Journal de Parodontologie & d'Implantologie Orale n° 1 du 01/02/2019

 

Article

Simon FOESSEL1 / Jean-Luc DAVIDEAU2 / Pierre SIMONIS3  

1- Pratique privée, Colmar2- PU-PH, Département de parodontologie, Faculté de chirurgie dentaire, Strasbourg3- Pratique privée en parodontologie/implantologie, Strasbourg

Résumé

Résumé

Cette étude rétrospective a pour but d'évaluer les effets cliniques et microbiologiques de la combinaison métronidazole/spiramycine à court terme. Une cohorte de 94 patients présentant des parodontites chroniques a été suivie dans un cabinet privé spécialisé en parodontologie. En fonction des résultats des tests bactériens et de la présence de suppuration, la thérapeutique initiale non-chirurgicale a été associée ou non à un traitement antibiotique combinant métronidazole et spiramycine. Les profondeurs des poches parodontales (PPP) et les quantités de paro-pathogènes ont été évaluées avant et 4 mois après le traitement. Les résultats montrent que le traitement antibiotique réduit très fortement l'infection parodontale. Au niveau clinique, en tenant compte des autres facteurs influençant les résultats thérapeutiques, la réduction des PPP ≥ 7 mm est plus marquée avec les antibiotiques. En conclusion, la combinaison métronidazole/spiramycine favorise la désinfection parodontale et conserve ses indications en présence de poches profondes et de fortes quantités des paro-pathogènes du complexe rouge.

Summary

Abstract

The aim of this retrospective study was to evaluate and compare the microbiologic and clinical effects of metronidazol/spiramycin association at short term. A cohort of 94 patients suffering from chronic periodontitis and treated in a specialized periodontal clinic has been investigated. Non-surgical treatment has been associated or not to metronidazol/spiramycin use depending on bacterial test results and pocket suppuration detection. Periodontal pocket depths (PPD) and periodontal pathogens have been evaluated before treatment and at 4 months. Results showed that antibiotic treatment markedly reduced periodontal infection. Reduction of PPD ≥ 7 mm appeared more pronounced with antibiotics considering other influencing factors. Therefore, the use of metronidazol/spiramycin association improves periodontal tissue disinfection and is still indicated in presence of deep pockets and high counts of red complex perio-pathogens.

Key words

Chronic periodontitis, antibiotic treatment, active periodontal treatment, microbiologic analysis.

Introduction

L'utilisation d'antibiotiques hors prophylaxie pour le traitement des maladies parodontales a été décrite dans les années 1980 pour certaines formes de parodontite dites « réfractaires » (Slots et al., 1979) ou sévères (Quee et al., 1987). Le but de ces traitements antibiotiques était d'éradiquer les paro-pathogènes persistant après une thérapeutique parodontale conventionnelle, supposés être responsables des échecs cliniques (Slots et al., 1979, Van Winkelhoff et al., 1989). Depuis lors, l'intérêt clinique de différentes stratégies et molécules antibiotiques a été évalué dans de très nombreuses études avec des résultats plus ou moins contradictoires (Feres et al., 2015, Jepsen et Jepsen, 2016). En France, l'AFSSAPS (Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé) recommande leur utilisation seulement dans le cas de parodontite agressive ou de parodontite chronique réfractaire au traitement (Lesclous et AFSSAPS, 2013). Pour les parodontites chroniques, le rapport bénéfice-coût entre l'amélioration des paramètres cliniques et bactériens parodontaux et les effets secondaires des antibiotiques ne fait pas consensus (Garcia Canas et al., 2015). Les dernières recommandations internationales, que ce soient celles de l'American Academy of Periodontology (Slots et al., 2004), de l'European Federation of periodontology (Sanz et al., 2008), et de l'American Dental Association (Smiley et al., 2015), laissent le choix au praticien qui devra décider au cas par cas pour chaque patient selon des critères relativement peu définis, aussi bien cliniques que bactériens.

