RÉHABILITATION D’UN CALAGE POSTÉRIEUR EN PROTHÈSE IMPLANTO-PORTÉE : PRÉCAUTIONS ET PROTOCOLE
Dossier
Tatiana ROMAN* Mickael COTELLE** Olivier ETIENNE***
*Tatiana Roman CCU-AH temps plein
**Ancien interne des hôpitaux Strasbourg
***Pratique libérale, Arras
****MCU-PH temps partiel Pratique libérale, Strasbourg
Une perte de calage postérieur (PCP) engendre une adaptation musculo-articulaire, une modification de la répartition des contraintes sur les dents résiduelles et le parodonte. Ces répercussions créent un terrain à risques de dysfonctionnement temporo-mandibulaire (DTM), de lésions dentaires et/ou parodontales.
De plus, si les dents antagonistes sont présentes et qu’aucune réhabilitation n’est entreprise, l’espace prothétique vertical initial diminuera progressivement. Au vu de ces risques, et idéalement de façon préventive, la prise en charge des pertes de calage postérieur est indiquée, le recours aux restaurations implantoportées restant le traitement de référence dans ces situations cliniques.
Cependant, à ce jour, aucun consensus n’existe concernant les protocoles chirurgicaux et prothétiques pour les réhabilitations implanto-portées dans les cas de PCP. L’objectif de cet article est d’analyser les différentes situations et de proposer une approche clinique basée sur les données de la littérature.
Le terme de « perte de calage postérieur » (PCP) ou posterior bite collapse a été introduit par Morton Amsterdam et Leonard Abrams en 1964 [123-4] et désigne une situation où l’occlusion postérieure est absente ou défectueuse, perturbant ainsi l’occlusion d’intercuspidie maximale (OIM) ainsi que la mastication.
Selon Nakamura et al. [2, 3], les facteurs étiologiques de la PCP peuvent être :
- la perte dentaire non réhabilitée ;
- la dysharmonie dento-maxillaire postérieure ;
- la maladie parodontale ;
- l’usure occlusale et/ou proximale accélérée ;
- les lésions carieuses sévères ;
- les réhabilitations prothétiques iatrogènes.
En 2021, Nakamura et al. [3] ont proposé une classification des PCP en 4 grades (tableau 1) selon les signes cliniques associés. Ainsi, les auteurs différencient les PCP avec ou sans édentement, associées ou non à une maladie parodontale et, dans une moindre mesure, combinées à des répercussions antérieures ou à une perte de dimension verticale d’occlusion (DVO).
Pour Orthlieb et al. [5], la PCP se décline en plusieurs anomalies : sous-occlusion, exocclusion ou édentement postérieur. L’auteur propose une classification (tableau 2) de ces anomalies en fonction du type d’édentement, de sa localisation, du délabrement ou de migrations secondaires des dents antérieures, et surtout de la présence associée ou non d’une anomalie de centrage.
Ainsi, sont différenciées :
- les insuffisances de calage postérieur et les pertes de calage intercalaires où l’occlusion postérieure peut être retrouvée, mais au prix d’un recrutement important des muscles élévateurs, favorisant les contraintes articulaires ;
- les pertes de calage terminal avec ou sans conséquences antérieures maxillaires (délabrement, migrations) et les PCP avec perte de DVO associée.
Dans une catégorie à part, Orthlieb et al. [5] évoquent les PCP avec anomalie de centrage, ces situations impliquant des contraintes articulaires exacerbées. À noter que ce « décentrage » ne sera pathogène que s’il est acquis et donc consécutif à un facteur de mal-occlusion modifiant l’OIM dans le plan frontal. Si l’asymétrie est structurelle et stable et le patient non dysfonctionnel, elle ne nécessitera pas d’être corrigée avant la prise en charge de la PCP [6].
Les classifications proposées présentent l’intérêt de décrire les conséquences dentaires et articulaires des différentes anomalies de calage postérieur et semblent donc orienter les types de prises en charge.
Selon plusieurs auteurs [2, 3, 5, 7], en présence de crispations musculaires et en l’absence de calage postérieur, une élévation condylienne pourrait apparaître (figure 1).
Parmi les conséquences cliniques de la PCP, d’autres signes sont également rapportés [3, 7] :
- dysfonction temporo-mandibulaire (DTM) ;
- progression accélérée de la maladie parodontale ;
- augmentation de la mobilité dentaire / apparition d’un frémitus ;
- perte des dents supplémentaires ;
- diastèmes antérieurs ;
- présence de contacts occlusaux forts et marqueìs ;
- usure occlusale accélérée ;
- migration dentaire (égression, version, chevauchement) ;
- perte de DVO.
