DÉMARCHE DIAGNOSTIQUE. À LA RECHERCHE DES FACTEURS DE RISQUE DE L’ÉROSION
Diagnostiquer
Pathologie
*MCU-PH, Dentisterie restauratrice et Endodontie. EA 2496 Pathologie, Imagerie et Biothérapies orofaciales. UFR d’Odontologie, Université Paris Cité. Hôpital Rothschild, APHP.
**PU-PH, Odontologie conservatrice et Endodontie. UFR d’Odontologie, Université Paris Cité. UMR CNRS 5615, Lyon 1. Hôpital Rothschild, AP-HP.
Les lésions érosives résultent d’un processus d’exposition aux acides, quelles qu’en soient leurs origines, qui s’inscrit sur des périodes souvent longues de plusieurs années. Elles sont susceptibles de se superposer avec d’autres lésions des tissus durs ou des tissus parodontaux pour constituer un schéma étiopathogénique complexe qu’il convient de savoir déchiffrer. Identifier des facteurs de risque permet de mettre en place une démarche de prévention avant même...
Un diagnostic étiologique d’atteinte des tissus dentaires par érosion nécessite pour être complet l’identification d’un facteur de risque principal mais également l’identification de l’ensemble des facteurs de risque individuels, de leur chronologie d’apparition, de leurs associations possibles entre eux ou avec d’autres facteurs de risque d’autres pathologies carieuses ou non carieuses. Cet ensemble de facteurs de risque, pour être ainsi identifié, nécessite une méthodologie fondée sur des connaissances mais aussi sur une démarche qui permet de corréler facteurs de risque, anamnèse, étiopathogénie des lésions et examen clinique. La connaissance de l’ensemble des facteurs de risque et de leurs associations possibles est un prérequis. La démarche est quant à elle explicitée dans un deuxième temps en se fondant sur la corrélation entre les données de l’examen clinique et le niveau de prévalence des facteurs de risque identifiés.
Les lésions érosives résultent d’un processus d’exposition aux acides, quelles qu’en soient leurs origines, qui s’inscrit sur des périodes souvent longues de plusieurs années. Elles sont susceptibles de se superposer avec d’autres lésions des tissus durs ou des tissus parodontaux pour constituer un schéma étiopathogénique complexe qu’il convient de savoir déchiffrer. Identifier des facteurs de risque permet de mettre en place une démarche de prévention avant même l’existence de lésions ou face à des lésions débutantes et d’instaurer un suivi. Il s’agit donc tout à la fois de prévention primaire, secondaire et tertiaire. Face à des lésions plus importantes, elle permet de réduire, à défaut de supprimer, ces facteurs de risque et d’adapter le plan de traitement restaurateur à chaque situation individuelle.
Chez de jeunes patients, enfants ou adolescents, la consommation de plus en plus fréquente de boissons gazeuses acides doit être identifiée dans une logique de prévention compte tenu de la prévalence en forte augmentation de ces lésions [1]. Lorsque les lésions sont constituées, l’examen clinique doit permettre de corréler configuration, localisation, étendue des lésions avec les facteurs de risque et les informations recueillies à partir de l’anamnèse. Il appartient alors au clinicien de valider ou non cette cohérence et, dans la négative, de savoir pousser plus loin les investigations afin d’identifier l’ensemble des facteurs de risque impliqués dans l’étiopathogénie de ces lésions. Ces facteurs de risque des lésions érosives relèvent bien entendu tous d’une exposition importante aux acides mais derrière cette évidence se cachent des phénomènes et des pathologies beaucoup plus complexes pour justifier une analyse plus précise.
L’hyposialie peut avoir différentes origines, d’un syndrome sec ou syndrome de Sjögren à une asialie engendrée par une irradiation de la sphère orale. Les personnes âgées sont également plus fréquemment affectées. Les hyposialies d’origine médicamenteuses sont fréquentes, le plus souvent consécutives à la prise de psychotropes. On constate également des hyposialies chez les patients toxicomanes. On parle d’hyposialie en cas de débit salivaire au repos inférieur à 0,4 ml/min ou après stimulation inférieure à une valeur comprise entre 1 et 3 ml/min [2].
