ECLAIRAGE
Dans le cadre du plan de traitement implanto-prothétique concernant une restauration complète bimaxillaire, deux prothèses transvissées transitoires sont mises en fonction immédiatement après implantation. Dans un second temps, le choix du type de prothèse d'usage s'est orienté vers la réalisation d'une double prothèse télescopique amovible afin de permettre une hygiène efficace.
As part of the implant-prothetic treatment plan for a full rehabilitation, two temporary screwed restorations are delivered immediately after implantation. In a second step, the choice of the type of final prosthesis was directed towards the realization of a double removable telescopic implant supported overdenture in order to allow an effective hygiene.
La restauration implanto-prothétique d'un patient totalement édenté nécessite de prendre en compte des impératifs esthétiques et fonctionnels dépendants de la situation clinique mais également des attentes du patient. À ce titre, la réduction de la durée du traitement ainsi que le fait d'éviter le port d'une prothèse amovible transitoire sont des demandes fréquentes.
La mise en charge immédiate (MCI) [] est une technique décrite depuis 1977 par l'équipe de Göteborg et de nombreux auteurs, dont Ledermann []. Les taux de survie implantaire dans les cas de mise en charge immédiate selon Papaspyridakos et al. [] sont de 94,9 % au bout de 10 ans, sans différence notable entre maxillaire et mandibule. Les publications récentes de Tealdo et al. [], Testori et al. [] et Schimmel et al. [] montrent que les taux de survie des mises en charge immédiates, précoces ou différées ne révèlent pas de différence statistiquement significative sur le plan implantaire ou sur la fréquence des complications. Après la phase d'ostéo-intégration réalisée avec une prothèse transitoire, la prothèse d'usage prévue lors du projet implanto-prothétique est réalisée en prenant en compte les paramètres cliniques validés lors de cette temporisation.
La capacité à assurer l'hygiène prothétique est essentielle afin de garantir la santé des tissus gingivaux péri-implantaires et de contribuer à la pérennité implantaire à long terme [-].
L'aptitude à contrôler l'élimination de la plaque dentaire se déposant sur la prothèse et les piliers prothétiques supra-implantaires est une caractéristique à évaluer afin, si cela s'avère nécessaire, d'adapter l'architecture de la future prothèse à la maintenance quotidienne assurée par le patient traité.
Cet article présente le cas d'une patiente partiellement édentée pour laquelle une double mise en charge immédiate effectuée sur des prothèses provisoires transvissées a été réalisée. Le traitement s'est poursuivi par la fabrication d'une double prothèse télescopique [-] afin d'éviter les complications biologiques que risquait d'entraîner une hygiène prothétique peu efficace constatée lors de la phase d'ostéo-intégration des prothèses transitoires fixées.
Madame R., 64 ans, sans pathologie générale et non fumeuse, se présente à la consultation avec une demande de restauration prothétique. Elle souhaite : « Une solution esthétique et confortable, pour remplacer mes dents mobiles. J'aimerais savoir si des implants sont possibles, sans greffe. Je ne suis pas opposée à des implants... »
Sa demande concerne uniquement le maxillaire et ses attentes sont autant esthétiques que fonctionnelles (fig. 1).
La patiente présente un étage médian diminué (fig. 2). La pointe du nez ne se situe pas sur l'axe sagittal médian mais est légèrement déviée à droite. Il est constaté également une déviation des lignes bicommissurale et bipupillaire, avec une légère asymétrie du visage (fig. 3). Le profil est légèrement convexe et révèle un angle naso-labial ouvert (fig. 4 et 5).
Lors du sourire (fig. 6 et 7), le profil se creuse par manque de soutien des lèvres dû à l'absence des dents antérieures et aux résorptions osseuses non compensées par une gencive artificielle prothétique. La patiente formule son ressenti en ces termes : « Je ne vois plus mes lèvres, je suis obligée de tricher par du rouge à lèvres et je garde un air sévère » (fig. 8 et 9). La ligne du sourire selon la classification de Liebart est basse (classe 4), n'exposant pas la région cervicale dentaire ni les papilles gingivales interdentaires. Au repos, les commissures labiales sont tombantes et asymétriques avec la présence de perlèches.
