Implants zygomatiques
J.-B. VERDINO S. ZARRINE D. MARDENALOM
La réhabilitation prothétique fixe d'une arcade édentée au maxillaire supérieur nous confronte parfois à des faibles volumes osseux résiduels et donc aux obstacles anatomiques (sinus, fosses nasales), empêchant le plus souvent la mise en place d'implants dits conventionnels.
La résorption osseuse peut avoir des origines diverses telles que :
– des extractions traumatiques ;
– une maladie parodontale ;
– le port d'une...
Résumé
La technique de pose d'implant transzygomatique est décrite avec le protocole d'étapes chirurgicales spécifiques pour ce type d'implant. Le lambeau d'accès, la fenêtre sinusienne, les étapes de forage, la mise en place de l'implant et du pilier sont ici exposés, ainsi que l'aménagement tissulaire péri-implantaire.
La réhabilitation prothétique fixe d'une arcade édentée au maxillaire supérieur nous confronte parfois à des faibles volumes osseux résiduels et donc aux obstacles anatomiques (sinus, fosses nasales), empêchant le plus souvent la mise en place d'implants dits conventionnels.
La résorption osseuse peut avoir des origines diverses telles que :
– des extractions traumatiques ;
– une maladie parodontale ;
– le port d'une prothèse adjointe mal adaptée ;
– l'absence de stimulation intra-osseuse.
L'étiologie peut aussi être congénitale ou encore liée à un traumatisme, une fente labio-palatine ou une tumeur.
Quelle qu'en soit l'origine, le problème commun est le manque d'os et la solution de ce type de cas s'opère à travers plusieurs options thérapeutiques :
– angulation des implants ou implants courts ;
– greffe d'apposition (nécessitant un second site opératoire de prélèvement intra- ou extra-buccal) ;
– augmentation 3D par coffrage (ROG) ;
– comblement sinusien ;
– et enfin un ancrage au niveau de l'os basal, zygomatique ou ptérygoïdien.
Que la technique de reconstruction soit crestale ou sinusienne, le résultat dépendra du potentiel de cicatrisation osseuse du patient, de son âge, de son état général et des qualité et quantité de l'os receveur résiduel.
Les techniques de greffe ou de ROG impliquent un délai important (variant entre 4 et 12 mois) avant de procéder à une réhabilitation fonctionnelle et esthétique avec la mise en place des prothèses d'usage.
Le professeur Brånemark a introduit une alternative thérapeutique en 1988 avec l'implant zygomatique. Le nombre de cas traités depuis et la bibliographie très riche avec un suivi à long terme font de cette option un traitement fiable et une alternative aux greffes osseuses maxillaires[-].
L'indication de pose d'un ou plusieurs implants zygomatiques découle d'une analyse radiographique (radiographie panoramique) en appliquant la classification de Bedrossian[] (fig. 1) : quand l'os est absent dans les zones II et III, la pose d'implant zygomatique est indiquée. En cas d'absence aussi en zone I, le quad-zygomatique s'impose.
Les avantages de cette technique chirurgicale sont :
– la réduction du temps de traitement global avec notamment la possibilité d'une mise en charge immédiate par un bridge provisoire ;
– une diminution de la morbidité par l'intervention sur un seul site opératoire.
Plusieurs techniques chirurgicales existent pour la mise en place des implants zygomatiques et plusieurs types d'implants ont également été mis au point.
Ces dernières années, une tendance s'est développée vers une systématisation des implants extra-sinusiens afin de ne pas pénétrer dans le sinus, de ne pas léser la membrane sinusienne et de se rapprocher du couloir prothétique[].
Nous limiterons notre propos à la technique chirurgicale dite « Ad modum Brånemark », que nous privilégions dans notre pratique, en nous référant à la classification ZAGA (fig. 2 à 6), qui repose sur un trajet intra- ou extra-sinusien de l'implant dépendant uniquement de l'anatomie de patient. Elle autorise, quand l'anatomie le permet[] (ZAGA 0,1,2,3), de conserver un appui osseux palatin.
