ANALYSE DU CONCEPT GUIDE D’EMPREINTE NUMÉRIQUE - GEN NUMÉRISATION DU TRAITEMENT DE L’ÉDENTEMENT COMPLET
Empreinte numérique
Bernard CANNAS* Sabrina HOUIOU** Damien GAYET*** Amira KHODJA**** Nicolas DAVIDO***** Nicolas BOUTIN******
*Exercice privé, chirurgie buccale et implantaire exclusive, Trilport Cofondateur SAPO Implants
**Responsable numérique et développement chez SAPO Implant
***Maître artisan prothésiste dentaire, formateur Exocad, Epinal
****Etudiante en Master d’ingénierie biomédicale et biomatériaux, Université Paris Cité
*****Exercice privé, chirurgie buccale et implantaire exclusive, Paris
******Exercice privé, chirurgie buccale implantaire exclusive, Paris Cogérant SAPO Implant
Le concept du guide d’empreinte numérique (GEN) du traitement de l’édenté complet s’intègre dans un flux numérique complet [2]. L’enregistrement digital de l’ensemble des données du patient permet de construire un patient digital. C’est la base essentielle à l’ensemble du protocole clinique et prothétique.
Il s’agit du double numérique du patient statique et/ou dynamique...
Le traitement de l’édentement complet a beaucoup évolué ces dernières années grâce aux outils numériques. Ces traitements sont complexes et demandent une parfaite coordination entre la clinique et le laboratoire de prothèse. Le protocole standard de mise en charge immédiate d’une prothèse complète provisoire est validé. Le taux de succès prothétique et chirurgical est supérieur à 95 % [
De nombreuses équipes ont développé différentes techniques numériques.
Nous avons proposé, dès mai 2021, un protocole de traitement de l’édentement complet dans un flux numérique complet. Le principe général de ce protocole, dit « concept du guide d’empreinte numérique (GEN) », est de transférer, en fin de chirurgie, la position des implants et la relation intermaxillaire au laboratoire de prothèse. Cette technique permet d’obtenir un enregistrement simple, rapide et précis en fin de chirurgie.
Le GEN est issu du design et de la position du guide chirurgical.
La modélisation du GEN est simplifiée grâce à l’évolution des logiciels de planification et de conception des guides chirurgicaux utilisant l’Intelligence Artificielle.
50 cas cliniques d’édentement complet ont été traités en suivant le concept GEN. Nous avons analysé les différentes indications, la méthode de contrôle de la précision du transfert des données au laboratoire. Les résultats obtenus montrent la reproductibilité du protocole dans toutes indications du traitement de l’édentement complet maxillaire et mandibulaire dans un flux numérique complet.
Le concept du guide d’empreinte numérique (GEN) du traitement de l’édenté complet s’intègre dans un flux numérique complet [2]. L’enregistrement digital de l’ensemble des données du patient permet de construire un patient digital. C’est la base essentielle à l’ensemble du protocole clinique et prothétique.
Il s’agit du double numérique du patient statique et/ou dynamique dans une combinaison des paramètres esthétiques et fonctionnels mis en situation dans une démarche proactive à l’aide de technologies numériques dans le but d’améliorer la construction d’un plan de traitement personnalisé.
Le dossier du patient digital doit contenir au minimum les photos, l’empreinte optique, les radiographies rétro-alvéolaires et panoramiques et le CBCT. Ce dossier peut être complété par des vidéos, le Smile Design, l’occlusion dynamique, le scan face. Ces éléments ne sont pas indispensables pour appliquer le protocole GEN.
Pour réussir une mise en charge immédiate après la chirurgie implantaire, il est crucial de recueillir des informations précises sur deux éléments fondamentaux : la position des implants et la relation intermaxillaire. Traditionnellement, ces informations sont obtenues à l’aide d’une empreinte physique. Cette méthode conventionnelle donne généralement une précision d’enregistrement de l’ordre du 100 à 150 µm, afin de garantir un ajustement optimal des prothèses [3-5]. Cependant, avec l’avènement des technologies numériques en dentisterie, des méthodes plus sophistiquées ont été développées pour numériser ces étapes critiques.
