Implant n° 2 du 01/05/2010

 

DOSSIER CLINIQUE

Nicolas Boutin*   Adrien Marinetti**  


*Chirurgie et prothèse implantaire
18, passage Du Guesclin
75015 Paris
**Spécialiste qualifié en orthopédie dento-faciale
4, boulevard Pasteur
75015 Paris

Les exigences des patients (santé, esthétique, confort masticatoire…) rendent les traitements plus complexes. Ces traitements globaux pluridisciplinaires s’avèrent longs, ce qui décourage souvent les patients d’entreprendre les soins. À travers un cas clinique, cet article montre comment un plan de traitement associant orthodontie linguale, prothèse fixée et implantologie peut être optimisé en vue d’en diminuer la durée.

PRÉSENTATION DU CAS CLINIQUE

Un homme de 37 ans s’est présenté en première consultation pour « des pivots décollés et perdus » à la mâchoire inférieure. Les examens ont révélé la perte de couronnes sur 45, 46 et 36.

Après entretien avec le patient, une demande de correction de son encombrement mandibulaire et donc d’amélioration du sourire a été également formulée.

Cette demande était révélatrice : sans ce souhait, le patient se serait peut-être contenté d’un statu quo pendant plusieurs années. En contrepartie, une durée excessive de traitement orthodontique risquait d’être décourageante sur le plan décisionnel.

La problématique du plan de traitement était donc l’organisation des spécialités – orthodontie/chirurgie implantaire/restaurations prothétiques – afin de répondre à sa demande dans un délai raisonnable.

L’enchaînement académique des étapes (mise sous provisoires – traitement orthodontique de 9 à 12 mois – cicatrisation après extraction de 36 de 1 mois et demi – mise en place d’un implant – ostéointégration de 3 à 4 mois – restaurations prothétiques définitives) portait la durée globale du traitement à 18 mois [1].

Était-ce raisonnable ? Pouvait-on diminuer cette durée globale de traitement ?

En fait, seul un examen serré des phases thérapeutiques et de leurs plages possibles de recouvrement a permis de proposer un « package » optimisé d’une durée globale acceptable.

ÉTUDE DU CAS

EXAMEN RADIOGRAPHIQUE

– 45, 46 à l’état radiculaire, saines ;

– 36 à l’état de racines cariées à extraire (Fig. 1).

EXAMEN DU SOURIRE

– encombrement incisivo-canin important à l’arcade inférieure ;

– très légère rotation mésio-vestibulaire de 12 ;

– dyschromie de 12 ;

– opacité excessive de 21 porteuse d’une couronne céramo-métallique ;

– bords incisifs maxillaires crénelés et usure oblique (Fig. 2).

EXAMEN CLINIQUE

– 36 à l’état de racine, cariée ;

– classes II molaire et I canine ;

– absence des premières prémolaires maxillaires et des dents de sagesse mandibulaires, dents extraites dans le cadre d’un traitement orthodontique à l’adolescence (Fig. 3 à 7).

PLAN DE TRAITEMENT

Il a été entendu avec le patient de procéder, dans l’ordre suivant, à :

– une thérapeutique parodontale initiale ;

– la pose d’un appareil multi-attaches lingual à la mandibule de 35 à 44 ;

– l’avulsion de 36 qui sera remplacée par une couronne implanto-portée ;

– la restauration prothétique des 45 et 46 (inlay-cores en or et couronnes Procera® zircone).

Les rapports canins et prémolaires étant de classe I, la place nécessaire à l’alignement de l’arcade inférieure ne pouvait pas être obtenue en distalant les prémolaires dans les zones édentées sous peine de créer des rapports de classe II. L’alternative a été de réaliser une réduction amélaire proximale de 33 à 43, le manque de place ne justifiant pas l’extraction d’une incisive inférieure.

Les rapports des secteurs cuspidés étant quasiment inchangés, il était tout à fait possible de réaliser le travail de prothèse avant, après ou mieux pendant le traitement orthodontique. Ainsi, la décision prise par l’équipe soignante, en accord avec le patient, a été de réaliser l’ensemble des étapes de traitement simultanément et non successivement.

DÉROULEMENT DU TRAITEMENT

Une fois la préparation initiale terminée, une empreinte pour la confection de l’appareil lingual a été réalisée. Dans la semaine, le patient a été appareillé à l’arcade mandibulaire. L’objectif étant de faire de l’expansion dans un premier temps, l’arc a été plié « trop grand » afin que les plis compensant les différences d’épaisseurs canines/prémolaires exercent une pression antérieure (Fig. 8).

L’appareil orthodontique, limité de 35 à 44, laissait le champ libre aux reconstructions prothétiques postérieures : les racines de 36 ont été extraites, puis des restaurations définitives ont été posées sur 45 et 46 (empreinte silicone double mélange – scellement de 2 inlay-cores en or au ciment verre ionomère – scellement des couronnes Procera® zircone au ciment verre ionomère).

