PAC
Nicolas LAFERTÉ* Marion TOUZEIL** Hervé PLARD*** Jérémie PERRIN****
*Prothésiste dentaire, LDL céramique,
Saint-Brieuc.
Membre ITI, co-directeur du Study Club
des Côtes-d’Armor
**Étudiante en odontologie,
sixième année
***Docteur en chirurgie dentaire,
ancien assistant hospitalo-universitaire,
praticien attaché, sous-section
Prothèses
****Docteur en chirurgie dentaire,
ancien assistant hospitalo-universitaire,
praticien attaché, sous-section
Prothèses.
Fellow ITI, co-directeur du Study Club
des Côtes-d’Armor
Pôle d’odontologie et de chirurgie buccale,
CHU de Rennes
La prise en charge d’un maxillaire édenté ne dépend pas uniquement du volume osseux résiduel et de la possibilité de mettre en place des implants. Le gradient de résorption est également à prendre en compte pour optimiser l’esthétique et la fonction. L’étude prothétique oriente le traitement.
Un patient, âgé de 70 ans, porteur d’une prothèse amovible complète maxillaire et d’une prothèse amovible partielle mandibulaire, consulte pour un avis prothétique (fig. 1 et 2). Il souhaite améliorer la stabilité et la rétention de ses prothèses, diminuer leur encombrement et retrouver de meilleures sensations gustatives.
Une solution implanto-retenue est envisagée pour le maxillaire. La prise en charge mandibulaire consistera simplement à réaliser une nouvelle prothèse amovible partielle bien adaptée.
L’examen clinique met en évidence un espace inter-arcades assez important aussi bien dans le sens sagittal que vertical.
L’outil d’évaluation de cas de restaurations définit notre patient comme « complexe ». Le traitement du maxillaire édenté par de la prothèse amovible implanto-retenue est en effet une prise en charge qui nécessite une étude prothétique rigoureuse.
La prise en charge d’un maxillaire édenté ne dépend pas uniquement du volume osseux résiduel et de la possibilité de mettre en place des implants.
Le gradient de résorption est également à prendre en compte pour optimiser l’esthétique et la fonction.
Dans le cas présent, l’espace inter-arcades est très important et le patient est presque en classe III d’Angle.
L’étude prothétique oriente le traitement vers une prothèse amovible maxillaire implanto-retenue (PACIR). Une réhabilitation implanto-portée fixée aboutirait à un résultat inesthétique au niveau du soutien de la lèvre et présenterait un risque de fracture en raison d’un porte-à-faux important.
Des empreintes primaires à l’alginate permettent de réaliser des porte-empreintes individuels personnalisés. L’empreinte implantaire maxillaire est conduite au plâtre (Snow White Plaster®, Kerr). Le porte-empreinte individuel est préparé en conséquence (fig. 3 à 5) : il est largement ajouré au niveau de l’emplacement des transferts. Le plâtre permet à la fois un enregistrement de la topographie muqueuse et une contention des transferts. L’empreinte secondaire mandibulaire est réalisée à l’alginate (Hydrogum 5®, Zermack).
Après décontamination des empreintes, les analogues d’implants sont positionnés. Le plâtre est isolé pour permettre de réaliser une fausse gencive prothétique en silicone (Gingifast®, Zermack) autour des implants. Ensuite, les modèles sont réalisés en plâtre dur de classe 4 (Elite Rock®, Zermack).
Pour valider le maître modèle maxillaire, une clé en plâtre est préparée à l’aide des transferts d’empreinte (fig. 6). Le vissage de la clé sur les implants permet de vérifier sa précision. La supra-structure doit venir se visser passivement sur les implants. Une fêlure ou une fracture de la clé sur les implants invalide l’empreinte.
Des bases d’occlusion permettent d’enregistrer la dimension verticale d’occlusion et les rapports inter-arcades. Le soutien de la lèvre, la ligne du sourire et la position du point inter-incisif sont aussi reportés pour guider le prothésiste (fig. 7).
En accord avec le patient, des nouvelles dents prothétiques sont choisies, l’attention est portée sur la forme et la couleur pour un résultat plus esthétique. Toutes ces informations servent à la réalisation de maquettes en cire avec des dents du commerce. L’esthétique, le soutien de lèvre, la ligne du sourire et les rapports d’occlusion sont à valider avant la réalisation de la barre implantaire (fig. 8).