Actuellement, la molécule la plus étudiée est le métronidazole, associé ou non à l'amoxicilline, avec des doses variant de 750 mg à 1,5 g par jour (Feres et al., 2015). En France, la combinaison métronidazole/spiramycine est utilisée depuis les années 1980 (Piccione, 1978, Quee et al., 1987, Poulet et al., 2005, Herrera et al., 2008). Elle représente près de 45 % des prescriptions à but curatif, en particulier pour des pathologies parodontales (CNAMTS, Évaluation de la prescription d'antibiotiques par les chirurgiens-dentistes omnipraticiens, 2005). Cependant, les études ayant évalué l'efficacité clinique de la combinaison métronidazole/spiramycine sont peu nombreuses et assez anciennes (Herrera et al., 2008).

Le but de cette étude est de déterminer, en pratique quotidienne de la parodontologie, l'intérêt en thérapeutique initiale de cette combinaison d'antibiotiques, pour améliorer les paramètres cliniques et bactériens parodontaux chez des patients présentant des parodontites chroniques.

Matériels et méthodes

Cette étude clinique rétrospective porte sur une cohorte de patients souffrant de parodontite chronique pris en charge dans le cabinet dentaire du docteur Pierre Simonis à Strasbourg.

Sélection des patients

Des patients traités entre 2012 et 2014 et ayant bénéficié d'un examen clinique et de tests bactériens avant et après traitement initial ont été sélectionnés (logiciel KitView®). Les critères d'exclusion sont : traitement parodontal (hors détartrage supragingival) et/ou prise d'antibiotiques dans les 6 mois précédant le premier rendez-vous, prise d'anti-inflammatoires à long terme, diabète, troubles du système immunitaire (c'est-à-dire : VIH, immunosuppresseurs), grossesse et allaitement, tabagisme, allergie ou intolérance au métronidazole ou à la spiramycine, et détection d'Aggregatibacter actinomycetemcomitans (A.a) (fig. 1).

Nous avons déterminé deux groupes de patients : groupe 1 traité par détartrage-surfaçage radiculaire (DSR) seul ; groupe 2 traité par DSR et antibiotiques. Les patients traités par antibiotiques présentaient au moins un taux supérieur à 107 d'un des paro-pathogènes du complexe rouge (Socransky et Haffajee, 2005), Porphyromonas gingivalis (P.g), Treponema denticola (T.d), ou Tannerella forsythia (T.f), et/ou des poches parodontales avec suppuration.

La chronologie du traitement comprend un examen et un traitement initiaux, suivis d'un réexamen à 4 mois (fig. 2).

Examen initial (T0)

À l'examen initial, les données démographiques ainsi que les données sur l'état général ont été enregistrées. L'examen parodontal comprend l'évaluation du saignement au sondage et la mesure des profondeurs de poches parodontales (PPP) sur six sites par dent à l'aide d'une sonde parodontale de type PCPUNC15.

Tests bactériens

Dans la même séance que l'examen initial, les trois sites les plus profonds de trois dents différentes et ne présentant pas de suppuration sont sélectionnés et indiqués sur le bon de demande d'analyses Carpegen® Perio Diagnostics. La plaque et le tartre en supragingival de ces trois sites sont éliminés à l'aide d'une curette mini CK6, puis les surfaces nettoyées avec du coton tenu par une précelle stérile induite de sérum physiologique. Les sites sont ensuite séchés, et une pointe de papier stérile livrée avec le kit Carpegen® Perio Diagnostics est introduite jusqu'au fond de la poche parodontale. On la laisse quelques secondes, puis elle est retirée sans toucher d'autres surfaces (salive, muqueuses, lèvres, gants de l'opérateur...) et placée dans un emballage stérile spécialement prévu à cet effet. On répète l'opération pour chacun des sites sélectionnés. Une fois les trois pointes de papier emballées stérilement et hermétiquement, elles sont envoyées au laboratoire Carpegen (Carpegen GmbH, MendelstraÞe 11, 48149 Münster, Allemagne) où est réalisée l'analyse quantitative par Real-Time PCR du P.g, T.d, T.f, Fusobacterium nucleatum sp (F.n), et Prevotella intermedia (P.i). Les résultats sont ensuite envoyés individuellement par mail sous la forme d'une fiche de résultat d'analyse (fig. 3 à 5).