Corroborant cette notion, de nombreux auteurs associent la perte de calage postérieur et les pathologies articulaires [5, 8], et d’autres contredisent cette hypothèse [9]. Une association positive entre la perte des dents postérieures et le développement des DTM a été mise en évidence par Tallents et al. [10] à travers une étude clinique transversale. Lors des simulations de morsures unilatérales chez l’homme, une bascule antérieure de la partie postérieure de la mandibule est observée dans le secteur controlatéral [4]. De plus, une étude in vivo chez les jeunes souris montre une adaptation condylienne bilatérale après la perte unilatérale des molaires [11]. L’ensemble de ces éléments semblent indiquer que la perte des dents postérieures peut favoriser ou accélérer les pathologies de l’ATM. Plus l’édentement sera étendu, plus le risque sera majoré, notamment en présence de bruxisme. Au niveau parodontal, des études récentes suggèrent que la PCP peut accélérer la maladie parodontale [2, 12]. L’augmentation de la mobilité dentaire, l’usure des dents résiduelles ainsi que les migrations dentaires peuvent être des conséquences directes de la répartition non harmonieuse des contraintes occlusales chez le patient édenté partiel.
Il est important de noter que la PCP n’est pas systématiquement associée à une perte de DVO, mais que l’espace prothétique vertical diminuera dans le temps par égressions des dents antagonistes et/ou compensation dento-alvéolaire (figure 2).
De nombreux auteurs confirment cette notion [3, 5, 8], les dents résiduelles les plus postérieures pouvant avoir une stabilité parodontale suffisante pour maintenir la DVO [2, 3].
Cependant, la DVO doit systématiquement être évaluée avant réhabilitation. Dans les cas où une PCP serait associée à une perte de DVO, l’espace prothétique inter-arcade de la zone édentée sera lui aussi forcément impacté, rendant plus complexe la réhabilitation, notamment dans la partie la plus distale où la hauteur disponible sera fortement réduite [2, 3].
Si les protocoles de prise en charge des situations cliniques de perte de dimension verticale d’occlusion ont été largement étudiés dans la littérature [13, 14], ceux concernant les cas d’édentement de classe I ou II de Kennedy-Applegate sans perte de DVO associée restent peu décrits.
L’objectif de cet article est donc de proposer une approche clinique simple et reproductible pour les réhabilitations implanto-portées dans les cas de PCP.
Pour Kaur et al., le chirurgien-dentiste est un membre de l’équipe soignante du patient souffrant d’un DTM [15]. Parmi les objectifs principaux, sont cités :
- le confort du patient ;
- la stabilité occlusale ;
- la réhabilitation prothétique.
Si l’on considère que la prise en charge d’une PCP est efficiente pour prévenir ou prendre en charge un DTM, une compréhension approfondie de ces pathologies est nécessaire, et leur dépistage obligatoire.
L’intérêt du dépistage d’un DTM avant réhabilitation d’une PCP a été largement décrit [16, 17]. Un protocole et une fiche de synthèse ont été proposés en 2021 par Savignat et al. [16].
Sans diagnostic préalable, un DTM latent pourrait se manifester cliniquement après la réhabilitation [18, 19], nécessitant, au mieux, une prise en charge en kinésithérapie maxillo-faciale afin de faciliter l’adaptation musculo-articulaire, mais plus généralement par l’obligation de prendre en charge plus globalement cet DTM et donc, fréquemment, par un renouvellement des restaurations prothétiques [16].
Dans un premier temps, un examen extra-oral d’évaluation de la DVO du patient sera effectué. Si une perte de DVO est constatée, une prise en charge globale doit être envisagée [13, 14]. Cette situation ne sera pas abordée dans le cadre de cet article.
