L’EXTRACTION/IMPLANTATION IMMÉDIATE DANS LE SECTEUR ESTHÉTIQUE
TECHNIQUE DE CHOIX POUR LA PRÉSERVATION OU L’AUGMENTATION TISSULAIRE ?
Dossier
Ancien assistant des hôpitaux de Marseille en Parodontologie.Exercice libéral à Nice.
Nous avons tous déjà vécu ou entendu parler d’une expérience décevante lors de la réalisation d’une extraction/implantation immédiate dans le secteur antérieur. La littérature n’est pas toujours tendre avec cette technique. Mais le risque de ce protocole est-il une réalité scientifique ? Les protocoles modernes décrits pour la gestion des cas esthétiques en extraction/implantation immédiate fournissent les clés pour obtenir des résultats esthétiques reproductibles, la technique devenant un allié de choix pour la préservation tissulaire.
Les protocoles implantaires traditionnels préconisent une période de cicatrisation de l’os crestal s’étendant sur plusieurs mois suite à l’extraction de la dent, et ce avant l’insertion chirurgicale de l’implant. Une période de cicatrisation comparable est conseillée avant la mise en fonction de cet implant.
Bien que ces protocoles en plusieurs étapes soient considérés comme « sûrs » et offrent une stabilité à long terme, notamment dans les situations compromettantes, ils impliquent des phases de traitement prolongées et nécessitent plusieurs interventions chirurgicales. C’est pour ces raisons que le placement d’implants de manière précoce et immédiate dans des alvéoles post-extraction ainsi que la mise en charge directe ont gagné en popularité, avec des demandes esthétiques toujours plus importantes [1].
Après avoir défini la technique d’extraction et d’implantation immédiate, nous aborderons la question de savoir si cette méthode présente des risques. Enfin, à travers un cas clinique, nous décrirons un protocole moderne étape par étape permettant d’obtenir des résultats fiables et reproductibles dans la prise en charge des secteurs antérieurs.
Les protocoles relatifs à la pose d’implants sont classifiés selon la durée de la période de cicatrisation post-extraction dentaire avant l’implantation elle-même. Ces méthodes ont été clairement définies lors des trois dernières conférences de consensus organisées par l’ITI en 2003, 2008 et 2013.
Elles se déclinent comme suit.
• Pose immédiate de l’implant, le jour même de l’extraction, qualifiée de type 1.
• Implantation précoce après une période de cicatrisation des tissus mous allant de 4 à 8 semaines, soit le type 2.
• Insertion précoce de l’implant après 12 à 16 semaines, suite à une cicatrisation osseuse partielle, correspondant au type 3.
• Enfin, pose d’implant tardive, intervenant après une cicatrisation osseuse totale d’une durée minimale de 6 mois, définie comme le type 4 [2].
Différentes options de mise en charge des implants ont également été appliquées cliniquement.
La définition des protocoles de mise en charge a été légèrement modifiée au fil des ans et est actuellement acceptée comme suit :
- la mise en charge immédiate des implants dentaires est définie comme étant antérieure à 1 semaine après la pose de l’implant ;
- la mise en charge précoce des implants dentaires se situe entre 1 semaine et 2 mois après la pose de l’implant ;
- la mise en charge conventionnelle des implants dentaires s’effectue au moins 2 mois après la pose de l’implant [3].
Dans le cadre de notre article nous nous intéresserons aux protocoles qui allient protocole de pose d’implant le jour de l’extraction (type 1) et mise en charge immédiate. Dans le secteur antérieur nous parlerons plutôt de mise en esthétique immédiate, durant laquelle nous diminuerons au maximum les contraintes occlusales tout en garantissant un maintien esthétique de la situation.
Ces procédures présentent des taux de réussite à long terme comparables à ceux des procédures traditionnelles d’implantation différée [4].
Nous sommes nombreux à avoir obtenu des résultats en-deçà de nos attentes lors de la mise en œuvre des protocoles d’extraction/implantation immédiate (EII). Il est souvent avancé, par ouï-dire ou à la lecture, que cette technique est intrinsèquement peu prédictive, voire risquée. S’agit-il d’un mythe ou est-ce corroboré par des sources bibliographiques et cliniques ?
