Implant n° 2 du 01/05/2016

 

DOSSIER CLINIQUE

Thomas BAUCHET  

À la suite d'une extraction dentaire, le procès alvéolaire du site édenté va subir des modifications quantitatives et qualitatives []. Grâce à des études expérimentales chez l'animal, Araùjo [] a mis en évidence la disparition progressive de l'os fasciculaire (bundle bone) lors du processus de cicatrisation. Sur cet os s'insèrent les fibres du...


Résumé

Les techniques d'augmentation osseuse sont fréquemment utilisées dans les restaurations implantaires. Afin d'éviter des prélèvements d'os autogène parfois délabrants, il est possible de réaliser une xénogreffe comme alternative thérapeutique. Le CopiOs® Particulate, par son procédé de stérilisation, permet de préserver le collagène de la matrice osseuse. Les particularités du matériau permettent de répondre à de nombreuses indications cliniques.

À la suite d'une extraction dentaire, le procès alvéolaire du site édenté va subir des modifications quantitatives et qualitatives []. Grâce à des études expérimentales chez l'animal, Araùjo [] a mis en évidence la disparition progressive de l'os fasciculaire (bundle bone) lors du processus de cicatrisation. Sur cet os s'insèrent les fibres du ligament desmodontal. Après l'extraction, les forces physiologiques ne s'appliquent plus sur cette partie du complexe dento-alvéolaire, provoquant sa disparition. Ce processus peut être aggravé par une extraction traumatique, par la présence d'une inflammation ou d'un défaut alvéolaire, par un biotype gingival fin, par le tabagisme mais également par le nombre de dents extraites []. Le but des thérapeutiques actuelles, en fonction des conditions locales et générales, est de restituer la fonction sur des prothèses supra-implantaires fixées afin de garantir des critères fonctionnels et esthétiques. Afin de pérenniser ces critères, le positionnement tridimensionnel de l'implant doit répondre à des règles strictes []. On a observé une évolution des concepts en implantologie, l'implant n'étant plus guidé par le volume osseux disponible mais par le couloir prothétique à restaurer. Lorsqu'il existe une discordance entre le projet prothétique et le positionnement idéal des implants, des techniques chirurgicales additives sont alors indiquées. La référence, ou gold standard, en matière de matériau d'apport reste l'os autogène mais il présente différentes limites : deux sites opératoires, des risques nerveux inhérents aux prélèvements intra-oraux [], un volume osseux disponible limité en intra-oral. Afin de pallier ces inconvénients et d'éviter des prélèvements extra-oraux, il est possible de réaliser des reconstructions grâce aux substituts osseux.

xénogreffes CopiOs® Particulate

Une xénogreffe est une greffe d'organe ou de tissu entre individus d'espèces différentes. Le CopiOs® Particulate est composé de particules spongieuses d'os d'origine bovine, stérilisées et conservées à l'aide du procédé exclusif Tutoplast®. Pour rappel, le procédé Tutoplast® (Tutogen Medical) permet, depuis plus de 30 ans dans de nombreuses spécialités médicales, d'obtenir une viro-inactivation de produits utilisés comme matériaux d'apport en chirurgie osseuse. Il se décompose en 5 étapes :

– une délipidation à l'acétone sous bain ultrasonore, qui permet l'élimination des lipides et l'inactivation des virus encapsulés ;

– un traitement osmotique afin de détruire les membranes cellulaires ;

– un traitement oxydatif à l'eau oxygénée, qui agit sur les virus non encapsulés et les protéines solubles ;

– une déshydratation par l'acétone permettant de conserver les propriétés biomécaniques du greffon ;

– une irradiation aux rayons gamma à faible dose afin de stériliser le greffon dans son double emballage stérile.

Le procédé de déshydratation permet au matériau de conserver le collagène de la matrice osseuse bovine, de la structure naturelle de l'os spongieux []. Ce procédé est également utilisé pour le traitement du Puros®, os allogénique présentant des caractéristiques biomécaniques inégalées.

Dans l'étude animale menée par Tudor et al. [], le CopiOs® Particulate conserve des propriétés ostéoconductrices grâce la préservation du collagène. En effet, de nombreuses intégrines exprimées à la surface des ostéoblastes sont ainsi capables de se fixer directement sur le collagène ou sur des fibronectines liées au collagène. Pour rappel, l'ostéoconduction correspond à la propriété passive d'un matériau lui permettant d'accepter la régénération osseuse, par invasions vasculaire et cellulaire, à partir du tissu receveur au contact de ce matériau.

Le CopiOs® Particulate présente la particularité d'avoir un taux de résorption assez important au bout de 12 semaines. L'étude de Thowarth et al. [] sur l'animal met en évidence un pourcentage de minéralisation osseuse supérieur, au bout de à 12 semaines, par rapport à une xénogreffe scientifiquement reconnue.

Présentation

Le CopiOs® Particulate se présente dans un double emballage stérile. Il peut être conservé durant 5 ans à température ambiante. Il est commercialisé sous trois contenances : 0,5, 1 et 2 cm3, et sous 2 granulométries : 0,25-1 mm et 1-2 mm (fig. 1 et 2).

