Péri-implantologie
A. Brincat C. Dumas S. Melloul V. Monnet-Corti
Les complications biologiques affectant les implants ostéointégrés sont un sujet d'intérêt croissant. Les maladies péri-implantaires peuvent se présenter sous deux formes : la mucosite et la péri-implantite. La mucosite est une lésion inflammatoire réversible des tissus mous autour de l'implant sans perte osseuse. La péri-implantite est un processus inflammatoire d'origine infectieuse atteignant les tissus durs et mous et conduisant à une perte de...
Résumé
Le traitement des maladies péri-implantaire est un sujet complexe car les études ne permettent pas de définir une thérapeutique « gold standard ». Cet article décrit notre protocole de prise en charge globale de ces complications biologiques : l'analyse et le contrôle des facteurs de risques, le diagnostic, le traitement non chirurgical, le traitement chirurgical (par une approche régénératrice ou résectrice) et enfin la maintenance péri-implantaire.
Les complications biologiques affectant les implants ostéointégrés sont un sujet d'intérêt croissant. Les maladies péri-implantaires peuvent se présenter sous deux formes : la mucosite et la péri-implantite. La mucosite est une lésion inflammatoire réversible des tissus mous autour de l'implant sans perte osseuse. La péri-implantite est un processus inflammatoire d'origine infectieuse atteignant les tissus durs et mous et conduisant à une perte de l'ostéointégration par résorption osseuse[].
Épidémiologiquement, il s'agit de maladies à forte prévalence : alors que la mucosite affecte environ 40 % des patients, la péri-implantite concerne 20 % des patients et 10 % des implants. Il existe une association entre le temps de mise en charge des implants et la prévalence des péri-implantites[].
L'étiologie bactérienne a été démontrée à plusieurs reprises[-] et il est désormais admis que la mucosite précède la péri-implantite, tout comme la gingivite précède la parodontite. Les conditions histopathologiques et cliniques conduisant à cette conversion ne sont pas encore complètement comprises[]. Les excès de ciment dans l'espace biologique péri-implantaire sont également corrélés à une augmentation de la prévalence des inflammations péri-implantaires[].
Tout comme les parodontites, les maladies péri-implantaires sont des pathologies multi-factorielles[] et l'influence des facteurs de risque est non négligeable (tableau 1).
L'analyse et le contrôle des facteurs de risque constituent donc la première étape du traitement.
Ils peuvent être classés en trois catégories : les facteurs prédisposants, déclenchants et aggravants (tableau 2).
Il existe de fortes preuves montrant un risque accru de développer une péri-implantite chez les patients ayant des antécédents de maladie parodontale[-], un contrôle de plaque insuffisant[] et une absence de soin de maintenance régulier après la thérapie implantaire[, ].
Des études suggèrent que l'absence ou une quantité réduite de tissu kératinisé et immobile ont un effet négatif sur la réalisation des mesures d'hygiène orale. La présence d'un bandeau de tissu kératinisé et attaché autour des implants permet un brossage moins douloureux et constitue un rupteur de force vis-à-vis des tractions musculaires, améliore l'herméticité de la sertissure muqueuse péri-implantaire et diminue le risque de récession[].
Certaines études suggèrent une influence potentielle de divers polymorphismes génétiques dans la pathogénie de la péri-implantite[-].
Le tabac et l'alcool[-], le diabète[, ], ou d'autres pathologies systémiques (polyarthrite rhumatoïde, pathologies cardiovasculaires, thyroïdiennes, ostéoporose)[-] sont des facteurs dont l'influence n'est pas clairement démontrée.
La surcharge occlusale dans un environnement péri-implantaire inflammatoire se révèle être un facteur aggravant la perte osseuse[], tout comme les facteurs iatrogènes (malposition de l'implant, surcontour prothétique, imprécision de la connexion)[].
Des études complémentaires doivent déterminer le rôle que seraient susceptible d'exercer les particules de titane[], la compression osseuse[] et la surchauffe peropératoires[], les micromouvements[] et la bio-corrosion[].
L'implication de l'état de surface implantaire sur le risque d'apparition d'une lésion péri-implantaire est encore controversée. Les études disponibles sont peu nombreuses et montrent des résultats contrastés.
