a été traitée avec des prothèses fixées à la fois dento-portées et implanto-portées (fig. 1 et 2). Après 10 ans de suivi (fig. 3 à 6), à l’exception de la perte d’un implant maxillaire gauche (remplaçant la deuxième molaire maxillaire gauche) à la suite d’une fracture de l’armature et d’une surcharge, le résultat clinique est stable au niveau des restaurations dento-portées et implanto-portées. Notre capacité à établir un pronostic pour ce cas a été couronnée de succès, mais quelle certitude avons-nous pour pouvoir prédire ce résultat pour d’autres cas cliniques ? Est-ce qu’il dépend du type d’implant (implant Brånemark d’origine avec une surface usinée et une connexion hexagonale externe), de la maintenance ou du contrôle des facteurs de risque qui contribuent à la maladie péri-implantaire ou parodontale ?
La figure 7 montre une évaluation radiographique après une restauration complète de la bouche d’un patient qui avait des antécédents de pertes dentaires dues à des caries et à une atteinte parodontale. Le sextant maxillaire postérieur gauche a été traité environ 1 an après la fin de la restauration initiale à suite de la perte de dents supplémentaires due à des caries et à une maladie parodontale. La figure 8 est une évaluation radiographique de toute la bouche au bout de 5 ans, qui révèle une perte osseuse radiologiquement visible autour des implants remplaçant les première et seconde prémolaires maxillaires droites durant la période d’observation de 5 ans. De plus, on note un large défaut osseux autour de la première prémolaire mandibulaire droite qui s’étend aux deux tiers de la longueur de l’implant (fig. 9 et 10). Cliniquement, on observe un saignement au sondage et un gonflement muqueux. Il est intéressant de noter que la prémolaire mandibulaire droite adjacente ne présente aucune modification radiologique au niveau de l’os, avec une profondeur de sondage et un niveau d’attache bien maintenus malgré l’inflammation des tissus mous. La canine mandibulaire gauche (fig. 11 et 12) présente une perte osseuse avancée et, cliniquement, une poche parodontale profonde avec saignement au sondage qui sont apparues durant le même laps de temps. Ce cas illustre quelques-uns des défis que nous rencontrons pour établir le pronostic du résultat thérapeutique, à la fois avec les dents et avec les implants, parfois chez un même patient avec les mêmes facteurs de risque. Le problème est qu’il n’y pas de bons outils pronostiques, ni pour les dents ni pour les implants, qui puissent prédire un tel résultat pour une période de 5 ans. En s’appuyant sur nos connaissances actuelles, il existe plusieurs options que nous pouvons proposer au patient pour conserver la canine mandibulaire gauche, mais notre capacité à traiter les premières prémolaires mandibulaire et maxillaire droites est très limitée et le résultat est imprévisible.
Ce cas montre un patient qui présente un antécédent de perte dentaire initialement due à une atteinte carieuse. Pour répondre à la demande fonctionnelle du patient, les dents maxillaires ont été extraites après avoir évalué le rapport risque/coût d’un traitement de substitution – avec traitement canalaire, allongement coronaire et structure dentaire affaiblie après le traitement, avec un risque carieux élevé chez ce patient – par rapport à des restaurations implanto-portées. La figure 13 montre l’aspect radiologique avant traitement et la figure 14 18 mois après la pose des implants. Une perte osseuse avancée est radiographiquement visible autour des implants maxillaires antérieurs. Il convient également de noter l’importante perte osseuse autour des implants maxillaires antérieurs. Pourtant, le niveau osseux radiologique résiduel autour des dents restantes est stable. Cette observation soulève une grande question : est-ce que ce patient est mieux avec une reconstruction implanto-portée complète de l’arcade maxillaire, alors qu’il était possible de traiter ses dents avec un traitement conventionnel endodontique, parodontal et de la dentisterie restauratrice, en limitant la pose d’implants à la zone maxillaire postérieure droite ? Malheureusement, c’est une question à laquelle nous ne pouvons pas apporter de réponse claire. D’un côté, des caries secondaires sur une denture déjà restaurée avec des structures affaiblies compromettent le pronostic de ces dents. D’un autre côté, bien que les implants soient fonctionnels et que les tissus mous ne présentent pas de signes majeurs d’inflammation, si l’on tient compte du taux de cette résorption osseuse autour des implants pendant une période relativement courte et de l’exposition de la plateforme-prothétique (fig. 15 à 20), quel est le pronostic réaliste à long terme de cette reconstruction ? C’est un défi auquel nous, en tant que cliniciens, devons faire face lorsque nous formulons un plan de traitement destiné à soigner la maladie de ce patient et à répondre à ses besoins de soins.
La dentisterie implantaire fournit un grand choix thérapeutique pour restaurer la fonction et améliorer la qualité de vie en présence de dents manquantes. La décision d’extraire des dents délabrées ou encore l’extraction stratégique de dents intactes pour une restauration implanto-portée pose un défi important en termes de plan de traitement pour le clinicien et pour les patients. Notre compréhension actuelle de la dentisterie implantaire est encore trop lacunaire pour pouvoir décider en toute confiance de remplacer des dents par des implants dentaires. Les données à long terme disponibles sur un seul système implantaire ou un seul concept prothétique ne peuvent pas être transposées à d’autres systèmes implantaires ou à d’autres concepts prothétiques, étant donné la grande variabilité à la fois biomécanique et biologique qui existe entre les différents systèmes et concepts. Les critères pour une évaluation pronostique de la santé des dents et des implants ne sont pas les mêmes. Il y a plusieurs facteurs de risque connus et inconnus qui influencent le pronostic des dents et des implants. Certains sont liés au patient, d’autres sont liés à la conception des implants. Les dents sont des systèmes biologiques totalement différents des implants qui, eux, peuvent être considérés comme des corps étrangers bien tolérés. Par conséquent, les réponses biologiques autour de ces deux entités ne sont pas les mêmes, ce qui rend les comparaisons entre elles tout à fait irréalistes. Le processus décisionnel conduisant à remplacer les dents en s’appuyant sur une prévision pronostique des deux entités est complexe et devrait se faire au cas par cas.
Alors que les implants constituent une formidable solution en cas d’édentation, la question de savoir s’ils sont une bonne solution d’un point de vue pronostique pour remplacer les dents demeure. Étant donné que nous ne pouvons pas répondre à cette question en nous fondant sur les connaissances actuelles, la décision doit être prise avec prudence, elle doit s’appuyer sur les rapports bénéfice/risque et coût/prestations d’assurance maladie en évaluant l’ensemble des objectifs thérapeutiques à travers un plan de traitement global. La communication entre les professionnels de santé et les patients est le point le plus important ; elle doit souligner les défis à relever en établissant le pronostic du résultat thérapeutique pour pouvoir orchestrer les attentes réalistes du patient et du clinicien.