RESTAURATIONS INDIRECTES ANTÉRIEURES : FACETTE ET CANTILEVER PROTOCOLES DE COLLAGE ET RECOMMANDATIONS CLINIQUES (2E PARTIE)
Biomatériaux
Protocoles
Romain CEINOS* Jean-Pierre ATTAL** Lionel MARSLEN*** Mickael GRIET**** Philippe FRANÇOIS***** Élisabeth DURSUN******
*MCU-PH, Dentisterie restauratrice et Endodontie, Université Côte d’Azur. UR4462, Unité de Recherche Biomatériaux Innovants et Interfaces (URB2i), Université Paris Cité. Président de la BioTeam Nice. Membre du groupe international Bio-Emulation.
**MCU-PH, Hôpital Charles-Foix, Université Paris Cité. UR4462, Unité de Recherche Biomatériaux Innovants et Interfaces (URB2i), Université Paris Cité. Membre du groupe international Bio-Emulation.
***Prothésiste dentaire. Meilleur Ouvrier de France.
****Prothésiste dentaire. Membre de la BioTeam Nice. Membre du groupe international Bio-Emulation.
*****MCU-PH, Hôpital Bretonneau, Université Paris Cité. UR4462, Unité de Recherche Biomatériaux Innovants et Interfaces (URB2i), Université Paris Cité.
******PU-PH, Odontologie Pédiatrique, Hôpital Henri-Mondor, Université Paris Cité. UR4462, Unité de Recherche Biomatériaux Innovants et Interfaces (URB2i), Université Paris Cité.
La facette en céramique collée incarne sans conteste le pinacle de la dentisterie adhésive contemporaine en réunissant respect biologique, biomécanique, économie tissulaire et performance esthétique. Son succès clinique sur le long terme en fait une thérapeutique fiable et pérenne. Les fractures et les chipping de céramique sont les complications les plus fréquentes, majoritairement avec la conservation de l’intégrité des tissus dentaires [
La facette et le cantilever en céramique collée sont deux thérapeutiques du secteur antérieur qui cristallisent à elles seules l’ensemble du cahier des charges de la dentisterie moderne. Ces deux types de restauration font appel aux techniques adhésives avec un respect maximal du capital tissulaire au service de la biologie et de l’esthétique. La pérennité de la facette ou du cantilever n’est plus à démontrer, de nombreuses publications scientifiques ont ainsi éprouvé leur fiabilité et leur durabilité. Pour autant, la nature chimique de la céramique employée (vitreuse pour les facettes et majoritairement en zircone pour les cantilevers), la spécificité des conditionnements prothétiques et la topographie des préparations amélaires (vestibulaire ou palatine) imposent un certain nombre de rappels afin d’établir les protocoles idéaux à employer par le praticien. L’objectif de cet article est d’exposer les protocoles contemporains d’assemblage des restaurations indirectes collées en vitrocéramique et en zircone à travers deux pas à pas illustrés.
La facette en céramique collée incarne sans conteste le pinacle de la dentisterie adhésive contemporaine en réunissant respect biologique, biomécanique, économie tissulaire et performance esthétique. Son succès clinique sur le long terme en fait une thérapeutique fiable et pérenne. Les fractures et les chipping de céramique sont les complications les plus fréquentes, majoritairement avec la conservation de l’intégrité des tissus dentaires [1, 2]. Les céramiques employées dans la réalisation des facettes sont de nature vitreuse (feldspathique ou vitrocéramique).
Le cantilever antérieur dans sa conception contemporaine, en céramique à mono-ailette collée, est de même une thérapeutique minimalement invasive. Il permet de suppléer la perte d’une dent et d’éviter la thérapeutique implantaire. Malgré les craintes de son hypothétique fragilité, la littérature est désormais formelle : le cantilever possède une excellente longévité [3]. Les céramiques employées peuvent être de nature vitreuses (vitrocéramique) ou polycristalline (zircone). Les complications du cantilever les plus courantes sont le décollement et la fracture (le type de complication rencontrée est corrélé à la nature de la céramique employée, les fractures étant plus fréquentes pour le cantilever en vitrocéramique) [4]. Toutefois, il est important de rappeler que le succès de ces restaurations indirectes n’est rendu possible qu’avec une communication sans faille avec un prothésiste de talent et une rigueur extrême dans leur mise en œuvre.
La facette et les cantilevers représentent les conceptions de préparation les moins invasives dans l’arsenal thérapeutique indirect du praticien [5]. Pour les deux, la préparation dentaire nécessite une conservation maximale de l’émail permettant un collage optimal sur un support quasi intact sur le plan mécanique [6].
Ainsi, le design de préparation choisi doit être en adéquation avec la biomécanique dentaire. Les stratégies de collage vont donc principalement reposer sur deux points :
– quel type de design de préparation va apporter les meilleures performances cliniques et entraîner le moins de complications au long terme ?
– quelle procédure de collage est la plus pertinente par rapport à la nature de la céramique employée dans la mise en œuvre de la pièce prothétique ?