Cependant, on observe qu'une péri-implantite peut progresser plus intensément sur des surfaces microtexturées, et que les surfaces lisses tolèrent mieux l'exposition au milieu buccal car elles sont plus faciles à nettoyer[].
Notons également que les systèmes d'attaches entre les implants et les dents sont sensiblement différents, en défaveur de la muqueuse péri-implantaire. En effet, l'absence d'ancrage de fibres conjonctives sur l'implant et la diminution de la vascularisation péri-implantaire entraînent une réduction du potentiel de réparation et une absence d'encapsulation des lésions, d'où une vitesse de progression rapide[].
La péri-implantite se caractérise par la présence de trois facteurs indispensables : une augmentation de la profondeur de sondage (supérieur ou égal à 6 mm), un saignement ou une suppuration au sondage, ainsi qu'une perte osseuse radiographique supérieure ou égale à 3 mm par rapport au col implantaire[].
Le sondage s'effectue de manière douce (0,2 N) car, en cas de péri-implantite, la sonde pénètre jusqu'à la crête osseuse (résistance faible due à l'absence de fibres d'ancrage[]). Une sonde en plastique moins rigide peut se révéler utile à cause de la suprastructure prothétique, qui peut rendre le sondage délicat[].
La profondeur de sondage d'un implant sain se situe entre 3 et 4 mm. Cependant, cette valeur dépend de la forme du col implantaire, de l'enfouissement de l'implant, du niveau d'attache des dents adjacentes, du temps de cicatrisation, du protocole chirurgical[]...
Ainsi, le sondage péri-implantaire doit être effectué régulièrement, à chaque visite de maintenance et au moins une fois par an, et c'est son augmentation qui constitue un signe d'alerte.
Pour confirmer le diagnostic de péri-implantite, cette profondeur de sondage de 6 mm doit être accompagnée de saignement/suppuration, d'une perte osseuse radiographique et/ou de symptômes cliniques (inconfort, douleur...)[].
Le saignement au sondage (BOP) est considéré comme un signe clinique à haute valeur prédictive négative pour le diagnostic. En outre, sa valeur prédictive positive est de 100 %. Par conséquent, l'absence de BOP est un bon indicateur de santé péri-implantaire. En revanche, la présence de BOP suggère clairement un diagnostic de mucosite ou de péri-implantite[].
La présence de pus ou d'exsudat dans le sulcus péri-implantaire, soit spontanément soit après sondage, indique la présence d'une infection et/ou d'une lésion inflammatoire[].
Une mucosite se diagnostique donc par une augmentation de la profondeur de sondage (« fausse poche ») et un saignement au sondage sans perte osseuse radiographique.
Le diagnostic radiologique permet de visualiser la perte osseuse à l'aide de radiographies panoramiques et de clichés rétro-alvéolaires (un angulateur devra toujours être utilisé pour ces derniers).
Les péri-implantites se manifestent radiologiquement comme une perte osseuse verticale supérieure ou égale à 3 mm par rapport au col implantaire (après remodelage osseux initial). Cependant, pour en apprécier la morphologie, il faudra confronter l'image radiographique aux informations cliniques fournies par les mesures de sondage.
Les défauts osseux et les déhiscences sur les faces vestibulaires et linguales des implants n'apparaîtront pas sur nos images. La radiographie conventionnelle intra-orale ne suffira pas dans certains cas, et on aura recours à l'imagerie volumétrique par faisceau conique (CBCT) [].
L'objectif principal du traitement non chirurgical est le contrôle de l'infection. La première étape consiste en l'élimination des facteurs étiologiques : amélioration de l'hygiène bucco-dentaire, suppression des éventuelles lésions parodontales récidivantes, adaptation de la prothèse, désorganisation du biofilm supra- et sous-gingival.
Cette dernière va s'effectuer via une instrumentation spécifique. En effet, les détartreurs et les curettes en aciers risquent d'endommager la surface de l'implant, de créer des aspérités ou de laisser des particules qui peuvent compromettre la cicatrisation.
Il est conseillé d'utiliser des curettes ou inserts en titane, plastique ou carbone. L'objectif est d'avoir des inserts plus fins qui permettent de passer entre les spires.
Il est possible d'utiliser un aéro-polisseur spécifique pour améliorer la désorganisation du biofilm, qui sera complétée par une désinfection locale minutieuse : chlorhexidine 0,2 %, H2O2, ATB local[, ]...
