Implant n° 1 du 01/02/2012

 

CHIRURGIE

Guillaume Drouhet  

Attaché de l’unité d’implantologie chirurgicale, service d’odontologie, hôpital Rothschild-Garancière (Paris 7),
Diplôme de chirurgie pré et péri-implantaire (Paris 11),
Diplôme universitaire d’implantologie chirurgicale et prothétique (Paris 7),
Diplôme d’expertise médicale et odontologique, hôpital Fernand Vidal (Paris 6),
Exercice privé : 4 rue Chomel, 75007 Paris.

Résumé

Les règles d’hygiène et d’asepsie doivent être scrupuleusement suivies pour éviter tout risque de contamination lors des actes de chirurgie orale. Les actes chirurgicaux pratiqués au cabinet dentaire présentent un haut niveau de risque contaminant, et nécessitent de la part du personnel du cabinet le strict respect de la chaîne d’asepsie en tenant compte des actes invasifs à réaliser ; l’organisation du plateau technique est en revanche adaptée en fonction de l’acte chirurgical. Cet article reprend les actes principaux à observer pour améliorer l’asepsie, depuis le lavage des mains à la mise en place de la table opératoire, en passant par la préparation de la salle d’intervention, l’habillage des protagonistes et les règles de stérilisation et de traçabilité.

Summary

Hygiene and asepsis rules must be strictly observed in order to avoid any risks of contamination during oral surgery. Oral surgery conducted in dental office presents a high level of contaminant risk, and requires from dental staff a strict observance of the asepsis sequence taking into consideration the surgery treatment. This article resume the main actions that have to be done to improve asepsis, from hand washing to the set up of the operating table and the operating room, the dressing of the staff, and the sterilization and traceability rules.

Key words

hygiene, asepsis, operating table, oral surgery

La chirurgie orale est un acte courant de la pratique quotidienne du praticien et, bien que ce dernier n’intervienne pas dans un bloc opératoire stérile comme pour une chirurgie orthopédique, il doit être extrêmement vigilant compte tenu du haut niveau de risque contaminant de ses actes invasifs.

Le comportement doit être rigoureux et systématique face au patient. L’interrogatoire et le questionnaire médical mettent en garde contre tout vecteur de transmission infectieuse, le patient peut être porteur de virus – de l’hépatite B ou C (VHB, VHC), de l’immunodéficience humaine (VIH), pour ne citer que ceux-là… Mais le patient, sain ou malade, doit être considéré comme une source potentielle d’agents pathogènes et l’attitude, la vigilance et la rigueur du praticien doivent être identiques.

La préparation du praticien pour l’acte chirurgical, sa réflexion sur la méthodologie et sa compétence l’aident à atteindre le niveau d’hygiène et d’asepsie optimale afin d’assurer la qualité des soins et la sécurité de ses patients.

La notion de risque est primordiale et l’évaluation de celui-ci impose une attitude rigoureuse pour toute chirurgie orale [1]. Selon les Anglo-Saxons, la chirurgie est la discipline où le niveau de risque infectieux est qualifié de « haut », le matériel utilisé est de classe « critique », le traitement requis étant la stérilisation ou l’usage unique, à défaut la désinfection de haut niveau.

Chopin [2] décrit trois zones théoriques dans un bloc opératoire :

– La zone 0 correspond à l’incision chirurgicale, le traitement requis pour les dispositifs médicaux est la stérilisation ou l’usage unique (à défaut, la désinfection de haut niveau) ;

– La zone 1 correspond à l’espace occupé par l’équipe chirurgicale, par la table d’instruments et le champ opératoire délimité par des champs stériles. Le traitement requis pour les dispositifs médicaux est la stérilisation ou la désinfection de haut niveau. En cas d’impossibilité, on utilise des protections stériles à usage unique après avoir pratiqué une désinfection de bas niveau ou de niveau intermédiaire ;

– La zone 2 correspond au reste de la salle d’intervention, le traitement requis pour les dispositifs médicaux est une désinfection de niveau intermédiaire. En cas d’impossibilité, on utilise des protections stériles à usage unique après avoir pratiqué une désinfection de bas niveau.