À la palpation, les muscles apparaissent contractés mais non douloureux. Le trajet d'ouverture-fermeture buccale est d'amplitude normale sans déviation ni bruits articulaires associés.
Au maxillaire, l'examen clinique révèle la présence des 15, 13 et 25. Le parodonte est fin, montrant quelques signes d'inflammation avec localement des hyperplasies gingivales. Des récessions gingivales sont visibles (fig. 10).
Une ancienne prothèse amovible partielle à châssis métallique présente des dents artificielles usées.
L'orientation des dents maxillaires au niveau antérieur est perturbée avec une vestibulo-position de l'ensemble du bloc antéro-supérieur.
À la mandibule, les 33, 32, 31, 41, 42, 43 et 44 sont présentes. Le parodonte est également fin avec des récessions gingivales.
L'hygiène est insuffisante, attestée par la présence de plaque.
Le sondage parodontal montre de nombreuses poches d'une profondeur supérieure à 5 mm localisées sur l'ensemble des dents. Des mobilités dentaires sont enregistrées.
Comme au maxillaire, une prothèse partielle à châssis métallique ancienne remplace les dents absentes. Les dents prothétiques présentent des faces occlusales aplanies par l'usure.
L'examen radiographique montre une résorption osseuse généralisée d'environ deux tiers de la hauteur de chaque dent avec localement des pertes accentuées en sites de 42 à 32 (fig. 11).
L'examen des moulages montés en articulateur en relation centrée montre un léger décalage entre cette position et l'occlusion d'intercuspidie maximale par contact prématuré entre la 13 et la 43. Les rapports interdentaires bilatéraux sont ceux d'une classe I d'Angle au niveau canin.
La vestibulo-version des dents antérieures maxillaires et le calage relatif assuré par des dents artificielles montées sur les deux plaques bases métalliques (PBM) contribuent à la perte de la dimension verticale d'occlusion, à la perturbation du plan d'occlusion ainsi qu'à la diminution de l'espace prothétique (fig. 12 et fig. 13).
La déglutition semble fonctionnelle sans pulsion sur le bloc incisif supérieur.
Lors d'une étape ultérieure, un montage d'étude prospectif est confectionné au laboratoire afin de compléter l'examen clinique et d'orienter le choix d'un plan de traitement. L'essayage de cette maquette esthétique et fonctionnelle confirme les anomalies de position des dents, notamment l'égression de la 13 ainsi que la version du bloc 33-43, et convainc la patiente de la nécessité de traiter les deux arcades simultanément (fig. 14, 15 et 16).
La synthèse de ces éléments permet de poser le diagnostic d'une parodontite chronique généralisée de l'adulte avec des atteintes localement sévères au niveau des 13, 25, 33, 32, 31, 41,42 et 43. Le pronostic de ces dents étant très réservé, il est décidé de proposer leur extraction et leur remplacement par une prothèse fixée supra-implantaire (PFSI). Afin de confirmer cette possibilité, des guides radiologiques issus des montages prospectifs sont réalisés (fig. 17 et 18). L'analyse des reconstructions scanner confirme la possibilité de mettre en place 6 implants maxillaires dans les secteurs 16, 15, 14, 24, 25 et 26 et 6 implants mandibulaires dans les secteurs 36, 34, 32, 42, 44 et 46.
En fonction des caractéristiques cliniques et radiologiques observées et afin d'éviter une temporisation par prothèse amovible refusée par la patiente, un protocole de mise en charge immédiate sur des prothèses transitoires se révèle être une option thérapeutique pertinente.
La réalisation de prothèses transitoires fixées de type armatures transvissées supportant des dents artificielles du commerce sans fausse gencive au maxillaire et avec fausse gencive en résine acrylique à la mandibule se révèle être la solution de choix pour permettre de compenser la perte osseuse et assurer ainsi un support labial suffisant. Une réévaluation sera néanmoins nécessaire après la phase initiale transitoire pour valider définitivement le choix de l'architecture prothétique réalisée.