Ce traitement non chirurgical est efficace pour le traitement de la mucosite (diminution de l'indice de saignement et de la profondeur de poche), mais insuffisant pour les péri-implantites.
La désinfection n'est pas optimale à cause de la surface rugueuse. Le tissu péri-implantaire, plus fibreux, possède un potentiel de cicatrisation et de réparation plus faible.
On observe une diminution de l'inflammation des tissus mous à moyen terme : la diminution de la profondeur de poche se fait essentiellement par la récession tissulaire et non par régénération osseuse.
Le traitement non chirurgical constitue donc une étape préliminaire indispensable mais non suffisante : il diminue l'inflammation avant l'approche « à ciel ouvert » et optimise les résultats chirurgicaux[].
Actuellement, aucun « gold standard » n'a pu être défini pour le traitement des péri-implantites, alors que leur prévalence augmente.
L'attitude thérapeutique va dépendre de plusieurs éléments :
- type de défaut osseux ;
- localisation de l'implant (situation dans une zone esthétique) ;
- présence de facteurs de risque.
Les objectifs sont d'intervenir le plus précocement possible, compte tenu de l'évolution rapide de la perte osseuse, de maîtriser les facteurs de risque et d'assurer une maintenance à long terme.
Il existe alors trois choix thérapeutiques[] :
- chirurgie résectrice : on effectue un lambeau d'accès afin de décontaminer la surface implantaire en vue de l'exposer aux manœuvres d'hygiène bucco-dentaire par un lambeau positionné apicalement (LPA), que l'on peut associer ou non à une implantoplastie et/ou à une ostéotomie ;
- chirurgie régénératrice : décontamination de la surface implantaire en vue de réaliser une régénération osseuse guidée (comblement osseux +/- membrane) ;
- dépose de l'implant.
Les cas cliniques présentés nous ont été adressés dans notre consultation sur les maladies péri-implantaires. Pour la plupart, il s'agit d'implants posés sans prise en charge parodontale préalable. La première étape du traitement a donc été de guérir la maladie parodontale par une thérapeutique initiale parodontale. À la réévaluation, une thérapeutique correctrice est alors envisagée.
Un des objectifs de la thérapeutique chirurgicale est de supprimer le tissu de granulation et d'entreprendre une décontamination et une détoxification efficaces des surfaces contaminées[].
Cependant, à l'heure actuelle, aucun protocole n'a démontré une efficacité supérieure[].
Sont détaillées dans cet article les méthodes que nous utilisons.
Des moyens mécaniques « classiques », à l'aide de curettes manuelles ou ultrasonores (plastique, métal ou titane), permettent d'éliminer le tissu de granulation autour des implants mais aboutissent à des résultats insuffisants en termes d'élimination du biofilm[] (fig. 1).
L'implantoplastie consiste à lisser la surface implantaire grâce à des instruments rotatifs. Il s'agit de fraises spécifiques à lame en carbure de tungstène, qui sont proposées sous forme allongée ou biconvexe, et qui permettent d'avoir un meilleur accès à la zone à traiter grâce à leur col rallongé.
Le premier passage se fait avec la bague rouge afin d'obtenir une élimination efficace des spires implantaires, puis un second passage à la bague blanche permet de finir l'état de surface. La zone va être polluée par des particules métalliques qu'il faut soigneusement éliminer avec une aspiration efficace, une protection du lambeau avec des compresses stériles, un rinçage abondant, puis en frottant l'os et les tissus mous au moyen d'une compresse imprégnée de sérum physiologique[].
L'implantoplastie ne compromet pas la viabilité cellulaire, la biocompatibilité[] ni la résistance à la fracture de manière significative des implants[]. On constate une amélioration des paramètres cliniques et radiologiques lorsque l'on compare les sites avec et sans implantoplastie[].
Concernant l'aéro-polissage, une poudre à base de glycine, moins abrasive et agressive que celle composée de bicarbonate, peut être utilisée[]. L'efficacité est importante et on constate une inhibition de la recolonisation bactérienne à court terme []. Un aéro-polisseur muni d'une buse spécifique diminue le risque d'emphysème et permet d'atteindre la globalité du défaut osseux.