Ce descriptif s’apparente à la situation d’un cabinet de chirurgie dentaire et, selon l’acte chirurgical pratiqué, les procédés et l’ergonomie de travail peuvent suivre la même rigueur afin de respecter la qualité des soins et la sécurité du patient.

Afin d’atteindre cette rigueur indispensable, la création d’une salle spécifique, consacrée à la chirurgie orale, facilitera l’organisation du cabinet dentaire. Cependant, en termes d’obligation légale, rien ne contraint le chirurgien-dentiste à créer une salle particulière pour les actes invasifs. De plus, les cabinets privés ne permettent pas, la plupart du temps, l’existence d’une telle pièce. Selon l’exercice de chacun, la réalisation d’une salle d’intervention spécifique pour la chirurgie améliorera l’organisation quotidienne du cabinet, facilitant les techniques d’hygiène et d’asepsie ainsi que l’ergonomie professionnelle.

Le praticien chirurgien doit intégrer la notion de risque selon son acte thérapeutique. Ainsi, la chirurgie orale, bien que qualifiée à « haut risque », peut avoir une classification selon trois niveaux [3] :

– Les actes de chirurgie « simple » ;

– Les actes de chirurgie complexe ;

– Les actes de chirurgie complexe nécessitant des niveaux de compétence spécifiques.

La notion de risque impose au praticien chirurgien une rigueur stricte de la chaîne d’asepsie compte tenu des actes invasifs à réaliser mais l’organisation du plateau technique est variable en fonction du niveau de l’acte chirurgical.

Il en découle une bonne compréhension de la chaîne d’asepsie afin d’avoir l’hygiène optimale pour tout acte chirurgical.

CHAÎNE D’ASEPSIE

Il n’y a pas de différence dans le respect de la chaîne d’asepsie en chirurgie orale ou en chirurgie dentaire généraliste. Le praticien doit comprendre et intégrer chaque point important de la chaîne.

DÉFINITION DE LA CHAÎNE D’ASEPSIE

La chaîne d’asepsie est l’ensemble des étapes qui vont de l’entrée du patient au cabinet dentaire, en passant par la préparation du matériel avec la chaîne de stérilisation, la préparation de la salle d’intervention, puis la préparation du praticien chirurgien et de l’assistante sans oublier celle du patient, jusqu’à la fin de l’intervention et la sortie du patient.

À chaque étape, l’événement inattendu que représente une infection bactérienne doit être évité. Un travail de réflexion doit être fait avec l’ensemble de l’équipe chirurgicale – praticien, assistante et éventuellement instrumentiste – pour avoir une maîtrise de l’hygiène-asepsie. Il faut réfléchir sur les actes de préparation, sur les gestes précis pour respecter cette chaîne d’asepsie.

L’équipe doit intégrer l’hygiène et l’asepsie pour avoir une démarche cohérente et rigoureuse ; il s’agit avant tout d’un état d’esprit. Celui qui est indispensable à l’hygiène-asepsie permet d’aboutir à la cohérence des actes et d’adopter une ligne de conduite stricte. Aussi l’équipe chirurgicale doit-elle étudier chaque étape afin de maîtriser la chaîne d’asepsie et la contrôler, en acceptant toute remise en question éventuelle pour améliorer l’organisation nécessaire afin d’avoir une démarche cohérente et systématique.

Pour aboutir à une démarche stricte et rigoureuse, il faut analyser les sources de toute intrusion possible en termes de contamination bactérienne. Pour simplifier, il faut connaître les vecteurs pouvant perturber la chaîne d’asepsie et organiser et préparer toute intervention en les contrôlant méthodiquement.

LES TROIS VECTEURS DE L’ASEPSIE : L’ÉQUIPE, LA SALLE D’INTERVENTION ET LE PATIENT (Fig. 1)

L’équipe chirurgicale, constituée du praticien chirurgien et de son assistante, est un vecteur important. Elle doit avoir une tenue adaptée et, surtout, adopter une gestuelle rigoureuse pour éviter toute erreur d’asepsie.

Le deuxième vecteur est la salle d’intervention, qui comporte le plateau technique et tout un environnement. Le plateau technique réunit l’ensemble du matériel nécessaire à l’intervention, il doit être organisé de façon ergonomique. Cette organisation est faite avec une gestuelle méticuleuse et réfléchie. L’environnement concerne le reste de la salle d’intervention : il doit être préparé selon une ligne de conduite rigoureuse.