Le risque de fracture pour les facettes est augmenté en cas d’exposition importante de la dentine [7]. Afin d’éviter cet écueil, la préparation dentaire à travers un mock up en résine bis-acryl issu des cires de diagnostiques du projet prothétique est une étape incontournable [8]. La préparation est calibrée en épaisseur à l’aide de fraises spécifiques (ex. : fraise marqueur de profondeur 868A.314.021 ou fraise boule long col 6801L.314.018, Komet) guidées selon les différents axes dentaires pour aboutir à une suppression uniforme des tissus. Un maximum d’émail est ainsi conservé tout en ménageant les épaisseurs de céramique nécessaires à la réalisation de la future facette (figure 1).
Le recouvrement du bord incisif présente un meilleur taux de succès dans le temps [9]. Le type de recouvrement et son angulation ont des répercussions importantes sur les valeurs de charge à la rupture [10]. Parmi ceux décrits dans la littérature, celui dit en butt margin (décapitation à plat du bord libre de bout en bout) est celui qui offre la meilleure répartition des stress de contrainte [11] et la meilleure résistance mécanique [12] (figure 2). De plus, ce butt margin a un certain nombre d’avantages : préparation dentaire ne nécessitant pas de dextérité manuelle particulière, gestion de cette limite plus aisée pour le prothésiste lors de la confection et pour le praticien lors de l’assemblage [13]. Au niveau des zones proximales, la limite de préparation en « toboggan » vient s’arrêter approximativement à la moitié de la zone de contact. Le contrôle de la profondeur de cette zone a pour finalité de parvenir à une économie maximale des tissus, d’éviter l’exposition dentinaire et de masquer la future interface dent/restauration. La zone cervicale peut être supra-gingivale jusqu’à légèrement intra-sulculaire en fonction des buts recherchés (modification morphologique majeure, masquage d’une dyschromie…). La recherche d’un collage amélaire dans cette zone reste un objectif primordial pour obtenir une force d’adhérence maximale et éviter les phénomènes de percolation. Cependant, l’exposition dentinaire est parfois inévitable pendant la préparation, en particulier le long des zones cervicales [14]. Bien entendu, le design de préparation générique ici décrit peut varier en fonction de la situation clinique rencontrée [15, 16].
« Toutes les fois où la situation clinique y est favorable, les marges de préparation doivent être maintenues dans l’émail sain périphérique, véritable “fermeture éclair” de l’adhésion de la pièce prothétique. » Dr Jean-François Lasserre.
Dans le cas de figure où de larges plages dentinaires seraient inévitablement exposées par la préparation, la réalisation d’une couche hybride dans la même séance que la préparation (et avant l’empreinte) est vivement recommandée. En effet, il a été prouvé au sein d’un essai clinique sur 11 ans que le taux de succès des facettes passait de 81,8 % à 96,4 % en utilisant la technique d’hybridation dentinaire immédiate (IDS), lorsque la zone de dentine exposée était supérieure à 50 % [17]. Le substrat majoritaire en présence étant l’émail, le conditionnement tissulaire de choix se portera sur un système adhésif M&R3 ou un adhésif universel dans sa modalité de etching préalable [18]. Après dépose des provisoires, il est recommandé de nettoyer les surfaces dentaires à l’aide de pâte prophylactique sans fluor ou idéalement par micro-sablage [19].
Indifféremment de leur méthode de mise en œuvre, les facettes sont réalisées en céramique vitreuse dont la nature chimique permet une adhésion maximale au sein du complexe dent/colle/facette [20]. L’attaque acide à l’aide d’un gel d’acide fluorhydrique (AF) suivie d’un agent de couplage (silane) reste à ce jour la technique la plus fiable de conditionnement des facettes. La durée du etching par AF dépend de la nature de la céramique employée (en moyenne 60-90 secondes pour une céramique feldspathique et 20 secondes pour une vitrocéramique renforcée au disilicate de lithium). Des alternatives à cette méthode ont été développées, en particulier pour des raisons écologiques afin d’éliminer l’AF (Monobond Etch & Prime, Ivoclar), mais les valeurs d’adhérence obtenues restent moins probantes [21]. L’attaque acide AF n’est pas pour autant exempte de défauts. Une sur-attaque aboutit à des microfissures au sein de la céramique et fragilise sa résistance [22]. De plus, la formation de sels et de débris de dégradation issus de cette attaque acide pourrait potentiellement entraver la correcte pénétration du silane. Pour cette raison, il est recommandé de nettoyer l’intrados de la facette post-attaque AF à l’aide de bain aux ultrasons avec de l’alcool (ou de l’eau distillée) [23] ou par frottement d’acide orthophosphorique [24]. Le silane doit être appliqué en une seule couche et être activé par chaleur [25], le cas échéant, la facette silanisée ne devant pas être manipulée avant une durée minimale de 2 minutes. Sauf recommandation du fabricant en raison de la spécificité du système de colle employé (relyX veneer, 3M), l’application d’une couche de résine adhésive non photopolymérisée dans l’intrados de la facette s’avère totalement optionnelle (pour un meilleur étalement de la résine composite de collage), voire inutile [26]. Après conditionnement, la facette est enduite d’une colle sans potentiel adhésif sur l’intégralité de son intrados (de même, une double enduction peut être menée en appliquant la colle sur les zones cervicales des préparations dentaires). Les kits de colle commercialisés proposent principalement des viscosités fluides adaptées à l’assemblage des facettes, duales ou purement photopolymérisables. Une colle photopolymérisable est à privilégier en raison du confort apporté par son temps de travail ; cependant, au-delà de 1 mm de céramique, une colle duale reste préférable [27]. Les praticiens s’orientant vers une résine composite de restauration réchauffée, dont l’avantage majeur est la gestion aisée des excès, doivent être mis en garde sur plusieurs problématiques. L’utilisation d’inserts ultra-sonores de vibration (SF1981, Komet ; Cem, Tips-12 KaVo ; CEM20, Acteon) couramment employés en secteur postérieur [28] risque ici en secteur antérieur, sur des pièces pelliculaires, d’aboutir à des fractures de céramiques, en particulier pour les facettes céramiques feldspathiques. Aussi, la qualité du joint d’interface et son épaisseur dépendent du niveau d’expertise de l’opérateur [29].
