Implant n° 2 du 01/05/2018

 

DOSSIER CLINIQUE

N. Zettel / A.-C. Metz / M. Metz  

Résumé

La persistance de dents dans le secteur antérieur mandibulaire opposé à un édentement complet maxillaire provoque une importante instabilité prothétique. Ce déséquilibre génère une résorption osseuse du prémaxillaire et des tubérosités ainsi que des crêtes mandibulaires postérieures avec l'apparition d'une gencive hyperplasique et flottante.

Ce tableau clinique, évoqué sous le nom de « syndrome de combinaison », est très invalidant et son traitement par prothèses conventionnelles est insatisfaisant.

Dans les années 1980, la thérapeutique implantaire a permis de gérer cette situation avec une certaine efficacité par la pose de deux implants mandibulaires en soutien de la prothèse inférieure, améliorant ainsi l'équilibre prothétique. La situation peut néanmoins être considérablement améliorée avec disparition de ce syndrome par la pose d'implants au maxillaire.

Cet article décrit le tableau clinique du syndrome de combinaison et des différentes options thérapeutiques évoquées dans la littérature, avec la présentation de deux cas complexes traités efficacement par une restauration implantaire fixe maxillaire après greffe osseuse, avec un suivi de 8 et 3 ans.

Summary

Eliminate the combination syndrome by an implant fixed maxillary restoration

The remaining of teeth in the front mandible as opposed to a edentulous maxilla induces an important prosthesis instability.

It generates a bone reduction of the pre-maxilla and tuberosities as well as crests in the back mandible with soft hyperplastic and flabby ridges.

This clinical picture: ``combination syndrome'' is very disabling and its treatment by conventional prosthesis is not satisfactory.

The implant therapy in the eighties allowed to deal with this situation with a certain efficiency by setting two mandibular implants in order to support a lower partial denture, allowing a better balance of both dentures.

Nevertheless, all this can be considerably improved by additional implants in the maxilla.

This article describes the clinical picture of combination syndrome and the various therapeutic options with presentation of two complex cases efficiently treated by a fix implant restoration of bone grafted maxillae and a medical follow up of 8 and 3 years.

Key words

dental implants, combination syndrome, Kelly syndrome, resorption, severely resorbed maxilla, edentulous maxillae, Kennedy Applegate class I, maxillary complete denture, flabby ridges, papillary hyperplasia, vertical dimension, treatment alternative, complete fixed dentures, implant retained removable partial denture, bone grafting maxilla, allogeneic bone grafting

Un édentement complet maxillaire opposé à un édentement postérieur bilatéral mandibulaire (classe I de Kennedy-Applegate) représente une situation difficile à compenser avec des prothèses amovibles conventionnelles. Celles-ci sont en effet très instables du fait de l'impact du bloc dentaire inférieur sur la prothèse maxillaire, entraînant un déséquilibre permanent et une résorption osseuse importante (fig. 1 à 4) 

Les patients qui souffrent de cette situation évoquent un aspect inesthétique et un inconfort proche d'un véritable handicap dont nous évaluons souvent mal l'impact fonctionnel et psychologique.

Comment pouvons-nous faire face à ce tableau clinique très invalidant ?

Le syndrome de Kelly ou syndrome combiné : définition, littérature

Cette situation est décrite pour la première fois par Kelly en 1972 comme un « syndrome de combinaison » – souvent évoqué depuis sous le nom de « syndrome de Kelly » dans la littérature –, puis par Saunders en 1979 [, ].

Les conséquences cliniques de ce syndrome sont directement liées à la surcharge du prémaxillaire par le bloc dentaire résiduel mandibulaire (fig. 5).