Dans la majorité des cas, à l'exception des configurations ZAGA 4, un appui palatin est indiqué pour la pose d'implant zygomatique car il réduit de manière significative le stress appliqué à l'implant[].
Il est donc fondamental de déterminer à l'avance la situation clinique du patient, notamment grâce aux examens radiographiques. De cette analyse vont découler trois éléments majeurs de la phase chirurgicale :
– le lambeau d'accès ;
– la fenêtre sinusienne (nécessité ou non de réaliser une fenêtre allongée : Slot Technic[] ;
– le forage primaire au niveau du palais.
De plus, une des complications rencontrées à moyen et long terme dans ce type de traitement est l'apparition d'une mucosite (par défaut d'hygiène), pouvant conduire à l'apparition d'une communication bucco-sinusienne très difficile à résoudre. Le maintien de l'os en périphérie de la tête de l'implant permet de diminuer ce risque.
Cette intervention est compatible avec une anesthésie locale qui doit être réalisée avec des points d'injection multiples. Toutefois, pour une pose de 4 implants zygomatiques, et compte tenu du temps d'intervention et d'un décollement plus large des tissus, l'anesthésie générale reste la règle.
Pour l'anesthésie locale, une solution de chlorhydrate d'articaïne adrénalinée à 1/100000 est préconisée. Il est recommandé d'injecter :
– une carpule en rétro-tubérositaire ;
– une carpule au niveau du trou sous-orbitaire ;
– une carpule sur la face externe de l'arcade zygomatique, en passant en intra-buccal avec une aiguille longue ;
– une carpule au niveau du trou palatin ;
– un rappel au niveau de l'épine nasale.
Un dispositif d'électrocoagulation est recommandé afin de faire face à une éventuelle lésion de l'artère antrale ou de tout autre origine.
Il devra répondre à deux critères fondamentaux :
– un bon accès visuel tant au niveau du palais que de l'arcade zygomatique ;
– la possibilité d'aménager une quantité suffisante de gencive kératinisée autour de l'émergence du pilier implantaire.
Une incision de décharge verticale est pratiquée dans la zone rétro-tubérositaire et se poursuit au niveau crestal de la muqueuse palatine jusqu'à la partie distale de la papille bunoïde, où une seconde décharge verticale est réalisée. Celle-ci devra être suffisamment importante pour donner une laxité suffisante au lambeau. L'incision principale est déportée côté palatin (fig. 7), à distance du sommet de la crête résiduelle, en prenant garde à rester à distance de l'artère palatine dans la zone postérieure. Cette bande de gencive kératinisée ainsi obtenue sera aménagée en fin d'intervention pour entourer le futur pilier : cela va conférer une meilleure protection de la zone péri-implantaire et faciliter de fait les mesures d'hygiène indispensables à la survie à long terme de l'implant.
Le lambeau est ensuite décollé et récliné jusqu'à la base du processus zygomatique à l'aide d'une rugine type Williger. Cette phase est en général assez aisée, il est important de décoller consciencieusement la partie distale de l'os maxillaire afin de visualiser la fosse ptérygo-maxillaire. En effet, que l'on soit amené à placer un ou deux implants zygomatiques du même côté, l'implant distal devra avoir un trajet qui suivra le mur postérieur du sinus ; cela afin de ménager un espace suffisant dans l'hypothèse où un second implant de même type devra être placé (quad zygo par exemple).
Le décollement au niveau de la partie antérieure de l'os zygomatique est l'une des phases les plus délicates de l'intervention, les tissus y sont très adhérents et la proximité du globe oculaire nécessite une grande attention. Il est recommandé de placer l'index de la main non opérante au niveau de l'angle inféro-externe de l'orbite et le pouce (ou vice versa selon le côté considéré) dans l'échancrure zygomatique (fig. 8) : le « couloir visuel » ainsi créé permet à l'opérateur de progresser avec plus de sécurité. Une fois que le décolleur atteint le rebord supérieur de l'arcade zygomatique, il devra être déplacé mésialement et distalement pour libérer totalement le lambeau à ce niveau et permettre l'insertion d'un écarteur type Obwegeser « toe out » dans l'échancrure. Cette opération une fois complétée, le champ opératoire est établi (fig. 9). Pour libérer davantage encore le lambeau et faciliter l'accès à la zone opératoire, il est possible de décoller ou de sectionner les fibres massétérines dans la partie mésiale de l'arcade zygomatique.