La réalisation d’un guide d’empreinte numérique, ou GEN, représente l’une des techniques d’enregistrement numérique. En intégrant des repères préfabriqués spécifiquement conçus, le guide d’empreinte numérique améliore considérablement la précision des empreintes optiques des implants dans les cas d’édentement complet [6-8]. Ces repères permettent de guider et de faciliter la capture de la position des implants afin d’assurer un transfert valable de ces informations au laboratoire de prothèse.
Le GEN intervient également dans le transfert de la relation intermaxillaire (RIM) qui est une autre étape clé dans ce processus. L’enregistrement précis de la relation maxillo-mandibulaire est essentielle pour une gestion sereine de l’occlusion des futures prothèses, toute inexactitude peut entraîner des complications fonctionnelles et esthétiques. Pour garantir un transfert optimal de cette relation au laboratoire, il est crucial de respecter une tolérance de superposition des différents fichiers STL générés, définie à +/- 100 µm. Cette précision est assurée par des contrôles rigoureux effectués lors de la superposition des fichiers STL au laboratoire.
Cela est particulièrement important pour la fabrication des prothèses provisoires dont le design est préparé en amont de la chirurgie. Ainsi, une fois le fichier STL contenant les informations sur la position des implants et la RIM transféré, le laboratoire n’a plus qu’à associer son design à ce fichier STL et à finaliser les détails avant d’imprimer ou d’usiner la prothèse pour une mise en charge immédiate.
50 patients édentés complets ou futurs édenté complets, maxillaire, mandibulaire ou bi-maxillaire, ont été traités de manière aléatoire par deux équipes chirurgicales. Les patients ont été classés en 3 grandes catégories :
- 1 : patients totalement édentés avec application de la technique du double scanner qui utilise la prothèse adjointe complète du patient comme projet prothétique (figure 1) ;
- 2 : patients avec un édentement subtotal sans possibilité de réaliser un matching précis sur les STL et nécessitant également l’application de la technique du double scanner (figure 2).
Pour ces deux catégories de patients, le protocole du double scanner a été appliqué et le GEN créé à partir du guide chirurgical (figure 3) [9]. Les étapes cliniques suivent le protocole de la chirurgie guidée (figure 4) ;
- 3 : patients partiellement dentés avec application de la technique du matching du STL de l’empreinte optique sur les dicoms s’il existe plus de 3 points de matching répartis sur l’arcade.
Les points de matching doivent être analysés afin de trouver la meilleure répartition pour en garantir la précision (figure 5). L’idéal est de trouver des points de matching répartis sur l’arcade en latéral et en antérieur (figure 6).
Quand un grand nombre de dents sont à extraire, certaines dents sont conservées pour réaliser le matching et garantir la stabilité du guide chirurgical (figure 7).
Les étapes préchirurgicales de planification des implants et de matching des empreintes initiales et segmentées doivent être analysées attentivement en collaboration avec le laboratoire de prothèse (figure 8). Quand la segmentation de dents est nécessaire, le guide chirurgical est généré sur le STL de l’empreinte initiale segmentée. Pour placer le guide chirurgical, les dents doivent d’abord être extraites, puis le guide claveté (figure 9).
L’occlusion de la prothèse provisoire lors de la mise en charge immédiate est conditionnée par la bonne position du GEN et une très grande rigueur est nécessaire à toutes les étapes de traitement pour assurer cette position.
• Les dents dites « stratégiques » permettent de « matcher » le modèle segmenté au laboratoire et de stabiliser le guide chirurgical et le GEN. Ces dents sont conservées pour le clavetage du guide chirurgical ou du GEN en début d’intervention, puis elles sont extraites soit en cours d’intervention, soit à la fin, en fonction de la situation clinique.
Des fenêtres d’inspection des guides permettent également de contrôler la position du guide chirurgical et du GEN au moment du clavetage (figure 7).
• Le clavetage du guide chirurgical et du GEN est réalisé au début de l’intervention.
Le clavetage du GEN est identique à celui du guide chirurgical. Si une chirurgie est faite à main levée ou en guidage dynamique, le GEN seul est claveté en début d’intervention. Il est fondamental de retrouver la position des clavettes en fin d’intervention pour repositionner le GEN. Toute erreur de placement entraînera une erreur d’occlusion de la prothèse provisoire.