Le dernier vecteur, essentiel, est le patient. Son installation doit être soigneuse et, lors de l’intervention chirurgicale, la gestuelle de l’équipe doit être réfléchie et rigoureuse afin d’éviter toute rupture de la chaîne d’asepsie.

Au centre de la chaîne d’asepsie se trouve la chaîne de stérilisation. Elle est sans doute la « colonne vertébrale » de la chaîne, son organisation est stricte et codifiée, avec des normes à respecter.

On note immédiatement que le maître mot de la chaîne d’asepsie est « gestuelle ». En effet, par la seule gestuelle réfléchie et rigoureusement étudiée, la maîtrise de la chaîne d’asepsie sera respectée. Elle se situe à tous les niveaux, tant lors de la préparation que lors de l’acte chirurgical proprement dit.

En schématisant, on peut définir trois mot clés que l’on doit toujours avoir en tête pour respecter la rigueur indispensable à l’hygiène-asepsie ?: comme le montre la Figure 2, la gestuelle doit être au cœur de la préoccupation du praticien tant lors de l’acte thérapeutique avec sa préparation et sa réalisation que dans la préparation de l’environnement que représente la salle d’intervention.

PRÉPARATION DE LA SALLE D’INTERVENTION

En fonction de l’acte chirurgical et de sa classification, le praticien organisera et préparera la salle d’intervention en tenant compte des niveaux de risques infectieux.

La préparation de la salle passe par une désinfection de l’environnement.

La notion de risque permet d’établir une classification des pièces en fonction du niveau d’exigence requis pour assurer une hygiène stricte. Comme en secteur hospitalier, trois zones sont classées en fonction du risque infectieux qu’elles représentent.

La salle de soins, adaptée pour les actes de chirurgie simple ou complexe, appartient à la zone 2. Le traitement requis est le « bio-nettoyage » quotidien avec alternance entre produits détergents et produits détergents-désinfectants normés ; il est destiné à réduire la contamination des surfaces et des sols.

Les actes de chirurgie complexe exigeant des niveaux de compétence spécifiques nécessitent une préparation de la salle plus rigoureuse avec un bio-nettoyage avant et après l’intervention. Dans ce dernier cas, la salle d’intervention appartient à la zone 3.

ACTES DE CHIRURGIE SIMPLE

Si le mot « simple » n’est pas approprié pour qualifier la chirurgie, il s’agit ici de l’opposer à tout acte chirurgical comportant des complexités techniques variant selon la compétence du praticien.

Dans ces actes sont regroupés tous les actes courants comme les extractions de dents sur arcade. Leur simplicité ne doit cependant pas être un facteur de négligence vis-à-vis du respect des procédures d’hygiène et d’asepsie.

Pour ce type d’intervention, un champ à usage unique isole le patient du champ opératoire et protège aussi ses vêtements de toute projection et souillure. Une préparation « simplifiée » d’une table de chirurgie est indispensable. Elle contient un plateau stérile et les instruments nécessaires, stériles sous emballage. Le chirurgien-dentiste doit préparer cette table de façon rigoureuse afin d’éviter toute manipulation au-delà de la zone d’intervention.

À la fin de l’intervention, les instruments souillés sont déposés dans le plateau, les instruments coupants et piquants (aiguilles, fils, lame de bistouri) sont séparés et jetés dans des conteneurs spéciaux, les champs et compresses souillés sont rassemblés et jetés dans les conteneurs prévus à cet effet.

ACTES DE CHIRURGIE COMPLEXE

Ces actes concernent les interventions de la chirurgie dite à lambeau, par exemple l’extraction d’une dent de sagesse incluse, le curetage apical avec ou sans obturation a retro ou le traitement d’assainissement parodontal par surfaçage radiculaire.

La salle d’intervention est préparée plus spécifiquement :

– Préparation d’une table de chirurgie ;

– Préparation du patient ;

– Préparation du praticien et de l’assistant(e).

Table de chirurgie (Fig. 3)

La table de chirurgie est recouverte d’un champ stérile (à usage unique de préférence), sur lequel sont disposés les différents instruments stériles, au besoin une trousse spécifique pouvant rassembler un type d’instrumentation, un micromoteur stérile éventuellement, les fraises chirurgicales, le tout recouvert d’un champ stérile pour isoler la table et qui servira ensuite à la protection du patient (Fig. 4).

