DOSSIER CLINIQUE
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Lors d’édentement postérieur au maxillaire, la présence de la cavité sinusienne associée à la résorption osseuse postextractionelle limite le volume osseux disponible dans ce secteur. La pose d’implants selon un protocole conventionnel est très souvent impossible, une élévation du plancher sinusien est alors nécessaire. Cet article décrit un protocole chirurgical avec abord latéral permettant de réaliser une augmentation du volume sous-sinusien et la mise en place des implants dans le même temps opératoire sans recours à un matériau de comblement.
Au maxillaire postérieur, lorsque le volume osseux est insuffisant, la pose des implants nécessite de réaliser une élévation du plancher sinusien. Cette intervention peut être réalisée avec un abord crestal ou latéral.
La technique chirurgicale par voie transcrestale a été décrite par Summers [1-3]. Après un forage de l’os alvéolaire jusqu’à la corticale du plancher sinusien, celle-ci est fracturée à l’aide d’ostéotomes et la membrane sinusienne est refoulée dans la cavité du sinus. Cette technique présente l’inconvénient d’être réalisée en aveugle.
L’élévation de la membrane sinusienne peut également être mise en œuvre par abord latéral [4, 5]. Un volet osseux est réalisé au niveau de la paroi vestibulaire du sinus et des décolleurs sont insérés au contact des parois internes du sinus afin de récliner la membrane sinusienne sans la déchirer. La mise en place d’un greffon d’os autologue, ou d’un substitut osseux, permet de maintenir la membrane sinusienne à distance du bas-fond sinusien et d’obtenir le gain tissulaire nécessaire à la mise en place chirurgicale des implants.
Cette technique chirurgicale est couramment pratiquée depuis de nombreuses années avec des taux de succès élevés [6-8]. Cependant, cet article s’intéresse aux complications qui peuvent survenir à la suite d’une telle chirurgie avec volet latéral et, au travers d’un cas clinique, une nouvelle procédure chirurgicale permettant de réaliser une élévation de plancher sinusien et la mise en place des implants dans le même temps opératoire sans avoir recours à un biomatériau.
Deux types de complications ont été rapportés dans la littérature médicale lors de la réalisation d’un soulèvement de sinus.
Les mécanismes biologiques d’ostéo-induction des biomatériaux sont désormais bien connus. Selon Araújo et al. [9], les biomatériaux mis sur le marché se présentent sous forme de particules de différentes tailles et porosités afin que les liquides biologiques les imprègnent et qu’une matrice s’organise à leur contact. Les cellules du remodelage osseux interviennent ensuite pour résorber partiellement ou totalement les particules et transformer la matrice en un tissu osseux mature. Les particules qui ne sont pas résorbées sont encapsulées dans un tissu mésenchymateux.
Selon l’étude de Verdugo et al. [10], au cours de la manipulation du biomatériau, celui-ci est contaminé par la flore microbienne commensale présente dans la salive ou à la surface des muqueuses. Cette flore microbienne peut se développer au sein du substitut osseux et provoquer une résorption importante de celui-ci limitant son potentiel de régénération osseuse intra-sinusienne.
Afin d’éviter le développement de germes pathogènes au sein du biomatériau, certaines études préconisent de l’imbiber d’une solution antibiotique, telle que le métronidazole, avant sa mise en place dans la cavité sinusienne. Il est ainsi possible d’améliorer l’homogénéité et la qualité de la reconstruction osseuse intra-sinusienne [11, 12].
La présence de cloison intra-sinusienne et les adhérences de la membrane sinusienne au niveau d’anciens sites d’extraction rendent son décollement parfois délicat. La perforation de la membrane est un incident fréquemment rencontré au cours de cette intervention [13]. Différentes techniques ont été décrites pour traiter les perforations de la membrane sinusienne : suture de la membrane avec du fil résorbable, apposition d’une membrane de collagène résorbable sur les berges de la perforation ou utilisation de colle de fibrine.
Si la perforation n’est pas correctement traitée, le biomatériau peut se disperser dans la cavité du sinus [14]. Il n’assure plus son rôle de mainteneur d’espace et la régénération osseuse intra-sinusienne est insuffisante pour la mise en place des implants. La dispersion du biomatériau dans le sinus peut également provoquer l’obstruction du méat moyen. Cette complication postopératoire se manifeste par l’apparition d’une sinusite infectieuse aiguë qui doit être traitée par méatotomie. Au cours de cette intervention, le matériau de greffe doit être totalement éliminé.
Les complications observées à la suite des soulèvements de la membrane sinusienne sont associées à l’utilisation de substitut osseux. Par ailleurs, aucun consensus n’existe concernant le choix du substitut osseux à utiliser dans les interventions d’élévation du plancher sinusien. L’os autologue a longtemps été considéré par défaut comme le gold standard, mais les biomatériaux actuellement mis sur le marché semblent donner des résultats comparables [15]. Il n’en reste pas moins vrai que certains patients acceptent difficilement la mise en place d’un biomatériau étranger dans leur cavité sinusienne, malgré les nombreuses précautions prises par les distributeurs pharmaceutiques [16]. Dans ce contexte, l’élévation du plancher sinusien avec implantation immédiate sans utilisation de substitut osseux est une procédure chirurgicale qui s’est développée et a été décrite dans plusieurs articles avec des taux de succès très intéressants [17-20].
Le cas clinique suivant a été traité selon cette technique chirurgicale. Le patient consulte pour une restauration globale aux arcades supérieure et inférieure. À l’arcade supérieure, il présente un édentement postérieur bilatéral. L’examen scanographique initial met en évidence une épaisseur de crête très fine au niveau de 14/15 et une hauteur d’os sous-sinusienne de 3 mm du côté droit et du côté gauche (Fig. 1 à 5).
