Implant n° 1 du 01/02/2013

 

DOSSIER CLINIQUE

Cyril Gaillard*   Jérôme Bellamy**  


*CES prothèse fixée
DU réhabilitation chirurgical pré-implantaire
**Prothésiste dentaire

L’implantologie du secteur antérieur doit relever le défi de la gestion des tissus mous. Dans cet article, nous proposons un pilier implantaire en céramique avec un design anatomique qui répond aux exigences esthétiques. Ce pilier présente des avantages en termes de rapidité d’exécution, de possibilité de collage de céramique, de connexion titane/titane et de réalisation sans CFAO à coût moindre. Au travers d’un cas clinique, nous abordons les étapes de réalisation clinique et de laboratoire.

L’objectif de tout traitement implantaire portant sur la zone esthétique est de réaliser une restauration qui soit bien intégrée au sourire du patient et qui garantisse durablement la stabilité des tissus mous environnants. Ce défi devient plus complexe lorsqu’il s’agit de traiter conjointement une dent naturelle et une restauration implantaire. On sait que, autour de toute restauration implantaire, un processus de remaniement ostéo-muqueux est à l’œuvre. Il lui a été attribué à différents facteurs mais on pense aujourd’hui qu’il est dû à l’espace biologique entre la gencive marginale et l’os alvéolaire péri-implantaire (Fig. 1 et 2).

Dans le cadre de la maîtrise clinique des restaurations implantaires situées dans la zone esthétique, on a bien sûr cherché à anticiper les conséquences du processus du remaniement ostéo-muqueux ainsi qu’à élaborer des stratégies pour annuler ou atténuer l’impact des bouleversements qu’il peut entraîner au niveau des tissus osseux et muqueux (Fig. 3 à 5).

Les concepts des implants ont en général pour objet de créer un sous-contour transmuqueux, lequel se traduit par un volume de tissus mous péri-implantaires plus important, surtout si le design du pilier, au niveau de la connectique, est concave.

Le but de cet article est de proposer la fabrication d’un pilier implantaire en titane céramique anatomique (Fig. 6 et 7).

CAS CLINIQUE

La patiente, âgée de 27 ans, se présente au cabinet pour régler le problème esthétique de son sourire. À l’examen clinique, on note une agénésie de la 12, la présence de la 13 en place de 12 et la 53 en place de 13 (Fig. 1 à 4).

La patiente ne souhaite pas de traitement d’orthodontie.

Un scanner est prescrit afin de déterminer le volume osseux disponible au niveau de 53 et de s’assurer qu’aucune dent n’est incluse.

Le traitement suivant est proposé à la patiente :

– extraction-implantation immédiate sur le site de la 13 avec mise en esthétique immédiate, puis réalisation d’une couronne IPS e.max ;

– réalisation d’une facette en céramique IPS e.max sur la 13 afin de lui donner une forme de 12.

La question suivante a été étudiée avec le prothésiste (Jérôme Bellamy) : comment obtenir un résultat optimal en utilisant deux différents types de céramiques, le disilicate de lithium pour la facette et la zircone pour le pilier sur l’implant avec une couronne à infrastructure zircone ?

Nous avons opté pour le choix du pilier suivant : utilisation d’un pilier en titane puis réalisation d’un faux moignon anatomique pressé pour le design du pilier. La pièce pressée sera ensuite collée sur le titane.

Cette technique présente plusieurs avantages :

– harmonisation des types de céramiques (pilier, couronne et facette) ;

– connexion entre l’implant et le pilier en titane et non pas en zircone ;

– collage possible entre le pilier et la couronne (à la différence de la zircone) ;

– coût moindre qu’un pilier CFAO en zircone ;

– design anatomique possible du pilier.

PREMIÈRE PHASE DE TRAITEMENT

Le jour de la chirurgie, la 53 est extraite très délicatement afin de préserver la paroi osseuse vestibulaire. L’alvéole est curetée puis le forage pour la pose de l’implant est réalisé. Nous avons opté pour un implant Nobel Active de 4,3 mm de diamètre. L’implant est positionné dans la partie palatine de l’alvéole. La stabilité primaire (50 N/cm) permet de faire une mise en charge immédiate. Un pilier provisoire ITA est vissé puis la couronne provisoire est réalisée par automoulage ; elle est en sous-occlusion. Le design de son profil d’émergence est concave en vestibulaire et plat ou convexe en proximal. Un greffon conjonctif est ajouté au niveau de la 13 afin d’épaissir le tissu (Fig. 5 et 6).

Après 4 mois de cicatrisation, la phase prothétique peut débuter.

PHASE PROTHÉTIQUE

Lors de l’élaboration de la phase prothétique, il y a trop de tissu en regard de la 13 que nous pouvons gérer de 2 manières :

– soit nous prenons une empreinte de l’implant et nous demandons au laboratoire de nous donner le profil d’émergence parfait de la dent à travers le pilier. À la mise en place du pilier en bouche, les tissus mous vont ensuite s’adapter au pilier ;

– soit nous retouchons les tissus mous à l’aide du laser avant de prendre l’empreinte. Le laboratoire réalisera ensuite un pilier qui viendra soutenir la gencive.

