Implant n° 3 du 01/09/2020

 

Chirurgie pré-implantaire

M. ASIN  

D'après Spray, une épaisseur osseuse minimale de 2 mm est un prérequis pour maintenir la dimension verticale de la crête alvéolaire []. Raghavendra introduit la notion d'espace de trophicité péri-implantaire []. Il s'agit de l'épaisseur minimum d'os vital en vestibulaire des implants dentaires nécessaire pour assurer la stabilité du volume osseux et la...


Résumé

Résumé

Un volume osseux suffisant est un prérequis pour assurer une ostéo-intégration pérenne. Le praticien est souvent amené, du fait de la résorption post-extractionnelle, à envisager des techniques de reconstruction osseuse. Si le prélèvement autogène semble être encore le gold standard, sa morbidité associée en limite le recours. La poudre allogénique Biobank associée à une membrane Créos peut-elle représenter une alternative fiable et reproductible aux greffes autogènes ? C'est l'objet de cette étude, totalisant 82 cas de régénérations osseuses guidées pinsées avec poudre allogénique.

D'après Spray, une épaisseur osseuse minimale de 2 mm est un prérequis pour maintenir la dimension verticale de la crête alvéolaire []. Raghavendra introduit la notion d'espace de trophicité péri-implantaire []. Il s'agit de l'épaisseur minimum d'os vital en vestibulaire des implants dentaires nécessaire pour assurer la stabilité du volume osseux et la pérennité des implants. Cette épaisseur indispensable semble être de 2 mm minimum.

Les études d'Araujo corroborent ces hypothèses. Ses recherches le conduisent à conclure que, lorsque l'épaisseur de la table osseuse vestibulaire est inférieure à 2 mm, celle-ci se résorbe [].

Lorsque le volume osseux s'avère insuffisant, les autogreffes représentent, selon Khoury, le gold standard dans les techniques d'augmentation osseuse de la crête alvéolaire [].

Les greffons allogéniques associés aux membranes xénogéniques permettent d'envisager d'éviter les inconvénients – dont la morbidité – du prélèvement autogène, de réduire le temps opératoire et de disposer de blocs osseux en quantité illimitée.

La poudre cortico-spongieux Biobank® provient de têtes fémorales humaines prélevées exclusivement sur des donneurs vivants lors d'arthroplasties de la hanche dans des établissements de santé en France. Les têtes fémorales sont transformées en greffons osseux viro-inactivés qui sont stérilisés par la mise en œuvre du procédé Supercrit® [-].

Composée d'un réseau de fibres d'élastine et de collagène porcin hautement purifiés, la membrane Créos® de Nobel Biocare® offre élasticité et résistance mécanique.

L'objet de cette étude est de tester l'intérêt de l'utilisation des particules osseuses Biobank associées aux membranes Créos dans le cadre de reconstructions crestales pré ou per-implantaires.

Matériel, méthode, cas cliniques

Matériel

Nous avons réalisé 82 régénérations osseuses guidées avec biomatériaux d'origine humaine et membranes pinsées (ROGHP) combinant les particules osseuses Biobank® et les membranes Créos® sur 40 patients entre le 5 décembre2017 et le 21 juin 2019 dans notre cabinet d'implantologie dentaire à Lyon.

Méthode

La membrane Créos® est fixée dans un premier temps par au minimum 2 pins Stoma® sur un versant de la crête, en mésial et en distal. Puis, les particules osseuses sont disposées de manière à regonfler la crête atrophiée. Enfin, en utilisant ses propriétés élastiques, la membrane est tendue par-dessus les particules, les comprimant de sorte à les maintenir dans le volume à reconstruire. La membrane est alors fixée sur l'autre versant de la crête par au moins 2 pins Stoma®.

Des implants Straumann® sont posés soit en même temps que la greffe, soit dans un deuxième temps opératoire.

Si les implants sont posés en même temps que la greffe, des vis de fermeture ou de cicatrisation sont installées. Les vis de cicatrisation peuvent participer à la stabilisation des particules osseuses. La membrane collagénique et élastique recouvre dans ce cas l'ensemble constitué par les implants, les vis et les particules osseuses.

Certains patients ont pu bénéficier d'un protocole plus rapide avec, au cours de la même séance, extraction et pose d'implants avec ROGPH.

Cas cliniques

Augmentations sans pose d'implant 

Cas no 1 : patiente de 58 ans, non fumeuse, sans traitement médicamenteux

La patiente nous est adressée pour corriger la perte osseuse vestibulaire en 12, incompatible avec un profil d'émergence esthétique [fig. 1]. Son praticien traitant réalisera, dans un deuxième temps, la pose de l'implant et la réhabilitation implanto-portée.