Cette contribution se veut une exploration bibliographique pour apporter un éclairage sur cette interrogation. Lorsqu’on évoque l’EII comme une technique risquée, une étude est fréquemment citée pour étayer cette assertion : la revue systématique de Chen et al. en 2014 [5]. Ces derniers ont constaté que, bien que des résultats esthétiques acceptables soient atteignables grâce à l’EII, un risque de récession des tissus vestibulaires péri-implantaires persiste. Ce qui suggère qu’un enjeu esthétique est intrinsèque à cette méthode.
Précisons qu’une revue de littérature consiste en une analyse rigoureuse des recherches préexistantes sur un sujet donné. Elle a pour but de condenser, évaluer et compiler l’état actuel des connaissances en se fondant sur diverses sources académiques. Parmi ces sources, les méta-analyses et revues littéraires sont les plus probantes, suivies des études contrôlées randomisées. Ces dernières sont reconnues pour leur capacité à établir une relation de cause à effet. Ensuite, on trouve les études observationnelles qui, bien qu’utiles, offrent une causalité moins robuste. Les études descriptives et séries de cas, quant à elles, ne permettent guère de généraliser leurs conclusions à une large population [5].
Dans leur revue, Chen et al. se sont intéressés aux résultats esthétiques de la pose d’implants en EII comparativement à une implantation traditionnelle différée. Ils ont examiné 50 articles, mais seulement 6 étaient des études contrôlées randomisées et 6 des études de cohorte, le reste se composant principalement de séries de cas. Suite à une évaluation critique des études les plus solides, nous avons porté une attention particulière aux 6 études cliniques randomisées retenues par Chen et al. dont 5 ont conclu en faveur de l’EII, notant de meilleurs résultats esthétiques. Une seule a évoqué un risque de récessions vestibulaires [6]. Il est important de souligner que l’étude de Chen et al. de 2007 mentionnant ce risque repose uniquement sur des implants de type bone level. Les choix méthodologiques effectués dans cette étude, notamment en ce qui concerne la position des implants, pourraient expliquer les résultats observés.
Une question se pose alors : une ap proche plus contemporaine de l’EII ne serait-elle pas une méthode efficace de conservation ou même d’augmentation tissulaire ?
Selon Puisys et al. [7], 3 facteurs sont à l’origine de la réputation controversée de l’EII :
- une compréhension insuffisante de la biologie sous-jacente ;
- une analyse inadéquate de la situation ;
- une mise en œuvre inappropriée de la technique.
Ces éléments méritent d’être explorés davantage. Toutefois, une chose est certaine : pour exploiter pleinement les avantages de l’EII, la maîtrise technique ne suffit pas. Une évaluation approfondie et globale de la situation clinique est impérative.
Cofar et al. [8] ont mis en lumière une méthode rigoureuse, articulée autour de 9 étapes cruciales, dédiée à la prise en charge des cas d’extraction/ implantation immédiate dans le secteur antérieur de la bouche. Ces étapes, bien qu’initialement conçues pour le secteur antérieur où l’enjeu esthétique est prépondérant, peuvent être adaptées aux secteurs postérieurs (figure 1).
Pour mieux nous immerger dans cette approche, explorons un cas concret.
Mme R. a sollicité une consultation dans le but spécifique de trouver une solution de remplacement pour son incisive centrale maxillaire droite. Cette dernière avait été, pendant de longues années, remplacée par une coiffe provisoire (figure 2). Les examens cliniques et radiologiques ont révélé une reprise de carie en position vestibulaire, avec une limite carieuse juxta-osseuse. La dent ne peut être sauvée (figure 3).
La première étape est cruciale : déterminer si la technique d’extraction/ implantation immédiate est adaptée à la situation. Cliniquement, l’analyse doit se pencher sur le phénotype gingival, la position du collet anatomique de la dent concernée et l’état des papilles. Ici, nous observons un parodonte fin sans récession vestibulaire ainsi que des papilles mésiales et distales intactes.