Cette hyposialie favorise les lésions érosives pour deux raisons : une diminution du pouvoir tampon lors de l’exposition de la cavité orale aux acides et une tendance pour les sujets atteints de consommer plus fréquemment des boissons acides pour la sensation de fraicheur qu’elles apportent. La salive joue également une protection de la surface des tissus dentaires par formation d’une pellicule formant une barrière à la diffusion des acides et contenant du calcium et des ions phosphates précurseurs pour favoriser les phénomènes de reminéralisation [3].
Environ 20 % des adultes présentent des reflux gastro-œsophagiens occasionnels mais 10 % présentent des reflux réguliers (source assurance maladie). Le muscle « cardia » assure normalement la fermeture entre l’œsophage et l’estomac mais ce muscle peut être défaillant.
Les phénomènes de reflux gastro-œsophagiens concernent également la population pédiatrique. Il s’agit d’une exposition à des acides d’origine intrinsèque dont le pH est d’environ 1,5. Les phénomènes de reflux sont souvent nocturnes et la position allongée favorise donc une attaque acide des molaires mandibulaires préférentiellement au niveau de leur surface occlusale. Lorsque les patients dorment principalement d’un seul côté, on constate classiquement des attaques acides dissymétriques (figures 1 et 2). Le diagnostic de reflux gastro-œsophagien est établi par les gastro-entérologues sur la base des résultats d’investigations par fibroscopie ou, mieux, de pH-métrie sur 24 heures (figure 3).
Ces phénomènes de reflux sont accentués par la consommation de boissons gazeuses qui, le plus souvent, sont elles-mêmes acides.
Ces troubles constituent des pathologies psychiatriques parfaitement décrites parmi lesquelles la boulimie, l’hyperphagie et l’anorexie mentale sont les plus fréquentes. Ils peuvent se manifester par des vomissements répétés dans les formes d’anorexie purgative ou dans la boulimie [4]. Les phénomènes de mérycisme sont moins fréquents mais difficiles à diagnostiquer. Il s’agit de phénomènes de régurgitation systématique difficiles à évoquer lors d’une consultation dentaire habituelle. L’exposition aux acides associe le plus souvent facteurs intrinsèques et extrinsèques dans un contexte de réduction de la sécrétion salivaire induite par la prise de psychotropes (figures 4 à 6).
Même s’ils ne sont pas répertoriés comme TCA, on peut également évoquer des phénomènes moins connus comme une dépendance à des sodas pouvant atteindre des consommations très élevées ou une alimentation systématiquement identique dans des phénomènes que l’on nomme orthorexie.
Certaines addictions telles que tabac, alcool, toxicomanie favorisent les risques d’érosion, qu’il s’agisse d’exposition à des acides comme dans l’alcoolisme ou de réduction du flux salivaire comme dans les autres addictions [5].
Les sodas, les jus de fruits, quels qu’ils soient, sont des boissons acides présentant un pH compris entre 3 et 4,5. Parmi ces boissons, les boissons gazeuses sont plus agressives que celles qui ne le sont pas. C’est ainsi qu’une eau gazeuse qui a un pH neutre présente un potentiel érosif plus élevé que celui d’une eau plate [6].
La recherche de facteurs de risque érosifs, en lien avec la consommation de boissons acides, doit se focaliser sur les quantités ingérées mais aussi sur le mode de consommation : durant ou en dehors des repas, c’est-à-dire selon que la sécrétion salivaire est stimulée ou non, et s’il s’agit de « siroter » ou d’une consommation rapide de la boisson. La durée d’exposition aux acides est souvent plus nocive que le pH de la boisson acide.
Les boissons dites « sportives », consommées en particulier durant les sports d’endurance, sont également acides. Leur mode de consommation se fait par des apports réguliers et fréquents qui exposent les dents à cette boisson acide pendant une période où la cavité buccale est desséchée par la ventilation buccale [7].
Une mention particulière doit être portée sur les boissons consommées pendant la nuit. Certains patients ont l’habitude de se désaltérer durant la nuit. La sécrétion salivaire est alors quasi nulle et l’exposition des dents à un liquide acide particulièrement néfaste. Les eaux acidulées commercialisées ou l’eau plate à laquelle on ajoute du jus de citron sont alors très agressives pour les tissus dentaires minéralisés [8].
Les condiments comme le vinaigre et la moutarde sont acides et génèrent des phénomènes érosifs en cas de consommation élevée. Une consommation importante de moutarde en particulier génère des colorations jaunâtres dont l’étiologie est difficile à déterminer sans information préalable du praticien (figure 7). Les agrumes, citrons et pamplemousses en particulier, sont également régulièrement retrouvés dans l’étiologie des érosions.