Les auteurs décrivent en général :

– un déséquilibre des pressions prothétiques sur la surface d'appui ostéo-muqueuse, entraînant une résorption de la crête mandibulaire postérieure et une résorption osseuse au niveau du prémaxillaire avec effacement des tubérosités, lesquelles présentent ainsi une hyperplasie muqueuse (fig. 6 à 8) ;

– une hyperplasie papillaire (papille rétro-incisive) avec parfois un dédoublement du vestibule maxillaire antérieur, pouvant entraîner des lésions gingivales en feuillet et une crête antérieure atrophiée et la plupart du temps flottante (fig. 9 et 10) ;

– une extrusion des dents mandibulaires inférieures avec perte récurrente du plan d'occlusion, déséquilibre prothétique et instabilité importante de la prothèse maxillaire entraînant une perte de la dimension verticale antérieure et un proglissement mandibulaire (fig. 11 et 12).

Selon Shen et Gongloff, ce syndrome concerne 24 % des patients portant une prothèse amovible complète maxillaire et une prothèse amovible partielle mandibulaire restaurant un édentement de classe I [].

En 2003, Palmqvist et Carlsson réalisent une revue de la littérature pour vérifier les fondements de ce syndrome. Ils en concluent que le syndrome de Kelly ne répond pas aux critères d'un syndrome médical ; en revanche, la réalité clinique est évidente et ils évoquent une situation complexe avec à la fois des modifications anatomiques et fonctionnelles [].

Pour Tolstunov, le syndrome de combinaison représente une des plus « fascinantes situations cliniques défavorables », pourtant très méconnue et sous-évaluée dans la pratique clinique et la littérature [].

Étiologie

Le syndrome de Kelly progresse de manière séquentielle et l'ensemble des complications du tableau clinique sont interdépendantes. L'évolution se fait en général selon deux séquences [, , ] :

1. Le patient ayant tendance à concentrer les charges masticatoires sur les dents naturelles restantes, les forces sont excessives sur la partie antérieure de la prothèse maxillaire. Ce phénomène conduit à la résorption du prémaxillaire avec une rotation du plan d'occlusion. En conséquence, on observe une perte de la dimension verticale d'occlusion et une égression des dents naturelles restantes. Ainsi, ce phénomène accentue la surcharge antérieure et crée un véritable cercle vicieux.

2. Les crêtes mandibulaires postérieures édentées se résorbent progressivement, entraînant une rotation avec une perte du plan d'occlusion postérieur et le cercle vicieux décrit précédemment se met en place.

Approches thérapeutiques

Classique sans technique implantaire

Le traitement classique du syndrome de combinaison repose sur une phase chirurgicale d'exérèse des crêtes flottantes maxillaires, associée ou non à une réfection des prothèses amovibles. Des techniques d'empreintes adaptées permettent l'enregistrement de la crête flottante résiduelle, la dimension verticale est réévaluée et le plan d'occlusion est optimisé. Dans ce cas, une maintenance régulière est nécessaire avec correction des bases prothétiques. Toutefois, les conditions d'apparition de ce syndrome de combinaison ne sont pas modifiées. Le problème du déséquilibre prothétique et de ses conséquences sur la résorption osseuse ne peut être pallié que partiellement et temporairement si la stabilité du plan d'occlusion n'est pas maintenue [, -].

Avec pose d'implants à la mandibule

L'arrivée des thérapeutiques implantaires au début des années 1990 offre une nouvelle perspective dans la résolution de cette problématique.

En effet, la sustentation des selles libres d'une prothèse partielle mandibulaire par des implants (fig. 13 à 15) représente une technique efficace pour stabiliser l'occlusion et améliorer l'équilibre prothétique. Le taux de survie implantaire, par ailleurs excellent, et le coût abordable de ce traitement permettent ainsi de promouvoir cette option pour atténuer le syndrome de combinaison [-].

Toutefois, la présence de gencive peu adhérente au prémaxillaire et celle de tubérosités effacées demeurent des facteurs rédhibitoires à une rétention efficace de la prothèse maxillaire. Un certain nombre de patients restent de ce fait handicapés et insatisfaits par le port de leur prothèse maxillaire. Une réhabilitation implantaire maxillaire représente ainsi une alternative à envisager.