Traitement initial

Dans la semaine suivant l'examen initial, le traitement a consisté en un enseignement à l'hygiène bucco-dentaire, suivi d'une élimination des biofilms à l'aide d'Airflow®, un DSR en trois séances par ultrasons (insert Perio Slim, Air Flow Master Piezon®, EMS®) réalisées sur 15 jours, et une prescription d'un bain de bouche à la chlorhexidine 0,2 % (Eludril Gé®) pendant 15 jours. À l'issue des trois séances de DSR, les patients du groupe 2 ont pris du métronidazole 250 mg/spiramycine 1,5 M UI (Birodogyl®) pendant 15 jours, la posologie étant adaptée à leur poids (deux comprimés par jour pour les moins de 80 kg, trois entre 80 et 100 kg, quatre pour plus de 100 kg).

Réexamen à 4 mois (T1)

Le réexamen comprend la mesure des PPP et un prélèvement microbiologique dans les mêmes conditions que l'examen initial. Les prélèvements bactériens s'effectuent sur les mêmes sites qu'à T0. Les traitements et mesures ont été effectués par le même praticien.

Analyses statistiques

Nous avons relevé pour chaque individu l'âge, le sexe, la moyenne des PPP, les pourcentages de PPP ≥ 4 mm, PPP ≥ 4 et ≤ 6 mm (modérées), et PPP ≥ 7 mm (profondes). Les quantités des cinq pathogènes (F.n, P.g, P.i, T.d, T.f), leur pourcentage, et le pourcentage total des cinq paro-pathogènes par rapport à la flore totale ont été analysés. Le critère clinique d'évaluation principal de l'effet des traitements est l'évolution des PPP (Heitz-Mayfield, 2005). Les troisièmes molaires, les implants et les sites présentant des suppurations ont été exclus. Les différences des moyennes et des pourcentages de PPP et des quantités et pourcentages de bactéries ont été analysées entre T0 et T1. Les patients présentant plus de deux PPP > 5 mm à T1 sont considérés comme des échecs de traitement. Les comparaisons des données entre les groupes 1 et 2 à T0 et T1 sont réalisées à l'aide du t test ou en cas de distribution non normale avec le test de Mann-Whitney, et les comparaisons entre T0 et T1 à l'aide du test de Wilcoxon. Pour évaluer les associations entre âge, sexe, sévérité initiale des parodontites, infection parodontale et les variables étudiées, des analyses univariées, multivariées à l'aide de tests ANOVA, et des régressions logistiques ont été réalisées à l'aide du logiciel XLSTAT®. Le seuil de significativité est fixé à p < 0,05.

Résultats

Caractéristiques initiales des patients traités avec ou sans antibiotiques

Les données démographiques et parodontales initiales (T0) et en réponse aux traitements (T1) des patients sont synthétisées dans le tableau 1 et les données bactériennes dans le tableau 2.

Après application des critères d'exclusion, 94 patients ont été sélectionnés, 54 dans le groupe avec antibiotiques et 40 dans le groupe sans antibiotiques. Les femmes (70 %) sont plus nombreuses que les hommes. Le pourcentage d'hommes est plus élevé dans le groupe avec antibiotiques. La moyenne d'âge est de 54 ans et est à peu près similaire dans les deux groupes de traitement. La moyenne des PPP et les pourcentages de PPP ≥  4 mm, modérées et profondes, sont significativement plus élevés dans le groupe avec antibiotiques, avec près de 5 fois plus de PPP profondes. Les quantités comme les pourcentages de bactéries paro-pathogènes, en particulier pour le T.d, T.f et le pourcentage total de paro-pathogènes, sont significativement supérieurs dans le groupe avec antibiotiques à l'exception du P.i. Les analyses univariées montrent que les quantités de T.d et de T.f, dans une moindre mesure leurs pourcentages, et le pourcentage total de bactéries paro-pathogènes sont associés aux PPP profondes.