Des brosses rotatives en titane peuvent également être utilisées[]. L'état de surface n'est alors pas altéré et la technique est intéressante pour éliminer le biofilm dans les zones difficiles d'accès[], avec des résultats significatifs en termes de réduction de la profondeur de poche[]. Les lasers, de plus en plus employés, montrent des résultats prometteurs mais pas supérieurs aux autres techniques[-].
Ces techniques sont efficaces mais elles ne seront pas suffisantes. Il convient d'y associer une désinfection chimique.
Des méthodes chimiques, (acide citrique, chlorhexidine, eau oxygénée, EDTA...) ou anti-infectieuses (antibiotiques locaux) permettent d'améliorer les résultats des traitements mécaniques. Ici encore, aucune méthode n'a démontré sa supériorité (fig. 2)[-].
Ce type de traitement sera utilisé pour les classes de type 1 selon Schwarz[], c'est-à-dire lorsque le plateau de l'implant reste au niveau osseux crestal (déhiscence vestibulaire avec ou sans cratérisation, déhiscence des deux corticales, cratérisation sans déhiscence), ou pour les défauts à quatre ou trois murs selon Giovannoli et Renvert[].
Selon l'anatomie du défaut, la chirurgie de régénération est plus ou moins prévisible[]. Une fois la décontamination de la surface implantaire réalisée, le matériau de comblement osseux est mis en place à l'abri de la salive. Selon la morphologie du défaut, l'utilisation d'une membrane peut être indiquée[]. Afin de faciliter la cicatrisation, l'idéal est d'enlever la coiffe implanto-portée, de remettre une vis de couverture et d'enfouir l'implant[]. Cela n'est possible qu'en présence de prothèse vissée ou transvissée.
Les biomatériaux de comblement osseux peuvent être soit de l'os autogène[], soit une xénogreffe[] ou le mélange des deux[].
Une patiente de 59 ans est adressée pour un traitement parodontal et la présence de douleurs au brossage secteur 4. Le diagnostic est une parodontite stade III grade B, associée à une péri-implantite autour de 45 (8 ans après implantation)[].
Les facteurs de risque sont : une hygiène bucco-dentaire déficiente (score de plaque de 72 %), une maladie parodontale active et une absence de tissu kératinisé. Il est entrepris une thérapeutique initiale parodontale (fig. 3 et 4).
À la réévaluation (fig. 5), il est décidé d'effectuer le traitement chirurgical de la péri-implantite. Le débridement est effectué avec des inserts ultrasonores en titane, puis l'implant est lissé, et traité par aéro-polissage avec de la poudre de glycine. La décontamination chimique est réalisée avec de la povidone iodée, de la chlorhexidine et de l'eau oxygénée avec des rinçages successifs de sérum physiologique.
L'anatomie du défaut, vertical à trois parois, permet une approche régénératrice par l'apport d'une xénogreffe d'origine bovine (Bio-Oss®, Geistlich) recouverte d'une membrane résorbable (Symbios®, Dentsply) (fig. 6 et 7).
À un an postopératoire, on observe une absence d'inflammation péri-implantaire, une profondeur de sondage de 2 mm et, radiologiquement, un comblement du défaut osseux. Une greffe épithélio-conjonctive peut être envisagée afin d'augmenter la hauteur de tissu kératinisé (fig. 8 et 9).
Ce type de traitement sera utilisé pour les classes de type II selon Schwarz, lorsque le plateau de l'implant est situé en dessous du bord crestal, c'est-à-dire en présence d'une alvéolyse horizontale. La régénération est alors impossible[].
Le traitement chirurgical est réalisé après élévation d'un lambeau muco-périosté et débridement, implantoplastie, nettoyage mécanique de la surface implantaire par aéro-polissage et brossage, puis par une désinfection chimique. Enfin, le lambeau est positionné au niveau osseux résiduel[].
La chirurgie de débridement et d'élimination des lésions péri-implantaires doit permettre une excellente décontamination des implants, mais également créer une architecture gingivale et osseuse compatible avec le maintien d'une bonne santé et hygiène péri-implantaires à long terme. L'apparition de récessions postopératoires peut contre-indiquer cette technique dans une zone esthétique.
Cette approche est efficace pour la diminution des signes inflammatoires et la réduction de la profondeur de sondage[].
Une patiente de 66 ans nous consulte pour des douleurs et une sensation de mauvais goût au niveau de ses implants secteur 2. L'examen clinique et radiographique montre les trois éléments du diagnostic : saignement/suppuration au sondage, profondeur de sondage supérieure à 5 mm, et perte osseuse supérieure à 3 mm (fig. 10 à 12).