Avec pose d'implants au maxillaire

La crête osseuse maxillaire est souvent atrophiée dans ce contexte de syndrome combiné, et la technique implantaire ne permet pas des garanties de succès prévisibles pour le soutien d'une prothèse amovible complète maxillaire. Engquist et al., de même que Palmquist, Sondell et Swartz, ont en effet publié des taux de succès très médiocres au maxillaire pour certains groupes de patients ayant une anatomie compromise [, ].

Pour certains auteurs, une prothèse fixe implanto-portée maxillaire peut être envisagée avec 6 à 8 implants maxillaires correctement distribués. Une reconstruction osseuse préalable peut s'avérer nécessaire dans les situations anatomiquement très défavorables, mais cette alternative de greffe au maxillaire dans un contexte de syndrome de combinaison a jusqu'à présent été très peu évoquée dans la littérature [-].

Cette approche de traitement du maxillaire par la pose d'implants sur une crête, avec ou sans greffe préalable, représente certes un traitement plus lourd et onéreux pour les patients, mais son aboutissement permet de modifier les paradigmes du syndrome pour arriver à sa suppression.

La prothèse amovible supérieure instable va pouvoir être remplacée par un dispositif « fixe » ou assimilable : bridge transvissé avec fausse gencive ou prothèse télescopique sur barre fraisée. Cette dernière option est particulièrement indiquée quand le volume tissulaire à compenser demeure trop important malgré des greffes osseuses : le réglage de la balance « herméticité/nettoyabilité » ne représente plus le même problème qu'avec un bridge transvissé. En effet, l'amovibilité prothétique d'une prothèse télescopique permet un nettoyage efficace des structures implantaires tout en assurant une herméticité efficace pour l'élocution [].

Additionnée à la sustentation implantaire de la prothèse partielle inférieure, cette option de prothèse fixe implanto-portée maxillaire permet ainsi d'obtenir une stabilité du plan d'occlusion et de la dimension verticale, octroyant l'équilibre occlusal garant de la stabilité prothétique (fig. 16).

Les deux cas cliniques présentés illustrent l'approche thérapeutique d'une reconstruction maxillaire pour traiter des patients fortement handicapés par ce syndrome.

Cas clinique 1

Présentation

Madame H., 53 ans, est édentée depuis une vingtaine d'années, complète au maxillaire et partielle à la mandibule avec persistance du bloc dentaire antérieur. Elle ne supporte plus sa prothèse maxillaire instable et inconfortable et trouve que sa prothèse mandibulaire manque de rétention. Les prothèses ont été renouvelées un certain nombre de fois au cours des dernières années sans améliorations de son ressenti.

Un cliché panoramique montre une résorption importante du prémaxillaire et des secteurs postérieurs de la crête mandibulaire (fig. 17 et 18).

Un examen Cone Beam détaille la résorption osseuse particulièrement importante sur le plan vertical dans la région antérieure et horizontale sur les secteurs postérieurs. On observe l'impact du bloc dentaire résiduel sur la fonte osseuse du prémaxillaire (fig. 19 à 22).

Plan de traitement

Au maxillaire, le projet est de supprimer la prothèse amovible pour la remplacer par un bridge implanto-porté. Une augmentation osseuse est bien évidemment un préalable indispensable à cette option de traitement.

La disparition presque totale de la crête dans le secteur antérieur représente une difficulté importante pour une augmentation verticale. En revanche, les crêtes postérieures, diminuées en épaisseur mais conservées verticalement, permettent d'envisager un bon pronostic pour des greffes d'apposions en onlay.

Si notre patiente est prête à ce traitement conséquent, l'option d'un bridge transvissé sur implants pourra être envisagée pour supprimer le syndrome de combinaison. Ce bridge prendrait appui sur des implants répartis sur les secteurs latéraux.