Une ROGHP est entreprise. Des lambeaux de pleine épaisseur sont réclinés, en vestibulaire et en palatin. La perte osseuse vestibulaire est située en distal de la dent concernée [fig. 2].

Une membrane Créos® de Nobel Pharma® de 15 × 20 mm est fixée dans un premier temps en palatin par 2 pins Stoma®. Un volume de 0,5 cc de poudre spongieuse Biobank® de granulométrie 0,5 mm est déposée sur la zone à augmenter [fig. 3].

En utilisant les propriétés élastiques de la membrane et en modulant la quantité de poudre osseuse, il est possible donner une forme pertinente à la greffe. Une fois le résultat escompté obtenu, la membrane est fixée en vestibulaire par 2 pins [fig. 4].

Cinq mois plus tard, la gencive vestibulaire, initialement concave, est devenue convexe [fig. 5]. Un lambeau vestibulaire permet de déposer les pins, de visualiser la néo-formation osseuse et de poser l'implant. La néo-formation osseuse reflète strictement la forme donnée à la membrane lors de la chirurgie de reconstruction osseuse [fig. 6].

Des analyses histomorphométriques de ce cas sont proposées dans le tableau 2.

Cas no 2 : patiente de 52 ans, non fumeuse, sans traitement médicamenteux

La patiente, édentée de longue date entre 15 et 25, nous est adressée pour une reconstruction osseuse de la crête et une pose d'implants dans le but de s'affranchir de sa prothèse adjointe partielle [fig. 7]. Le bridge d'usage sera réalisé par son praticien traitant.

La table osseuse vestibulaire est sévèrement atrophiée [fig. 8]. Une augmentation osseuse de grande envergure type ROGHP est programmée avec pose d'implants différée de 6 mois. Les matériaux retenus pour la greffe sont une membrane Créos® de 30 × 40 mm et 1,5 cc de poudre Biobank® spongieux de granulométrie 0,5 mm.

La membrane est fixée en vestibulaire par 4 pins Stoma® [fig. 9]. Les points d'ancrage sont suffisamment apicaux pour permettre la reconstruction d'un volume osseux compatible avec la mise en place d'implants de 10 mm de longueur.

La poudre d'os (1,5 cc) est régulièrement répartie en vestibulaire de la crête résorbée [fig. 10]. La membrane est étirée sur la poudre osseuse et fixée par 4 pins de manière à configurer et stabiliser le volume à reconstruire [fig. 11].

À 10 jours post-opératoires survient une complication : la membrane est exposée en plusieurs points [fig. 12]. Le bain de bouche est reconduit pour une durée de 15 jours supplémentaires sans aucun soin supplémentaire. Il est important de noter que la guérison se déroule spontanément avec un recouvrement progressif et total de la zone exposée par du tissu gingival. De plus, la membrane exposée reste intacte, sans résorption jusqu'à son recouvrement gingival. Le comportement de la membrane a permis une parfaite rétention de la poudre d'os en son sein, en rendant impossible l'expulsion des particules dans le milieu buccal.

À 5 mois post-opératoires, des lambeaux sont réclinés afin de procéder à l'ablation des pins, de prélever une carotte osseuse destinée à l'analyse histomorphométrique et de poser les implants [fig. 13]. Le volume osseux obtenu est compatible avec la pose de 6 implants destinés à soutenir un bridge implanto-porté de 10 dents.

Augmentations avec poses d'implants

Cas no 3 : patient de 80 ans, non fumeur, sous Lévothyrox et Pravastatine

Ce patient est pris en charge dans notre structure d'implantologie dentaire pour la pose de 3 implants en 44, 45 et 47 avec reconstruction osseuse [fig. 14]. Un bridge implanto-porté de 4 dents sur 3 implants sera réalisé par son praticien traitant par la suite.

L'examen tridimensionnel nous permet de valider le choix d'un protocole accéléré d'augmentation et de pose extemporanée d'implants.

Le positionnement des implants Straumann® RC 4,1 × 10 en 44 et 45, WN 4,8 × 10 en 47 est réalisé dans l'axe prothétique [fig. 15]. Leur enfoncement est guidé par la table osseuse résiduelle en lingual. En conséquence, des spires implantaires sont visibles en vestibulaire. De plus, un défaut osseux vertical et horizontal existe entre les deux implants mésiaux [fig. 16].

