ÉDITORIAL
Rédacteur en chef
La France est le pays des paradoxes, à force de refuser d’ouvrir les yeux sur le monde qui nous entoure, de penser échapper à la mondialisation économique, les mesures nécessaires sont différées sine die en vertu de la résistance au changement et du droit de se tromper.
Ainsi, pour ouvrir l’horizon des étudiants à la réalité économique, il a été proposé qu’une partie des cours dispensés par l’Université soit en langue étrangère, en anglais...
La France est le pays des paradoxes, à force de refuser d’ouvrir les yeux sur le monde qui nous entoure, de penser échapper à la mondialisation économique, les mesures nécessaires sont différées sine die en vertu de la résistance au changement et du droit de se tromper.
Ainsi, pour ouvrir l’horizon des étudiants à la réalité économique, il a été proposé qu’une partie des cours dispensés par l’Université soit en langue étrangère, en anglais principalement. Immédiatement des protestations se sont élevées pour dénoncer cette atteinte inadmissible à la culture francophone et afin de préserver la prédominance de la langue française au sein de l’Université, il a été décidé par le ministère que le quota ne devait pas dépasser 1 % des cours. Le bilinguisme des étudiants français n’est pas prêt à être effectif. L’un des rôles de l’Université est la diffusion du savoir et, en particulier dans le domaine médical, les équipes de recherche sont encouragées à diffuser leurs travaux dans les revues anglo-saxonnes qui sont les seules à procurer la reconnaissance du travail auprès de la hiérarchie universitaire. Le paradoxe est que tant que la maîtrise de l’anglais n’est pas suffisante, les étudiants et les professionnels issus de l’Université n’ont pas accès à la connaissance des travaux publiés en anglais et encore moins à leur compréhension. En ne reconnaissant pas les travaux publiés en français en équivalence à ceux publiés dans les revues anglophones, et si elle n’assure pas une connaissance approfondie de l’anglais, l’Université prive ceux qu’elle forme de l’accès à la connaissance la plus récente.
Récemment, l’installation dans le sud de la France d’une école privée portugaise a secoué notre profession, déclenchant une levée de boucliers, des manifestations publiques, des actions en justice. Ce qui est étrange, c’est que, pour certains, c’est le caractère privé de cette institution qui dérange, réminiscence de mai 1968 qui a libéré l’enseignement de la dentisterie des écoles privées. Le paradoxe à l’époque, c’est que la qualité de l’enseignement diffusé dans les écoles, jugé médiocre, s’est brusquement amélioré lors du passage à l’Université alors que les enseignants étaient pour la plupart les anciens professeurs des écoles privées ou pour les plus jeunes formés dans les écoles privées. Ou alors syndrome français par excellence, c’est le côté payant des écoles privées qui, créant une sélection par l’argent, a été balayé par la gratuité de l’Université française. Actuellement, le vrai problème vient du numerus clausus qui bloque le nombre d’étudiants en matières médicales à une valeur vraisemblablement inférieure aux besoins de la population. Ainsi, s’est installée une pénurie, qui est compensée depuis plusieurs années par les lois européennes. Il est étrange de découvrir cet état de fait par l’installation sur le sol français d’une école privée, sachant qu’un nombre significatif d’étudiants français contournent le numerus clausus en partant en Belgique, en Roumanie ou en Pologne pour faire leurs études. Le phénomène est connu et légal, du fait des lois européennes. Dans certains de ces pays, l’enseignement est en partie assuré par des enseignants de l’Université française, ce qui fait qu’il est difficile de critiquer la qualité de l’enseignement. Le paradoxe est que la France a installé un système de santé qui, en 30 ans, nous ramène aux pires heures du système anglais, et que nous oublions un peu vite que la faillite du système anglais a assuré la fortune des french doctors londoniens.