Étude prospective à 10 ans d'implants ITI placés dans la région postérieure : II Influence du ratio couronne/implant et des différentes modalités prothétiques sur la perte osseuse crestale - JPIO n° 02 du 01/05/2008
 

Journal de Parodontologie & d'Implantologie Orale n° 02 du 01/05/2008

 

Revue Scientifique Internationale - La sélection

Yves Reingerwirtz (Strasbourg)  

But de l'étude

Le bras de levier coronaire d'un implant, qu'il soit anatomique (couronne seule) ou clinique (couronne + épaulement), semble au vu de la littérature être un facteur de risque supplémentaire responsable de la perte osseuse crestale. Les auteurs de cette étude tentent de valider cette hypothèse dans une étude prospective à 10 ans.

Matériels et méthodes

L'étude porte sur 192 implants ITI, posés entre 1989 et 1996 à l'Université de Genève....


But de l'étude

Le bras de levier coronaire d'un implant, qu'il soit anatomique (couronne seule) ou clinique (couronne + épaulement), semble au vu de la littérature être un facteur de risque supplémentaire responsable de la perte osseuse crestale. Les auteurs de cette étude tentent de valider cette hypothèse dans une étude prospective à 10 ans.

Matériels et méthodes

L'étude porte sur 192 implants ITI, posés entre 1989 et 1996 à l'Université de Genève. Les traitements concernaient des édentations partielles, en secteurs prémolaires et molaires. Les implants étaient de type cylindre creux, vis creuse et vis standard et étroite. L'analyse des résultats repose sur la superposition de clichés radiographiques péri-apicaux utilisant le système Rinn et la technique long-cône.

Résultats

1. Taux de survie : dans le groupe à ratio clinique couronne/implant (C/I) important ( 2), 3 des 51 implants ont été perdus sur la période de 10 ans, donnant un taux de survie de 94,1 %. Les échecs correspondaient à des implants cylindres creux.

2. Rapport anatomique C/I : les implants avec un ratio C/I faible (< 0,41) montrent une perte osseuse annuelle (- 0,21 ± 0,38 mm) statistiquement supérieure à celle des implants avec ratio C/I élevé (C/I 1 : 0,04 ± 0,17 mm).

3. Rapport clinique C/I : les implants avec un rapport C/I faible (< 0,99) montrent une perte osseuse annuelle (- 0,34 ± 0,27 mm) supérieure à celle des groupes à ratio intermédiaire (C/I = 1 ou 2 : - 0,03 ± 0,15 mm) ou élevé (C/I 2 : - 0,02 ± 0,26 mm).

L'analyse par régression logistique montre que des ratios C/I importants présentent un risque de perte osseuse 7 à 8 fois inférieur à celui des ratios faibles.

4. Il n'y avait pas de différence significative au niveau de la perte annuelle osseuse quelle que soit la modalité prothétique, connexion implantaire (- 0,05 ± 0,19 mm), connexion implant-dent (- 0,03 ± 0,18 mm) et implant unitaire (- 0,01 ± 0,25 mm).

5. La présence d'extension n'influence pas la perte osseuse (extension distale : perte osseuse annuelle = - 0,01 mm ± 0,18 mm ; extension mésiale = - 0,06 ± 0,15 mm).

Conclusion

L'analyse prospective sur 10 ans d'un groupe de 192 implants posés dans la région postérieure à l'Université de Genève montre la moindre perte osseuse annuelle crestale dans le groupe d'implants affichant le rapport C/I (clinique ou anatomique) le plus important. Ce résultat est confirmé quel que soit le type de réhabilitation prothétique, unitaire, connexion entre implants et connexion dents-implants.

Commentaires

Tordre le cou à une idée profondément ancrée tant dans la logique que dans la pratique implantaire est une chose suffisamment exceptionnelle pour hisser l'étude proposée par l'équipe genevoise au sommet des informations à retenir. Adossés à une étude prospective sur 10 ans portant sur 192 implants, les résultats de ce travail invalident le modèle mathématique développé par Rangert (Rangert et al., 1997) concluant à l'intérêt d'un rapport C/I faible. Pour autant, il paraît souhaitable de souligner que l'élément négatif avancé par l'équipe suédoise est le facteur stress présent au niveau crestal qui, s'il est trop important (en cas de C/I élevé), risque d'entraîner une résorption osseuse. Si les auteurs suisses de notre étude avancent que ce stress, élevé en cas de rapport C/I important, est responsable d'une stimulation osseuse à l'origine des bons résultats constatés dans ce groupe, ils n'en ignorent pas moins l'inconnue concernant le niveau de stress limite à partir duquel risque de débuter la résorption osseuse. Cette information précieuse devrait faire l'objet d'autres études prospectives, avec notamment un échantillon de cas défavorables (C/I 2) plus important que celui de cette étude (5 %).