Les implants retenus sont des implants Soft Tissue Level® (Straumann) avec des plates-formes Regular Neck® (RN). La réalisation d’une barre implantaire n’impose pas le recours à des implants de type bone level : l’assemblage et la maintenance seront plus faciles. Le positionnement des implants dans le pré-maxillaire est suffisant et permet par conséquent d’éviter les chirurgies pré-implantaires. Pendant l’ostéo-intégration des implants, le patient porte ses anciennes prothèses légèrement aménagées au niveau des vis de cicatrisation.
Le gradient de résorption nécessite le recours à une PACIR. Une barre implantaire pour retenir la prothèse maxillaire est préférable à des attachements axiaux seuls. La littérature récente recommande en effet une solidarisation des implants maxillaires pour ce type de reconstruction.
Afin de répondre à la demande initiale du patient, c’est une barre en titane usinée associée à des attachements axiaux qui a été choisie (fig. 9). La barre a été modélisée à l’aide du flux numérique Dental Wings® (Straumann). Les modèles de travail ainsi que la clé d’occlusion ont été scannés et envoyés vers le logiciel de modélisation virtuel.
Le volume de la barre dépend directement de celui de la prothèse et les attachements axiaux doivent être vissés à la barre perpendiculairement au plan occlusal (fig. 10).
Le choix s’est porté sur des attachements de type Novaloc®. Le système dispose de 6 gaines de résilience, ce qui permet d’ajuster la friction des attachements. De plus, ces pièces sont en PEEK et ont l’avantage d’avoir une usure moins rapide que celles en nylon. Ces gaines sont ensuite placées sur les attachements et polymérisées. Les parties femelles en métal sont noyées dans l’intrados de la prothèse. Les attachements sont serrés sur la barre avec une clé dynamométrique à un couple de 35 N/cm (fig. 11).
Pour finir les étapes de laboratoire, nous polymérisons la résine des prothèses avec le système Ivobase® (Ivoclar Vivadent). Ce système de résine injectée permet d’obtenir une polymérisation presque complète et une résistance mécanique accrue.
Les dents choisies sont les dents du commerce Phonares® (Ivoclar Vivadent) car elles permettent une moindre usure face au dents naturelles et un amorti suffisant pour les implants (fig. 12). Ce sont en effet des dents en résine composite plus résistantes que les dents en résine précédemment utilisées.
L’ensemble barre-attachements axiaux est vissée sur les implants avec un couple de 35 N/cm (fig. 13 et 14). Les puits de vissages sont comblés par de la résine composite souple, après avoir protégé les têtes de vis à l’aide de Téflon.
L’augmentation de la rétention et de la sustentation apportée par la barre supra-implantaire à permis de décharger le palais et de diminuer l’encombrement de la prothèse (fig. 15).
Une fois la prothèse maxillaire en place ; il ne reste plus qu’a déposer les inserts de laboratoire Novaloc® et de les remplacer par les inserts rétentifs adéquats à l’aide des instruments spécifiques (fig. 16 à 19).
Nous avons opté pour un schéma d’occlusion de prothèses complètes bi-maxillaires afin d’éviter le décrochage de la prothèse maxillaire et une usure prématurée des attachements. Nous observons donc, en intercuspidie maximale, un rapport une dent/deux dents et, en occlusion dynamique, une fonction de groupe du côté travaillant et une fonction équilibrante du côté non travaillant (occlusion bilatéralement équilibrée). Cet équilibrage a permis d’échancrer le palais pour un plus grand confort chez notre patient.
Comme toutes les thérapeutiques bucco-dentaires entreprises, une réhabilitation complexe nécessite une maintenance importante. Le patient doit en effet entretenir au mieux à la fois la barre implantaire et les implants mais aussi les prothèses.
Bien entendu, une maintenance professionnelle et un suivi régulier font partie intégrante du traitement (fig. 20 à 23).
L’utilisation de la CFAO nous assure une passivité, un ajustage, un polissage et une étanchéité parfaits de la barre sur les implants. Son design est parfaitement adapté à la situation clinique, intégrant le volume de la prothèse de façon optimale.
Les attachements viennent apporter une rétention accrue et permettent une évolution et un contrôle de la tenue de la prothèse.