IMPLANTOLOGIE
Ancien interne du CHU de Rennes.
Ancien assistant hospitalo-universitaire
Spécialiste qualifié en chirurgie orale.
Membre ITI, co-directeur du Study Club
du Morbihan.
Ce cas clinique illustre l’intérêt des implants cylindro-coniques de diamètre réduit (< 3 mm) dans le cas de proximité radiculaire, situation fréquemment rencontrée en fin de traitement orthodontique lors d’une agénésie de l’incisive latérale maxillaire.
Une patiente de 18 ans consulte après un traitement d’orthodontie pour prendre en charge une agénésie bilatérale des incisives latérales maxillaires.
Son édentement est jusque-là compensé par un arc palatin portant deux dents provisoires (fig. 1).
La patiente souhaite une solution fixe, pérenne et rapide.
L’outil de classification SAC proposé sur ITInet nous permet de répertorier ce cas clinique en type « Avancé » au niveau chirurgical et prothétique.
L’examen clinique montre des espaces mésio-distaux satisfaisants et une concavité vestibulaire apicale très marquée sur les deux sites (fig. 2).
Radiologiquement, les volumes osseux sont compatibles avec une implantation sans aménagement osseux. Au niveau des deux sites, la planification confirme la possibilité de mettre en place les implants dans un axe compatible avec des couronnes transvissées (fig. 3).
On note cependant deux situations cliniques différentes selon le côté.
Au niveau du site 22, l’espace interradiculaire est plus étroit car les axes des racines convergent davantage. Par conséquent, il est décidé de poser un implant de diamètre très étroit de 2,9 mm et de longueur 12 mm en position 22 (Implant Straumann BLT SC SLActive) et un implant de diamètre étroit de 3,3 mm et de longueur 12 mm en position 12 (Implant Straumann BLT NC SLActive) (fig. 4).
Le plan de traitement retenu consiste en la pose de deux implants avec une mise en esthétique dans la journée par deux prothèses provisoires transvissées hypofonctionnelles.
Afin d’améliorer le contexte gingival en redonnant du volume vestibulaire, deux greffes conjonctives enfouies sont réalisées dans le temps chirurgical.
Les prothèses provisoires seront laissées en place pendant 4 mois avant d’être remplacées par deux couronnes en zircone transvissées sur embase titane.
Klein et al. (2014) dans leur revue de littérature classent les implants de diamètre étroit (Narrow Diameter Implant) selon trois catégories :
- Catégorie 1 : Monobloc < 3 mm (mini-implants).
- Catégorie 2 : Deux pièces de diamètre compris entre 3 et 3,25 mm.
- Catégorie 3 : Deux pièces de diamètre compris entre 3,30 et 3,50 mm.
Outre une technique chirurgicale moins invasive l’utilisation d’implants étroits facilite l’implantation dans un espace mesio-distal étroit ou dans une crête fine. Cependant le recul clinique de ces implants est encore assez faible, notamment dans ses complications biomécaniques. Leur utilisation demeure donc limitée au remplacement unitaire d’une incisive latérale maxillaire ou d’une incisive mandibulaire. La cinquième conférence de consensus (2014) dresse une liste des études nécessaires au sujet des implants de diamètre étroits (NDI) :
- études comparant les NDI avec des implants de diamètres standard avec ou sans procédure d’augmentation ;
- études sur les nouveaux matériaux et les nouveaux designs implantaires ;
- études sur le profil d’émergence des prothèses sur implants de diamètres étroits ;
- études sur les taux de succès à long terme.
Une fois les sites opératoires anesthésiés, deux lambeaux dont l’incision est légérement déportée côté palatin sont élevés.
Les forages sont réalisés en tenant compte des critères de positionnement tridimensionnel de l’implant.
Une fois les implants insérés, leur position est enregistrée par technique d’indexation en solidarisant les piliers provisoires à un index préparé préalablement. Cette technique permet la réalisation au laboratoire d’une prothèse provisoire de qualité et esthétique avec un temps au fauteuil très réduit (fig. 5 et 6).
Les vis de cicatrisation sont mises en place, deux greffons conjonctifs sont prélevés dans les tubérosités et suturés sous les lambeaux vestibulaires. Les lambeaux sont suturés à l’aide d’un fil monofilament résorbable 6.0 (fig. 7).
Le volume osseux de départ étant satisfaisant, le choix de la greffe conjonctive enfouie est retenu pour améliorer l’esthétique en redonnant un galbe gingival plus naturel.
Des instructions post-opératoires sont données ainsi qu’un traitement par antibiothérapie.
Au laboratoire, l’index est repositionné sur le modèle de travail. Les prothèses provisoires sont transvissées le soir de l’intervention en contrôlant leur inocclusion statique et dynamique.
Elles sont vissées à un couple 20 N.cm (fig. 8 et 9).
Un premier contrôle est prévu 8 jours plus tard puis régulièrement jusqu’aux étapes prothétiques (fig. 10).
Après 4 mois de cicatrisation et plusieurs contrôles intermédiaires, il est décidé de passer à la réalisation des deux prothèses d’usage (fig. 11).
Une empreinte classique aux élastomères en double mélange est réalisée et deux couronnes en zircone transvissées sur embase titane (Straumann Variobase) sont fabriquées (Laboratoire Design Implant, Dr Ivan Botherel) (fig. 12).
Elles sont vissées à un couple de 35 N.cm et les puits de vissage sont comblés au composite sur Téflon (fig. 13).
Ce cas clinique illustre l’intérêt des implants de diamètres étroits (NDI) dans le cas de proximité radiculaire, situation fréquemment rencontrée en fin de traitement orthodontique lors d’agénésie de l’incisive latérale maxillaire.
L’évolution des alliages, des états de surface, et des designs implantaires nous autorise aujourd’hui à réduire les diamètres implantaires et à proposer des traitements plus rapides grâce à la possibilité d’une mise en esthétique immédiate.
Il nous est ainsi possible d’élargir les indications de traitement en choisissant une alternative à l’utilisation d’implants plus standards associés ou non à des techniques d’augmentation osseuse ou une prise en charge orthodontique pré-implantaire.
Le choix de la mise en esthétique immédiate est rendu possible par le design cylindro-conique (apex plus étroit que le corps implantaire) et la surface implantaire qui garantissent une bonne stabilité primaire et une osteointégration rapide.
La technique de l’indexation est une solution rapide de réalisation au laboratoire d’une provisoire de qualité et esthétique avec un temps opératoire au fauteuil très réduit.
La réalisation de la prothèse d’usage transvissée est permise grâce aux embases titanes qui offrent une grande modularité prothétique comme sur tous les autres implants de la gamme. Les résultats des implants de faible diamètre sont prometteurs à court terme avec des taux de survie, de succès (> 95 %) et une perte osseuse marginale (< 1 mm) comparable à ceux retrouvés avec les implants de diamètre standard en titane.
Il demeure un réel besoin d’études à long terme pour confirmer ces excellentes performances cliniques. On ne recense qu’une étude en 2016 avec un recul supérieur à 5 ans.