Une membrane Créos® de 25 × 30 mm et 1 cc d'os spongieux Biobank® sont utilisés pour la reconstruction crestale.

La membrane est fixée sur la table osseuse linguale par 2 pins, puis les particules osseuses sont disposées dans le volume à reconstruire [fig. 17]. La membrane est ensuite étirée par-dessus le biomatériau puis immobilisée par 2 pins [fig. 18].

À 5 mois post-opératoires, à la ré-ouverture, le volume osseux présente un gain significatif. L'espace de trophicité de 2 mm conditionnant la pérennité tissulaire en vestibulaire est obtenu [-] [fig. 19]. Les vis de fermeture sont totalement recouvertes de tissu osseux. Il est nécessaire de meuler le tissu osseux excédentaire pour les dévisser [fig. 20].

Cas no 4 : patiente de 24 ans, non fumeuse, sans traitement médicamenteux

Cette jeune patiente très anxieuse nous est adressée suite à un échec de greffe pré-implantaire en situation de 11 et 21 [fig. 21]. Le volume osseux est à ce stade particulièrement dégradé.

Un protocole accéléré de greffe associée à la pose simultanée d'implants est envisagé, à la condition suspensive que, lors de la chirurgie, les implants puissent être placés dans l'axe prothétique avec un ancrage mécanique supérieur à 10 Ncm (couple de serrage des vis de fermeture).

Des lambeaux sont réclinés, la table osseuse vestibulaire en 11 et 21 présente un volume très résorbé, en hauteur comme en largueur [fig. 22].

Une tentative de pose de 2 implants Straumann® en 11 et 21 dans les stricts axes prothétiques est entreprise. Le résultat s'avère favorable grâce à la capacité d'accroche mécanique des spires des implants Bone Level Tapered NC 3,1 × 10 dont la forme est proche de celle des vis à bois (en opposition des spires des implants Tissue Level, plus semblables à celles des vis à métaux).

Les matériaux retenus pour l'augmentation osseuse sont, pour ce cas, une membrane de 25 × 30 mm, tendue au-dessus d'un volume de 1 cc de particules osseuses.

La fixation palatine étant impossible du fait de l'ouverture limitée de la bouche et de l'absence de porte-pin coudé dans la trousse proposée par le fabricant à ce jour (un dispositif semblable à celui des ostéotomes coudés de Summers® serait très utile), la membrane est suturée en palatin par plusieurs points séparés [fig. 24].

La réouverture à 5 mois permet de mettre en évidence une reconstruction osseuse très importante. Sur le plan horizontal, l'espace de trophicité obtenu est très largement suffisant [-]. Sur le plan vertical, le niveau osseux atteint le plateau des vis de cicatrisation hautes de 3 mm. Le tissu obtenu est minéralisé et vascularisé.

Extractions avec poses d'implants et greffes

Cas no 5 : patient de 49 ans, non fumeur, sans traitement médicamenteux.

Ce patient, victime d'une fracture radiculaire en 22, nous est adressé pour pose d'implant [fig. 26].

L'examen du cone beam met en évidence une suspicion de perte partielle de la table osseuse vestibulaire (TVO).

Des lambeaux vestibulaire et palatin sont réclinés.

Dans le but de maintenir la meilleure vascularisation possible et d'éviter la permanence d'une éventuelle cicatrice potentiellement disgracieuse dans la zone esthétique, seule une incision de décharge est pratiquée, en distal de 23 [fig. 27].

Après extraction délicate conduite avec un Piezzotome®, le défaut osseux vestibulaire vertical et horizontal est visible [fig. 27].

L'implant Straumann® RC 3,3 × 10 est posé dans l'axe prothétique [fig. 28] de façon à ménager, entre sa partie vestibulaire et la TVO correspondante, un espace de trophicité de 2 mm [fig. 29]. Une membrane de 15 × 20 mm est fixée en palatin avec 2 pins. De la poudre d'os (0,5 cc) est disposée de manière à compenser les défauts de la TOV et à remplir le hiatus entre celle-ci et l'implant [fig. 29]. La membrane est ensuite glissée sous la gencive et pinsée sur la TVO [fig. 30].

Cinq mois plus tard, à la réouverture, les pins sont déposés. Du tissu minéralisé excédentaire recouvrant la vis de fermeture doit être retiré à la fraise [fig. 31 et 32].