Les facteurs prédisposants sont l'hygiène parodontale et péri-implantaire non satisfaisante avec une maladie parodontale active. Les facteurs déclenchants sont donc les bactéries pathogènes avec du ciment de scellement au niveau du joint prothétique mal adapté.
Le facteur aggravant, mais qui est un facteur majeur ici, est la distance mésio-distale trop faible des deux implants : 3 mm sont nécessaires à la vascularisation, ce qui n'est pas respecté dans cette situation[].
À un an, on note l'absence de poches résiduelles, de saignement au sondage et de perte osseuse supplémentaire (fig. 13 à 16).
Les implants ont été posés il y a 6 ans. Après traitement non chirurgical, le traitement chirurgical de type résecteur est choisi car l'alvéolyse horizontale ne permet pas la régénération du tissu osseux entre les implants. Le même protocole de désinfection mécanique et chimique est appliqué que précédemment, et le lambeau est suturé apicalement (fig. 17 à 19).
Dans une majorité de cas, on observe une alvéolyse horizontale associée à un défaut osseux vertical. On utilise alors une technique combinée résectrice et régénératrice concernant la partie du défaut qu'il est possible de reconstruire (avec des parois osseuses résiduelles).
Il s'agit d'une patiente de 59 ans ancienne fumeuse (arrêt de moins d'un an) avec une maladie parodontale active (parodontite stade III grade B). Au niveau implantaire, l'examen clinique et radiologique montre un saignement au sondage associé à une alvéolyse horizontale et verticale. La péri-implantite est diagnostiquée 8 ans après la mise en place des implants (fig. 20 à 22).
La première phase du traitement comporte une thérapeutique initiale parodontale non chirurgicale. Le traitement chirurgical de la péri-implantite est effectué après 3 mois. La décontamination mécanique est effectuée (débridement, implantoplastie, aéro-polissage, brossage) puis chimique (chlorhexidine, povidone iodée, eau oxygénée, sérum physiologique). Le défaut angulaire est comblé avec une xénogreffe d'origine bovine (Bio-Oss®, Geistlich) (fig. 23 à 26).
Il est dans certains cas indiqué de déposer l'implant, notamment en cas de péri-implantite terminale avec mobilité de l'implant, de mauvais pronostic de chirurgie conservatrice ou d'échec de traitement chirurgical de péri-implantite.
Une patiente de 68 ans nous consulte pour des douleurs sous son bridge implanto-porté. L'examen clinique révèle un abcès en lingual et une gencive très inflammatoire. L'examen rétro-alvéolaire montre une lyse osseuse concernant deux implants, dont une péri-implantite terminale sur un d'entre eux. Ce dernier, du fait de son mauvais pronostic de conservation, sera déposé (fig. 27 et 28).
L'implant adjacent contaminé sera traité par le protocole décrit précédemment, et le défaut osseux sera comblé par un biomatériau d'origine porcine (Gen-Os®, OsteoBiol) (fig. 29 et 30). Un bridge provisoire est mis en place le temps de la cicatrisation.
Les résultats à 6 mois postopératoires montrent une absence d'inflammation sur les implants résiduels, et un comblement du défaut osseux provoqué par la péri-implantite terminale (fig. 31 et 32).
Les études, avec des protocoles différents en termes de protocoles chirurgicaux, de décontamination implantaire, de biomatériaux (type, forme de blocs ou de particules), et d'enfouissement ou pas de l'implant, apportent des résultats contradictoires et il n'est pas possible aujourd'hui de définir le meilleur matériau de comblement osseux pour le traitement des péri-implantites, de même que pour le choix de membrane résorbable ou non résorbable. Isehed et al. ont montré une corrélation positive entre la survie implantaire à 5 ans et le traitement chirurgical des péri-implantites avec Emdogain®[].
Chez l'animal, la ré-ostéointégration est possible si la surface est suffisamment décontaminée mais elle dépend aussi de l'état de surface qui, si elle est rugueuse, donnera un meilleur résultat qu'une surface lisse. Cette re-ostéointégration dépend aussi et du protocole chirurgical : la régénération osseuse est supérieure au débridement seul[, ].