Une récession et/ou la dégradation des papilles sont des signaux d’alerte : ils pourraient nous pousser vers une technique de préservation alvéolaire et une implantation différée. L’épaisseur des tissus gingivaux est également déterminante. Nous aborderons ultérieurement comment les moyens numériques nous permettent facilement de quantifier cet aspect.
Un autre élément crucial à considérer est la présence ou l’absence de la corticale vestibulaire ainsi que son épaisseur.
Lors d’une avulsion, un remodelage osseux se produit. Cette transformation se traduit par une perte de volume osseux en relation avec l’épaisseur de la corticale vestibulaire présente avant l’avulsion. Si cette dernière dépasse 1 mm d’épaisseur, la perte est limitée à environ 9 %. En revanche, si elle mesure moins de 1 mm, voire si elle est absente, la perte peut atteindre jusqu’à 62 % [9].
Ces données sont à corréler avec l’anatomie rencontrée au niveau de l’incisive centrale maxillaire : 86 % des patients présentent une corticale de moins de 1 mm d’épaisseur dans le tiers moyen et coronaire. Dans 48 % des cas, elle est même inférieure à 0,5 mm [10].
Le desmodonte influence cette corticale. Ainsi, lors d’une avulsion dentaire, son retrait affaiblit la corticale [11].
Ainsi, pour la majorité des patients du secteur esthétique, les extractions risquent d’entraîner une diminution significative du volume osseux. Cette perte complique la pose différée d’implants dans ces zones, augmentant le risque de préjudice esthétique. Il est important de noter que ces complications surviennent indépendamment de l’ostéo-intégration réussie.
Nous avions initialement espéré que la pose d’implants simultanément à l’avulsion pallierait ce problème. Cependant, la corticale étant sujette à une résorption prononcée, l’avulsion induit un remodelage osseux. Cette transformation entraîne une réduction du volume, même avec une implantation immédiate. Face à ce défi, l’EII préconise l’adoption de diverses stratégies pour compenser cette perte osseuse.
Une étude approfondie du parodonte marginal est essentielle, de même que l’analyse détaillée de l’environnement osseux via le CBCT est cruciale. Il existe plusieurs classifications conçues pour fournir un diagnostic précis. Ces systèmes de classification, loin de n’avoir qu’une portée académique, visent également à guider nos interventions chirurgicales.
Parmi les classifications couramment adoptées pour le secteur antérieur, celle de Elian et Smith est prédominante [12]. Selon une vue sagittale au CBCT, elle établit 3 classes distinctes (figure 4).
• Classe I : la corticale vestibulaire et la gencive demeurent intactes.
• Classe II : bien qu’il n’y ait pas de récession gingivale, la corticale vestibulaire est amoindrie.
• Classe III : la corticale vestibulaire est atténuée, complétée par une récession gingivale vestibulaire.
La classe I est favorable pour l’EII, tandis que la classe III est déconseillée.
Chu et al. [13] ont affiné la classe II en fonction de la position du rebord osseux vestibulaire (figure 5).
• Classe IIa : perte osseuse touchant le tiers cervical.
• Classe IIb : affecte le tiers moyen.
• Classe IIc : concerne le tiers apical.
Pour la classe IIa, l’EII est réalisable. Par contre, pour la classe IIc, elle est déconseillée. Quant à la classe IIb, une évaluation plus détaillée du défaut sous différents angles s’impose pour trancher. Cette subdivision s’enrichit avec la classification de Khan (2018) qui décrit la forme du défaut en pers pective frontale [14].
Bien que précieuse, la classification de Elian et Smith ne couvre pas tous les aspects de l’évaluation chirurgicale. Elle s’appuie sur celle de Khan (2011) pour définir la position de l’apex et de la dent par rapport à la corticale vestibulaire [15].
Pour des raisons à la fois anatomiques et physiologiques, l’implant doit être placé aussi palatin que possible. Ceci offre un espace adéquat entre l’implant et la corticale vestibulaire. Puisqu’un remodelage osseux est inéluctable, une épaisseur osseuse minimale de 2 mm en vestibulaire est essentielle pour assurer durabilité et esthétisme.
