INCITER ET AIDER LES PATIENTS À SE SEVRER
Éditorial
Catherine MARTELLI* Sophie-Myriam DRIDI**
Le tabagisme, première cause de mortalité évitable et de morbidité, en France et dans le monde, est une préoccupation majeure de santé publique. Tous les acteurs de santé sont concernés par cette problématique.
Ainsi, ce numéro a été élaboré pour répondre à un besoin : celui d’aider les odontologistes dans la lutte contre le tabagisme en leur donnant les moyens d’inciter leurs patients, souffrant de cette addiction, à se sevrer.
Pour satisfaire cet...
Le tabagisme, première cause de mortalité évitable et de morbidité, en France et dans le monde, est une préoccupation majeure de santé publique. Tous les acteurs de santé sont concernés par cette problématique.
Ainsi, ce numéro a été élaboré pour répondre à un besoin : celui d’aider les odontologistes dans la lutte contre le tabagisme en leur donnant les moyens d’inciter leurs patients, souffrant de cette addiction, à se sevrer.
Pour satisfaire cet objectif, nous proposons un numéro inter et pluridisciplinaire faisant intervenir des médecins et des odontologistes.
• Les médecins, psychiatres, addictologues, tabacologues exercent à l’AP-HP Université Paris Saclay, Hôpital Paul-Brousse à Villejuif, dans le Département de Psychiatrie et d’Addictologie du Pr Benyamina.
Bruno Roméo et Catherine Martelli commencent par définir ce qu’est une addiction : une pathologie complexe qui se caractérise par une impossibilité, répétée, de contrôler un comportement et une poursuite de ce comportement en dépit de la connaissance de ses conséquences négatives. Ils abordent les hypothèses physiopathologiques, les modèles intégratifs neurobiologiques et les principes de la prise en charge pluridisciplinaire. Mieux comprendre cette pathologie permet de mieux engager l’alliance thérapeutique !
Patrick Dupont et Carine Verdier présentent le traitement de première intention par substituts nicotiniques. Leur efficacité a été parfaitement démontrée, avec une sécurité et une simplicité d’emploi ainsi que l’absence de contre-indication. De nombreuses formes différentes existent et leur association est désormais conseillée. Ils peuvent être prescrits par de nombreux professionnels de santé dont les chirurgiens-dentistes. La question de la dangerosité de la cigarette électronique est également soulevée. De l’avis de nombreuses sociétés savantes et au regard des données les plus récentes, même si les risques de l’usage de la cigarette électronique semblent inférieurs à ceux de la cigarette classique, il n’est plus possible aujourd’hui d’affirmer que l’usage des cigarettes électroniques est sans risque pour la santé générale. Concernant les tissus parodontaux, les données scientifiques vont dans le même sens. L’odontologiste doit pouvoir conseiller les patients sans les décourager.
Catherine Martelli et son équipe exposent 2 méthodes de sevrage tabagique sans délivrance de nicotine et répondent à la question de leur pertinence : les thérapies cognitivo-comportementales et l’hypnose. Les premières sont les seules thérapies brèves validées par la HAS. Elles permettent un apprentissage de stratégies pour faire face à l’envie de fumer : « une vie sans tabac, libre de ne plus fumer ». La thérapie brève par hypnose nécessite encore des évaluations scientifiques pour faire ses preuves, mais elle bénéficie déjà d’un certain recul et donne des résultats intéressants à l’échelle individuelle.
Carolina Cros et son équipe abordent l’addiction au cannabis et reviennent sur les mécanismes neurobiologiques sous-tendant les effets cliniques de ce produit, tant somatiques, psychiatriques qu’odontologiques. Compte tenu de l’augmentation de la prévalence de sa consommation, les odontologistes doivent augmenter leur capacité à identifier les sujets consommateurs de cannabis dès l’entretien médical, afin de les informer des effets néfastes de cette substance sur les tissus oraux d’une part, et sur la santé générale y compris psychiatrique d’autre part.
• Les odontologistes, parodontistes ou chirurgiens oraux, sont universitaires et travaillent en milieu hospitalier et/ou en cabinet de ville.
Anne-Laure Ejeil et son équipe font le point sur les pathologies orales liées au tabagisme, quelle que soit sa forme : fumé, chiqué, prisé ou associé au cannabis. Le tabac n’est pas seulement lié aux carcinomes épidermoïdes, sa consommation est reconnue comme un facteur de risque pour les maladies parodontales et péri-implantaires, les candidoses, les caries… Dès lors l’incitation au sevrage tabagique doit faire partie intégrante des plans de traitements !
Pour faciliter cette approche, Sébastien Jungo et Marjolaine Gosset expliquent comment intégrer l’éducation thérapeutique dans la pratique odontologique qui vise à transmettre aux patients les compétences d’auto-soin et d’adaptation face aux situations à risque.
Charles Micheau et son équipe complètent les données précédentes en proposant une ligne de conduite à tenir pour inciter les patients fumeurs à se sevrer, fondée sur leurs expériences et leurs échanges pluridisciplinaires. Le témoignage d’un collègue libéral, Philippe Bidault, vient renforcer leur pratique.
Enfin, Fadel Bellakhdar et Sophie-Myriam Dridi proposent une fiche pédagogique (téléchargeable sur CLINIC.fr) destinée aux patients qui pourra être utilisée au quotidien par tous les odontologistes et les médecins.
Ce numéro a été conçu pour faciliter la démarche des odontologistes dans la prise en charge des troubles liés à la consommation de tabac mais également les échanges inter et pluridisciplinaires leur permettant, si nécessaire, d’orienter correctement leurs patients vers une prise en charge addictologique.