Cette liste n’est pas exhaustive et il convient d’évaluer avec le patient ses habitudes alimentaires en sachant que l’attirance pour un seul aliment acide est rare. Il importe donc, après avoir identifié un facteur de risque, de poursuivre l’échange avec le patient afin d’identifier tous les facteurs de risque.
Elles sont nombreuses, variées et d’autant plus difficiles à identifier qu’elles relèvent de comportements individuels isolés.
On peut citer l’utilisation de jus de citron sur la brosse à dent pour soi-disant « les éclaircir » (figures 8 et 9), la consommation matinale de vitamine C effervescente absorbée après le brossage des dents qui ne sont alors plus protégées par la pellicule exogène acquise, la conservation de l’écorce de citron dans la bouche lors de la consommation d’un thé, voire une consommation de moutarde à la petite cuillère ou l’ingestion d’un verre de vinaigre pour se « purifier » !
Les aliments qui entrent dans la composition des menus végétariens, pour nombre d’entre eux, ne sont pas acides. Cependant, on note chez les patients qui adoptent cette alimentation une consommation forte d’agrumes, de salades assaisonnées de vinaigre ou de jus de citron, de moutarde, de tomates, etc.
On peut donc considérer qu’une alimentation végétarienne constitue un facteur de risque d’érosion même si on ne peut pas systématiser.
Les œnologues sont exposés à l’acidité des vins blancs en particulier. La dégustation nécessite une application prolongée de la boisson au contact des faces linguales des incisives maxillaires avec la langue. Certains travailleurs dans l’industrie chimique (chlore) peuvent également être exposés à un environnement acide ; les nageurs de compétition sont exposés aux vapeurs d’acide chlorhydrique à la surface de l’eau mais la tendance est à traiter l’eau des piscines par des produits non chlorés.
Les facteurs de risque érosifs énoncés précédemment peuvent bien évidemment être associés, ce qui complique l’anamnèse. C’est pourquoi la rigueur dans la conduite de l’examen clinique est essentielle pour identifier les facteurs de risque associés aux lésions observées.
L’examen clinique en cariologie fait partie du quotidien des chirurgiens-dentistes. La recherche des lésions érosives et la relation entre situation, morphologie, facteurs de risque des différentes lésions ne faisaient pas l’objet, jusqu’à récemment, d’un enseignement structuré dans les universités. Les publications de Lussi, Ganss et Bartlett ont, depuis les années 2010, fortement contribué à faire connaître ces pathologies, leurs étiologies, leurs classifications, leur prévalence [9, 10]. Il est intéressant, au vu de ces travaux, de structurer cet examen de façon à poser le diagnostic mais surtout à identifier tous les facteurs de risque individuels dans des situations souvent complexes.
L’examen clinique dans un contexte de lésions érosives s’articule en plusieurs phases.
• Observer toutes les lésions érosives, noter leur étendue relative, leur localisation, leur symétrie en comparant les deux arcades et les deux côtés de chaque arcade.
• Observer les autres lésions d’usure présentes causées par des phénomènes d’abrasion et/ou d’attrition associés. Le diagnostic différentiel entre lésion érosive et lésion consécutive à un phénomène d’attrition se fait facilement en examinant les lésions des dents antagonistes. Rechercher alors la chronologie relative de ces différentes lésions et leur interrelation dans l’explication des pertes de substances constatées.
• Noter la présence de lésions parodontales, particulièrement des récessions, et leur localisation (figure 10).
• Procéder à un examen fonctionnel des ATM et rechercher des douleurs musculaires des muscles masticateurs par palpation. Les dysfonctions temporo-mandibulaires sont en effet fréquentes dans les contextes d’érosion sévère.
• En cas de lésions volumineuses étendues intéressant les faces occlusales des dents cuspidées, évaluer la dimension verticale (figure 11). Si ces lésions intéressent principalement les dents antérieures, rechercher d’éventuelles égressions compensatrices. Si toutes les dents sont concernées par ces lésions érosives, il convient d’évaluer la part entre égressions compensatrices et perte de dimension verticale, ce qui n’est pas toujours facile. Rechercher la relation centrée en prenant en compte la facilité à décontracter le patient et l’importance de l’écart entre relation centrée et relation d’intercuspidie. En cas de lésions érosives étendues affectant le guidage antérieur, il convient d’évaluer la fonctionnalité du guidage en latéralités gauche et droite ainsi qu’en propulsion.