Au niveau intra-oral, l’espace prothétique inter-crête est systématiquement et rigoureusement évalué [20]. En effet, il est fréquent d’être confronté à un espace faible, voire insuffisant, pas toujours aisé à estimer en vision directe, et source de déconvenues futures s’il n’est pas anticipé, que ce soit lors de la phase chirurgicale ou pendant les étapes prothétiques. Selon le consensus cité par Misch et al., la hauteur verticale nécessaire à une réhabilitation implanto-portée se situerait entre 8 et 11 mm [20]. Les espaces mésio-distaux ainsi que d’éventuels décalages transversaux doivent aussi être évalués et analysés. Si, dans le cas des édentements libres, engendrant une PCP, la gestion de l’espace mésio-distal semble plus facile, un décalage transversal important pourrait engendrer des contraintes mécaniques s’exerçant en dehors du grand axe implantaire [21]. Cela favorise d’éventuelles complications mécaniques (risque d’une fracture de la pièce prothétique), voire biologiques (pertes osseuses verticales) [21].
L’absence de proprioception fine et discriminative, ainsi que la localisation postérieure de la réhabilitation, là où sont concentrées une grande partie des contraintes liées aux puissants muscles élévateurs, imposent prudence et rigueur.
Pour prévenir une surcharge mécanique au niveau des implants, les données de la littérature recommandent d’augmenter leur nombre et de raccourcir, si possible, la longueur de la travée des restaurations plurales [22]. Ainsi, la stratégie de réhabilitation d’une PCP devrait être d’« une dent-un implant ».
Il va de soi qu’une bonne gestion de l’occlusion participe grandement à la pérennité des restaurations et des tissus environnants [21, 22]. Dans cette optique, plus l’axe des implants sera proche des courbes de compensation physiologique (courbes de Wilson et de Spee), mieux seront absorbées les contraintes.
Afin de positionner les implants au plus proche de ces axes optimaux, les chirurgiens oraux s’accordent pour une utilisation quasi systématique des guides chirurgicaux [23, 24].
Pour ou contre une phase de couronnes transitoires (provisoires) ?
La question mérite d’être posée et une réflexion s’impose, guidée par la notion « coût-bénéfices ».
Le coût est purement financier, les patients ayant à s’acquitter de cette étape supplémentaire, ainsi que du temps à passer au cabinet pour sa réalisation.
En prothèse implanto-portée, et notamment en secteur postérieur, les couronnes provisoires sont rarement réalisées, probablement à tort [25].
La prothèse provisoire implanto-portée en cas de PCP permettra :
- d’évaluer l’adaptation fonctionnelle, de manière évolutive ;
- de vérifier que le patient retrouve une mastication physiologique (c’est-à-dire unilatérale alternée), sans morsures jugales ou linguales persistantes ;
- d’observer l’éventuelle apparition de signes de DTM dans le temps ;
- de préserver, voire d’optimiser l’état des tissus péri-implantaires.
Enfin, les couronnes transitoires vont faciliter la communication avec le laboratoire, l’enregistrement de la relation maxillo-mandibulaire ainsi que la gestion de l’occlusion lors de l’insertion des prothèses d’usage.
Pour une validation clinique optimale, une temporisation de 3 mois semble nécessaire, de manière similaire à la durée de port des réhabilitations prothétiques transitoires chez les patients bruxeurs [13].
Il est important de noter que cette étape transitoire est impérative chez les patients ayant présenté ou présentant des signes de DTM.
• Contrôle de l’empreinte
La réalisation de l’empreinte suit les protocoles préalablement décrits [26, 27]. Une attention importante sera accordée au choix des transferts, qui doivent rester compatibles avec l’ouverture buccale du patient. Ce point est en partie résolu dans le cas des empreintes optiques.
Dans le cadre des recommandations déjà exposées (un implant-une dent) [28-30], la validation de l’empreinte via une clé en plâtre n’apparaît pas justifiée. Néanmoins, cela demeure un impératif si les PIP sont solidarisées [31].
• Contrôle des adaptations
Chaque couronne doit d’abord être essayée individuellement afin de s’assurer de son insertion complète, puis conjointement afin de contrôler de nouveau les adaptations cervicales ainsi que les points de contacts proximaux. Un contrôle radiographique sera réalisé.
• Contrôle du respect de la physiologie
Une attention importante sera accordée au respect de la courbe de Spee. En effet, l’équipe de Kanavakis a décelé une association statistiquement significative entre la typologie de la courbe de Spee et l’existence de bruits au niveau de l’ATM [32]. Ainsi, dans l’étude ayant analysé la relation entre les symptômes de DTM et les courbes occlusales chez 100 sujets sans antécédents de trauma crânio-facial et présentant au moins une molaire, une prémolaire, une canine et deux incisives dans chaque quadrant, les auteurs ont conclu que les patients avec des courbes occlusales planes présentaient des bruits articulaires [32]. La morphologie de la ou des couronnes sera également soigneusement analysée. Certains auteurs préconisent une diminution jusqu’à 40 % de la surface occlusale, pour éviter des charges en cantilever, au-delà de l’axe de l’implant [21]. Toutefois, une réduction de la surface occlusale pourrait augmenter les charges au niveau de l’implant [21]. De ce fait, la morphologie de la couronne doit être adaptée à la dent qu’elle remplace, l’inclinaison des versants cuspidiens parfaitement ajustée afin de réduire le stress mécanique transmis à l’implant [21].