Cas no 6 : patient de 57 ans, non-fumeur, sans traitement médicamenteux

L'extraction a été réalisée après séparation de racines et ablation douce de chacune d'entre elles pour préserver au mieux les différentes parois osseuses.

Une fois l'implant Straumann® RC 4,8 × 10 posé dans l'axe prothétique [fig. 33], une membrane de 15 × 20 mm est fixée en lingual et de la poudre osseuse (0,5 cc) est compactée dans les alvéoles et le défaut vertical distal [fig. 34].

La fixation vestibulaire de la membrane exige suffisamment d'attention pour, dans même temps, mettre à profit ses propriétés élastiques et charger le volume de poudre d'os utile [fig. 35].

Des conseils seront proposés ci-dessous.

À 5 mois, le volume d'os obtenu est satisfaisant [fig. 36]. Il est nécessaire de fraiser profondément le tissu minéralisé régénéré au-dessus de la vis de fermeture pour la mettre en évidence [fig. 37]. Le gain en hauteur est important.

Résultats

L'ensemble des résultats de cette étude est présenté dans le tableau 1.

Étude histomorphométrique

Celui qui règle les factures des études histomorphométriques peut, en fonction des résultats, décider de les diffuser ou non. Il en est le détenteur légal. S'il s'agit du fabricant, la transparence n'est alors pas garantie. Dans une exigence d'indépendance et de liberté, nous avons tenu à les régler intégralement nous-mêmes.

Cette étude intéresse 3 sites régénérés sur 3 patients différents.

Sur chaque site, l'ostéotomie implantaire a été réalisée avec des trépans, avec prélèvement d'une carotte osseuse, puis calibrée avec les forets habituels.

Les carottes osseuses ont été confiées au laboratoire Novotec, à Bron.

L'organisation tissulaire et cellulaire de la biopsie osseuse a été mise en évidence par coloration histologique (HES) après déminéralisation et inclusion de l'échantillon en paraffine.

Une analyse morphométrique a été réalisée afin de déterminer la densité de surface (%) du greffon et de l'os néo-synthétisé présents dans l'échantillon. Le cytoplasme des cellules est rose et leur noyau bleu-violet. La matrice extracellulaire, dont le tissu osseux, est colorée en rose/orangé.

Le pourcentage de la densité de surface (%) du greffon et de l'os néo-synthétisé est calculé par rapport à la surface de la biopsie.

Le texte original du laboratoire d'analyse apparaît ci-dessous de la manière suivante : « en italique et entre guillemets ».

Patient no 1. Cas no 20 (19E1556)

Observations microscopiques

« Sur la planche no 1, réalisée à faible grossissement [fig. 40], la biopsie est caractérisée par de larges fragments de greffon, colorés en violet, encapsulés dans des plages développées d'os néo-synthétisé et du tissu fibro-cellulaire. »

« À plus forts grossissements, sur la planche 2 [fig. 41], les ostéocytes sont nettement visibles dans leurs logettes au niveau des zones osseuses (a3, a4, b2, b3, b4). Celles-ci correspondent certainement à une néoformation osseuse antérieure, formée autour des fragments acellulaires de greffon (*) (a1, a2, a3, a4, b1, b3). De fines bandes (→) de néo-synthèse plus récente, colorées en jaune-orangé, sont localement mises en évidence en périphérie des travées de l'os précédemment néoformé (a2, a4, b3). Quelques ostéoblastes (ob) sont observés au niveau de ces zones de néo-synthèse osseuse (a2, b3).

Une seule cellule ostéoclastique (oc) est visualisée sur l'ensemble des coupes.

Le tissu fibro-cellulaire environnant est vascularisé et peu matriciel (a2, a3, b1, b2, b4). »

Morphométrie [tableau 2]

 

Conclusion

« Les résultats histologiques mettent en évidence une néoformation osseuse développée autour des fragments de greffon, sans activité cellulaire significative. »

Patient no 2. Cas no 31 (19E1608)

Observations microscopiques

« À faible grossissement, sur la planche 1 [fig. 42], l'échantillon est composé de fragments de greffon encapsulés dans des plages d'os néo-synthétisé et du tissu fibro-cellulaire. »

« À plus forts grossissements (planche 2), les plages d'os cellulaire néo-synthétisé, colorées en orangé, sont accolées aux fragments acellulaires de greffon (*) [fig. 43] (a1, a2, b1, b2, b3).

De fines bandes de néoformation osseuse plus récente, colorées en jaune-orangé, sont aussi observées ponctuellement (→) (a3, a4, b4).

À noter quelques plages amorphes, colorées en violet, dont l'origine reste inconnue.