À la mandibule, la pose de deux implants en situation de 34 et 44 pourra soutenir une prothèse amovible partielle à châssis, optimisant ainsi la stabilité du plan d'occlusion. Le groupe dentaire sera a priori conservé afin de permettre une proprioception plus fine à notre patiente, et son égression sera compensée par le réajustage du plan d'occlusion des nouvelles prothèses. La stabilité verticale de ces dents fera l'objet d'une attention particulière une fois les prothèses d'usage en place.

Plusieurs entretiens avec la patiente sont nécessaires pour expliquer le principe et les différentes phases du traitement. Sa compréhension et son implication sont en effet importantes pour contribuer au succès thérapeutique. Madame H. est déterminée à envisager un « traitement radical qui [lui] changera [s]a vie ».

Le traitement va s'organiser de la façon suivante :

– Greffe osseuse d'épaississement ;

– Attente de 6 mois et pose de 8 implants au maxillaire ;

– Attente de 4 mois et réouverture avec mise en fonction des implants ;

– Pose de deux implants à la mandibule puis attente de 2 mois ;

– Réalisation prothétique :

– bridge transvissé maxillaire sur piliers implantaires coniques ;

– prothèse partielle mandibulaire soutenue par deux attaches axiales.

La chirurgie de greffe osseuse

Elle est réalisée en ambulatoire en mars 2010 au service de stomatologie de l'hôpital du Kremlin-Bicêtre par le docteur Michel Jabbour.

Des blocs en onlays allogéniques (Puros®) sont ostéosynthésés sur les secteurs 13-16 et 23-26 ; le prémaxillaire n'est donc pas concerné par l'augmentation (fig. 23 à 25).

Le port de la prothèse est interdit pendant 15 jours après la chirurgie et fortement déconseillé pendant les deux semaines suivantes. Un aménagement prothétique important est nécessaire pendant la phase de consolidation des greffons : la partie vestibulaire est totalement supprimée (fig. 26 et 27).

Une attente de 4 mois est nécessaire avant de vérifier l'intégration des greffons par un examen cone beam. La cicatrisation tissulaire est à ce stade satisfaisante (fig. 28 à 39).

La chirurgie implantaire

La pose des implants est programmée au maxillaire, 6 mois après la greffe osseuse. La réouverture montre une intégration optimale des blocs à l'os natif (fig. 40 et 41).

Huit implants Screw-Vent® (Zimmer Biomet) sont insérés sur les secteurs latéraux ; leur pose est guidée par une maquette qui permet d'objectiver et de respecter le couloir prothétique (fig. 42 à 44).

Après une attente de 6 mois, les piliers de cicatrisation sont mis en place (fig. 45 et 46). Au cours de la période d'attente, deux implants mandibulaires ont été posés distalement au groupe dentaire inférieur.

La phase prothétique peut à présent être entamée.

Traitement prothétique

Un bridge avec fausse gencive transvissé sur piliers coniques est réalisé au maxillaire en technique de fonderie traditionnelle. La participation active de la patiente lors du choix des dents est le garant d'une adhésion précieuse à notre réalisation prothétique (fig. 47 à 53).

Les secteurs postérieurs mandibulaires sont restaurés par une prothèse amovible à châssis métallique avec appuis supra-implantaires par des connecteurs type Locator®, lesquels soutiennent et retiennent efficacement la prothèse, permettant de ce fait de supprimer des crochets vestibulaires inesthétiques (fig. 54 à 57).

Résultat à 8 ans

Huit ans après la pose des implants, la situation est stable aussi bien du point de vue implantaire que prothétique. Le bloc dentaire inférieur n'a pas subi d'égression particulière.

Madame H. a retrouvé sa joie de vivre et ne regrette pas d'avoir entrepris ce traitement. Ses prothèses sont esthétiques et fonctionnelles, et le plan d'occlusion est maintenu avec une dimension verticale conservée (fig. 58 à 64).

