Clinic n° 05 du 01/05/2024

 

Prothèse

Yohann FLOTTES*   Camille LUTTENBACHER**   Aurélia WASONG***   Claudine WULFMAN****  


*CCU-AH, Service de Médecine bucco-dentaire, Hôpital Henri-Mondor, Créteil. Exercice libéral à Paris.
**Interne en médecine bucco-dentaire, Service de Médecine bucco-dentaire, Hôpital Henri-Mondor, Créteil.
***Praticien attaché, Service de Médecine bucco-dentaire, Hôpital Henri-Mondor, Créteil. Exercice libéral à Paris.
****PU-PH, Département de Réhabilitation orale prothétique, Université Paris Cité. Service de Médecine bucco-dentaire, Hôpital Henri-Mondor, Créteil.

Avec l’avènement des implants dentaires au cours des années 1980 et leur démocratisation au XXIe siècle, un changement de paradigme dans la conception prothétique s’est opéré et une diminution de l’utilisation des attachements prothétiques a été observée. Il existe cependant des situations où le traitement implantaire n’est pas retenu pour des raisons médicales, esthétiques ou économiques. Reviennent alors les alternatives de prothèses composites. L’objectif de ce cas clinique est d’illustrer que le implant first ne peut faire oublier les attachements.

LES ATTACHEMENTS PROTHÉTIQUES DENTO-PORTÉS

Un attachement peut être de semi-précision (matrice calcinable) ou de précision (usiné) [1]. La classification topographique est plus didactique : intra-coronaires ; extra-coronaires (à liaison rigide, à liaison articulée) ; supra-radiculaires ou intra-radiculaires. Les attachements supra-implantaires se sont développés à partir des attachements supra-radiculaires.

L’utilisation des attachements dento-portés est indiquée pour des raisons esthétiques et fonctionnelles. La transmission des forces occlusales le long des axes des dents piliers permet de prévenir les blessures et l’impaction alimentaire [2]. Les principaux avantages sont l’amélioration de l’esthétique et l’optimisation biomécanique. La déformation de l’attachement, la diminution de la rétention par usure des pièces, la rupture par fatigue, les contraintes sur la dent pilier, les difficultés d’hygiène, les préparations coronaires potentiellement délabrantes, les difficultés des réparations, la complexité des procédures de laboratoire et la charge financière sont les inconvénients majeurs des attachements [3-5]. Ils exigent un suivi régulier.

Le choix du schéma occlusal de la prothèse composite se porte sur une occlusion stable et réitérative. Celle du patient est donc conservée si elle respecte ces critères sinon une relation centrée (équilibrée bilatérale) est à privilégier [6].

SITUATION CLINIQUE

Thérapeutique initiale

Le patient se présente à la consultation implantaire pour une difficulté à la mastication en rapport avec des mobilités dentaires importantes, particulièrement à la mandibule et au niveau molaire au maxillaire. Il ne présente aucun antécédent particulier ni intoxication alcoolo-tabagique. La prise en charge initiale consiste en l’avulsion des dents non conservables et en une prise en charge parodontale (figure 1).

Décision thérapeutique

Le patient ne présente aucune contre-indication médicale à la chirurgie implantaire. Une prothèse amovible complète mandibulaire d’usage supra-implantaire lui est donc proposée (figure 2). Au maxillaire (figure 3), la nécessité de chirurgie pré-implantaire préalable l’a incité à refuser cette thérapeutique. Il présente des lésions d’usure généralisées au niveau maxillaire et un support parodontal réduit, principalement sur les deuxièmes prémolaires maxillaires.

Le patient souligne un intérêt pour une intégration esthétique de la prothèse et refuse la présence de crochet en vestibulaire.

La prothèse composite est retenue : prothèse amovible partielle à châssis métallique, facettes (vitrocéramiques renforcée au disilicate de lithium) de 13 à 23 et couronnes solidarisées avec attachements extra-coronaires sur les prémolaires (14/15 et 24/25).