Aucune cellule ostéoblastique n'a été visualisée mais de rares ostéoclastes (oc) ont pu être notés.

Le tissu fibro-cellulaire environnant est vascularisé (v) et peu matriciel (a2, a3, a4, b2, b3). »

Morphométrie [tableau 3]

 

Conclusion

« Les résultats histologiques mettent en évidence une néoformation osseuse significative autour des fragments de greffon. Il n'y a pas d'activité cellulaire. »

Examen des réussites

Les réussites

Les greffons classés dans le groupe des réussites se sont avérés, à 5 mois post-opératoires, mécaniquement stables, suffisamment minéralisés pour la mise en place des implants ou des réhabilitations prothétiques et bien vascularisés.

• Le taux de succès global est de 92,7 % (76 cas sur 82).

• Le taux de succès au maxillaire est de 87,8 % (36 cas sur 41).

• Le taux de succès à la mandibule est de 97,6 % (40 cas sur 4).

Les succès obtenus l'ont été sur des patients de profils très différents, sans aucun traitement médicamenteux ou traités avec Kardegic®, Plavix, Pravastatine®, Préviscan, Erelzi, de 25 à 80 ans, fumeurs de 0 à 10 cigarettes par jour, avec des approches chirurgicales dissemblables, avec ou sans pose d'implant, avec membrane suturée ou pinsée en palato-lingual, avec ou sans extraction et implantation immédiate, avec ou sans exposition...

Les échecs

Le taux d'échec global est de 7,3 % (6 cas sur 82).

En fonction du maxillaire :

• le taux d'échec au maxillaire supérieur est de 12,2 % (5 cas sur 41) ;

• le taux d'échec au maxillaire inférieur est de 2,4 % (1 cas sur 41).

En fonction de la pose éventuelle d'implants lors de la ROGHP :

• le taux d'échec avec pose d'implants lors de la ROGHP est de 8,1 % (5 cas sur 62) ;

• le taux d'échec sans pose d'implants lors de la ROGHP est de 5 % (1 cas sur 20).

En fonction du maxillaire et de la pose éventuelle d'implants lors de la ROGHP :

• le taux d'échec avec pose d'implants lors de la ROGHP au maxillaire supérieur est de 13,3 % (4 cas sur 30) ;

• le taux d'échec avec pose d'implants lors de la ROGHP au maxillaire inférieur est de 3,1 % (1 cas sur 32) ;

• le taux d'échec sans pose d'implants lors de la ROGHP au maxillaire supérieur est de 9,1 % (1 cas sur 11) ;

• le taux d'échec sans pose d'implants lors de la ROGHP au maxillaire inférieur est de 0 % (0 cas sur 9).

Étude des échecs 

Les échecs obtenus l'ont été sur des patients :

• sans traitement médicamenteux ;

• de 47 à 70 ans ;

• non fumeurs ou, pour l'un d'entre eux, fumeur de 15 cigarettes par jour ;

• dont les ROGHP ont été toutes pinsées et non suturées en palato-lingual ;

• greffés avec un volume de poudre de 0,5 à 2 cc ;

• ayant fait l'objet de greffes concernant plusieurs sites contigus avec 1 échec et 1 ou plusieurs réussites ;

• n'ayant pas bénéficié d'extraction avec implantation immédiate.

Il semble donc que les traitements médicamenteux des patients inclus dans cette étude, l'âge, le tabagisme jusqu'à 10 cigarettes par jour, le type de fixation de la membrane en palato-lingual, le volume de greffe, l'extraction-implantation immédiate ne sont pas des paramètres favorisant l'échec de la ROGHP.

Par contre, le maxillaire concerné semble faire varier le taux d'échec : 12,2 % au maxillaire supérieur et 2,4 % au maxillaire inférieur.

De plus, l'association de la pose des implants à la ROGHP semble augmenter le taux d'échec : 8,1 % pour les cas avec pose d'implants, 5 % pour les cas sans pose d'implants.

En croisant les deux paramètres ci-dessus, nous constatons que le taux d'échec évolue de la manière suivante :

• avec pose d'implants au maxillaire supérieur : 13,3 % (4 cas sur 30) ;

• sans pose d'implants au maxillaire supérieur : 9,1 % (1 cas sur 11) ;

• avec pose d'implants au maxillaire inférieur : 3,1 % (1 cas sur 32) ;

• sans pose d'implants au maxillaire inférieur : 0 % (0 cas sur 9).