La première intervention a été conduite sous sédation consciente afin de :
– réaliser une élévation du plancher du sinus droit avec la mise en place de 2 implants EVL(r) (SERF by GLOBAL D) en position 16/17 (Fig. 6 à 8) ;
– stabiliser une greffe d’apposition d’origine mentonnière par 2 vis d’ostéosynthèse au niveau de 14/15 ;
– réaliser l’élévation du plancher du sinus gauche avec mise en place de 2 implants EVL(r) au niveau de 26/27 ;
– mettre en place 1 implant EVL(r) au niveau de 24 en réalisant une expansion de crête (Fig. 9 et 10).
La chirurgie d’élévation du plancher sinusien et la mise en place des implants ont été réalisées dans le même temps sans utiliser de substitut osseux et selon le protocole suivant :
– un lambeau de pleine épaisseur est récliné pour mettre à jour la paroi vestibulaire du sinus maxillaire ;
– un volet osseux est découpé à l’aide d’inserts diamantés montés sur une pièce à main de piézochirurgie. Le volet est décollé de la membrane sinusienne et conservé dans du sérum physiologique pour pouvoir le repositionner en fin d’intervention ;
– la membrane sinusienne est réclinée en prenant garde à ne pas la perforer. Deux membranes de fibrine riche en plaquettes (PRF, platelet rich fibrin) obtenues à partir du prélèvement sanguin du patient sont placées contre la membrane sinusienne afin d’assurer son herméticité (Fig. 11). Le forage des sites implantaires est réalisé en prenant garde à ne pas endommager la membrane sinusienne, un décolleur est interposé entre la membrane et la partie travaillante du foret. Le site d’implantation est légèrement sous-calibré pour obtenir une bonne stabilité primaire des implants qui sont insérés au travers des 3 mm d’os disponibles ;
– de nouvelles membranes de PRF sont positionnées sur la fenêtre d’accès au sinus et le volet osseux est ainsi stabilisé dans sa position initiale ;
– après avoir réalisé une incision périostée pour donner de la laxité au lambeau, celui-ci est suturé dans un plan profond avec des surjets passés et dans le plan superficiel avec des points simples ;
– après une période de cicatrisation de 6 mois, un nouvel examen de type scanner permet de mettre en évidence radiographiquement la reconstruction osseuse qui s’est organisée au niveau des sinus droit et gauche (Fig. 12 à 14). Une seconde intervention chirurgicale a permis la mise en place de 2 implants supplémentaires au niveau du site greffé (14/15) et de 1 implant supplémentaire au niveau de 25 (Fig. 15 et 16). Au cours de cette intervention, un carottage a été réalisé au niveau de 25. L’analyse histologique de la carotte osseuse conclut à la présence d’un tissu osseux riche en ostéoblastes et bien minéralisé (Fig. 17 à 20) ;
– après 3 mois de temporisation, les implants sont mis au jour avec un lambeau de demi-épaisseur repositionné vestibulairement et apicalement ;
– un bridge transitoire transvissé avec armature métallique est réalisé pour la mise en charge des implants. Il permet de valider l’ostéo-intégration des implants et de s’assurer de la bonne intégration esthétique et fonctionnelle de la future prothèse (fonctions occlusale et phonatoire) (Fig. 21 et 22).
Cette technique présente l’avantage majeur de ne pas avoir recours à la mise en place de biomatériau dans le sinus. Le risque de complications associé à l’utilisation des substituts osseux (obstruction du méat moyen, développement microbien au sein du biomatériau) est ainsi supprimé et la reconstruction osseuse intra-sinusienne obtenue est un os vivant qui n’est pas pollué par la présence de particules de biomatériau non résorbées. Cependant, cette technique présente également des limites. La mauvaise stabilité primaire des implants lors de leur mise en place pourrait se solder par leur migration dans la cavité sinusienne. Au cours de cette procédure chirurgicale, il peut être tentant de réaliser un forage sous-dimensionné de l’alvéole implantaire afin d’assurer la bonne stabilité primaire des implants. Or, une mise en compression excessive de l’os cortical conduit irrémédiablement, dans les mois qui suivent, à sa résorption.
Certaines sociétés commerciales ont fait évoluer le design de leurs implants et de leur trousse chirurgicale pour répondre à cette problématique. Des implants de forme conique, avec des macrospires et des microspires ont été mis au point pour obtenir une importante stabilité primaire en présence d’un volume osseux sous-sinusien limité. Grâce à ce type d’implants, il est très souvent possible de réaliser l’élévation de plancher sinusien et la mise en place des implants dans le même temps opératoire dès lors que la hauteur sous-sinusienne est supérieure ou égale à 3 mm.
Au vu des résultats cliniques et radiographiques obtenus avec ce cas clinique et les articles publiés par différentes équipes de chirurgiens implantologistes, il semble que le succès à long terme d’une élévation du plancher sinusien ne soit pas tant lié à la présence du biomatériau utilisé, et encore moins à sa nature, qu’aux conditions de mise en œuvre de l’intervention.
Il nous paraît plus important, pour tout type de chirurgie avec élévation du plancher sinusien, de s’attacher à :
– réaliser la chirurgie dans une bouche assainie d’un point de vue parodontal ;
– préserver la membrane sinusienne lors de son décollement et lors de la mise en place des implants ;
– repositionner le volet osseux en fin de chirurgie afin de maintenir une cavité sinusienne à 4 parois.
→ EVL(r) – SERF by GLOBAL D – contact@globald.com – www.global.com