Le plan de traitement proposé et accepté par la patiente est articulé autour de trois phases :
– une première phase d'assainissement et de préparation aux différentes chirurgies ainsi qu'à la réalisation des prothèses provisoires immédiates transvissées ;
– une deuxième étape d'avulsions dentaires et d'insertion des implants d'abord au maxillaire puis, 4 mois plus tard, à la mandibule avec mise en charge immédiate des prothèses transvissées dans les deux cas, 6 heures après intervention chirurgicale ;
– une troisième phase de réévaluation et de réalisation des deux prothèses d'usage (tableau 1).
Après moulage des empreintes primaires réalisées à l'aide d'un matériau élastomère siliconé polyvinylsiloxane (Imprint 4 Preliminary Penta, 3M ESPE), des porte-empreintes individuels ont été fabriqués. Des empreintes secondaires maxillaire et mandibulaire sont ensuite effectuées avec un matériau polyéther (Impregum Penta Soft, 3M ESPE). Les modèles réalisés sont montés sur un articulateur semi-adaptable avec des bases d'occlusion qui permettent de fixer la relation intermaxillaire, en occlusion en relation centrée à la dimension verticale d'occlusion déterminée. Les étapes d'essayages esthétique et fonctionnel des montages directeurs sur cire sont conduites classiquement malgré la présence des dents à extraire encore présentes sur les deux arcades. Un premier duplicata en résine transparente des montages directeurs est réalisé afin de servir de guide radiologique, qui sera transformé secondairement en guide chirurgical de situation implantaire. Un second duplicata, ou index occlusal, en résine transparente est confectionné avec un renforcement du calage en occlusion dans le but de faciliter l'enregistrement du rapport intermaxillaire, immédiatement après la mise en place des implants.
Après une étape d'assainissement préalable par détartrage et motivation à l'hygiène, les extractions des 13, 15 et 25 ont été réalisées. L'insertion immédiate de 6 implants (SLActive® Tissue Level RN SP, Straumann), de 4,1 mm de diamètre et de 10 et 12 mm de longueur, est facilitée grâce à un guide chirurgical de forage initial à appui dentaire. Le premier forage est réalisé avec un foret pilote au travers des puits de 2,2 mm situés au centre des faces occlusales des dents artificielles du guide chirurgical, duplicata du projet prothétique. Puis les phases successives de forage et d'insertion des implants se déroulent classiquement. Des vis de cicatrisation hautes sont placées avant le repositionnement des lambeaux et les sutures (Monofil® 5-0 résorbable, Assut Europe).
La phase chirurgicale terminée laisse place aux étapes prothétiques d'empreinte des situations implantaires et d'enregistrement du rapport intermaxillaire sur les plateformes implantaires.
Une fois les vis de cicatrisation déposées, une empreinte globale au polyéther (Impregum Penta Soft et Impregum Garant L Duosoft, 3M ESPE) est réalisée avec 6 transferts (RN synOcta®, Straumann pour porte-empreinte ouvert) transvissés sur les plateformes implantaires (fig. 19). Dans le cas présenté ici, les axes implantaires étant suffisamment parallèles entre eux et les émergences implantaires peu sous-gingivales, il a été décidé de ne pas utiliser de piliers intermédiaires, du type pilier conique ou pilier transgingival droit ou angulé type SRA® (Straumann), et d'agréger la restauration prothétique directement sur les implants.
Après l'empreinte de situation implantaire, afin de garantir la conservation de la relation intermaxillaire établie lors des phases thérapeutiques précédentes et de permettre un enregistrement fiable de l'occlusion malgré la fatigue et l'anesthésie du patient, deux cylindres provisoires (RN synOcta® NI, Straumann) transvissés en 15-25 sont solidarisés à l'index occlusal à l'aide de résine chémopolymérisable (Luxatemp Star, DMG) (fig. 20). Des vis de cicatrisation hautes, afin qu'elles ne soient pas recouvertes par l'inflammation gingivale des premières heures post-chirurgicales, sont ensuite installées. Elles permettront un dévissage simple et indolore lors de la pose de la prothèse provisoire transvissée, 6 heures après la chirurgie.