• La présence de lésions carieuses n’est pas incompatible avec celle de lésions érosives. Une consommation excessive de sodas est susceptible d’engendrer ces deux types de lésions de même qu’une consommation excessive de jus de fruits à base d’agrumes (figure 12). L’interrelation entre lésions carieuses et lésions érosives doit donc être recherchée et ne pas faire l’objet d’une démarche distincte dans l’établissement du diagnostic étiologique.
• La présence de restaurations en composites localisées sur des sites évocateurs de lésions érosives doit faire rechercher l’indication précise de ces restaurations, leur ancienneté, la dégradation éventuelle de ces restaurations au niveau des joints, signe évocateur de facteurs de risque encore présents.
Ces différentes phases peuvent sembler complexes au clinicien désireux de planifier la restauration des pertes de substances dentaires. Elles sont cependant incontournables pour celui qui cherche à identifier tous les facteurs de risque afin d’agir en amont des phénomènes de perte de substance, à stopper ou a minima à ralentir la progression des lésions et à prévenir les risques de récidives consécutives au seul traitement restaurateur. Il importe de s’intéresser à l’ensemble des lésions d’usure et de ne pas isoler les lésions érosives de l’ensemble de l’examen de la cavité orale.
La démarche pour déchiffrer toutes les informations concernant les facteurs étiologiques et/ou les facteurs de risque peut s’articuler selon le schéma suivant (figure 13).
Une bonne connaissance des facteurs étiologiques permet :
- de guider l’échange avec le patient, d’établir une relation de confiance et de ne pas s’arrêter à l’identification d’une cause car, le plus souvent, les causes sont multiples et évolutives dans la durée ;
- d’intervenir sur la suppression ou, plus fréquemment, la diminution et le contrôle des facteurs de risque ;
- d’échanger avec nos confrères médecins et de faire partie intégrante de l’équipe médicale ;
- d’adapter la thérapeutique à ces facteurs de risque en choisissant par exemple des thérapeutiques d’interception lorsque les facteurs de risque sont difficiles à contrôler ou des thérapeutiques pérennes lorsqu’ils sont maîtrisés ;
- d’orienter le suivi thérapeutique et, dans certaines situations, d’évoluer vers un schéma thérapeutique mieux adapté [11].
La relation entre lésions, facteurs étiologiques, symptomatologie, lésions associées est résumée dans le tableau 1, revu et complété depuis sa première parution [12].
L’examen clinique peut être utilement complété par des examens radiographiques, la réalisation de moulages, voire, dans les cas sévères, une analyse occlusale complète à partir d’un montage des moulages sur articulateur en relation centrée. Cependant, l’identification des facteurs de risque ne se limite pas au seul examen clinique. Les aspects somatiques doivent être recherchés car ils peuvent être à l’origine de prescription de médications sialoprives.
L’identification de l’ensemble des facteurs de risque nécessite souvent un échange avec le patient qui s’enrichit rendez-vous après rendez-vous et ne peut se limiter à la simple consultation initiale. Certains aspects des comportements alimentaires touchent à l’intimité ou relèvent d’habitudes dont le patient n’a pas conscience. Cette démarche conditionne le plan de traitement restaurateur qui sera adapté au contrôle des facteurs de risque. De la relation patient/praticien dépendent le suivi des facteurs de risque, les possibilités d’éducation thérapeutique ainsi que la formulation d’objectifs définis autour du projet de soins restaurateurs.
La recherche des facteurs de risque d’érosion est souvent rendue plus difficile lorsque le patient consulte pour des para-fonctions occlusales, en particulier de « bruxisme ». En effet, le motif de consultation oriente le praticien vers un examen fonctionnel et la présence de lésions d’attrition au détriment de la recherche de lésions érosives. Cette recherche est pourtant importante pour plusieurs raisons.