Réhabiliter une PCP a comme objectifs fonctionnels l’optimisation de l’OIM existante ainsi que le retour à une mastication unilatérale alternée. Cette réhabilitation n’a pas vocation à modifier l’OIM initiale, mais simplement à l’optimiser.
• Pour cela, quatre impératifs sont à respecter :
- connaître l’occlusion initiale du patient, et donc l’avoir mise en évidence (figure 3) ;
- connaître la localisation « idéale » des points supports de l’occlusion à créer sur les PIP (figure 4) ;
- régler l’occlusion statique en gérant correctement l’intensité de ces contacts ;
- régler l’occlusion dynamique via les surfaces de guidage.
• L’intensité des contacts occlusaux à créer est souvent source de questionnements, voire d’approximations.
Pourtant, le premier des quatre impératifs décrits ci-dessus simplifie l’étape d’équilibration occlusale en pratique quotidienne, et s’applique tout particulièrement aux cas traités dans cet article.
Les contacts occlusaux statiques seront systématiquement présents sur les restaurations, les contacts préexistants sur le reste de l’arcade seront inchangés, que ce soit en intensité ou en localisation.
• Pourquoi cette exigence ?
Une surcharge occlusale expose la réhabilitation à des risques mécaniques :
- fracture ou écaillage de la prothèse ;
- fracture de la vis prothétique ;
- ou plus rarement fracture du col implantaire.
De surcroît, une surcharge occlusale peut être à l’origine de complications biologiques, comme la perte osseuse crestale [33].
Selon Chiche et Guez, la sur-occlusion, est une situation qui dépasse la limite de tolérance mécanique du complexe implant-os-prothèse [34]. Si la sollicitation mécanique de l’os par des charges masticatoires peut s’avérer nécessaire, voire indispensable [33, 35] au remodelage osseux, le seuil critique de surcharge ne doit pas être dépassé. Ainsi, Frost, en rappelant les lois de Wolf, souligne la réaction du support osseux face à des contraintes mécaniques [36].
Cependant la sous-occlusion n’est en aucun cas une option. Les concepts de mise en place prothétique en « légère sous-occlusion » ou de « prémolarisation » des faces occlusales des molaires afin d’échapper à un excès de contraintes ne se justifient pas quand les règles concernant les concepts occlusaux sont maîtrisées [21].
Il est donc nécessaire que le laboratoire réalise des travaux en très légère sur-occlusion. Celle-ci sera corrigée lors de l’essayage, jusqu’à l’obtention de points de contacts nombreux et correctement localisés, respectant l’OIM initiale. Cette étape nécessite que le patient exerce une pression conséquente (« serrez fortement ») afin de soumettre les réhabilitations aux pressions futures réelles et d’éliminer le risque de sur-occlusion/sur-guidage lors des contraintes masticatoires. Cela devient d’autant plus important dans les cas de patients bruxeurs.
Concernant la localisation « idéale » des points supports de l’occlusion, elle répond à la fois à un impératif mécanique de stabilisation de l’OIM (figure 4), mais aussi à un rôle de guidage lors de la cinématique (figures 5 et 6).
Rappelons que l’OIM, ainsi que les surfaces de guidage initiales définissent l’enveloppe fonctionnelle du patient, le système musculo-articulaire s’y adaptant.
Dans les cas de PCP, le couple résiduel fonctionnel le plus postérieur servira de référence et l’angle fonctionnel (figure 7) qu’il décrit sera copié pour construire les restaurations postérieures.
Fermer cet angle fonctionnel présente un risque d’inconfort et de conséquences musculo-dento-parodontales. L’ouvrir rend les dents concernées moins fonctionnelles et provoquera un risque de morsure, jugale notamment.
• Contrôler et équilibrer la cinématique : quels mouvements et quelle intensité ?