Sur une autre table, le moteur chirurgical est déposé, muni du système d’irrigation stérile au besoin.

Le plateau technique doit être préparé et organisé afin d’éviter tout déplacement pour recherche d’instrumentation en cours d’intervention.

Praticien

Le praticien doit revêtir une tenue aseptique : une blouse ayant subi les traitements requis de désinfection, à manches courtes, laissant les avant-bras nus, et un pantalon désinfecté selon les normes.

Après avoir mis son masque et ses lunettes et ajusté une coiffe, le praticien réalise un lavage antiseptique des mains puis enfile des gants stériles.

Patient

Pour son installation, le praticien prend le champ stérile recouvrant la table de chirurgie et le dispose sur le patient en prenant garde à placer la face externe contre le corps du patient. Il met alors le champ de tête de façon à isoler la bouche, zone centrale de l’intervention. L’anesthésie est effectuée à l’aide de la seringue située dans la trousse de chirurgie. L’acte chirurgical proprement dit peut ainsi débuter.

En procédant de cette façon, le schéma décrit par Chopin [2] est respecté, ainsi que l’hygiène et ­l’asepsie.

Comme à la fin de toute intervention, les instruments souillés sont déposés dans le plateau (ou dans la trousse) pour être évacués et mis dans un bain de prédésinfection. Les instruments à usage unique sont séparés et jetés dans des conteneurs spéciaux, les champs et compresses sont mis dans le conteneur prévu à cet effet.

ACTES DE CHIRURGIE COMPLEXE NÉCESSITANT DES NIVEAUX DE COMPÉTENCE SPÉCIFIQUES

On regroupe sous cette dénomination tous les actes de chirurgie à notion de risque important tant au niveau de la sécurité des patients qu’à celui de la qualité et de la réussite du traitement proposé. Il s’agit des interventions comme la chirurgie implantaire, les greffes osseuses d’origine symphysaire ou ramique, les comblements osseux sous-sinusiens ou la chirurgie parodontale (régénération osseuse guidée, greffe de tissu conjonctif, etc.).

Ces actes invasifs majeurs nécessitent une compétence spécifique du chirurgien-dentiste, qui peut disposer d’une salle d’intervention particulière et bien adaptée, afin d’y effectuer la préparation indispensable à toute intervention de ce type [4, 5].

Préparation de la salle d’intervention

Si on se réfère à la description de Chopin [2], tout l’environnement situé dans la zone 2 subit une désinfection de niveau intermédiaire, tandis que dans les zones 0 et 1, les dispositifs médicaux sont stériles, le plateau technique s’y trouvant précisément.

L’installation du plateau technique, sans être très différente de la préparation décrite précédemment, est très méticuleuse et organisée afin d’agencer le matériel et les dispositifs médicaux de façon ergonomique selon l’acte à effectuer et pour optimiser l’hygiène et l’asepsie.

Cette installation est réalisée par l’assistante, qui doit être formée par le praticien, en tenue aseptique : masque, coiffe (calot, charlotte) et gants stériles. Une table de chirurgie est préparée, une table recevant les dispositifs stériles emballés est installée ainsi que le moteur chirurgical.

→ Table de chirurgie

On dispose sur la table de chirurgie, recouverte d’un champ stérile, toute l’instrumentation stérile indispensable :

– Une trousse de chirurgie standard (Fig. 5) ;

– Une trousse spécifique à l’intervention :

• trousse de chirurgie implantaire,

• trousse de parodontologie,

• trousse d’instruments spécifiques aux greffes osseuses, etc.;

– Des cupules stériles pour sérum physiologique, Bétadine ou chlorhexidine ;

– Une canule d’aspiration stérile à usage unique ;

– Un champ de tête (il existe des champs troués à usage unique).

Le tout est recouvert d’un champ stérile, destiné au corps du patient, qui isole la table de chirurgie.

