CHIRURGIE
Olivier Bourhy* Patrick Limbour**
*Interne en chirurgie orale au CHU de Rennes
Service de chirurgie orale, CHU Pontchaillou,
2, rue Henry-Le-Guilloux
35000 Rennes
**Chirurgien-dentiste qualifié en chirurgie orale
MCU-PH au CHU de Rennes
Service de chirurgie orale, CHU Pontchaillou,
2, rue Henry-Le-Guilloux
35000 Rennes
L’objectif de l’enquête était d’évaluer la satisfaction des patients restaurés par prothèses amovibles partielles stabilisées sur implants (PAPSI).
Trente-deux patients ont été traités par PAPSI entre 2011 et 2014 par le même binôme de praticiens (un chirurgien-dentiste omnipraticien pour la partie prothétique, un chirurgien oral pour la partie implantaire). Leur avis a été recueilli au moyen de questionnaires portant sur les motivations, les attentes et les résultats de leur restauration. Les réponses de 21 patients, traités soit par PAPSI maxillaire (16 patients), soit par PAPSI mandibulaire (4 patients), soit les deux (1 patient), à l’aide d’attachements de type Locator®, ont pu être récupérées.
Cent pour cent des patients ont été satisfaits tant sur le plan fonctionnel qu’esthétique.
Au vu de ces résultats, la PAPSI apporte pleine satisfaction aux patients qui en bénéficient. Pour tous les patients interrogés, l’adaptation a été rapide et la maintenance est simple. Malheureusement, le coût des traitements implantaires reste un frein pour les patients, même s’il est moins important que pour des restaurations fixes sur implants.
Purpose: to assess patient satisfaction with implant supported removable partial dentures.
Thirty-two patients were treated with an implant supported removable partial denture from the same two practitioners (a general dentist for the prosthetic rehabilitation, an oral surgeon for the implants placement). Their opinions have been collected with a questionnaire about their motivations, their expectations and their satisfaction. Twenty one patients answered it, who received either a maxillary implant supported removable partial denture (16 patients), or a mandibular one (4 patients), or both (1 patient), with use of the Locator® attachement.
One hundred percent of the patients were satisfied with their implant supported removable partial dentures, both functionally and aesthetically.
Given these results, implant supporting of removable partial dentures is of great help for patients. For all of them, adaptation was fast and maintenance is easy. Unfortunately the costs for implant placement still limit the access for these treatments, even if it is a much cheaper option than fixed implant supported prostheses.
Au sein de notre arsenal thérapeutique, la prothèse amovible partielle stabilisée sur implants (PAPSI) reste méconnue et rarement rencontrée. Elle permet pourtant de résoudre efficacement certaines situations cliniques : c’est ce que nous évaluons ici par une enquête auprès de patients et de praticiens [1].
Quelle est, sur le terrain, la place de la PAPSI ? Est-ce une solution fréquente ou plutôt marginale ? Quelle opinion en ont les professionnels dentaires ? Pour en avoir une idée, nous avons posé à 34 praticiens bretons la question suivante : « Entreprenez-vous régulièrement des restaurations prothétiques par PAP implanto-stabilisées ? »
Les résultats sont éloquents : seuls 3 praticiens répondent affirmativement. Parmi les 31 réponses négatives, 3 raisons ressortent :
– un manque de formation sur le sujet : les praticiens ne connaissant ou ne maîtrisant pas le sujet, la PAPSI ne fait tout simplement pas partie de leur arsenal thérapeutique ;
– une méconnaissance des intérêts et indications de la PAPSI : maîtrisant mieux les techniques dites conventionnelles, ces praticiens ne pensent pas ou ne trouvent pas d’indication à cette méthode ;
– un rejet de cette solution : ces chirurgiens-dentistes n’en voient pas l’intérêt ou en ont une mauvaise opinion, notamment concernant la durée de vie d’une telle restauration. Certains disent même ne jamais travailler avec les implants.
