DOSSIER CLINIQUE
Pratique privée
DU implantologie chirurgicale et prothétique Paris VII
Post-graduate implantologie et parodontologie New York
24, rue du Rocher
75008 Paris
Les solutions digitales envahissent à grand pas le monde de la dentisterie moderne, nous ne pouvons les ignorer aujourd’hui. Les empreintes optiques, guides chirurgicaux, piliers personnalisés, barres fraisées… font partie de l’arsenal thérapeutique du praticien.
Cet article présente le traitement d’un édentement complet mandibulaire par un bridge complet implanto-porté scellé sur des piliers personnalisés Atlantis™. Ces piliers présentent de nombreux avantages, ils sont conçus et réalisés par rapport à la forme finale de la dent et sont disponibles en différents matériaux (titane, titane nitruré, zircone).
Le système Atlantis™ permet d’optimiser la forme, la rétention, le profil d’émergence et la situation des limites des piliers sans que nous ayons à changer nos habitudes cliniques.
La prothèse implanto-portée, telle qu’elle a été décrite par Brånemark et al. en 1985 [1] chez l’édenté complet, a ouvert la voie au traitement de l’édentement partiel et unitaire. À l’origine, toutes les prothèses étaient transvissées afin de réaliser des contrôles réguliers et de pouvoir réintervenir en cas de problème. La prothèse scellée a été introduite dans un second temps principalement pour optimiser l’esthétique des restaurations prothétiques mais aussi pour se rapprocher des techniques prothétiques conventionnelles [2, 3].
Dans le cas clinique traité ici, le patient présente une maladie parodontale très avancée associée à de nombreux foyers infectieux et mobilités dentaires (Fig. 1 et 2). Après les différents examens nécessaires à l’élaboration du plan de traitement (examen clinique, modèles d’études, radiographies…) et avoir présenté au patient les différentes options de traitement, nous décidons ensemble de nous orienter vers une édentation complète maxillaire et mandibulaire et la réalisation de prothèses fixes scellées implanto-portées du fait des nombreux avantages associés à cette technique :
• absence de puits d’accès aux vis des piliers. Les surfaces des couronnes sont identiques aux couronnes conventionnelles. Cela présente un double avantage :
• amélioration de l’esthétique des restaurations prothétiques principalement au niveau des faces occlusales des dents mandibulaires,
– possibilité d’équilibration et d’ajustement occlusal identiques à ceux de la prothèse fixée conventionnelle ;
• l’espacement nécessaire au ciment de scellement facilite l’adaptation passive de l’armature ;
• l’utilisation de piliers permet de corriger l’axe implantaire, de paralléliser les piliers en présence de plusieurs implants, d’optimiser le profil d’émergence et d’enfouir les limites de la prothèse dans les zones esthétiques.
L’objectif de cet article est de présenter le traitement réalisé à la mandibule, le traitement maxillaire ayant été réalisé quelques mois plus tard du fait de reconstructions osseuses.
Les premières phases de traitement consistent en l’élimination des foyers infectieux et la réalisation d’une prothèse provisoire amovible (Fig. 3). La conservation transitoire de quelques dents à distance des sites implantaires permet de stabiliser la prothèse provisoire pendant la phase temporisation. Ces éléments sont utilisés comme supports de crochets de la prothèse amovible.
Après 4 mois de cicatrisation, la mise en place de 8 implants est réalisée sous anesthésie locale. Les implants sont mis en place selon le protocole de forage conventionnel en essayant de les positionner au mieux par rapport aux exigences prothétiques et chirurgicales (Fig. 4). Aujourd’hui, nous aurions traité ce cas à l’aide d’un guide chirurgical Expertise® pour optimiser le positionnement des implants.
Trois mois après la phase chirurgicale, l’ostéo-intégration est vérifiée et les vis de cicatrisation sont mises en place (Fig. 5). La prothèse est largement évidée en regard des sites implantaires. L’espacement souhaité entre l’intrados de la prothèse et les vis de cicatrisation doit être d’au moins 2 mm. Une fois l’espacement vérifié, la prothèse est rebasée avec une résine souple.