• De nombreuses publications démontrent aujourd’hui le lien étroit entre reflux acide et bruxisme. Depuis ces dix dernières années, on a pu constater un nombre croissant de publications établissant une corrélation entre acidité d’origine intrinsèque et bruxisme [13-15]. Cette association reste méconnue de la plupart des chirurgiens-dentistes alors qu’il semble aujourd’hui logique, face à un patient présentant des érosions, de rechercher des para-fonctions occlusales comme, réciproquement, face à un patient consultant pour un bruxisme en particulier nocturne, de rechercher des facteurs de risque érosifs.
• Dans un contexte d’exposition des tissus durs dentaires aux acides, les phénomènes d’attrition évoluent rapidement aux dépens de tissus fragilisés. L’exposition permanente des surfaces dentaires aux acides fragilise la surface de ces tissus et accélère l’effet délétère des phénomènes d’attrition [16]. Lorsque la dentine se trouve exposée sur des faces occlusales, ses propriétés mécaniques très inférieures à celles de l’émail expliquent une perte de tissus qui s’accélère, au point que l’origine érosive des lésions s’estompe pour ne plus laisser voir que des lésions d’attrition (figures 14 et 15).
• Des lésions érosives étendues peuvent être à l’origine d’une dégradation de la relation inter-arcade qui va elle-même engendrer des para-fonctions. Lorsque érosion et attrition cohabitent, il est parfois difficile de reconstituer le schéma étiopathogénique pour bien identifier les facteurs de risque.
Le mode d’abrasion le plus fréquent est consécutif à un brossage traumatique. Les pertes de substances d’origine mécanique par frottement sont accentuées, là encore, dans un contexte d’exposition des tissus aux acides. Il importe, lors de la recherche des facteurs de risque, de ne pas se limiter aux mauvaises habitudes lors du brossage pour rechercher également les facteurs de risque d’érosion. Le brossage traumatique est en général conforme à ce que l’on rencontre le plus fréquemment ; brosse à dent trop dure, brossage horizontal énergique, geste machinal répétitif. On voit de plus en plus souvent un brossage traumatique consécutif à un mauvais usage de la brosse à dent électrique (figures 16 et 17). Certains patients effectuent un mouvement avec la brosse à dent électrique analogue à celui que l’on observe lors d’un brossage traumatique avec une brosse manuelle. Nombre de patients reproduisent avec la brosse à dent électrique les mauvaises habitudes qu’ils avaient avec la brosse manuelle.
Par ailleurs, en présence de récessions gingivales, la dentine radiculaire exposée est peu résistante mécaniquement, surtout si elle est exposée par ailleurs à des acides d’origine intrinsèque ou extrinsèque.
On pourrait penser que ce cas de figure est rarement rencontré. Lorsque, à l’issue d’un examen clinique soigneux, on tente de corréler forme, localisation, symétrie, teinte des lésions, sans trouver la logique permettant d’expliquer l’étiopathogénie des lésions observées, on revient vers un nouvel échange avec le patient pour, le plus souvent, identifier de nombreux facteurs de risque associés (figure 18).
Si le syndrome érosif est avéré, la recherche de para-fonctions associées permet rapidement d’établir la corrélation entre ces deux pathologies. Des lésions asymétriques à la mandibule sur les dents postérieures feront penser à un reflux gastro-œsophagien nocturne associé à une position latérale privilégiée expliquant l’asymétrie des lésions. Des lésions cervicales asymétriques sur les zones cervicales vestibulaires des dents maxillaires permettront de s’orienter vers un brossage traumatique dans un environnement acide. Dans toutes les situations cliniques où les facteurs de risque érosifs identifiés ne permettent pas d’expliquer l’étiopathogénie des lésions observées, il est nécessaire d’évaluer les facteurs de risque en lien avec les phénomènes d’abrasion et d’attrition [17].
La connaissance de l’ensemble des facteurs de risque de l’érosion est un préalable nécessaire mais pas suffisant pour analyser chaque situation individuelle de nos patients. Il importe de relier ces facteurs de risque à deux paramètres incontournables pour définir le schéma thérapeutique le mieux adapté. Le premier est le facteur temps qui implique une analyse de la période d’évolution des lésions sur plusieurs années et de l’évolution concomitante des facteurs de risque. Le deuxième est la recherche systématique des autres formes de lésion d’usure comme l’attrition et l’abrasion. La compréhension des mécanismes d’association de ces différentes lésions représente probablement l’étape la plus difficile, la plus intéressante et la plus utile pour définir le meilleur schéma thérapeutique.
Les auteurs déclarent n’avoir aucun lien d’intérêts.