La planification des clavettes est une étape clé du protocole GEN. Elles peuvent être réparties en vestibulaire et lingual ou palatin afin d’éviter toute bascule du guide. Les clavettes doivent être planifiées en position endo-osseuse afin de retrouver facilement l’ancrage en fin d’intervention (figure 10).
Dans la technique du double scanner, il n’y a pas d’appui dentaire. Le guide est en appui muqueux sur toute sa surface. Pour éviter tout mouvement du guide chirurgical, les clavettes jouent un rôle majeur. Elles sont réparties sur la périphérie du guide avec le meilleur ancrage osseux (figure 11).
Quel que soit le type de chirurgie (full guided, pilot guided ou free hand), le protocole GEN peut être appliqué uniquement pour sa fonction fondamentale : simplification de l’enregistrement de la position des implants en fin de chirurgie dans leur relation intermaxillaire.
Lors des étapes préchirurgicales, le laboratoire de prothèse doit importer sur sa plateforme Exocad les fichiers STL représentant la situation initiale avec la bonne dimension verticale. Sur ces fichiers, il superpose le STL du guide chirurgical. Lors de cette superposition, le laboratoire doit s’assurer que celle-ci est uniformément répartie sur l’ensemble de l’intrados du STL du guide chirurgical (figure 12).
Le STL du guide chirurgical est ensuite dupliqué pour concevoir le GEN, qui est une copie du guide chirurgical, avec des ouvertures aux emplacements où les transferts d’empreinte numérique seront vissés. Un design plus élaboré peut également être réalisé en fonction des demandes spécifiques du praticien et des particularités du cas traité.
À la fin de la chirurgie, le praticien envoie au laboratoire le STL du GEN avec les transferts. Ce fichier est alors superposé avec le STL du GEN conçu sur la plateforme Exocad, intégrant la relation intermaxillaire validée du patient. La tolérance maximale pour la superposition est de +/- 100 µm. Un contrôle minutieux est nécessaire pour s’assurer, à l’aide de la cartographie colorimétrique, que la superposition couvre une large surface du STL avec une répartition équilibrée en trois points de contact (antérieur, postérieur droit et gauche) (figure 13).
L’intégration de techniques numériques comme le GEN dans la pratique chirurgicale et prothétique permet non seulement d’améliorer la précision et la reproductibilité des résultats, mais aussi de faciliter le processus de fabrication des prothèses. Cela réduit les marges d’erreur, améliore le confort du patient, et permet une meilleure communication entre le praticien et le laboratoire de prothèse.
Cependant, la mise en œuvre de ces technologies nécessite une coopération étroite entre la clinique et les laboratoires de prothèse. Le respect strict des protocoles de chirurgie guidée est essentiel pour garantir des résultats constants et fiables. La rigueur dans les étapes préchirurgicales est déterminante pour assurer le succès des phases chirurgicales et prothétiques.
Les résultats cliniques observés lors de la pose de la prothèse provisoire confirment l’efficacité de cette approche. L’occlusion obtenue, conforme au projet prothétique avec peu ou pas de retouches témoigne de la précision offerte par ces technologies. Par ailleurs, l’utilisation des imprimantes 3D de nouvelle génération, capables de produire des pièces en 30 à 40 minutes, permet de réduire le temps d’attente post-chirurgical.
La dématérialisation des étapes, à l’exception du double scanner, limite le nombre de séances cliniques nécessaires. Une empreinte optique et un logiciel de planification adapté suffisent pour appliquer ce protocole de manière routinière. Bien entendu, il est possible de rendre le processus encore plus sophistiqué en intégrant des technologies telles que l’occlusion dynamique, le scan facial ou le Smile Design.
De nouvelles recherches sont indispensables pour approfondir cette approche et en démontrer pleinement les bénéfices. Cependant, les avancées technologiques actuelles représentent déjà une évolution significative par rapport aux méthodes analogiques conventionnelles, ouvrant la voie à des traitements dentaires plus personnalisés et plus efficaces.
Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêt.
Remerciements au laboratoire Design4Me.