Durant cette phase, deux obstacles anatomiques majeurs sont à prendre en considération :
– le trou sous-orbitaire, afin d'éviter une lésion nerveuse ;
– le rebord orbitaire, qu'il faudra malgré tout objectiver dans le cas d'une chirurgie type « quad zygo », car celui-ci va longer cette zone.
Au niveau du palais, l'incision déportée implique qu'il n'est pas toujours
nécessaire de récliner la muqueuse en direction palatine.
Enfin, il est bon de noter que même en cas de pose bilatérale, il est préférable de décoller un côté, puis l'autre, ce afin d'exposer le tissu osseux le moins longtemps possible, et d'améliorer ainsi les suites opératoires.
C'est un élément majeur de ce type d'intervention. Sa réalisation ad hoc en première intention va grandement faciliter les phases de forage et d'insertion de l'implant. Son but initial est de visualiser le passage de l'implant, éventuellement de nettoyer la tête de celui-ci au cas où des débris de fraisage ou des parties de membranes sinusiennes seraient présents. Les cas de ZAGA 0 ne nécessitent qu'une fenêtre réduite, située dans la partie haute du maxillaire, juste en dessous de l'arcade zygomatique (fig. 10). Toutefois, si l'on veut rapprocher au maximum l'émergence de l'implant de la crête osseuse, pour améliorer le design de la future prothèse, il sera nécessaire d'allonger cette ouverture sur quasiment toute la hauteur vestibulaire du maxillaire et réaliser ainsi une « slot technic »[] (fig. 11). Il est important de bien visualiser la partie inférieure intra-sinusienne de l'arcade zygomatique, afin de débuter le forage à distance de la partie vestibulaire, faute de quoi une effraction de l'os peut intervenir lors de la mise en place de l'implant et compromettre à la fois la stabilité primaire mais aussi la cicatrisation future des tissus par un phénomène d'irritation. La partie postérieure de la fenêtre ne doit pas dépasser la ligne virtuelle de démarcation entre la face antérieure de l'os maxillaire et la fosse ptérygo-maxillaire (fig. 12).
Lors de cette opération, la membrane sinusienne est le plus souvent déchirée et il faudra la décoller et la repousser à l'aide d'une compresse humide tassée dans le sinus. Certains opérateurs cherchent à préserver son intégrité et à la ménager : cela augmente considérablement le temps d'intervention et n'apporte pas de bénéfices évidents en termes de suites opératoires. Dans les chirurgies orthognatiques type Lefort, la membrane est systématiquement déchirée sans que cela entraîne des problèmes particuliers. La technique de pose extra-sinusienne, décrite par Malo et Davo est effectivement plus conservatrice à ce niveau-là mais peut poser d'autres problèmes, notamment biomécaniques[].
La chirurgie type « quad zygo » impose de fait une fenêtre plus large, notamment vers la partie mésiale du maxillaire, en prenant soin de rester à distance du rebord orbitaire (fig. 13).