Favorisés par l’enseignement universitaire actuel, les mouvements d’analyse (propulsion et diductions) sont donc les principaux que font exécuter une large majorité des confrères à leurs patients afin de contrôler l’intégration fonctionnelle des restaurations posées.
Estimant ces mouvements insuffisants, voire inadaptés, certains auteurs ont préconisé de faire réaliser les mouvements fonctionnels que sont l’incision et la mastication [35].
Désireux de ne pas entrer dans cette confrontation, il sera tenté ici de proposer simplement un protocole qui permet de regrouper les avantages de chaque concept.
Ainsi, les mouvements d’analyse, plus aisés à comprendre et à réaliser pour un patient au fauteuil, devront être effectués sous pression occlusale maximale, afin d’apporter une composante verticale forte, présente lors de la mastication au quotidien et absente lors des seules diductions classiquement demandées aux patients. En exerçant cette pression forte lors des mouvements aller et retour, les papiers marqueurs mettront en évidence, au moins en partie, les surfaces de guidage réellement présentes ensuite à la mastication.
Puis il peut être intéressant de faire réaliser des cycles de mastication sur papiers marqueurs, sous pression occlusale forte également. En pratique, peu de patients arrivent à simuler ce mouvement pourtant physiologique.
De surcroît, afin de réaliser ces réglages, il conviendrait de choisir un papier adapté, d’une épaisseur inférieure à 21 µm [37].
Dans le cadre d’un flux numérique complet, des nouveaux outils permettent l’analyse minutieuse des informations occlusales, afin de permettre une réhabilitation d’usage encore mieux adaptée [38].
• Solidarisation des couronnes ou pas ?
La réhabilitation par couronne unitaire permet :
- une réintervention ponctuelle, individuelle, en cas de complications ;
- un meilleur accès à l’hygiène (pour le passage de fil interdentaire) ;
- une facilitation des étapes cliniques ainsi que de laboratoire et notamment de l’équilibration occlusale.
Les avantages supposés d’une solidarisation sont :
- la facilité de la gestion des points de contact.
Les points de contact proximaux faisant partie des impératifs assurant la pérennité des restaurations, ils sont délégués au laboratoire dans ce cas, et n’auront pas à être gérés au fauteuil ;
- la répartition des contraintes et l’obtention d’un effet de contention dans le cas des implants courts.
De récentes revues de littérature permettent de conclure que les implants courts (< 8,5 mm), solidarisés ou non, présentent un taux de survie, une perte osseuse marginale et des complications mécaniques similaires [18-20].
Lors de la réhabilitation d’usage, et afin de conserver l’anatomie, mais surtout les contacts statiques ainsi que les surfaces de guidage établies avec les prothèses de transition, plusieurs options sont à la disposition du praticien :
- pour les techniques prothétiques conventionnelles, une empreinte des provisoires guidera le laboratoire dans la reproduction à l’identique des paramètres occlusaux choisis et soigneusement équilibrés. Laisser en place la prothèse transitoire la plus distale facilitera grandement la réalisation et l’ajustage des autres prothèses ;
- pour les flux numériques de travail, une « copie 3D » des provisoires ainsi qu’un enregistrement de l’OIM pourront être réalisés.
Dans les cas d’édentement terminal avec plus d’une dent réhabilitée, et dans le cadre d’empreinte conventionnelle, il serait souhaitable de conserver le calage postérieur lors des étapes prothétiques (figure 8). Ainsi, la prothèse provisoire de la dent terminale restera en place pendant toutes les étapes cliniques et de laboratoire de réalisation des prothèses d’usage concernant les dents intercalaires. Cette technique permet un gain de temps important lors des étapes d’enregistrement de la RMM, d’essayage et d’équilibration, car les informations occlusales sont conservées par la dent terminale. Une fois les couronnes intercalaires d’usage insérées et l’équilibration occlusale réalisée, la couronne terminale peut être réalisée. Dans le cadre d’un flux numérique, l’information occlusale pourra être enregistrée avant la réalisation de l’empreinte, avec une acquisition numérique préalable, dents provisoires en place (figure 9). Pour les étapes de réalisation puis d’essayage, il est tout de même recommandé de garder en place la dent provisoire la plus distale et de procéder à des réglages séquentiels. Dans le cas des réhabilitations de PCP avec des édentements terminaux dans deux quadrants antagonistes, quel que soit le flux de travail choisi, il sera judicieux de procéder à la réhabilitation d’un quadrant avant de réaliser l’antagoniste. Ainsi, dans un premier temps, l’harmonie occlusale des prothèses d’usage sera guidée par les faces occlusales des prothèses provisoires antagonistes. Dans un second temps, les prothèses d’usage du dernier quadrant pourront être réalisées.