→ Table pour le moteur chirurgical (Fig. 6)

Le moteur chirurgical ne peut être que désinfecté, il est posé sur un champ stérile large, le système d’irrigation stérile est installé, ainsi que le micromoteur stérile muni du contre-angle ou de la pièce à main (stérile) qui est posé sur la partie libre du champ stérile. La pédale doit comporter la plupart des commandes possibles comme la variation des vitesses programmées, l’inversion de rotation des forets (un signal sonore est indispensable) et l’activation de l’irrigation.

→ Table pour instruments stériles non déballés

Les instruments ou dispositifs médicaux stériles emballés posés sur cette table sont destinés à être utilisés au cours de l’intervention en cas de nécessité. Il s’agit d’avoir à disposition tout instrument susceptible d’être utilisé en cas de difficulté imprévue. De plus, les matériaux ou implants qui ne sont ouverts qu’au moment de la mise en place sont présents sur cette table.

→ Installation de gaines stériles pour aspiration ou scialytique

L’utilisation de tubulures stériles à usage unique pour l’aspiration chirurgicale simplifie grandement l’installation.

Installation et préparation du patient

Préalablement à l’intervention, on demande au patient de se rincer la bouche pendant 3 ? minutes avec un bain de bouche à la chlorhexidine. Son action bactéricide à faible concentration permet une désinfection rapide de la bouche.

Des surchaussures lui sont fournies avant son entrée dans la salle d’intervention. Une fois qu’il est installé sur le fauteuil, on procède à son habillage.

Le champ stérile recouvrant la table de chirurgie est posé sur son corps (face interne vers le dessus). Le champ de tête troué est posé sur son visage, recouvrant les cheveux et le cou, laissant l’ouverture au niveau de sa bouche. Les champs peuvent être stabilisés avec des pinces à champ ou, pour les champs à usage unique, collés sur le pourtour des lèvres.

Tout cela est effectué par l’assistante en tenue aseptique.

Préparation du praticien et de l’assistante

Pour assurer la sécurité et la qualité des soins, il faut s’opposer à toute transmission contaminante dans les sens patient-praticien et praticien-patient. Une tenue de protection spécifique est de rigueur.

Une coiffe doit couvrir les cheveux et la tenue est constituée d’une blouse stérile de type casaque munie d’un col montant et de manches longues serrées aux poignets recouvrant un pantalon. Des surchaussures à usage unique sont enfilées.

La méthode d’habillage doit être stricte et respecter l’ordre suivant :

– Ajustage de la coiffe, des lunettes de protection et du masque ;

– Lavage « chirurgical » des mains et séchage ; habillage en blouse stérile ;

– Ajustage des gants de chirurgie stériles.

En respectant ces différentes mesures et procédures, tout praticien est en mesure d’assurer la sécurité et la qualité des actes de chirurgie qu’il réalise.

Seule une bonne préparation, réfléchie et rigoureuse, des actes chirurgicaux permet d’atteindre une hygiène et une asepsie optimales. La gestuelle et l’ergonomie sont les compléments indispensables pour obtenir une qualité et une hygiène parfaites.

HYGIÈNE DES MAINS

Pour maîtriser l’infection, il faut avant tout contrôler la diffusion des germes, des bactéries principalement. Leur circulation au sein de la structure de soins, d’un patient à un autre ou du soignant au patient, se fait d’abord par cette chaîne, invisible, de chaque acte de soins ou de réconfort, partout où est la main.

Contrôler la circulation des germes suppose donc un lavage soigneux des mains après chaque acte, chaque soin, chaque contact suspect d’être contaminant.

Le revêtement cutané préserve l’organisme des agressions extérieures. Barrière naturelle tant mécanique que chimique, il s’oppose à la pénétration des substances exogènes comme le passage des micro-organismes ou celui des molécules. La peau est constituée de trois couches anatomiques, l’épiderme, le derme et l’hypoderme, l’épiderme étant la couche la plus superficielle. Elle est la seule partie du corps qui puisse être exposée à l’air sans s’infecter spontanément à condition de ne pas être lésée. L’écosystème bactérien comprend deux flores : la flore résidente et la flore transitoire.

La flore résidente est constituée de germes commensaux se situant sur les couches superficielles ou dans les couches profondes de la peau : ce sont les bactéries aérobies principalement des cocci à Gram positif (Staphylococcus epidermidis, Corynebacterium [Propinibacterium acnes dans les follicules pilo-sébacés]). Cette flore bactérienne varie qualitativement et quantitativement d’un site à l’autre chez un même individu et d’un individu à l’autre, et elle se renouvelle régulièrement. Elle a une faible virulence mais un geste invasif peut la modifier et induire un processus infectieux.