L’empreinte est une étape cruciale de la chaîne prothétique, elle doit être réalisée avec rigueur.
Du fait du nombre important d’implants, la technique pick-up nous semble la plus adaptée (Fig. 6). Avec cette technique, les transferts restent solidaires dans l’empreinte après la désinsertion du porte-empreinte [4-6]. L’utilisation d’un porte-empreinte ajouré en regard des implants est nécessaire. Les transferts d’empreinte sont mis en place sur les implants et leur parfaite adaptation est contrôlée radiographiquement. Pour limiter les mouvements des transferts d’empreinte et compenser la déformation due à la prise du matériau, de nombreux auteurs ont proposé la solidarisation des transferts [1, 7]. Dans notre situation clinique, les transferts ont été solidarisés à l’aide de fil de soie et de résine.
Le porte-empreinte est enduit d’adhésif et l’empreinte est réalisée avec des silicones A en technique double mélange. Avant la prise, les excès de matériau sur les têtes de vis des transferts sont éliminés. Une fois le matériau pris, les vis des transferts sont dévissées. L’empreinte est ensuite désinsérée, rincée et examinée. Les transferts d’empreinte restent solidaires dans l’empreinte (Fig. 7). Après avoir validé l’empreinte, les analogues d’implants sont délicatement connectés aux transferts dans l’empreinte (Fig. 8).
Dans ce type de réalisation prothétique, il est indispensable de valider le modèle de travail avant la réalisation prothétique.
Cette étape permet de vérifier la précision de l’empreinte réalisée. Elle est indispensable lors de la réalisation de restaurations de moyenne ou de grande étendue. Différentes techniques ont été décrites [4, 8], cependant celle qui nous semble le plus adaptée est la technique de la clé en plâtre [9, 10]. Elle consiste à réaliser au laboratoire une clé en plâtre de fine épaisseur autour de transferts pick-up vissés sur le modèle. Cette clé est ensuite positionnée en bouche sur les implants et le test de Sheffield est réalisé pour vérifier la passivité. Le transfert le plus distal est vissé sur l’implant et les éventuels défauts d’adaptation au niveau des autres implants sont observés. Les transferts sont vissés les uns après les autres, un défaut d’adaptation se caractérisant par la fracture de la clé en plâtre. En fonction de l’importance du défaut, la décision de reprendre l’empreinte ou de modifier le modèle est prise. Si le modèle est modifié, les transferts sont vissés en bouche sur les implants et la clé fracturée est réparée par adjonction de plâtre à prise rapide.
Le modèle de travail est secondairement modifié (déplacement de l’analogue) pour s’adapter à la clé. La réalisation d’une nouvelle empreinte est toutefois préférable. De plus, la réalisation d’une radiographie permet de valider la bonne mise en place de la clé en plâtre. Dans notre situation clinique, nous avons réalisé 3 clés du fait de la présence de dents (Fig. 9 à 11).
L’étude pré-implantaire [11] permet de prévoir le type de prothèse (scellée ou transvissée) ainsi que le type de pilier. Toutefois, le choix définitif du pilier se fait après la confirmation de l’ostéo-intégration des implants et la cicatrisation des tissus mous. Différents critères sont à prendre en compte :
– l’émergence implantaire ;
– l’axe implanto-prothétique ;
– le parallélisme interimplantaire ;
– la hauteur prothétique disponible ;
– le profil d’émergence ;
– la hauteur des tissus mous ;
– la qualité des tissus mous ;
– la connexion pilier-implant ;
– le type de la restauration (unitaire ou plurale) ;
– le temps de travail ;
– l’aspect financier.