Ces données montrent que les patients chez qui l'indication de traitement antibiotique a été posée présentent un état parodontal et infectieux plus sévère.

Réponses au traitement parodontal avec ou sans antibiotiques

Après traitement, la moyenne des PPP et les pourcentages de différentes PPP deviennent comparables entre les deux groupes, en particulier pour les PPP profondes. Les réductions des pourcentages de PPP profondes et dans une moindre mesure de ceux des PPP modérées sont significativement plus marquées dans le groupe avec antibiotiques. Dans le groupe avec antibiotiques, le nombre de patients présentant plus de 2 PPP > 5 mm après traitement est de 18 sur 54, soit 33 %. Dans ce même groupe, les quantités comme les pourcentages de bactéries paro-pathogènes sont significativement 3 à 10 fois inférieurs après traitement. Pour le groupe sans antibiotiques, les réductions des taux du T.d, T.f et du P.g sont moins marquées. Les taux de P.i et de F.n sont équivalents à leurs taux initiaux. Pour le P.i, la différence des moyennes entre T0 et T1 n'est due qu'à quelques patients présentant des forts taux de P.i.

Ces données montrent que les pourcentages de PPP modérées et profondes deviennent comparables entre les groupes après traitement. Les niveaux de paro-pathogènes obtenus après traitement avec antibiotiques sont beaucoup plus faibles que sans antibiotiques.

Facteurs influençant la réponse clinique au traitement parodontal

Les analyses univariées sur l'ensemble de la cohorte montrent que les principaux facteurs influençant les réductions des pourcentages de PPP modérées et profondes sont tout d'abord liés à la sévérité initiale des parodontites (pourcentage de PPP modérées ou pourcentage de PPP profondes). Plus la sévérité initiale est forte, plus la réduction est importante. La réduction des pourcentages de PPP profondes est aussi plus marquée chez les patients présentant à T0 des fortes quantités de T.d et de T.f, alors que la quantité de P.g ou le pourcentage total de paro-pathogènes influencent moins le résultat. La réduction du pourcentage de PPP modérées n'est pas influencée par les taux de bactéries initiaux. Concernant l'effet des antibiotiques, la réduction des pourcentages de PPP modérées et profondes est plus marquée avec antibiotiques. Ces données sont résumées dans le tableau 3.

Les analyses multivariées combinant sévérité initiale, taux de bactéries à T0, et prise d'antibiotiques, confirment l'effet indépendant et prédominant de la sévérité initiale sur les réductions des pourcentages de PPP profondes, mais montrent aussi un effet indépendant de l'infection au T.d, et des antibiotiques. Pour la réduction des pourcentages de PPP modérées, il n'y a pas d'effet indépendant des antibiotiques. Ces données sont synthétisées dans le tableau 4.

Ces données montrent que la prise d'antibiotiques participe à la réduction des PPP profondes, celle-ci restant principalement influencée par la sévérité initiale des parodontites et le taux de T.d initial, quel que soit le traitement.

Facteurs influençant la réponse bactérienne au traitement parodontal

Les analyses univariées montrent que la réduction du pourcentage total des paro-pathogènes augmente avec la sévérité initiale des parodontites, mais n'est pas influencée par les taux de bactéries à T0. La prise d'antibiotiques est associée à une réduction plus marquée du pourcentage total de paro-pathogènes.

L'analyse multivariée montre l'effet indépendant des antibiotiques sur la réduction du pourcentage total de bactérie. La sévérité initiale des parodontites n'a pas d'effet indépendant, en particulier quand celle-ci est définie par le pourcentage de PPP profondes à T0.

Ces données montrent que la réduction du pourcentage total de paro-pathogènes est principalement influencée par la prise d'antibiotiques.