Remarque : Peut-on utiliser l’empreinte des prothèses de transition pour réaliser les prothèses d’usage ?
Il est en effet tentant, notamment en technique conventionnelle, de s’épargner une seconde empreinte. Cela est tout à fait possible si la pose des couronnes transitoires n’a nécessité que des ajustements occlusaux.
Les matériaux à utiliser pour les PIP d’usage doivent satisfaire le cahier des charges des restaurations supra-implantaires [39].
Leur usure doit être proche de celle des dents antagonistes et controlatérales, sous peine d’un risque d’usure accélérée qui engendrera, à terme, une anomalie de calage postérieur.
Dans le cas des réhabilitations par PIP et, de surcroît, dans le cas des réhabilitations de PCP, le rôle du chirurgien-dentiste ne s’arrête pas après la séance de pose des prothèses d’usage. Une maintenance régulière doit être mise en place pour assurer la pérennité des restaurations et prévenir les éventuelles complications.
Parmi les complications liées aux restaurations PIP, sont fréquemment citées :
- les complications mécaniques :
• sous-occlusion ;
• dévissage ;
• fracture de la couronne prothétique ;
• fracture du pilier implantaire ;
• fracture de l’implant ;
- les complications biologiques ;
• mucosite ;
• péri-implantite.
80 % des complications mécaniques surviendraient pendant la première année [34]. Ainsi, Chiche et Guez recommandent une fréquence accrue des visites de contrôle la première année : à une semaine, 3 mois, 6 mois et 12 mois, pour ensuite mettre en place des contrôles bi-annuels [34].
De plus, il semble que 6 mois après la mise en charge des PIP, 50 % des patients présenteraient une sur-occlusion [34].
Pour rappel, la surcharge occlusale serait l’une des premières causes de complications mécaniques. Afin d’éviter cet écueil, il convient de rappeler l’importance de réaliser l’équilibration occlusale sous pression occlusale forte.
La prise en charge « classique » de la DTM effectuée [16, 40], il est largement préconisé de réhabiliter les PCP, facteurs à risque de récidive [16].
La prise en charge prothétique des patients atteints de DTM semble complexe et la pauvreté de la littérature disponible à ce sujet reste à déplorer. Toutefois, le début d’un essai clinique randomisé, déclaré en 2021 par la publication du protocole de recherche, témoigne de l’importance de ce sujet dans le monde scientifique [41]. Le but de cet essai clinique est d’apporter des preuves de haut niveau scientifique concernant l’effet des réhabilitations prothétiques sur les douleurs associées aux DTM. Des recommandations de réhabilitation pourraient en être extraites.
En attendant, une approche clinique pour la réhabilitation des DTM a été proposée par l’équipe de Savignat [16]. Ainsi, le passage par une restauration prothétique de transition devient impératif pour la réhabilitation des patients présentant un DTM. Une attention particulière sera accordée à la position de référence. Le temps de validation des réhabilitations prothétiques par le patient sera aussi souvent augmenté. Une fois le confort musculo-articulaire obtenu, la nouvelle OIM sera transférée au laboratoire qui reproduira les mêmes caractéristiques avec les restaurations d’usage.
• La réhabilitation d’une PCP par prothèses implanto-portées est indiquée, et ce le plus précocement possible.
• Selon les recommandations actuelles, une réhabilitation de type « une dent-un implant » est conseillée. Pour la phase prothétique, le passage par une étape de couronnes transitoires présente de nombreux avantages.
• L’équilibration occlusale de ces pièces prothétiques nécessite quant à elle quelques notions de bases sur la localisation des points de contacts « optimaux » ainsi que sur celle des surfaces de guidage afin de rendre les restaurations fonctionnelles.
• La tentation de surprotéger ces travaux en minimisant leur volume ou en privilégiant une sous-occlusion doit être oubliée, au profit d’une gestion rigoureuse de l’occlusion, impliquant les réglages sous pression occlusale forte et le respect des contacts et guidages initiaux de l’OIM.
Les auteurs remercient le Pr O. Fromentin pour sa relecture et ses précieuses suggestions
Les auteurs déclarent n’avoir aucun lien d’intérêts.