Implant n° 4 du 01/11/2013

 

ÉDITORIAL

Xavier Assémat-Tessandier  

Rédacteur en chef

Après l’application de la TVA, avec rétroactivité de plus d’un an, aux actes à but esthétique pour les chirurgiens, par assilimation certains confrères posant des implants ont été contactés par les services fiscaux pour application de la TVA sur leurs honoraires. Le motif : tout ce qui n’est pas inscrit à la NGAP, et ne donne donc pas lieu à remboursement par la Sécurité sociale, ne concerne pas des actes à but fonctionnel et donc est du domaine de...


Après l’application de la TVA, avec rétroactivité de plus d’un an, aux actes à but esthétique pour les chirurgiens, par assilimation certains confrères posant des implants ont été contactés par les services fiscaux pour application de la TVA sur leurs honoraires. Le motif : tout ce qui n’est pas inscrit à la NGAP, et ne donne donc pas lieu à remboursement par la Sécurité sociale, ne concerne pas des actes à but fonctionnel et donc est du domaine de l’esthétique.

L’ubuesque de cette attitude dans notre domaine est que, comme chacun le sait, la pose d’implants est un acte HN et donc susceptible d’être assujetti à la TVA malgré le fait qu’enfoui dans l’os, il n’est pas visible et donc quid de l’esthétique ? Alors que la prothèse implantoportée qui a une vocation fonctionnelle et esthétique la plupart du temps connaît une prise en charge par assimilation avec une prothèse amovible et donc une participation financière de la Sécurité sociale n’était pas soumise à TVA. Il semblerait que cette application aveugle d’un texte soit pour l’instant abandonnée, en attendant la prochaine initiative d’un génie de la taxation systématique dont notre beau pays a le secret.

Dès l’annonce de l’abandon de cette application de la TVA, surgit une nouvelle menace issue de l’amendement du 24 octobre dernier au PLFSS 1 adopté par l’Assemblée nationale imposant le plafonnement des honoraires de prothèse des chirurgiens-dentistes en fonction de la base de prise en charge de la Sécurité sociale. Si l’on se réfère à l’avenant des médecins pour lesquels les honoraires du secteur 2 sont limités à 2 fois et demie la base de leur prise en charge, on peut en déduire que le tarif imposé pour une couronne ne peut dépasser 268,75 €, avec la possibilité bien entendu d’être en dessous de ce tarif que certains considèrent déjà comme prohibitif.

Comme un malheur n’arrive jamais seul, l’amendement Le Roux a été voté par les deux chambres, Sénat et Assemblée nationale. Il modifie la loi sur les mutuelles en autorisant la discrimination financière entre leurs adhérents. D’une part, les gentils mutualistes sont dirigés vers les praticiens signataires du protocole les liants à la mutuelle. Alors que d’autre part, les vilains mutualistes rebelles aux injonctions et recommandations de leur complémentaire de santé sont pénalisés en exerçant leur libre choix de praticien, pourtant inscrit au code de la Sécurité sociale. Un patient en consultation hier pour un traitement implantaire m’a donné un chiffre : 800 € par an chez un praticien agréé et 400 € ailleurs, je me suis empressé de conseiller à mon patient de quitter son merveilleux contrat « Excellence » et de cotiser au quart du prix pour le contrat « Standard », car ce tarif de prise en charge ne s’applique pas par implant, comme on le lui avait expliqué, mais par an quel que soit le nombre d’implants. Ce patient consultait pour une réhabilitation complète d’un maxillaire…

Bien entendu, un certain nombre de praticiens vont ratifier les protocoles les liant aux complémentaires de santé de peur de perdre leurs patients prisonniers de leur contrat. Mais ce faisant ils perdent plusieurs choses, en premier leur patient qui se fait traiter non plus pour leur qualité professionnelle mais comme client de leur assurance complémentaire. Ces clients cherchent un remboursement avant de choisir un traitement, et leur complémentaire les poussent dans cette direction en imposant des tarifs à leurs praticiens référents, qui sont peut-être acceptables aujourd’hui mais deviendront insupportables dans l’avenir. Ces praticiens perdent donc ensuite leur liberté d’exercice. Pourquoi rester en secteur « libéral » dans ces conditions ? Parce que les complémentaires préfèrent trouver des pigeons qui investissent à leur place, on peut au bas mot estimer l’investissement pour un cabinet dentaire au minimum à 100 000 € hors murs, soit pour un centre mutualiste de 10 fauteuils environ un million d’euros. C’est beaucoup d’argent, pour un matériel appelé à être renouvelé tous les 5 à 10 ans.

Que faire ? Résister à la tentation de la facilité en espérant un avenir meilleur. Partir à l’étranger, notre diplôme étant valable dans toute la communauté européenne. Arrêter l’exercice d’une magnifique profession qui n’a pas su se défendre. !

  • 1. Projet de loi de financement de la Sécurité sociale