Un grand nombre de piliers sont aujourd’hui à notre disposition. Ils sont souvent surdimensionnés et le technicien de laboratoire essaie alors de les ajuster au mieux à la situation clinique. Cependant, avec un nombre important d’implants, on risque de se trouver dans une situation de compromis entre le parallélisme, la hauteur des piliers, le profil d’émergence…, ce qui peut aboutir à des piliers ne répondant plus à nos critères.
La solution la plus intéressante nous semble être la réalisation de piliers personnalisés avec le système Atlantis™. Ce type de piliers présente plusieurs avantages :
– les piliers sont conçus par le logiciel VAD (virtual abutment design), à partir de la forme finale de la dent, ce qui implique des piliers parfaitement adaptés à la situation clinique ;
– ils sont disponibles en titane, titane nitruré ou zircone ;
– c’est un système ouvert qui est compatible avec de nombreux systèmes implantaires ;
– la réalisation des empreintes se fait de manière conventionnelle ;
– aucun investissement n’est nécessaire au cabinet comme au laboratoire.
Avant la conception et la réalisation des piliers, un montage en résine amovible préfigurant la future prothèse est réalisé. Il préfigure la situation des futures dents du patient. Les empreintes et le projet prothétique en résine sont envoyés à l’usine de fabrication en Suède où ils vont être scannés et les piliers seront réalisés à partir de ces informations (Fig. 12 à 16).
Une fois les modèles scannés, un ingénieur modélise les piliers par rapport à la situation clinique et aux informations fournies. La modélisation est ensuite envoyée au technicien de laboratoire pour validation. Les logiciels disponibles dans les laboratoires permettent la visualisation du projet (Atlantis™ 3D Viewer) et, éventuellement, de réaliser certaines modifications (Atlantis™ 3D Editor).
Une fois les piliers validés, la fabrication peut être réalisée.
Les piliers sont ensuite contrôlés et expédiés au laboratoire de prothèse.
Les piliers obtenus s’adaptent parfaitement à la situation clinique en ce qui concerne la forme, le profil d’émergence, le parallélisme, la situation des limites (Fig. 17 à 19)…
Après dépose des vis de cicatrisation, les piliers sont mis en place à l’aide de la clé de repositionnement (Fig. 20 et 21). L’empreinte ayant été validée par les clés en plâtre, cette étape se déroule sans problème.
Les dents conservées jusque-là sont extraites et rajoutées sur la prothèse provisoire qui devient une prothèse complète que le patient devra porter pendant la durée des finitions.
L’armature est positionnée sur les piliers et sa qualité d’ajustage est validée par différentes méthodes (Fig. 22) :
– vérification par vision directe ;
– vérification tactile avec une sonde affûtée (précision de l’ordre de 100 µm) ;
– vérification radiographique (précision de l’ordre de 200 µm avec une rétroalvéolaire correctement angulée) ;
– vérification à l’aide d’un silicone basse viscosité.
Quand l’adaptation est jugée satisfaisante, une cire d’occlusion est réalisée sur l’armature pour valider le rapport intermaxillaire.
La prothèse terminée, l’adaptation et la passivité sont de nouveau contrôlées, la teinte et la forme des dents sont validées. Les vérifications fonctionnelles sont réalisées et l’occlusion ajustée.
Les piliers sont vissés au coude indiqué par le fabricant, les puits d’accès aux vis sont obturés et la restauration prothétique est scellée au ciment provisoire (Fig. 23 à 26).
La gestion d’un édentement complet par une prothèse scellée sur implants et aujourd’hui une technique parfaitement documentée et validée. Les progrès réalisés ces dernières années en matière de solutions digitales (guides chirurgicaux, suprastructure CFAO, piliers personnalisés Atlantis™…) permettent réellement de simplifier les étapes cliniques et d’optimiser les résultats obtenus. Le système Atlantis™ permet d’optimiser la forme, la rétention, le profil d’émergence et la situation des limites des piliers ou, tout simplement, de réaliser des piliers parfaitement adaptés à la situation clinique… !
REMERCIEMENTS au laboratoire Créatif Dentaire pour la réalisation des travaux prothétiques.