La flore transitoire est composée de bactéries saprophytes issues de l’environnement, mais aussi de bactéries pathogènes ou commensales issues de la flore commensale des patients soignés. Elle varie au cours de la journée, selon les activités et en fonction des modifications de l’environnement extérieur, et reflète l’écosystème microbien de la structure de soins (bactéries multirésistantes). Elle est constituée par des bactéries à Gram négatif de la flore individuelle – entérobactéries (Klebsiella), Pseudomonas – et des bactéries à Gram positif (Staphylococcus aureus, Streptococcus). Son rôle dans le mécanisme de survenue d’une infection est important. Sa prévention nécessite la mise en œuvre de mesures barrières, dont l’hygiène des mains.

LAVAGE DES MAINS

Le lavage des mains se divise en trois catégories en fonction des niveaux de risques infectieux [6] :

– Lavage simple ;

– Lavage hygiénique ou antiseptique ;

– Lavage chirurgical.

Lavage simple

Le lavage simple a pour objectif de prévenir la transmission manuportée et d’éliminer la flore transitoire. Pratiqué après tout geste de la vie courante et tout geste de soin non invasif, il se fait avec un savon liquide doux avec distributeur et dure au minimum 30 secondes.

Le port de gants n’exclut pas le lavage des mains.

Lavage antiseptique

Le lavage antiseptique a pour objectif d’éliminer la flore transitoire et de diminuer la flore commensale. Il est pratiqué avant tout geste invasif ou soin ou technique aseptique. Il est réalisé avec un savon antiseptique (chlorhexidine ou polyvidone iodée) avec distributeur et dure au moins 1 minute.

Une autre solution est la friction mécanique ou le massage des mains avec un produit hydroalcoolique. Cet acte réduit provisoirement le nombre des micro-organismes sur une peau saine et non mouillée. Il prévient la transmission manuportée et élimine la flore transitoire. Il peut être utilisé soit en complément du lavage simple des mains, soit en substitut du lavage antiseptique sur une main ne présentant pas de souillures. Un bon nombre d’arguments joue en faveur de la désinfection des mains par friction : activité antimicrobienne et antivirale importante et rapide, large spectre d’action sauf sur les spores, bonne tolérance cutanée et économie de temps ; mais attention au risque d’inflammation des produits à base d’alcool.

Afin d’optimiser la qualité d’utilisation de ces produits, il est indispensable de noter la date d’ouverture du flacon.

Lavage chirurgical des mains (Fig. 7 à 11)

Le lavage chirurgical des mains a pour but d’éliminer la flore transitoire et de réduire de façon significative (de 2 à 3 log.10) la flore commensale. Il est nécessaire avant toute intervention chirurgicale et tout geste invasif à haut risque infectieux. Il se fait avec une solution moussante antiseptique à large spectre (chlorhexidine ou polyvidone iodée), une brosse à usage unique stérile, un essuie-mains stérile et une eau bactériologiquement pure.

Le lavage, avec port de masque et coiffe ajustée, se fait en trois temps : un temps de prélavage, un temps de lavage avec brossage et un nouveau temps de lavage. Il dure de 5 à 6 minutes.

• Premier temps ou prélavage :

– Mains et avant-bras nus, mouiller les mains et poignets ;

– Appliquer une dose de savon antiseptique à large spectre, faire mousser abondamment jusqu’aux coudes pendant 1 minute, mains toujours au-dessus des coudes ;

– Rincer abondamment mains, poignets et avant-bras.

• Deuxième temps ou brossage des ongles :

– À l’aide d’une brosse à usage unique, prendre une dose de savon antiseptique (la brosse peut être imprégnée d’une solution moussante) ;

– Brosser les ongles pendant 1 minute.

• Troisième temps ou lavage proprement dit :

– Appliquer une dose de savon pendant 1 minute par main et 30 secondes par avant-bras ;

– Rincer soigneusement, mains toujours au-dessus des coudes ;

– Sécher les mains et les avant-bras à l’aide d’un essuie-mains stérile que l’on trouve dans le sachet contenant aussi la blouse stérile qui est ouvert par l’assistant(e) ;

– Jeter l’essuie-mains dans la poubelle prévue à cet effet.