Des analogues (RN, Straumann) sont transvissés sur les transferts et l'ensemble est envoyé au laboratoire de prothèses. Un maître modèle est réalisé avec une fausse gencive en élastomère. L'index occlusal sur lequel sont solidarisés les deux cylindres provisoires permet de monter facilement les modèles en articulateur en conservant la relation intermaxillaire et la dimension verticale d'occlusion préétablies. Le montage directeur est polymérisé. La base prothétique maxillaire est largement modifiée dans sa forme par meulage afin d'éviter tout appui muqueux de la prothèse et d'obtenir une architecture de prothèse transvissée esthétique, tout en permettant une hygiène quotidienne. Ainsi, une attention particulière est portée à la forme de l'intrados en regard de la fibromuqueuse en termes d'état de surface et d'architecture afin de faciliter le passage des instruments d'hygiène.
La prothèse est transvissée 6 heures après la chirurgie (fig. 21). L'esthétique, l'occlusion et la phonation sont contrôlées ainsi que l'accès prophylactique aux brossettes.
Des contrôles cliniques et radiologiques (fig. 22) réguliers sont effectués au bout de 1 semaine puis tous les mois pendant 4 à 6 mois avant la réalisation des prothèses d'usage. Des conseils réitérés concernant les manœuvres d'hygiène et l'importance de l'efficacité du contrôle de plaque sont prodigués.
Quatre mois après la phase chirurgicale maxillaire, le protocole de traitement de l'édentement bimaxillaire se poursuit à la mandibule.
Ainsi, à la mandibule 6 implants (SLActive® Tissue Level RN SP, Straumann), de 3,3 et 4,6 mm de diamètre et de 8 à 14 mm de longueur, sont mis en place après extraction des 33 à 44 suivant un protocole identique à celui appliqué au maxillaire. À ce stade, la prothèse maxillaire est déposée et rectifiée pour améliorer le plan d'occlusion avec la prothèse mandibulaire transvissée mise en place . L'ensemble est jugé satisfaisant malgré une légère déviation du milieu interincisif dont l'effet est accentué par la déviation de l'axe nasal.
Durant les différents rendez-vous de contrôle successifs, malgré les conseils, encouragements et le soutien actif de l'équipe soignante, il est constaté une persistance de plaque dentaire sous les prothèses transvissées et autour des émergences implantaires.
À ce stade du traitement, il est nécessaire de prendre en compte les difficultés rencontrées par la patiente pour assurer l'hygiène de ses prothèses. Malgré sa bonne volonté et la compréhension de l'inefficacité relative de son hygiène, la persistance chronique de plaque dentaire en quantité importante tant au maxillaire qu'à la mandibule incite à penser que la mise en place d'une prothèse d'usage transvissée d'une architecture similaire à celle des prothèses transitoires se traduira par un contrôle de plaque tout aussi limité avec les conséquences délétères sur la santé des tissus péri-implantaires fréquemment rapportées dans la littérature scientifique [-] (fig. 23).
Il est donc proposé de modifier le plan de traitement initial en réalisant des prothèses amovibles de type télescopique, agrégées à des piliers télescopiques, qui allient les avantages de compenser la perte tissulaire par une gencive artificielle en résine acrylique et de permettre une hygiène efficace par retrait quotidien de la prothèse par la patiente.
Après discussion avec Mme R., celle-ci accepte, rassurée par l'architecture prothétique envisagée qui n'est pas celle d'une prothèse amovible conventionnelle tout en facilitant les manœuvres d'hygiène, ce qui réduit d'autant certains risques biologiques inhérents aux prothèses fixées transvissées.
Le système d'ancrage de la prothèse est constitué de piliers télescopiques en alliage de titane transvissés, réalisés selon un axe d'insertion unique. Les 6 infrastructures parallélisées reçoivent des chapes d'or comme contreparties, celles-ci étant intégrées dans l'intrados prothétique.