Le réglage du point de contact mésial sur 45 a demandé une étape supplémentaire de laboratoire.

Trois mois plus tard, l’alignement s’est nettement amélioré, mais un manque de place subsiste pour la 31 (Fig. 9). Davantage de place à cet endroit bien précis a été obtenue à l’aide d’un ressort placé en compression. Le mois suivant, un bracket a finalement été collé sur cette dent (Fig. 10). Pour finir, un stripping mesuré et localisé a permis d’obtenir des surfaces de contact entre les dents antérieures évitant ainsi les « triangles noirs » disgracieux (Fig. 11). Finalement, un fil de contention en inox tressé a été collé, évitant toute possibilité de récidive, mais permettant une mobilité physiologique.

THÉRAPEUTIQUE IMPLANTAIRE

Cinq mois après l’avulsion de 36 (mais aussi quasiment du début du traitement orthodontique), un nouvel examen Cone Beam Icat®1 a été réalisé afin d’évaluer la possibilité de réaliser l’implant en 36 [2, 3].

Les fichiers DiCom® ont alors été analysés via le logiciel Simplant® et la planification implantaire réalisée sur dents virtuelles (Fg. 12). Un implant Nobel Biocare® Groovy Brånemark System 4 × 11,5 mm a été mis en place (Fig. 13) avec pilier de cicatrisation.

Les 3 mois nécessaires à l’ostéointégration ont été mis à profit pour terminer le traitement orthodontique.

Les trois mois écoulés, l’ostéointégration a été vérifiée, la restauration prothétique finale (couronne Procera® transvissée) a alors été mise en place (Fig. 14) dans un contexte occlusal (Fig. 15 à 17) et esthétique (Fig. 18) finalisé.

CONCLUSION

Le traitement, grâce à la concomitance et au recouvrement des plages dévolues à chacune des spécialités, a duré au total 9 mois, soit exactement la moitié de l’année et demie qu’aurait nécessité une stratégie avec enchaînement pur et simple des diverses thérapeutiques. Comme nous l’avons déjà souligné, ce travail d’organisation et d’optimisation du plan de traitement n’est pas neutre sur la motivation du patient dans ses demandes d’amélioration esthétique.

Loin d’avoir été découragé par le traitement, le patient demande la réfection de 21 ainsi qu’un éclaircissement… !

ADRESSE DES DISTRIBUTEURS

CONE BEAM ICAT® – IMAGING SCIENCES distribué par KAVO – 8, Mail Barthélémy-Thimmonnier – Rond-Point Andréï Sakharov – 77185 Lognes – Tél. : 825 825 099 – Fax : 01 64 68 93 12 – E-mail : kavo@kavofr.com – http://www.100-years-kavo.com

SIMPLANT® – MATERIALISE DENTAL FRANCE – Immeuble Vecteur Sud – 76-86, avenue de la République – 93320 Chatillon – Tél. : 01 46 56 31 52 – E-mail : simplant@materialisedental.fr – http://www.materialisedental.fr

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1. L’apport des cone beam dans ce type de traitement permet, à des doses de rayonnement tout à fait raisonnables (30 mGy) [4], de gérer le traitement du patient dans sa globalité. Ainsi, la réalisation de ce type d’examen 2 à 3 fois pendant les 9 mois de traitement n’est en rien gênante.

Les données 3D et Dicom fournissent des informations précises sur les volumes osseux, les espaces disponibles, les bases osseuses et les éléments anatomiques remarquables [5]. De plus, la norme DiCom® permet, via des visionneuses (par exemple Osirix®, gratuit sur Mac®), d’échanger les données images des patients entre spécialistes via Internet.

BIBLIOGRAPHIE

  • 1. Marinetti A, Taboulet JM, Deffrennes D. Cas pluri-disciplinaire. Inform Dent 2007;89(37).
  • 2. Bellaiche N. Place de la technologie cone beam en imagerie odontostomatologique. La Lettre de la Stomatologie 2009;42:4-14.
  • 3. Cavézian R, Pasquet G, Bel G, Baller G. Imagerie dento-maxillaire : approche radio-clinique. 3e édition. Paris : Masson, 2006.
  • 4. Ludlow JB, Davies-Ludlow LE, Brooks SL, Howerton WB. Dosimetry of 3 CBCT devices for oral and maxillofacial radiology : CB MercurRay, NewTom 3G, and i-Cat. Dentomaxillofacial Radiol 2006;35:219-226.
  • 5. Cannas B, Gillot L. Computer-assisted surgery : analysis of the NobelGuide™ concept. J Parodontol Implantol Orale 27;1.

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