Les attachements choisis au maxillaire sont des attachements Mini-SG F/R T et, au niveau mandibulaire, des attachements Locator. L’occlusion en relation centrée est retenue dans cette situation.

Chronologie de traitement

• Une première prothèse amovible partielle provisoire maxillaire (figure 4) est réalisée en même temps que la prothèse amovible complète d’usage mandibulaire supra-implantaire.

• Un mock-up de 15 à 25 est ensuite utilisé pour la validation esthétique du projet. Un épaulement à bord interne arrondi vestibulo-proximal avec chanfrein palatin est préféré pour les couronnes sur 24-25-14-15. La position extra-coronaire de l’attachement sélectionné nous autorise à effectuer une réduction périphérique classique. Pour les dents de 13 à 23, la préparation vestibulaire et palatine a consisté en un chanfrein cervical de 0,5 mm juxta-gingival, à mi-hauteur en palatin, avec respect des points de contacts (figure 5).

• L’enregistrement de la relation maxillo-mandibulaire est réalisée avec la PAP du patient.

• Les restaurations adhésives en céramique de 13 à 23 ont été collées avec un composite à prise duale (Variolink Esthetic, Ivoclar).

• Puis, une empreinte secondaire avec les couronnes emportées a été réalisée (figure 6). Le prothésiste a privilégié le composite pour la solidarisation entre le châssis et la partie femelle des attachements.

• Les couronnes céramo-métalliques ont été scellées avec un ciment verre ionomère modifié par addition de résine (CVI Fuji Plus, GC) le jour de la pose de la PAP maxillaire d’usage (figures 7 à 11).

Thérapeutique de soutien parodontal et prothétique

Tous les 4 mois, le patient sera revu pour la maintenance prothétique et parodontale. Un changement du joint des attachements maxillaires a été réalisé lors de la première séance de réévaluation pour optimiser la rétention (figures 11 et 15).

CONCLUSION

Avec l’évolution des techniques prothétiques, il est facile d’oublier l’ensemble du panel thérapeutique s’offrant à nous. Les solutions implantaires se montrent à la hauteur de nos attentes dans de nombreuses situations, déclassant ainsi les attachements comme une thérapeutique secondaire. Néanmoins, ils ont encore des indications intéressantes, pouvant se montrer tout aussi fonctionnelles, dans les réhabilitations où la solution implantaire n’est pas retenue.

BIBLIOGRAPHIE

  • 1. Dos Santos Nunes Reis JM, Da Cruz Perez LE, Alfenas BF, De Oliveira Abi-Rached F, Filho JN. Maxillary rehabilitation using fixed and removable partial dentures with attachments: A clinical report. J Prosthodont 2014;23(1):58-63.
  • 2. DeBoer J. The effects on function of distal-extension removable partial dentures as determined by occlusal rest position. J Prosthet Dent 1988;60:693-696.
  • 3. Preiskel HW, Preiskel A. Precision attachments for the 21st century. Dent Update 2009;36(4):221-227.
  • 4. Reslan MR, Osman E, Segaan L, Rayyan M, Joukhadar C, Fattouh M. Comparison between integrated and parallel interlock designs of an extracoronal attachment-retained distal extension removable partial dentures: A clinical trial. J Int Soc Prev Community Dent 2021;11(1):41-49.
  • 5. Donovan TE, Derbabian K, Kaneko L, Wright R. Esthetic considerations in removable prosthodontics. J Esthet Restor Dent 2001;13:241-253.
  • 6. Goodacre CJ, Goodacre BJ. What occlusal scheme should be used with removable partial dentures? J Prosthodont 2021;30 (S1):78-83.
  • 7. Kern JS, Kern T, Wolfart S, Heussen N. A systematic review and meta-analysis of removable and fixed implant-supported prostheses in edentulous jaws: Post-loading implant loss. Clin Oral Implants Res 2016;27(2):174-195.

Liens d’intérêt

Les auteurs déclarent n’avoir aucun lien d’intérêts.