Concernant notre patiente, elle relève de la classe IIa selon Chu et présente un parodonte fin sans perte des papilles distales et mésiales. La corticale vestibulaire mesure moins de 1 mm, rendant la situation propice à une EII.
La détermination de la position de l’implant est cruciale pour le rendu esthétique, influençant autant les tissus entourant l’implant que la forme de la dent que la couronne va remplacer. Dans le contexte d’une implantation/ immédiate post-extraction, cette position est guidée par le projet prothétique.
Des critères bien définis dans la littérature précisent la position optimale de l’implant dans chaque orientation spatiale [16].
• Positionnement corono-apical du col de l’implant. Il s’agit de la profondeur à laquelle l’implant est placé, relative à la position du collet de la dent remplacée. La profondeur doit être d’au moins 3 mm en-dessous du collet de la dent, idéalement de 4 mm. Ceci permet de ménager un espace biologique suffisant et de fournir l’espace nécessaire pour les composants prothétiques et, ainsi, de sculpter un profil d’émergence conforme aux aspirations esthétiques (figure 6).
• Positionnement mésio-distal du col de l’implant. L’implant doit être aligné avec la future restauration. Un désalignement excessif, que ce soit en mésial ou en distal, risque de compromettre la papille adjacente (figure 7).
• Positionnement vestibulo-lingual du col de l’implant. Il est préférable de positionner l’implant aussi palatin que
possible par rapport à la future dent. Cela permettra la conception d’une couronne vissée avec un accès au cingulum de la prothèse. Comme mentionné précédemment, cela permet aussi d’éviter une proximité avec la corticale vestibulaire. Un placement trop vestibulaire compromettrait le rendu esthétique, augmentant le risque de récession lié au remodelage osseux (figure 8).
• Angulation vestibulo-palatine de l’implant. Même si le col de l’implant est idéalement situé, l’angle de l’implant reste primordial. Un angle trop vestibulaire entraîne un accès vissé inesthétique (figure 9).
Bien que la théorie du positionnement idéal de l’implant dans le secteur antérieur paraisse simple, sa mise en œuvre s’avère plus délicate. L’utilisation d’outils numériques devient ainsi essentielle. Ils nous guident à travers toutes les étapes du traitement. Lors de la planification, ces outils fusionnent les diverses données recueillies pour élaborer un modèle virtuel du patient (figure 10). Grâce à cette réplique numérique, il devient aisé de placer l’implant selon les critères susmentionnés, tout en s’assurant de la compatibilité avec le volume osseux existant (figure 11).
Selon une méta-analyse récente menée par Pitman et al., l’une des méthodes pour préserver l’architecture gingivale lors d’une technique d’EII réside dans l’installation d’une restauration provisoire [17]. Elle joue un rôle essentiel dans le maintien de la structure idéale des tissus mous dès le jour de la chirurgie, garantissant ainsi une meilleure stabilité des tissus péri-implantaires.
Pour que cette restauration provisoire soit efficace, sa morphologie est es sentielle. Elle doit être soigneusement définie tant au niveau transgingival que coronaire.
Dans la section transgingivale, s’étendant du col de l’implant jusqu’à la couronne visible, Gomez-Meda et Esquivel distinguent 3 régions [18] (figure 12).
• La zone C : elle est définie par la forme de l’embase en titane fournie par le fabricant. Différentes hauteurs d’embase sont disponibles sur le marché afin de s’adapter à diverses situations cliniques. Cette zone C a pour but de soutenir l’os crestal. Sa forme peut être droite ou concave et elle s’élève de 1 à 1,5 mm au-dessus du col de l’implant.
• La zone B : sa forme est dictée par le design du provisoire et elle joue un rôle dans la fermeture biologique de l’environnement adjacent. Sa forme peut être convexe ou concave selon les tissus et sa hauteur varie entre 1 et 2 mm.