Les étapes de réalisation prothétique sont classiquement conduites autour de nouvelles empreintes des situations implantaires maxillaire et mandibulaire dont les moulages sont montés en articulateur. La validation de l'exactitude des transferts des situations implantaires au niveau des modèles obtenus est effectuée à l'aide de clés en plâtre, transvissées sans fracture (fig. 24). Un montage directeur maxillaire et mandibulaire, issu des prothèses transitoires modifiées durant la phase d'ostéo-intégration, est réalisé puis validé cliniquement (fig. 25 et 26).
Les maîtres modèles obtenus ainsi que les montages directeurs sont numérisés à l'aide d'un scanner de table puis superposés numériquement afin de permettre la conception des infrastructures supra-implantaires sous forme de piliers télescopiques, par CFAO (fig. 27 à 29).
Les infrastructures télescopiques en titane sont réalisées au centre d'usinage Straumann de Bâle (fig. 30 à 31). Les chapes en or de 250 microns d'épaisseur sont ensuite fabriquées au laboratoire par galvanoplastie (électrodéposition d'or 24 carats) directement sur les piliers dont la surface a été recouverte d'un vernis espaceur (fig. 32, 33a et 33b). Ce dépôt est réalisé dans un bain électrolytique constitué d'une dilution de 6 g d'or/500 ml durant 5 heures (cuves à électrodéposition Wieland AGC5 Process). Ensuite, les parties mâles (piliers télescopiques) sont séparées des parties femelles (chapes) en les plongeant dans un bain d'acide nitrique dilué à 60 % qui dissout le vernis espaceur. Les chapes sont solidarisées entre elles par un fil de renfort coulé (fig. 34 et 35) en chrome-cobalt puis collé à l'aide de RelyX Unicem (3M ESPE). L'ensemble est secondairement inséré dans la résine de l'intrados prothétique (fig. 36). La prothèse équipée de dents en résine chargée (Premium, Heraeus Kulzer) est terminée avec une légère caractérisation de la résine acrylique (PalaXpress®, Heraeus Kulzer, SR Nexco®, Ivoclar Vivadent). La limite entre le pilier supra-implantaire télescopique et la chape doit se situer 1 mm au-dessus de la limite gingivale pour éviter une compression des tissus mous péri-implantaires. L'insertion se fait par friction douce sur les 6 piliers parallélisés assurant un niveau global de rétention prothétique très efficace. L'ensemble est essayé en bouche après vissage des infrastructures supra-implantaires. Un contrôle clinique et radiographique des différentes étapes est effectué pour vérifier l'adaptation des pièces (fig. 37 à 42).
Finalement, les piliers sont torqués à 35 N.cm. L'insertion et la désinsertion par friction douce sont vérifiées ainsi que l'absence de sustentation muqueuse de la prothèse qui doit être uniquement implanto-supportée, retenue par le système d'attachement télescopique.
L'aspect esthétique (fig. 39 et 42) donne satisfaction à la patiente qui déclare « Je me retrouve mieux ainsi, je suis bien ! » (fig. 43 et 44) On retrouve un parallélisme des lignes esthétiques plus harmonieux qu'avant. Les possibilités d'hygiène sont vérifiées avec et sans retrait prothétique (fig. 45). La simplicité d'accès aux zones à nettoyer rassure la patiente.
Des contrôles successifs sont effectués afin de vérifier l'efficacité des procédures d'hygiène, tant au maxillaire qu'à la mandibule, et suivre l'état d'inflammation des tissus gingivaux péri-implantaires. Les contrôles radiologiques successifs montrent une bonne stabilité du niveau osseux péri-implantaire au cours du temps (fig. 46).
Dans le cadre du plan de traitement proposé à la patiente, la mise en charge immédiate répondait à sa demande d'éviter une temporisation par prothèse amovible. La littérature scientifique récente [-] montre que la mise en charge immédiate est une technique considérée comme fiable et cliniquement validée. Ainsi, pour Papaspyridakos et al., les taux de survie implantaire sont compris entre 94 et 100 % avec un recul de 10 ans []. De plus, d'après Tealdo et al., Testori et al. et Schimmel et al. [-], la mise en charge immédiate donnerait des résultats comparables à ceux des protocoles classiques de mise en charge.