Il apparaît dans cette étude, dont le nombre de cas reste peu élevé, que les paramètres « pose d'implants » et « maxillaire concerné » ont une influence sur le taux d'échec. Le paramètre « maxillaire concerné » semble avoir le plus d'impact sur le taux d'échec. Cela est peut-être lié au fait que les patients portent plus leurs prothèses adjointes partielles au maxillaire supérieur qu'à la mandibule, du fait de l'impact esthétique des dents manquantes.

Recommandations

Dans un esprit de partage d'expérience, nous proposons ci-dessous des recommandations qui, dans les limites de notre exercice, nous semblent pertinentes.

1. Il est préférable de déporter d'une dent l'ancrage des pins pour mieux augmenter le site concerné. Par exemple, pour reconstruire en 14, il faudrait placer les pins en mésial de 13 et distal de 15.

2. Fixer la membrane en palato-lingual est moins simple et donc moins rapide qu'en vestibulaire. Il semble indiqué de terminer par le plus rapide car la poudre osseuse, une fois déposée sur la crête, est instable. Les particules osseuses peuvent se déplacer si la fixation des pins s'avère fastidieuse.

3. Concernant les pins vestibulaires, une fois la poudre en place, il apparaît judicieux de ne fixer que le pin distal dans un premier temps. Le pin mésial en place, il est possible, avec une pince chirurgicale de Cooley, de préfigurer le résultat en étirant la membrane de sorte à positionner le coin mésial de la membrane sur sa destination finale.

En cas de besoin, à ce stade, il est facile de compléter la reconstruction en poussant un complément de particules osseuses avec un fouloir en utilisant à bon escient les propriétés élastiques de la membrane Créos®. Une fois le résultat présumé satisfaisant, le pin mésial est fixé.

4. En conséquence, nous recommandons le protocole suivant :

• fixation des pins en palato-lingual ;

• mise en place de la poudre osseuse ;

• pose du pin disto-vestibulaire ;

• placement de la poudre osseuse ;

• évaluation du résultat et modification éventuelle du volume de poudre ;

• fixation du pin mésio-vestibulaire.

5. Si la membrane n'épouse pas parfaitement la table osseuse concernée, en particulier lors de configurations osseuses concaves, des pins intermédiaires peuvent être utiles pour garantir une bonne étanchéité et s'opposer à la fuite des particules ou à une colonisation fibreuse du site.

6. Les lambeaux doivent être suturés sans tension. Du fait de l'augmentation de volume crestal, des incisions périostées sont indispensables en vestibulaire et, si possible, en lingual pour la mandibule. De plus, à la mandibule, le décollement délicat de l'insertion du muscle mylo-hyoïdien peut être indiqué.

7. Compte tenu du meilleur pourcentage de réussite des ROGHP sans pose d'implants par rapport aux ROGPH avec pose d'implants, l'approche en deux temps semble préférable. Cela étant, la taille de l'échantillon n'est pas assez élevée pour en tirer des conclusions générales.

Conclusion

Nos conclusions ne sont formées qu'en fonction des cas que nous avons traités dans notre cabinet.

Nous sommes conscients du fait que les résultats de ces techniques de reconstructions osseuses peuvent être « praticien-dépendants » et être largement influencés par le biotype des patients.

Ce protocole de reconstruction de crête atrophiée de type ROGPH semble être un choix thérapeutique fiable, reproductible et offrant un taux de réussite élevé. Par rapport aux greffes autogènes, il permet l'économie du prélèvement mentonnier, rétro-molaire ou extra-buccal et, en conséquence, évite la morbidité associée à ces chirurgies.

En cas d'échec, la situation clinique est globalement celle du départ, sans aggravation liée en particulier au prélèvement osseux. La relation patient/praticien nous est apparue, avec cette approche, plus sereine.

Il convient néanmoins, bien évidemment, de s'assurer que le patient est bien conscient du caractère aléatoire des reconstructions osseuses, ROGHP comprise.

Auteur

M. ASIN

Docteur en chirurgie dentaire

Exercice exclusif en Implantologie Orale

Expert Judiciaire près la Cour d'Appel de Lyon

CES Biologie Buccale

AEU Recherche en Implantologie

DU Implantologie

DU Expertise Maxillo-Faciale

Post Graduate Implantology and prosthodontics

Bibliographie

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  • 5. Frayssinet P, Rouquet N, Mathon D. Histological integration of allogenic cancellous bone tissue treated by supercritical CO2 implanted in sheep bones. Biomaterials 1998;19:2247-2253.
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