ÉDITORIAL
Rédacteur en chef
Dans la presse un marronnier n’est pas le grand châtaignier cultivé qui produit le marron et orne les voies publiques mais un article sur un événement qui se produit à date fixe.
Et quel plus merveilleux marronnier que la rentrée ! La longue tradition française de la coupure estivale a pris fin et nous retrouvons notre exercice avec ses certitudes : les impôts (pour presque tous, puisque la moitié des Français n’en paient pas), les charges sociales (pour les 20 %...
Dans la presse un marronnier n’est pas le grand châtaignier cultivé qui produit le marron et orne les voies publiques mais un article sur un événement qui se produit à date fixe.
Et quel plus merveilleux marronnier que la rentrée ! La longue tradition française de la coupure estivale a pris fin et nous retrouvons notre exercice avec ses certitudes : les impôts (pour presque tous, puisque la moitié des Français n’en paient pas), les charges sociales (pour les 20 % d’entre nous qui emploient encore une assistante), la gestion des 35 heures (pour les 20 % de privilégiés déjà cités) dans un exercice chronophage où l’exigence des patients est inversement proportionnelle à leur participation financière directe, les difficultés à respecter les contraintes administratives en progression exponentielle (une traçabilité inapplicable, une gestion des déchets aléatoire, une nomenclature toilettée de NGAP en CCAM, l’accès des handicapés sans cesse différé) et des menaces juridico-administratives de plus en plus préoccupantes.
Mais également avec un certain nombre de réalités, dont l’application prochaine du tiers payant généralisé (TPG), qui a été voté en mars dernier et signe la mort de la médecine libérale souhaitée depuis longtemps par une partie de notre élite. En effet, depuis plusieurs années, la politique de santé de notre pays a davantage relevé de l’application arbitraire et démagogique d’une idéologie archaïque favorisant le « tout État » au profit d’une minorité inactive que d’une analyse réaliste des besoins de la population et des moyens à mettre en œuvre pour la soigner. Avec la nouvelle loi, l’État devient le seul responsable de la politique de santé, il décide des objectifs de santé (qui ne sont pas forcément en adéquation avec les besoins des patients), des moyens à mettre en œuvre (avec pour idée principale de réaliser des économies) et de la répartition homogène des services de soins (signant la fin de la liberté d’installation).
Le malade devient un numéro qui doit suivre le parcours de soins fixé par l’État, suivre le traitement « optimisé » par le ministère de la Santé, accepter la libre circulation de son dossier médical. Les praticiens, eux, voient leur exercice encadré sans liberté de prescrire, de soigner en dehors des directives imposées, de s’installer selon leurs souhaits.
Ces bouleversements qui concernent l’ensemble de la population n’arrivent pas sur le devant de la scène médiatique. Et malgré les efforts des syndicats, la population médicale reste passive depuis près de 6 mois face au péril : nul blocage de la télétransmission remplacée par des feuilles papier, pas de déconventionnement massif, aucune manifestation d’envergure depuis celle du mois de mars qui n’a pas empêché le vote de la loi, la sidération des professions de santé est stupéfiante.
Pendant ce temps, les tracteurs ont envahis Paris ; les enseignants annoncent des mouvements de grève la rentrée scolaire, à peine entamée ; on s’attend au blocage des transports inévitable en cette période où les marronniers vont perdre leurs feuilles. Feuilles qui seront ramassées à la pelle, nos illusions et nos regrets aussi !