Cas clinique 2

Présentation

Madame St. âgée de 54 ans est une personne de nature joviale mais très affectée par le handicap lié à sa situation dentaire : elle est édentée complète au maxillaire et partielle à la mandibule avec persistance du bloc dentaire antérieur. Elle a beaucoup de difficultés à supporter sa prothèse maxillaire très instable et souhaite une proposition de traitement efficace.

L'examen visuel montre une crête qui semble favorable à une bonne rétention prothétique. Mais la gencive est flottante et douloureuse, et le port de la prothèse est très inconfortable, avec une instabilité due à l'impact du bloc dentaire inférieur qui provoque un déséquilibre prothétique permanent (fig. 65 à 68).

Un examen radiographique cone beam est réalisé avec un montage radio-opaque du bloc incisivo-canin supérieur. Il montre une résorption osseuse importante du maxillaire avec un décalage des dents antérieures par rapport à la crête, qui explique le déséquilibre prothétique (fig. 69 à 71).

Plan de traitement

Des implants au maxillaire pourraient permettre de stabiliser la prothèse amovible ou même d'envisager une prothèse fixe, supprimant ainsi cette problématique.

La difficulté réside dans l'atrophie de la crête osseuse, laquelle présente un volume insuffisant pour la mise en place d'implants, qui ne pourront être envisagés qu'après un épaississement de la crête osseuse maxillaire (fig. 72 à 76).

Une greffe de la presque totalité de la crête doit être réalisée dans un premier temps : le choix de blocs osseux allogéniques vissés par ostéosynthèse est retenu.

Le traitement va s'organiser de la façon suivante :

– Greffe osseuse d'apposition au maxillaire ;

– Attente de 6 mois et pose de 6 implants ;

– Attente de 4 mois et réouverture avec mise en fonction des implants ;

– Réalisation prothétique : bridge transvissé maxillaire sur 6 piliers implantaires coniques ;

– Par la suite : pose d'implants molaires à la mandibule pour une restauration fixe distale.

La chirurgie de greffe osseuse

Elle est réalisée en 2015 en ambulatoire au bloc opératoire de notre cabinet à Strasbourg par le docteur Michel Jabbour.

Un lambeau de pleine épaisseur sur l'ensemble du prémaxillaire permet le vissage de blocs osseux allogéniques cortico-spongieux (Biobank®, France) (fig. 77 et 78).

La prothèse amovible n'est pas portée pendant 14 jours et, comme pour le premier cas, est réaménagée pour supprimer tout appui sur le vestibule.

Une attente de 4 mois est nécessaire pour valider l'intégration des greffons osseux et vérifier la cicatrisation des tissus mous (fig. 79 à 84).

La chirurgie implantaire

La chirurgie implantaire est programmée 6 mois après la greffe osseuse.

Un nouveau lambeau de pleine épaisseur permet de contrôler l'intégration des greffons à la crête native avant la dépose des vis d'ostéosynthèse (fig. 85 et 86).

La pose des implants s'effectue à l'aide d'un guide chirurgical issu de la transformation du guide radiologique. Il permet d'objectiver et de respecter le couloir prothétique lors de l'implantation (fig. 87 à 90).

Un contrôle intermédiaire par un examen cone beam effectué au sein même du bloc opératoire permet de vérifier le centrage des forages initiaux avant de finaliser la pose des implants (fig. 91 et 92).

Quatre implants Screw-Vent® (Zimmer Biomet) sont mis en place en position de 14, 12, 22 et 24 dans la partie spongieuse des greffons (fig. 93 et 94).

Les deux implants postérieurs (16, 26) sont posés sur des sites osseux non greffés en technique « flap-less » (sans lambeau) du fait de l'épaisseur favorable de la crête. Ce sont des implants adaptés à un os tendre (implants Trabecular Metal®/Zimmer Biomet) qui sont directement recouverts de piliers de cicatrisation trans-gingivaux. Les 4 implants antérieurs sont coiffés de vis de couverture et ré-enfouis pour éviter des pressions liées à la prothèse. Des sutures résorbables assurent une herméticité des tissus mous (fig. 95 à 97).