GESTUELLE ET ERGONOMIE EN CHIRURGIE

L’ergonomie a pour objet d’organiser notre travail de façon rationnelle. L’hygiène et l’asepsie sont interdépendantes de l’ergonomie.

Pour avoir une ergonomie de travail parfaite, l’organisation du plateau technique, primordiale pour une intervention chirurgicale, et la maîtrise d’une gestuelle réfléchie et rigoureuse sont les deux principes à adopter pour le praticien chirurgien.

ORGANISATION DU PLATEAU TECHNIQUE

En chirurgie orale, l’agencement du plateau technique, tout en appliquant les méthodes de mise en place décrites précédemment pour la salle d’intervention, doit être réfléchi.

En reprenant le schéma de Chopin [2], il faut organiser le plateau chirurgical dans une aire restreinte autour de la zone 0 dite de l’incision.

Toute l’instrumentation nécessaire à l’acte chirurgical doit être « à portée de main » du chirurgien.

Agencement du plateau technique

La tête du patient est le centre de l’aire de travail, le praticien se trouve à côté et organise les tables de façon à pouvoir accéder aux instruments aisément.

La table recevant le moteur de chirurgie, si besoin, se trouve le plus souvent derrière la tête du patient, pièce à main et/ou contre-angle stériles ainsi que système d’irrigation (sérum physiologique ou eau stérile) installés.

La table chirurgicale est située à côté du praticien ou, si l’on dispose d’une table le permettant, au-dessus du corps du patient (table pont).

Le praticien organise dans un premier temps cette table selon ses habitudes, de façon à réduire les manipulations et gestes en cours d’intervention.

Du côté de l’assistante, l’aspiration chirurgicale est installée, la tubulure stérile est clampée sur le champ de corps du patient afin d’éviter toute chute accidentelle de la canule d’aspiration.

Matériels et instrumentiste

Dans cette zone de travail, tous les instruments sont à usage unique ou doivent pouvoir subir une stérilisation à l’autoclave. Sinon, les dispositifs sont traités selon une désinfection de haut niveau ou isolés à l’aide de champs stériles (gaine stérile pour scialytique ou aspiration, etc.).

Le moteur chirurgical, non stérile mais désinfecté, doit disposer d’une commande simplifiée à la pédale, la variation des vitesses, l’inversion de la rotation du foret, l’activation de l’irrigation sont des options qui permettent au chirurgien de supprimer toute action manuelle autre que l’insertion des fraises ou foret sur le contre-angle et/ou la pièce à main stérile.

L’aide d’un instrumentiste est sans doute la solution pour manipuler toute surface non stérile, ouvrir les blisters ou sachets de dispositif stérile.

GESTUELLE ET RIGUEUR

Le praticien expérimenté doit avoir organisé son intervention de façon rationnelle. Ainsi, tous les gestes inutiles sont évités.

Chaque intervention est codifiée, permettant une entente parfaite et harmonieuse de l’équipe chirurgicale. Les gestes doivent être choisis et réfléchis, sans aucune hésitation, l’assistant opérateur est présent non seulement pour tenir les écarteurs et aspirer le sang et la salive, mais aussi pour veiller à toute méprise éventuelle de la part du chirurgien en ce qui concerne les diverses manipulations de dispositifs médicaux.

TRAÇABILITÉ

Afin d’aborder le problème de la traçabilité, il faut comprendre les tenants et les aboutissants et, surtout, replacer les différents acteurs dans leur contexte.

La finalité de la traçabilité est de pouvoir, à tout moment, quelle que soit la situation problématique :

– Remonter le processus pour identifier la cause du problème (éléments ou événements) ;

– Suivre la prestation en aval pour identifier les conséquences du problème.

La traçabilité correspond à de l’identification mais sa finalité ne s’arrête pas là. Elle sert à agir et à corriger les situations problématiques [7, 8].