Il existe plusieurs types d'implants transzygomatiques, avec différents fournisseurs. Le propos n'est pas de décrire les avantages et inconvénients comparés des différents implants. Nous avons choisi de décrire la technique de pose de l'implant Zygan® (Southern Implants) qui présente, à notre sens, plusieurs avantages :
– une partie apicale auto-taraudante rugueuse de 2,8 mm de diamètre, donc ménageant plus de tissus osseux autour de l'implant. En outre, en cas de quad zygo ou de rescue zygo futur, cela ménage plus de place pour un deuxième implant ;
– une partie intermédiaire lisse, dépourvue de spires ;
– un pas de spire de 0,6 mm, donc peu agressif lors de l'insertion ;
– une partie coronaire de 4,3 mm de diamètre, à l'état de surface machined, moins sensible à la contamination microbienne en cas d'une déhiscence future ;
– une tête angulée à 55o, avec un diamètre de plate-forme de 4 mm avec un hexagone externe ;
– un choix de 11 longueurs (de 30 à 60 mm) permettant de faire face à la quasi-totalité des situations cliniques ;
– un choix de piliers type MU de 1 à 5 mm.
Le forage primaire débute avec une fraise boule long col de 2 mm de diamètre montée sur contre-angle (certains opérateurs préfèrent utiliser une pièce à main coudée). Le point d'impact palatin doit être choisi le plus près possible du sommet de la crête résiduelle (dont l'épaisseur est par définition réduite) et venir impacter la partie inférieure de l'os zygomatique (fig. 15 et 16) suffisamment à distance de sa face vestibulaire. Il est généralement situé dans la zone comprise entre la deuxième prémolaire et la première molaire. À ce stade, si le mur antérieur du sinus empêche, par sa concavité, de rejoindre le point choisi, il ne faudra pas hésiter à agrandir la fenêtre sinusienne vers le bas, faute de quoi on risque d'être déporté, soit vers le mésial et risquer alors de léser le plancher orbitaire, soit vers l'arrière et risquer d'avoir une émergence de l'implant dans la fosse temporale. Les deux cas sont évidemment à proscrire.
En présence d'une situation clinique type ZAGA 4, du fait de l'extrême résorption, l'implant sera « posé » sur la partie vestibulaire de la crête, et dans ce cas, on créera une encoche sur celle-ci à l'aide d'une fraise boule (fig. 17).
Une fois ce marquage effectué, un forêt de diamètre 2,9 est passé jusqu'à transfixer complètement l'os zygomatique (fig. 18). Cette étape est capitale à deux niveaux :
– en cas de non-transfixation, l'implant inséré pourrait venir buter sur le « plafond » de la préparation et perdre de sa stabilité primaire ;
– il est indispensable de voir l'émergence du forage pour s'assurer du bon positionnement de l'implant à ce niveau et proscrire une lésion du plancher orbitaire, ou une émergence postérieure.
À noter que dans le cas d'un quad zygo, le premier forage sera celui de l'implant antérieur, avec un point d'impact palatin situé dans la zone entre l'incisive latérale et la canine. Le forage zygomatique devra suivre, à distance, le rebord inférieur de l'orbite. Dans ce cas, le foret utilisé est plus long que le précédent et il est recommandé de le laisser en place pendant la préparation de l'implant distal, afin de bien visualiser son trajet et d'éviter que les deux implants ne se touchent (fig. 19).
L'os zygomatique étant un os très dense, il est parfois nécessaire d'utiliser un foret pilote de diamètre 2,9/3,5 mm, à la partie terminale non travaillante, de façon à « marquer » l'entrée de la préparation. Son passage ne doit pas excéder 2 à 3 mm afin de ne pas nuire à la future stabilité primaire (fig. 20).
Dans le cas d'un implant zygomatique de diamètre supérieur, le passage du foret pilote et du foret terminal est nécessaire.
Cette étape complétée, une jauge de profondeur permet de choisir avec précision la longueur du futur implant. Il est donc impératif de voir l'extrémité de la jauge à la partie externe du zygoma (fig. 21).
À ce stade, si l'os palatin est assez dense, il sera préférable d'utiliser un foret court de diamètre 3,5 pour éviter de léser l'os palatin lors de l'insertion de la partie coronaire de l'implant (fig. 22).