Discussion

Les résultats de cette étude montrent l'intérêt potentiel mais aussi les limites de l'indication d'un traitement antibiotique avec la combinaison métronidazole/spiramycine. Cette combinaison est utilisée en parodontologie depuis les années 1980 (Quee et al., 1987) et améliore à court et moyen termes les résultats des traitements parodontaux (Quee et al., 1987, Poulet et al., 2005). La spiramycine appartient à la famille des macrolides comme l'azithromycine, elle agit sur les bactéries aérobies (Streptococcus, Campylobacter) et anaérobies (Porphyromonas). Le métronidazole appartient à la famille des imidazolés et agit principalement sur les bactéries anaérobies (Porphyromonas). Ces deux molécules présentent des spectres antibactériens complémentaires, ainsi qu'une synergie contre les espèces bactéroïdes les plus paro-pathogènes (Quee et al., 1983), permettant ainsi de limiter les doses de métronidazole (Poulet et al., 2005). Les résistances bactériennes des paro-pathogènes à cette combinaison sont plus faibles que celles des deux antibiotiques utilisés séparément et comparables à l'association amoxicilline /métronidazole (Rams et al., 2011). Cependant, cette combinaison ne semble pas avoir d'effet sur le A.a (Poulet et al., 2005), de même que ces molécules prises séparément (Veloo et al., 2012), d'où l'exclusion dans cette étude des patients présentant du A.a. Ces données montrent que la combinaison métronidazole/spiramycine peut être une alternative à des antibiothérapies plus lourdes en parodontologie chez des patients ne présentant pas d'infection au A.a, avec en outre des effets secondaires assez limités (Poulet et al., 2005, Rams et al., 2011).

Après un traitement non chirurgical, une nette amélioration des conditions cliniques est observée dans la cohorte étudiée avec une réduction globale de près de 2 fois et demi des PPP ≥ 4 mm à 4 mois. Les réductions des PPP sont plus marquées pour le groupe avec antibiotiques (deux fois plus pour la réduction de la moyenne de PPP). La réduction de 0,8 mm des moyennes des PPP chez les patients traités avec la combinaison métronidazole/spiramycine est supérieure à celles (0,4 à 0,5 mm) observées chez les patients avec un état parodontal initial comparable et traités avec l'azithromycine ou le métronidazole (Haffajee et al., 2007), ou avec l'amoxicilline ou le métronidazole (Feres et al., 2001), et ce avec des doses plus fortes. Les moyennes de PPP et les pourcentages des PPP modérées après traitement restent cependant supérieurs au groupe sans antibiotiques, mais le taux résiduel des PPP profondes devient similaire entre les groupes. La très forte réduction des PPP profondes, plus de 6 fois, observée ici dans le groupe avec antibiotiques est comparable à celle observée avec le métronidazole (Feres et al., 2012). Elle suggère que les PPP profondes sont celles où l'effet bénéfique de la prise d'antibiotiques est le plus marqué (Jepsen et Jepsen, 2016).

Au niveau bactérien, on observe une diminution des paro-pathogènes du groupe rouge, T.d, T.f et P.g, essentiellement chez les patients prenant des antibiotiques, avec des réductions de leur taux de près de 10 fois. Ces taux deviennent même plus faibles que dans le groupe sans antibiotiques. Ce résultat confirme la suppression à 1 mois de P.g et de T.f après traitement avec la même combinaison métronidazole/spiramycine (Poulet et al., 2005). Les diminutions du nombre de bactéries sont décrites de manière assez variable dans les études du même type, réalisées avec d'autres antibiotiques (Haffajee et al., 2006). Elles ont été observées dans une moindre mesure pour le T.f et le P.g après traitement au métronidazole (Feres et al., 2001) ou azithromycine (Oteo et al., 2010). Elles sont de l'ordre de 2 à 3 fois avec le métronidazole ou l'azithromycine pour P.g, T.d, et T.f, à 12 mois, sans qu'il y ait de différence entre les patients traités ou non avec antibiotiques, sauf pour le P.g qui présente une réduction plus forte à 2 mois avec antibiotiques (Haffajee et al., 2008). Cela peut s'expliquer par le fait que, dans l'étude présente, les prélèvements bactériens sont effectués dans les sites les plus profonds, et non pas dans tous les sites (Haffajee et al., 2006), confirmant par ailleurs que ces sites répondent bien à la combinaison métronidazole/spiramycine aussi bien cliniquement que bactériologiquement.