Ces opinions reflètent-elles de mauvais résultats obtenus avec les PAPSI ? Ou correspondent-elles plutôt à un manque de diffusion de la technique auprès des praticiens ?
Pour nous assurer de la qualité des résultats obtenus lors de restaurations par prothèses amovibles partielles implanto-stabilisées, nous avons décidé de réaliser une enquête de satisfaction auprès de patients qui en étaient porteurs.
Ainsi, nous avons envoyé aux 32 patients traités par PAPSI conjointement par le même binôme de praticiens entre 2011 et 2014 (un chirurgien oral pour la pose des implants, un chirurgien-dentiste omnipraticien pour la partie prothétique) un questionnaire permettant d’évaluer leur satisfaction, en leur demandant de détailler leurs attentes ainsi que les différents points positifs et négatifs a posteriori. Cela nous a permis de récupérer 21 questionnaires de patients porteurs de PAPSI.
Le groupe se compose de 11 hommes et 10 femmes, de 50 à 91 ans (soit 45,86 ans en moyenne), traités par PAPSI entre 2011 et 2014 (de 3 mois à 4 ans de port de prothèse, avec 4/21 patients appareillés depuis moins de 1 an).
Les principaux résultats de l’enquête sont les suivantes (Fig. 1, 2, 3 et Tableau I) :
– 4 patients traités par PAPSI à la mandibule, 16 au maxillaire, 1 PAPSI maxillo-mandibulaire ;
– toujours 2 implants à la mandibule et, au maxillaire, 1 (4 patients), 2 (12 patients) ou 4 implants (1 patient) ;
– 17 PAPSI en remplacement ou optimisation de PAP conventionnelle, 4 en tant que premier appareil amovible ;
– satisfaction aussi bien fonctionnelle qu’esthétique de 100 %.
Il en ressort que la totalité des patients est satisfaite par la restauration par PAPSI. Une seule personne ne la conseillerait pas à ses proches du fait de l’aspect contraignant du traitement.
À noter tout de même que 9 personnes font état du coût élevé et/ou de l’absence de prise en charge d’une telle restauration.
En étudiant plus en détail ces données, on remarque que :
– dans ce groupe de patients, la PAPSI est un succès aussi bien pour remplacer une PAP défectueuse, en tant que premier appareil amovible, ou que pour améliorer la stabilité d’une PAP déjà bien conçue ;
– tous les patients entretiennent aussi bien l’appareil amovible que les attachements avec facilité ;
– le temps d’adaptation à la prothèse a été très rapide pour tous, sauf pour 3 patients pour lesquels quelques semaines ont été jugées nécessaires.
La prothèse amovible partielle stabilisée sur implant permet de pallier certains défauts de la PAP conventionnelle. En effet, en dépit de ses nombreuses indications, la PAP n’en garde pas moins de nombreux inconvénients, source de plus d’un quart de PAP réputées infructueuses [2] et d’une diminution du confort oral chez beaucoup de patients [3].
Ces inconvénients sont retranscrits par les patients dans les questionnaires :
– rétention d’aliments par l’appareil et difficulté d’alimentation ;
– bascule, instabilité de la prothèse ;
– encombrement lié au volume de la prothèse, notamment au niveau du palais ;
– gêne esthétique liée aux crochets (crainte des « remarques d’enfants ») ;
– blessures gingivales ;
– problèmes de mastication.
De même, en étudiant les réponses aux questionnaires, il ressort que la PAPSI permet de régler un certain nombre de ces problèmes, les patients rapportant plusieurs avantages liés à leur nouvelle prothèse tels que :
– l’absence de crochet ;
– la facilité d’entretien tant de la prothèse que des attachements (grand intérêt pour la personne âgée) ;
– l’aisance à la mastication ;
– la stabilité de la prothèse ;
– la diminution des blessures liées à la prothèse ;
– la possibilité de supprimer le faux palais ;
– le respect des dents supports.