• La zone E : avec une fonction principalement esthétique, elle est systématiquement convexe pour épauler les tissus péri-implantaires et mesure environ 1 mm de hauteur.
Quant à la section coronaire, la morphologie du provisoire doit évoquer la dent qu’il remplace, tout en respectant la position des points de contact. L’avantage des outils numériques est qu’ils nous autorisent à segmenter la dent concernée. Autrement dit, à partir des données du CBCT, nous pouvons effectuer une extraction virtuelle de cette dent (figure 13). Cette reproduction numérique servira de référence pour la conception du provisoire. Étant donné que la position de l’implant est déjà définie par l’étape antérieure, la préparation du provisoire peut être réalisée avant l’intervention. Elle respecte les principes énoncés par Gomez-Meda et reproduit fidèlement la dent qu’elle vise à remplacer (figure 14).
Suite aux phases de planification et de modélisation, nous abordons les étapes cliniques. Une des phases cruciales de cette procédure est l’extraction de la dent ou de sa racine. Elle doit se faire de manière atraumatique pour préserver la corticale vestibulaire. Il est essentiel de maintenir son intégrité pour la suite du processus. De ce fait, il convient de s’abstenir de mouvements brusques ou de l’utilisation d’instruments inappropriés.
Pour effectuer une extraction « atraumatique », différents outils peuvent être mobilisés :
- périotome ;
- piezochirurgie ;
- davier ;
- système Benex.
Il peut être judicieux de sectionner la racine de la dent pour faciliter son extraction par morceaux. Pour les dents situées dans la zone antérieure, la découpe s’effectuera dans le sens vestibulo-palatin et la luxation se fera avec délicatesse.
Dans le cas présent, nous avons opté pour le système Benex qui fonctionne à la manière d’un « tire-bouchon » pour extraire la racine (figure 15).
Il est recommandé d’éviter les incisions de décharge ; de plus, la réalisation des lambeaux devra être minimisée. L’utilisation d’instruments de microchirurgie est préconisée, et ce en combinaison avec des aides optiques.
Atteindre une telle précision et une telle exactitude est largement favorisé par l’utilisation de la chirurgie guidée [19]. Grâce à la planification initiale de la position de l’implant par rapport à notre projet prothétique, nous avons conçu un guide chirurgical destiné à une pose implantaire entièrement guidée (figures 16 et 17). Bien que la procédure guidée simplifie la démarche, elle ne nous exonère pas du risque d’erreurs liées à une utilisation incorrecte des guides chirurgicaux ou à une mise en œuvre inappropriée des principes de la chirurgie guidée.
Avant de commencer l’ostéotomie, il est impératif de s’assurer que le guide est correctement positionné. Il doit parfaitement s’appuyer sur les dents de support, évitant tout décalage ou basculement (figure 18). Une fois cette précaution prise, il est essentiel de ne pas démarrer la rotation des forets tant que leur partie guidée n’est pas pleinement enga gée dans la douille métallique du guide.
La vitesse de rotation recommandée des forets se situe entre 500 et 1 000 tours par minute et il est crucial de suivre le protocole fourni par le fabricant (figure 19). Chaque foret doit être inséré graduellement, jusqu’à ce qu’il atteigne sa butée.
L’implant est également mis en place à l’aide du guide. Le porte-implant, lorsqu’il est en contact avec la douille, assure la position idéale de l’implant. De plus, l’alignement des marques sur le porte-implant et la douille assure une indexation correcte avec la coiffe provisoire préalablement préparée (figure 20).
Il est reconnu que, même en optant pour une pose d’implant simultanée à l’avulsion, nous ne pouvons échapper au remodelage des tissus durs et mous. Ainsi, il convient d’adopter des techniques de reconstruction ou de préservation. Nous avons à notre disposition 3 alternatives :
- se concentrer uniquement sur les tissus mous ;
- se concentrer uniquement sur les tissus durs ;
- traiter les deux conjointement.