Indications

Le CopiOs® Particulate permet de répondre à de nombreux cas cliniques dans les indications suivantes :

– comblement postextractionnel d'alvéole ;

– chirurgie parodontale (poche, furcation) ;

– comblement sinusien ;

– régénération osseuse guidée péri-implantaire ;

– comblement des espaces avoisinant des greffons corticaux autogènes.

Intérêts cliniques

L'intérêt de ce matériau de xénogreffe sera mis en évidence avec la présentation de deux cas cliniques utilisant, pour l'un, un comblement d'alvéole et, pour l'autre, un processus de régénération osseuse guidée.

Une patiente de 44 ans, sans antécédents médicaux, souhaite une solution implantaire afin de remplacer une prothèse amovible qu'elle supporte depuis 5 ans après l'extraction de la 21 pour des raisons infectieuses.

L'examen clinique met en évidence un biotype gingival fin et une perte de substance osseuse vestibulaire. La patiente présente un diastème. Au niveau prothétique, l'examen ne relève pas de facteurs de risques particuliers (fig. 3).

L'analyse 3D confirme l'examen clinique en ce qui concerne la perte d'une partie importante du mur osseux vestibulaire. Le volume osseux résiduel permet malgré tout de stabiliser l'implant en respectant le positionnement tridimensionnel idéal (fig. 4).

La présence du diastème permet de réaliser une incision de décharge médiane. Après la mise en place de l'implant, le comblement vestibulaire est réalisé. Pour cette régénération osseuse guidée, le CopiOs® Particulate est associé à une membrane CopiOs®. Par le maintien du collagène dans le biomatériau, on constate une facilité de manipulation des particules (fig. 5 et 6).

Au bout de 4 mois, la réouverture du site est associée à une greffe de conjonctif enfouie en rouleau avant de réaliser la partie prothétique (fig. 7 à 9).

Le second cas concerne une patiente de 39 ans qui a subi de nombreuses résections apicales sur les 2 incisives centrales maxillaires. Par suite de la récidive infectieuse et de la mobilité de ces 2 dents, la décision d'extraire est retenue (fig. 10). Une restauration prothétique supra-implantaire est envisagée. Après l'analyse 3D (fig. 11), on constate de volumineuses lésions radio-claires avec des pertes de continuité de l'os cortical vestibulaire. Afin d'éviter une greffe osseuse secondaire en onlay, un comblement d'alvéole postextractionnel au CopiOs® Particulate est réalisé ; il est associé à un bouchon collagénique (fig. 12 à 14). La phase de temporisation est gérée avec un bridge collé afin de guider les tissus mous (fig. 15 et 16).

L'imagerie 3D du site au bout de 5 mois met en évidence un maintien du volume osseux (fig. 17), ce qui est confirmé par l'observation clinique lors de la mise en place des implants (fig. 18).

Intérêts histologiques

Après l'extraction d'une 36, un patient de 45 ans présente au bout de 2 mois un important retard de cicatrisation (fig. 19). Après un curetage minutieux du tissu cicatriciel, la décision est prise de combler le déficit osseux avec des particules de CopiOs® Particulate. Le résultat radiologique 5 mois plus tard met en évidence une préservation du volume osseux (fig. 20). Une carotte osseuse est prélevée lors de la mise en place de l'implant (fig. 21) et transmise au CHU d'Angers (fig. 22). Une étude histologique et histo-enzymologique est demandée. L'analyse de la biopsie osseuse est réalisée sans décalcification, après inclusion à l'aide de polymères méthacryliques et coupe sur microtome à objets durs. À la coloration de Goldner et grossissement × 40, on constate un important volume osseux (zone verte) avec de nombreux fronts d'apposition de tissu ostéoïde (zone rouge). Dans la principale zone de tissu ostéoïde, on observe quelques îlots de particules de matériau CopiOs® Particulate. Ce sont les seules retrouvées dans la carotte (fig. 23). L'analyse en polarisation relève un os à texture non lamellaire (fig. 24). Sur les coupes avec détection histo-enzymologique de la phosphatase acide tartrate résistante (TRAcP, tartrate-resistant acid phosphatase 5b), on note la présence d'ostéoclastes typiques (aspect brun rouge) en train de résorber, d'une part, le tissu osseux néoformé et, d'autre part, le biomatériau (fig. 25). On ne constate pas de cellules inflammatoires. Ces résultats confirment la résorption rapide du biomatériau et sa capacité ostéoconductrice.

Conclusion

La xénogreffe CopiOs® Particulate permet de répondre à de nombreuses situations cliniques comme cela vient d'être exposé. La préservation de la matrice collagénique permet une manipulation clinique aisée et révèle des résultats cliniques ainsi qu'histologiques prometteurs.

BIBLIOGRAPHIE

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Remerciements

Au prothésiste du laboratoire Dental Doué.

Au Pr Daniel Chappard et au Groupe études remodelage osseux et biomatériaux (GEROM) du CHU d'Angers.

Thomas Bauchet
Docteur en chirurgie dentaire
DES de chirurgie buccale
DU d'implantologie (Corte)
DU de chirurgie pré-implantaire et péri-implantaire (Paris 11)
DU de biomatériaux et tissus calcifiés (Angers)
Chirurgie buccale et implantaire exclusive
3, boulevard Foch
49100 Angers

l'auteur déclare n'avoir aucun lien d'intérêts concernant cet article.