Un des avantages de ce type de traitement est qu’il peut aussi s’inscrire dans une démarche évolutive : étape avant l’édentement complet ou vers une solution fixée sur implants à terme, nécessitant d’optimiser la position des implants pour qu’ils puissent être intégrés à la future restauration [4]. Cela permet l’amortissement du coût des implants sur plusieurs années, tout en assurant une première phase de traitement par PAPSI relativement pérenne étant donné qu’elle permet de respecter les structures dentaires et ostéo-muqueuses [2, 5].
Au final, tous les patients interrogés lors de cette étude sont pleinement satisfaits par leur prothèse implanto-stabilisée et, pour tous ceux qui possédaient déjà une prothèse amovible partielle, la stabilisation sur implants (avec ou sans réfection de la prothèse) a été une solution efficace au niveau de l’intégration tant esthétique que fonctionnelle.
Malgré tout, 7 patients ont trouvé le plan de traitement contraignant, une patiente allant jusqu’à déconseiller la PAPSI pour cette raison, bien qu’étant pleinement satisfaite par sa prothèse. En effet, le temps d’ostéo-intégration des implants, les rendez-vous de contrôle et les étapes prothétiques supplémentaires sont à prendre en compte. Les patients doivent être préparés et informés, et la pose des implants doit être accompagnée d’une antalgie efficace pour qu’elle soit bien vécue.
Les étapes de prothèse restent peu complexes, l’attachement Locator® étant simple d’utilisation. De plus ce dernier permet une maintenance aisée et de très bons résultats au niveau fonctionnel [6].
La principale réserve émise par les patients est le coût d’une telle restauration (7/21 personnes). Beaucoup déplorent que, étant donné le grand confort apporté par la stabilisation sur implant des prothèses, cette méthode ne soit pas accessible au plus grand nombre en raison de l’absence de prise en charge par la Sécurité sociale.
La PAPSI reste tout de même une bonne solution de remplacement, au niveau financier, par rapport aux restaurations fixes implanto-portées de plus grande ampleur. Elle permet également de traiter de manière simple des patients souvent âgés qui, pour la réalisation de bridges implanto-portés ou de prothèses type pilotis auraient nécessité une reconstruction osseuse souvent complexe.
La prothèse amovible, qu’elle soit complète ou partielle, tire de grands bénéfices des attachements supra-implantaires. Cela ne doit toutefois pas être un moyen de sauver une prothèse mal réalisée, les implants exprimant tout leur potentiel lorsque cette dernière est bien conçue.
Cette option rend de grands services aux patients tout en étant simple à mettre en place pour le praticien. Le coût de la prothèse est bien sûr augmenté du fait des implants mais, pour certains patients, le remboursement d’un implant par an par beaucoup de mutuelles est un critère important.
Cela reste une solution raisonnable, tant au niveau de l’aspect peu invasif de la chirurgie que de l’investissement financier moindre par rapport à une restauration implantaire de grande ampleur.
À la frontière entre la prothèse amovible conventionnelle et la prothèse fixe sur implant, la PAPSI constitue la solution idéale pour de nombreux patients. Elle convient tout particulièrement aux personnes âgées, permettant un entretien aisé ainsi qu’une évolutivité en cas de perte d’éléments dentaires.
– L’intérêt de la PAPSI est nettement sous-estimé par de nombreux praticiens.
– La PAPSI a donné pleine satisfaction esthétique et fonctionnelle aux 21 patients de l’enquête.
– L’implanto-stabilisation permet de pallier de nombreux désavantages de la PAP conventionnelle.
– Le patient doit être préparé à l’aspect contraignant du plan de traitement.
Aux Dr Sarah Bourmand, Anaïs Remond et Alain Veillerobe, chirurgiens-dentistes, pour leur contribution indispensable à la réalisation de cet article.
les auteurs déclarent n’avoir aucun lien d’intérêt concernant cet article.