Mise en fonction des implants antérieurs

Quatre mois après la chirurgie implantaire, un contrôle clinique et radiographique montre une situation satisfaisante : la gencive est bien cicatrisée et les implants semblent bien intégrés. Une réouverture chirurgicale permet de valider l'ostéo-intégration avant de placer des piliers de cicatrisation sur les implants antérieurs (fig. 98 à 100).

Réalisation prothétique

Des piliers coniques remplacent les piliers de cicatrisation pour permettre le positionnement d'un bridge transvissé (fig. 101 et 102).

La réalisation du bridge a été faite en technique CFAO – conception et fabrication assistée par ordinateur – (fig. 103 et 104).

Ce bridge est dans l'esprit des constructions sur pilotis de l'école suédoise. Les dents du commerce sont montées sur de la fausse gencive qui permet un soutien adéquat de la lèvre, tout en étant suffisamment jointive au niveau des tissus mous pour assurer une herméticité apte à une élocution aisée sans « fuites d'air ».

Le positionnement des implants s'est fait en respect du couloir prothétique grâce au guide chirurgical. Il n'existe donc pas de surplombs prothétiques importants qui pourraient contraindre un nettoyage efficace des structures implantaires, condition indispensable à la pérennité de notre traitement (fig. 105 et 106).

Résultat à 3 ans

Trois ans après la pose des implants, la situation est satisfaisante tant du point de vue implantaire que prothétique. La stabilité du bridge maxillaire a permis de conserver le bloc dentaire inférieur sans égression notable.

Notre patiente est très satisfaite du résultat fonctionnel et esthétique et ne regrette pas son engagement dans ce traitement relativement lourd. Il lui a en effet permis de retrouver une vie normale et l'inconfort lié à son ancienne prothèse complète n'est plus qu'un souvenir ancien (fig. 107 et 108).

Elle porte toujours une prothèse partielle inférieure et ses finances vont lui permettre d'envisager prochainement la pose d'implants pour une restauration fixe des secteurs molaires mandibulaires.

Conclusion

Le syndrome de Kelly est une situation clinique complexe, souvent sous-estimée quant à son retentissement clinique et qui demande beaucoup de rigueur dans son traitement. Toutefois, une technique classique de prothèses amovibles, même conduite avec la plus grande maîtrise, ne permet pas de gérer efficacement cette problématique.

Grâce à l'apport de la technique implantaire, ce syndrome peut être :

• soit atténué par la pose de deux implants mandibulaires qui permettent une sustentation de la prothèse inférieure et une certaine stabilité du plan d'occlusion ;

• soit totalement supprimé par la pose d'implants en nombre suffisant au maxillaire pour une restauration fixe avec, en cas de résorption extrême, une nécessité de greffe préalable, option que les patients ne regrettent pas tant l'amélioration de leur confort et de leur qualité de vie est significative.

Dans les deux cas cliniques présentés ici, le syndrome de combinaison a pu être traité de façon efficace malgré des conditions anatomiques très défavorables au maxillaire, grâce à un protocole de greffe qui s'est considérablement allégé avec l'utilisation de greffons allogéniques issus de banques osseuses.

Remerciements

Merci à Jérôme Durly (laboratoire A2J,Strasbourg) pour la réalisation prothétique des deux cas cliniques.

Merci au docteur Michel Jabbour pour sa disponibilité, son expertise et son humanité.

Merci à François Soutif pour ses croquis.

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Natacha Zettel
Docteur en chirurgie dentaire
Pratique exclusive en paro-implantologie

Anne-Claire Metz
Docteur en chirurgie dentaire
Pratique exclusive en implantologie

Michel Metz
Docteur en chirurgie dentaire
Pratique exclusive en implantologie

LIENS D'INTÉRÊTS : les auteurs déclarent un lien d'intérêts en tant que conseillers et formateurs pour la société Zimmer Biomet.

Correspondance : Docteur Michel Metz / drmichelmetz@gmail.com