La mise en place de l'implant peut se faire de manière mécanique ou manuelle, à l'aide d'une poignée (fig. 23). Cette dernière permet une plus grande maîtrise du geste. La phase délicate consiste à engager la partie apicale de l'implant dans la préparation. Un instrument dédié, le zygodriver, est un crochet en titane qui permet de plaquer l'implant et de le guider, car la sous-préparation osseuse rend parfois difficile l'insertion de la tête de l'implant dans l'os (fig. 24). Au niveau de l'arcade zygomatique, l'implant doit affleurer tangentiellement l'os sans saillir. Il est capital d'avoir un contrôle visuel de l'émergence à ce niveau (fig. 25).
À la fin du vissage, l'implant doit affleurer l'os palatin, et il faut se méfier qu'un rebord osseux ne compromette pas la bonne mise en place du pilier. Du fait de l'orientation à 55o de la tête de l'implant, il faut disposer celle-ci de manière verticale. Pour ce faire, on place un tournevis dans la vis du porte-implant et, par ajustements, on oriente celui-ci afin que l'émergence soit la plus verticale possible (fig. 26).
Il devra affleurer la gencive périphérique, un pilier multi-unit standard sera choisi et sa hauteur dépend de l'épaisseur de la gencive. Il faut garder en mémoire que ce type d'implant, du fait de son angulation, ne peut être utilisé seul. Il doit s'intégrer dans une structure rigide[] et donc être relié avec au minimum 2 autres implants. De plus, la réalisation d'une prothèse transvissée est la règle et les piliers anatomiques pour prothèse scellée sont à proscrire (fig. 27). Le pilier sera vissé et serré à 35 Ncm.
Le point « faible » de ce type d'implant est la qualité de l'os palatin qui, dans ce type d'indications, est par définition en petite quantité et souvent de mauvaise qualité. De ce fait, il est indispensable d'avoir une quantité suffisante de gencive attachée en périphérie du pilier. En effet, un des principaux risques de complication est lié à l'apparition d'une mucosite à ce niveau, menant à une perte osseuse pouvant aboutir à une communication bucco-sinusienne. La future prothèse devra donc répondre à des critères d'accès à l'hygiène.
Du fait de l'incision déportée côté palatin, il doit normalement rester une quantité suffisante de gencive kératinisée : on pourra alors soit disposer la totalité de cette gencive en vestibulaire, soit, quand cela est possible, faire une fenêtre gingivale à la lame ou à l'aide d'un « tissue punch » pour entourer le pilier (fig. 28). Les sutures sont ensuite réalisées avec du fil résorbable, 4.0 ou 5.0.
Le passage des brossettes interdentaires devra être contrôlé avec le patient pour s'assurer d'une maintenance de qualité (fig. 29).
Dans la plupart des cas, il est recommandé d'effectuer une mise en charge immédiate avec une prothèse provisoire transvissée.
À la fin de l'intervention, un cliché radiographique type CBCT permet de s'assurer de la parfaite insertion de l'implant dans l'arcade zygomatique (fig. 30).
Actuellement, plusieurs types et marques d'implants sont disponibles. Il n'y a pas un implant idéal. Cela dépend de la technique utilisée. Il faut penser à son outil avant la chirurgie.
Si nous pouvons éviter un contact direct et étendu entre la gencive et une surface implantaire rugueuse, nous diminuerons le risque de colonisation bactérienne sur cette surface. Cela sous-entend qu'un implant lisse sera plus sûr d'un point de vue gingival[] et qu'un collet osseux entraînera un meilleur comportement parodontal par le maintien des tissus[, ].
Un appui muqueux prolongé sur un relief important entraîne une déhiscence[]. C'est le problème rencontré lors des greffes osseuses avec le relief créé par les blocs, des vis et des plaques d'ostéosynthèse. Cela implique que :
– un implant zygomatique ne devrait être en extra-sinusien que si la situation anatomique l'exige ;
– dans cette situation, une protection avec le corps adipeux de la joue gardé pédiculé pourrait être une couche protectrice entre le corps implantaire et la muqueuse ;
– la présence de spires peut être irritante.
