GESTION DE L’URGENCE TRAUMATIQUE : AU SECOURS DE LA PULPE
Endodontie
Marjorie ZANINI* Marion LUCCHINI** Faouzia BOUSSETTA*** Thomas MARQUILLIER****
*MCU-PH Université Paris Cité, Service de médecine bucco-dentaire de la Pitié Salpêtrière, Département d’endodontie
**MCU-PH Université Lyon1, Hospices Civils de Lyon, Dentisterie restauratrice et Endodontie
***Pratique privée limitée à l’endodontie, Belleville
****MCU-PH Université Lille, CHU Lille, Odontologie pédiatrique
La fracture amélo-dentinaire compliquée (avec exposition pulpaire) peut survenir sur dents temporaires ou permanentes. Elle représente 2 à 13 % des traumatismes dentaires. L’évaluation de la situation clinique (notamment le type de dent concernée : temporaire/permanente, les possibilités de restauration de la dent, la contamination pulpaire et l’inflammation pulpaire qui en résulte) et du potentiel de cicatrisation pulpaire est un facteur clé de la prise de décision...
La fracture amélo-dentinaire compliquée (avec exposition pulpaire) peut survenir sur dents temporaires ou permanentes. Elle représente 2 à 13 % des traumatismes dentaires. L’évaluation de la situation clinique (notamment le type de dent concernée : temporaire/permanente, les possibilités de restauration de la dent, la contamination pulpaire et l’inflammation pulpaire qui en résulte) et du potentiel de cicatrisation pulpaire est un facteur clé de la prise de décision thérapeutique (abstention thérapeutique, thérapeutique de préservation pulpaire, traitement endodontique ou avulsion) (figures 1 et 2).
Un traumatisme chez un enfant de 3 ans et demi entraîne une fracture corono-radiculaire complexe de l’angle distal de l’incisive centrale maxillaire temporaire gauche (61) (figure 3). La taille modérée de l’exposition pulpaire, le délai relativement court entre l’exposition et la consultation ainsi que le stade physiologique de la dent (stade 2) orientent le choix thérapeutique vers une biopulpotomie cervicale avec collage du fragment fracturé (figure 4). L’obturation de la chambre pulpaire est réalisée avec un eugénate renforcé à prise rapide (IRM®) et le fragment coronaire collé à l’aide de composite fluide. Cette thérapeutique est envisagée en raison de la bonne coopération de l’enfant et d’une limite cervicale de la fracture accessible pour un collage du fragment dans des conditions satisfaisantes.
Un patient de 9 ans consulte après un choc direct survenu 3 heures auparavant. La dent 11 présente une fracture amélo-dentinaire complexe (figure 5) sans déplacement associé. Le fragment dentaire a été conservé dans du lait (figure 6). Selon les recommandations de l’International Association of Dental Traumatology (IADT), il est immergé dans une solution de sérum physiologique pendant 20 minutes avant la procédure de collage.
L’analyse de la situation clinique est la suivante :
- la dent est restaurable via un collage du fragment fracturé ;
- le paquet vasculo-nerveux est intact (en raison de l’absence de déplacement associé de la dent) ;
- la pulpe est jugée peu inflammatoire en raison d’une contamination bactérienne superficielle (délai court entre l’exposition pulpaire et la consultation) ;
- le potentiel de cicatrisation pulpaire est élevé (patient jeune).
Ici, une thérapeutique de préservation pulpaire est donc indiquée à condition que tout soit mis en œuvre pour décontaminer la plaie pulpaire, stimuler le processus de réparation pulpo-dentinaire et assurer l’étanchéité à court, moyen et long terme.
Après une anesthésie locale, la bonne coaptation du fragment est vérifiée et le champ opératoire est posé. Une désinfection de la plaie pulpaire à l’aide d’hypochlorite de sodium 3 % est effectuée. Une pulpotomie partielle a été préférée au coiffage pulpaire direct (également possible) afin de ménager l’espace nécessaire pour le matériau de coiffage et faciliter ainsi le bon repositionnement du fragment dentaire. L’amputation pulpaire est réalisée sur une hauteur de 2 mm à l’aide d’une fraise stérile à grande vitesse et sous irrigation abondante. L’obtention de l’hémostase se fait après compression légère à l’aide d’une boulette de coton stérile. La plaie pulpaire est ensuite coiffée à l’aide d’un silicate de calcium (Biodentine™, Septodont) qui permettra la stimulation de la cicatrisation pulpaire (figure 7). Après les 12 minutes de prise, le fragment est collé avec un protocole adhésif de type MR2 et une résine composite fluide. À la suite du polissage rigoureux et du contrôle de l’occlusion, une radiographie postopératoire est réalisée à l’aide d’un angulateur de Rinn (figures 8 et 9). Le suivi du patient est nécessaire afin de vérifier le succès de la thérapeutique (le maintien de la vitalité pulpaire) à 6/8 semaines, 3 mois, 6 mois et un an.
Les deux cas cliniques présentés mettent en lumière qu’une analyse rigoureuse de la situation clinique permet de poser l’indication d’une thérapeutique de préservation pulpaire. Le collage du fragment est tout à fait compatible avec ce type de thérapeutique et offre l’avantage d’assurer un résultat esthétique satisfaisant pour le patient avec un protocole simplifié pour le praticien.
A4 - Gestion de l’urgence traumatique : au secours de la pulpe !
Mardi 26 novembre 2024 - 14 h 00 - 15 h 30
Objectifs
• Savoir analyser la situation clinique selon une démarche systématisée
• Appréhender une prise en charge adaptée au patient et à la situation clinique
• Savoir optimiser prise en charge et suivi pour un pronostic pulpaire prédictible
Responsable scientifique : Marion Lucchini
Conférenciers : Marjorie Zanini, Thomas Marquillier