Le délai entre l'intervention de mise en place des implants, tout d'abord au maxillaire puis à la mandibule, a été décidé essentiellement afin de respecter la demande initiale de la patiente inquiète de la perte de ses dents maxillaires. Rassurée par le bon déroulement du traitement, elle a pu accepter la suite de la thérapeutique. Par ailleurs, ce délai a été mis à profit pour modifier la prothèse maxillaire mise en place. Enfin, cette période complétée par la mise en charge immédiate de la prothèse mandibulaire a permis de découvrir les difficultés rencontrées concernant la prophylaxie et l'hygiène quotidienne, et ce malgré les motivations répétées.
D'après les travaux de nombreux auteurs [-] et en accord avec les conclusions de la méta-analyse de Atieh et al. [], la plaque dentaire représente le facteur de risque essentiel de la péri-implantite. Selon Wilson [], Serino et al. [] et Pranskunas et al. [], le contrôle de l'élimination de la plaque bactérienne par le patient, en complément de séances de maintenance régulières, est la clé de la réussite thérapeutique à long terme des traitements implanto-prothétiques.
Afin de faciliter l'hygiène quotidienne, l'intérêt des prothèses amovibles est patent face aux prothèses fixées transvissées rapportées fréquemment comme difficiles d'accès aux brossettes interdentaires, ce qui entraîne une rétention de plaque à l'origine de l'inflammation des tissus péri-implantaires associée à une halitose [] (fig. 45).
Le choix d'une prothèse télescopique [-] repose sur des avantages en termes :
– de haut niveau de rétention, lequel la rapproche d'une prothèse fixée ;
– de volume prothétique permettant un support labial suffisant pour compenser la perte osseuse antérieure ;
– de possibilité accrue d'accessibilité à l'hygiène, la maintenance au niveau des tissus péri-implantaires et des piliers télescopiques ne semblant pas constituer un inconvénient de cette architecture prothétique.
La littérature scientifique souligne par ailleurs l'excellent comportement sur le plan de la pérennité implantaire de ce type de restauration prothétique. Concernant le traitement de l'édentement complet, Rehmann et al. [] rapportent des taux de survie implantaire identiques entre prothèses totales fixées et télescopiques. Cela est en accord avec les publications de Hu et al. [] et, plus récemment, de Kern et al. [] qui signalent un taux de survie implantaire à 5 ans de 95 % au maxillaire et de 98 % à la mandibule. La méta-analyse de Raghoebar et al. [] conforte le choix effectué en précisant que la solidarisation de 6 implants par une barre de conjonction, par rapport aux attachements axiaux indépendants, permettrait des taux de survie implantaire de 98 %. L'étude clinique rétrospective à 10 ans de Hu et al. [] montre également les avantages de ce type de thérapeutique en termes de maintenance et de satisfaction.
Les demandes ou les attentes réalistes des patients édentés doivent être prises en compte dans le plan de traitement implanto-prothétique qui leur est proposé. Néanmoins, l'aptitude du patient à entretenir le dispositif prothétique spécifique qui va être réalisé pour répondre à sa demande conduit parfois à adapter les modalités thérapeutiques ou à modifier le plan de traitement initialement arrêté. À ce titre, la temporisation est une étape essentielle pour évaluer la pertinence du choix thérapeutique initialement proposé et, éventuellement, décider de le modifier afin de limiter les complications mécaniques ou biologiques fréquemment rapportées dans la littérature scientifique concernant les restaurations implanto-prothétiques fixées.
L'auteur remercie son collègue, le Dr Xavier Frachon, chirurgien-dentiste spécialiste qualifié en chirurgie orale, qui a effectué les étapes chirurgicales et implantaires, Guillaume Fleury du laboratoire Design Implant, le DU de prothèses sur implants (DUCPIP) dirigé par le Pr Bruno Tavernier et, plus particulièrement, le Pr Olivier Fromentin qui l'a fortement incité à écrire cet article et soutenu lors de sa rédaction.
Ivan Botherel
DUCPIP, Université Paris 7-Denis Diderot
Hôpital Rothschild (AH-HP)
27 rue du Dr Émile Roux, 56000 Vannes
l'auteur déclare n'avoir aucun lien d'intérêts concernant cet article.