Au sein de notre exercice quotidien, la traçabilité intervient dans la chaîne de stérilisation et lors d’utilisation de dispositifs médicaux implantables (arrêté du 20 avril 2006 fixant les règles de classification des dispositifs médicaux, pris en application de l’article R. 5211-7 du Code de la santé publique ; arrêté du 26 janvier 2007 relatif aux règles particulières de la matériovigilance exercée sur certains dispositifs médicaux, pris en application de l’article L. 5212-3 du Code de la santé publique).

TRAÇABILITÉ EN STÉRILISATION

Appliquée à la stérilisation, la traçabilité doit s’organiser autour des identifications du matériel enregistré de l’« entrant » au « sortant » du dispositif médical stérile. L’« entrant » se caractérise par son identification. Le « sortant » se traduit par la réforme du produit, excepté pour les dispositifs médicaux implantables où il s’agit de l’implantation. Entre les deux extrémités, il y a tout le parcours du dispositif :

– Le circuit entre la stérilisation et l’utilisation du dispositif médical ;

– Les actions réalisées tout au long de ce circuit incluant, entre autres, la désinfection, le nettoyage, le conditionnement, les cycles de stérilisation, les contrôles de procédé, les contrôles de produit fini, le stockage, la mise à disposition, les modalités d’utilisation, les réparations éventuelles…

Par conséquent, la traçabilité du cycle de stérilisation proprement dit peut être considérée comme le minimum requis compte tenu de l’analyse du risque. Elle repose alors sur l’enregistrement de tous les paramètres relatifs à la maîtrise du procédé : paramètres du cycle (temps, température, pression), indicateurs de stérilisation, test de pénétration de la vapeur d’eau et composition de la charge. Tous ces éléments constituent le dossier de « lot » permettant l’attribution d’un « numéro de lot » (ou numéro de charge, si l’on considère que la stérilisation d’une charge hétérogène interdit le terme « lot »).

Ainsi, la tenue d’un registre de stérilisation satisfait à la traçabilité de stérilisation. Il doit contenir tous les éléments permettant le contrôle de la fonctionnalité du stérilisateur (test de Bowie-Dick, essai d’étanchéité au vide, diagramme paramétrique) et le contrôle de l’efficacité du procédé (les indicateurs physico-chimiques, qui sont mis dans un sachet et placés au sein d’une charge de stérilisation).

Le registre de stérilisation doit comporter :

– Le numéro de charge ;

– L’indicateur physico-chimique test « prion », pour 134 °C pendant 18 minutes, daté et numéroté ;

– La date de stérilisation ;

– La liste des instruments concernés, des trousses de rangement ou des conteneurs ;

– Pour les appareils qui en disposent, les paramètres de stérilisation imprimés seront étiquetés de même à chaque charge de stérilisation ;

– De plus, régulièrement, doit figurer le test de Bowie-Dick effectué, daté et numéroté.

TRAÇABILITÉ EN CHIRURGIE ORALE

Pour être en règle avec les arrêtés du Code de la santé publique récents en ce qui concerne l’instrumentation chirurgicale dite invasive, le chirurgien doit mettre en œuvre la traçabilité en « aval ».

En chirurgie orale, acte de chirurgie invasive, au même titre que la chirurgie implantaire ou parodontale notamment, le report dans le dossier du patient du numéro de la trousse de chirurgie utilisée (numéro de stérilisation avec date et charge), ainsi que celui de la trousse spécifique d’implantologie sont des éléments simples à noter, au même titre que les numéros de lot des implants dentaires ou des matériaux utilisés qui sont collés dans ce même dossier (Fig. 12).

CONCLUSION

La contamination et l’infection éventuelle qui suit dépendent essentiellement du lieu et des conditions de l’intervention chirurgicale.

La lutte contre l’infection repose donc à la fois sur le lieu de l’intervention, qui doit être adapté à la chirurgie orale, et surtout sur l’attitude de l’équipe chirurgicale. Le fait d’avoir comme objectif prioritaire la lutte contre l’infection constitue déjà une démarche positive qui va motiver toute l’équipe soignante pour tendre à une asepsie idéale.

BIBLIOGRAPHIE

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  • 8. AFNOR. NF EN 29002 (ISO 9002). Système qualité – Modèle pour l’assurance de la qualité en production et installation.

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La chirurgie orale

Hervé Tarragano, Patrick Missika, Franck Moyal, Benjamin Illouz, Yvon Roche, Éditions CdP, 2010

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