Notre choix de la technique Ad modum Brånemark associé à la classification ZAGA permet de se rapprocher du couloir prothétique idéal[] tout en conservant autant que possible un volume osseux vestibulaire résiduel en regard de l'implant zygomatique :
Ce choix découle de deux facteurs :
– comme précédemment évoqué, le collet osseux réduira le contact muqueuse-relief implantaire et préservera l'environnement gingival car il est important de maintenir de la gencive kératinisée au niveau du col implantaire, qui constitue une protection immédiate contre les diverses agressions mécaniques et bactériennes. Son absence ou sa finesse sont les facteurs principaux des inflammations puis des récessions gingivales.
Alors que l'ancrage et la stabilité d'un implant dans l'os sont les conditions préalables à l'ostéointégration, sa pérennité dépendra des tissus parodontaux.
Cela souligne l'importance du volume osseux et gingival au col de l'implant, mais aussi celle d'une conception prothétique optimale afin de faciliter l'hygiène[] ;
– l'étude de Freedman et al.[] a démontré ce qui était de l'ordre de la perception clinique et mécanique depuis bien longtemps sur le stress implantaire : le support osseux alvéolaire maxillaire est bénéfique dans la répartition des forces sur les implants zygomatiques.
De ce fait, l'ancrage dans l'os zygomatique combiné à une stabilisation dans l'os crestal sertissant le col implantaire permet une meilleure distribution des contraintes mécaniques occlusales et latérales[].
Cependant, comme le souligne Bedrossian[], lorsque la tête implantaire n'est pas sertie dans l'os alvéolaire (paroi latérale du maxillaire très concave, morphologie classée ZAGA 4, maxillectomie), la plate-forme implantaire et les spires seront sous-périostés et non soutenus par l'os. Dans de telles situations cliniques, une éventuelle déhiscence en regard de l'implant pourra se produire. Le patient doit être prévenu sur une éventuelle exposition de l'implant et la nécessité d'une hygiène adaptée et d'une surveillance.
L'implant zygomatique est une réelle alternative aux greffes osseuses chez l'édenté maxillaire total. Cependant, un résultat prévisible et reproductible repose sur une parfaite connaissance du protocole chirurgical approprié et sur une excellente connaissance anatomique.
Cette chirurgie reste complexe de par l'éloignement de la zone apicale de forage, l'inclinaison de l'axe implantaire vers l'extérieur, la recherche d'une émergence implantaire idéale ou au moins prothétiquement acceptable, et la gestion gingivale péri-implantaire.
Le chirurgien expérimenté et formé spécifiquement à cette chirurgie implantaire zygomatique, entouré d'une équipe chirurgicale chevronnée, doit avoir une parfaite connaissance des complications éventuelles. Il doit être capable de les anticiper et de les gérer si elles se produisent.
Enfin, plus que jamais, la prothèse doit guider l'implant, et la gestion ostéo-gingivale et la conception prothétique assureront la longévité du traitement par implant zygomatique.
Jean-Baptiste VERDINO
Docteur en chirurgie dentaire, DEA de sciences chirurgicales
Ancien-assistant hospitalo-universitaire
Exercice privé limité à l'implantologie (Hyères, France)
Sepehr ZARRINE
Conférencier-Speaker Fellow ITI (International Team for Implantology)
European Master in dental implantology: clinical surgery, prosthetics, bone grafts (Frankfort, Allemagne)
Diplôme universitaire de réhabilitation chirurgicale maxillofaciale (Université Paris 7-Denis Diderot)
Exercice privé limité à l'implantologie (Saint-Dié-des-Vosges, France)
David MARDENALOM
DU d'implantologie orale
DU d'odontologie et restauration esthétique (faculté de Marseille)
DU d'anatomie cervico céphalique, Master 1 sciences et biologie médicales
Lauréat de l'Académie nationale de chirurgie dentaire
Lauréat du Prix de recherche européen SFPIO
Au Dr Thierry Louvet, médecin stomatologiste (Aubagne, France) pour sa participation à certaines chirurgies exposées.