Il existe peu études chez l'homme. Une autopsie 20 mois après procédure régénératrice montre un contact direct entre la surface implantaire et l'os néoformé, avec l'intégration de la majorité des particules du substitut osseux greffé[].
Les facteurs qui affectent le pronostic du traitement sont le tabac, la profondeur de poche initiale, l'hygiène bucco-dentaire, la perte osseuse initiale, le nombre d'implants (pluraux ou unitaires) et l'expérience du praticien[].
Le succès thérapeutique est défini à 12 mois par une profondeur de sondage péri-implantaire inférieure à 5 mm sans saignement au sondage et sans augmentation de la perte osseuse visible radiographiquement.
La santé péri-implantaire nécessite une absence de signes cliniques d'inflammation, de saignement et/ou de suppuration lors d'un sondage doux, et aucune augmentation de la profondeur de sondage par rapport aux examens précédents.
Elle peut donc exister sur un support osseux réduit[].
Comme en parodontologie, la maintenance est une étape fondamentale afin de stabiliser nos résultats à long terme et d'éviter une récidive des maladies péri-implantaires[, ].
Après vérification de l'absence de changements concernant l'état général du patient, elle comporte trois étapes : l'examen du site implantaire[] (indice de plaque, gingival, saignement et profondeur de sondage, présence d'un exsudat, examen radiographique, de la mobilité et de l'occlusion), une (re)motivation à l'hygiène, et le débridement de maintenance (tableau 3).
Ce débridement sera effectué avec une instrumentation spécifique afin de préserver de potentielles rayures l'état de surface des piliers prothétiques ou de la surface implantaire exposée[].
On peut ainsi utiliser des ultrasons en plastique, en titane, un aéro-polisseur, ou des cupules de caoutchouc avec de la pâte à polir[].
Le traitement des maladies péri-implantaires requiert un protocole rigoureux. Le diagnostic doit être déterminé de manière certaine : saignement au sondage avec profondeur de poche augmentée pour la mucosite, et perte osseuse associée de plus de 3 mm après remaniement initial pour la péri-implantite. Puis les facteurs de risque doivent être contrôlés : désorganisation du biofilm, adaptation de la prothèse, sevrage tabagique...
Le traitement non chirurgical permet de soulager les patients et de diminuer l'inflammation, mais ne permet pas une décontamination efficace de la surface implantaire.
De nombreuses procédures existent pour le traitement chirurgical des péri-implantites et la littérature ne permet pas aujourd'hui de définir quelle est la meilleure méthode.
Pour une désinfection optimale, il est utile d'associer les différentes possibilités qui s'offrent à nous et de combiner une décontamination mécanique et chimique. Lorsque cela est possible (défauts à trois ou quatre parois), une procédure de régénération doit être employée. Une alvéolyse horizontale sera associée à une procédure de réduction de la profondeur de poche.
Il ne faut pas réaliser de sur-traitement, et lorsque le pronostic sera trop défavorable ou qu'il n'y a pas de bénéfice à la conservation de l'implant infecté, ce dernier devra être retiré (fig. 33).
Quelle que soit la procédure envisagée (régénératrice, résectrice, ou combinée), la maintenance est la dernière étape mais non la moindre du protocole de traitement. Elle doit être régulière concernant les patients ayant eu des épisodes de maladie péri-implantaire.
Arthur Brincat
Docteur en chirurgie dentaire
Attaché hospitalier
Unité fonctionnelle de parodontologie, service d'odontologie, APH Marseille
Cathy Dumas
Docteur en chirurgie dentaire
Assistant-hospitalo-universitaire
Unité fonctionnelle de parodontologie, service d'odontologie, APH Marseille
Aix-Marseille Université
Sébastien Melloul
Docteur en chirurgie dentaire
Assistant-hospitalo-universitaire
Unité fonctionnelle de parodontologie, service d'odontologie, APH Marseille
Aix-Marseille Université
Virginie Monnet-Corti
Professeur des Universités – Chef de département de Parodontologie
Unité fonctionnelle de parodontologie, service d'odontologie, APH Marseille
UFR d'Odontologie Aix-Marseille Université
Responsable des DESU de Parodontologie théorique et Pratique et clinique de Chirurgie Plastique Parodontale
Praticienne Hospitalière
Responsable de l'Unité Fonctionnelle de Parodontologie
Assistance Publique Hôpitaux de Marseille