Nous optons pour la seconde solution. À l’aide d’un laser erbium, nous retouchons la gencive puis nous prenons une empreinte. Le transfert d’empreinte est vissé dans l’implant. Du composite fluide est positionné au niveau du profil d’émergence pour l’enregistrer et l’empreinte est prise au polyvinylsiloxane (Fig. 7 à 9).

Auparavant, la canine en place de l’incisive latérale est préparée pour recevoir la future facette.

L’empreinte est envoyée au laboratoire qui réalise la fausse gencive en silicone intégrée au modèle de travail.

La fabrication des piliers définitifs se fait de la manière suivante : un pilier provisoire en titane (Nobel Biocare) est ajusté en fonction de l’occlusion puis le technicien réalise une cire sur ce pilier. L’objectif de cette cire est de reproduire le design du futur pilier. Elle sera ensuite pressée en céramique disilicate de lithium. Cette céramique sera dans un second temps collée à l’aide du composite de collage Multilink(r) Hybrid Abutment (Fig. 10 à 17).

L’intérêt de ce type de pilier réside dans :

– la rapidité d’exécution ;

– la possibilité de réaliser un pilier anatomique sans CFAO ;

– la possibilité d’avoir une concordance de céramiques et une possibilité de collage avec la couronne ;

– la connexion implant-pilier en titane/titane ;

– le coût moins élevé qu’un pilier zircone.

Sur ce pilier, le technicien stratifie une couronne IPS e.max et, sur la 13, une facette.

En clinique, le jour de la pose des éléments prothétiques définitifs, nous déposons la facette, la couronne et le pilier provisoire. Nous vissons le pilier à 35 N/cm en veillant à ce qu’il n’exerce pas de pression sur les tissus mous. Cela ne doit pas être le cas car le profil d’émergence a été enregistré avec le composite fluide. La facette est collée à l’aide du Variolink(r) Veneer sous digue. La couronne supra-implantaire est assemblée avec le même matériau. Un cordonnet de rétraction a été placé le temps du collage pour éviter les risques de fusée de colle au niveau du sulcus. Le pilier est traité comme l’intrados de la céramique au niveau de sa partie en disilicate de lithium, c’est-à-dire avec de l’acide fluorhydrique à 5 % pendant 20 secondes puis passage d’un silane pendant 60 secondes séché à l’aide d’un sèche-cheveux.

Ce résultat est obtenu en ayant eu une réflexion prothétique/implantaire et matériau/biologie (Fig. 18 et 19).

CONCLUSION

Premièrement, l’implant choisi (Nobel Active) permet d’optimiser le résultat esthétique de par son design (col plus étroit, connexion du type cône morse). Deuxièmement, le design du pilier implantaire permet un maintien des tissus gingivaux. Ensuite, pour la pérennité du traitement, il est préférable d’avoir une connexion implant/pilier avec du titane exclusivement. Enfin, pour le résultat esthétique, une harmonisation du type de la céramique, que ce soit au niveau de la couronne, de la facette ou du pilier implantaire, a été choisie.

ADRESSE DES DISTRIBUTEURS

→ MULTILINK(r) HYBRID ABUTMENT – IVOCLAR VIVADENT http://www.ivoclarvivadent.fr/

→ VARIOLINK(r) VENEER – IVOCLAR VIVADENT

→ NOBEL ACTIVE – NOBEL BIOCARE FRANCE http://www.nobelbiocare.com/fr

BIBLIOGRAPHIE

  • 1. Bengazi F, Wennström JL, Lekholm U. Recession of the soft tissue margin at oral implants. A 2 year longitudinal prospective study. Clin Oral Implants Res 1996;7:303-310.
  • 2. Grunder U, Gracis S, Capelli M. Influence of th 3-D bone to implant relationship on esthetics. Int J Periodontics Restorative Dent 2005;25:113-119.
  • 3. Kan JYK, Rungcharassaeng K, Umezu K, Kois JC. Dimensions of peri-implant mucosa: an evaluation of maxillary anterior single implants in humans. J Periodontol 2003;74:557-562.
  • 4. Bianchi AE, Sanfilippo F. Single tooth replacement by immediate implant and connective tissue graft: a 1-9 year clinical evaluation. Clin Oral Implants Res 2004;15:269-277.
  • 5. Kan JY, Rungcharassaeng K, Lozada JL. Bilaminar subepithelial connective tissue graft for immediate implant placement and provionalization in the esthetic zone. J Calif Dent Assoc 2005;33:865-871.
  • 6. Lazzara RF, Porter SS. Platform switching: a new concept in implant dentistry for controlling postrestorative crestal bone levels. Int J Periodontics Restorative Dent 2006;26:9-17.
  • 7. Rompen E, Raepsaet N, Domken O, Touati B, Van Dooren E. Soft tissue stability at the facial aspect of gingivally converging abtments in the esthetic zone: a pilot clinical study. J Prosthetic Dent 2007;97 (suppl.):S119-S125.