L’intégration de biomatériaux du côté vestibulaire de l’implant favorise la préservation de l’os. Une recherche animale dirigée par Araújo et Lindhe a démontré que l’insertion d’un substitut osseux entre l’implant et la paroi de l’alvéole renforce l’union entre l’os et l’implant [20]. Cependant, il est crucial de rappeler que les résultats obtenus sur les animaux ne se traduisent pas toujours directement chez l’humain. Il convient donc d’être circons pect quant à l’application directe de ces découvertes chez nos patients.
Dans une autre étude, Chen et al. ont révélé que l’utilisation d’une xénogreffe bovine au sein du périmètre de l’implant diminuait considérablement la résorption horizontale de la paroi osseuse vestibulaire. Les auteurs conseillent de privilégier une position palatine de l’implant afin de minimiser les risques de récession [21]. D’où l’approche couramment préconisée, fondée sur la littérature, qui consiste à remplir l’espace autour de l’implant avec un matériau xénogénique à résorption lente [22], surtout si cet espace dépasse 2 mm [23].
Selon une méta-analyse récente de Fettouh et al., l’épaisseur de la corticale en préopératoire s’avère primordiale. Une corticale mince nécessite davantage de biomatériaux [24].
Une question persiste : faut-il greffer du tissu conjonctif lors d’une implantation immédiate en secteur antérieur ? Seyssens et al., en 2021, ont tenté d’éclairer cette problématique.
Leurs conclusions suggèrent qu’une telle greffe réduit les modifications des tissus mous de 0,41 mm. Cette procédure est d’autant plus pertinente lorsque le biotype gingival est fin [25]. Une équipe italienne a constaté qu’aucune étude clinique n’avait encore examiné l’impact de la greffe de tissu conjonctif seul lors de l’implantation immédiate. Leurs résultats indiquent de légères variations horizontales après une telle intervention. Ils estiment que cette technique pourrait efficacement compenser les changements morphologiques des tissus durs et préserver la forme des tissus mous, surtout en cas de tissus de faible épaisseur [26].
La question du moment optimal pour effectuer cette greffe reste ouverte. Avant l’avulsion, la procédure est plus simple mais nécessite une attention accrue lors de l’extraction pour préserver le greffon. Si elle est réalisée après l’avulsion, il convient d’éviter toute pression excessive qui pourrait endommager la corticale vestibulaire.
La littérature n’offre pas encore de directive claire à ce sujet (figure 21).
Suite à une période de cicatrisation de 4 mois, la zone autour de l’implant est désormais prête à accueillir une prothèse permanente (figures 22 à 24).
Durant cette période de cicatrisation, il est recommandé d’éviter autant que possible le démontage récurrent de la restauration temporaire. Même si ce critère n’est pas primordial, c’est le fruit de toutes les considérations et mesures préventives que nous avons vues précédemment qui garantira un résultat à la fois fonctionnel, es thétique et durable.
Pour la création de la prothèse finale, le prothésiste s’appuiera sur l’empreinte numérique de la situation intra-orale. L’usage de la technologie numérique facilite grandement l’enregistrement du profil d’émergence, tout en minimisant les éventuelles variations dimensionnelles qui peuvent survenir lorsque les tissus restent sans le support de la prothèse temporaire (figure 25).
De plus, le prothésiste bénéficiera du modèle numérique de la structure intra-orale ayant servi non seulement à maintenir mais également à façonner le profil d’émergence. Ce modèle numérique fait office de « matrice » pour la modélisation du profil d’émergence de la prothèse fonctionnelle (figure 26).
L’extraction/implantation immédiate est une technique de choix pour le remplacement d’une dent dans le secteur esthétique. Cette technique sera source de satisfaction pour le patient comme pour le praticien, si et seulement si nous suivons un pro tocole précis. Elle nous permettra de maintenir et de régénérer les tissus durs et mous pour un résultat fonctionnel et esthétique.
Aucun paramètre ne doit être laissé au hasard, depuis l’analyse de la situation initiale, jusqu’à la prothèse définitive, en passant par l’apport de tissus durs et mous, les moyens à mettre en œuvre pour l’extraction et le positionnement de l’implant, tout doit être réfléchi et pris en compte.
L’auteur déclare n’avoir aucun lien d’intérêts.