Dans la cohorte étudiée, les réductions de PPP observées peuvent être amplifiées chez les patients prenant des antibiotiques par le fait qu'ils présentent à l'examen initial des parodontites et des infections parodontales du groupe rouge (T.d, T.f et P.g) plus sévères que les patients non traités avec antibiotiques. En effet, les analyses univariées montrent que la sévérité initiale de la parodontite impacte très fortement les réductions des PPP modérées et profondes lors des traitements non chirurgicaux, comme cela a déjà été observé dans de nombreuses études (Heitz-Mayfield et al., 2002). Cependant, l'analyse multivariée tenant compte de cet effet de la sévérité initiale montre que l'effet positif et indépendant de la combinaison métronidazole/spiramycine persiste mais uniquement pour les réductions des PPP profondes. L'impact de l'infection initiale sur les résultats des antibiothérapies reste davantage sujet à controverses, dues aussi bien à la fiabilité/pertinence des tests bactériens utilisés qu'à la variabilité de l'association entre sévérité clinique et profil bactérien (Mombelli et al., 2011). Dans cette étude, l'indication de la prescription de la combinaison métronidazole/spiramycine est essentiellement basée sur les résultats des tests bactériens utilisant la technique d'amplification de l'ADN bactérien. C'est une technique très sensible, spécifique et reproductible en utilisation clinique courante pour évaluer les quantités de paro-pathogènes (Verner et al., 2006). Les pourcentages totaux des bactéries paro-pathogènes et les taux de T.d, et T.f sont corrélés à la sévérité clinique des maladies parodontales comme dans de nombreuses études (Socransky et Haffajee, 2005). Ces taux de T.d et de T.f sont aussi fortement associés aux plus fortes réductions de PPP profondes, plus faiblement pour le P.g, le F.n et le pourcentage total de paro-pathogènes, mais pas à la réduction des PPP modérées. L'absence d'influence de ces paro-pathogènes pour la réduction des PPP ≥ 4 mm a été observée avec l'association métronidazole/amoxicilline (Cionca et al., 2010).

Au-delà de l'effet sur la réduction des moyennes et des pourcentages de PPP, l'objectif des traitements parodontaux non chirurgicaux est de plus en plus de réduire le nombre de patients présentant des PPP résiduelles > 5 mm considérées comme un risque de récidive (Matuliene et al., 2008) et nécessitant des traitements chirurgicaux (Heitz-Mayfield, 2005). Dans le groupe traité par l'association métronidazole/spiramycine, on constate que 33 % des patients présentent au moins 3 sites > 5 mm, un pourcentage plus important comparé aux 18 % obtenus à 1 an avec l'association métronidazole (1,2 gr) et amoxicilline (1,5 gr), mais plus faible que les 62 % obtenus sans antibiotiques (Feres et al., 2012).

En conclusion, cette étude confirme l'efficacité clinique du traitement par DSR seul pour des formes modérées de parodontites (Jepsen et Jepsen, 2016). Les résultats montrent que la prescription de la combinaison métronidazole/spiramycine réduit très fortement l'infection parodontale à court terme, en particulier dans des formes sévères de parodontites chroniques. Le bénéfice clinique en termes de réduction moyenne des profondeurs de poches parodontales peut apparaître plus limité, en particulier en comparaison avec l'association métronidazole/amoxicilline. Cependant, en considérant les effets secondaires non négligeables de cette association (résistance bactérienne, allergie, intolérance) (Garcia Canas et al., 2015), la combinaison métronidazole/spiramycine conserve son indication en thérapeutique parodontale chez des patients présentant des poches profondes et des taux élevés de paro-pathogènes du complexe rouge.

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