Une patiente se présente en consultation avec une restauration inadaptée sur 11 (figures 3 et 4). Après enregistrement de la couleur à reproduire, une anesthésie est effectuée et une préparation à l’aide de fraise de calibration est conduite selon les différents axes coronaires (figure 5). Les rainures de préparation sont marquées à la mine graphite (figure 6). Une fois la préparation finalisée, la couleur du substrat de collage est transmise au laboratoire et l’empreinte est prise à l’aide de silicones par addition à double viscosité. La temporisation se fait par la technique du spot etch (figure 7) et iso-moulage du projet prothétique issu des cires de diagnostique (figures 8 à 10). Une fois la facette confectionnée par le prothésiste, le provisoire est déposé et les surfaces sont nettoyées à l’aide d’une cupule chargée en pâte à polir non fluorée avant d’être rincées (figure 11). La facette est essayée en bouche à l’aide d’une pâte try-in. L’isolation est assurée par un champ opératoire de type digue caoutchoutée (Nictone blue, Bisico) de prémolaire à prémolaire. Les surfaces des dents adjacentes sont protégées à l’aide de bandes de téflon et un crampon unitaire vient assurer la rétraction maximale des tissus gingivaux sur la 11 afin d’obtenir visibilité et étanchéité des marges de préparation (figure 12). Les tissus dentaires sont traités à l’aide d’un système adhésif universel avec mordançage préalable (figure 13). Parallèlement à cette étape, l’intrados de la facette est mordancé à l’AF 9 % durant 20 secondes avant silanisation (figure 14). L’assemblage à proprement parler de la facette chargée en colle aux tissus dentaires se fait par pression douce à l’aide d’un instrument mousse (Optrasculpt pad, Ivoclar) (figure 15). La correcte position de la facette est vérifiée (l’alignement des bords libres constitue un repère efficace) et maintenue en place. Les excès de colle non photopolymérisée sont éliminés par passages successifs de fil dentaire et de pinceau imbibé en résine de modelage (Modeling Liquid, GC ; Ena Seal, Micerium ; Composite Wetting Resin, Ultradent ; Modeling Resin, Bisico). Cela réduit la tendance à l’échappement de la résine hors de l’espace marginal et assure un joint plein, lisse et aisément polissable [30]. La facette est photopolymérisée une première fois sous légère pression en débutant par sa face palatine, puis sur toutes ses faces (figure 16). Les marges sont ensuite photopolymérisées sous film de glycérine miscible à l’eau (DeOx, Ultradent ; Liquid Strip, Ivoclar ; Gradia Air Barrier, GC) pour s’assurer de l’élimination de la couche superficielle inhibée par l’oxygène dans cette zone stratégique où on veut éviter des colorations [31] (figure 17). Une finition minutieuse du joint palatin et des limites cervicales à la lame de scalpel et aux polissoirs pointes montés sur contre-angle finalise la procédure d’assemblage (figure 18). La digue est déposée et l’occlusion est vérifiée en statique et en dynamique. Le respect du protocole ainsi que l’attention portée à l’élimination des excès et aux polissages des interfaces rendent la maturation gingivale prédictible pour une intégration optimale de la facette au sein du sourire (figures 19 à 21).
Les formes et concepts de préparation pour cantilever ont évolué ces dernières décennies en particulier grâce aux travaux du Pr Mathias Kern, véritable pionner de cette thérapeutique [32]. L’introduction du cantilever collé à mono-ailette voit le jour au début des années 80 [33]. L’analyse de la littérature recommande de nos jours, sans équivoque, une seule et unique ailette, quel que soit le design de préparation des dents supports [34]. Même si cela paraît contre-intuitif, le bridge à deux ailettes présente de plus nombreuses ruptures d’interface de collage, dues aux différents degrés de mobilité dentaire. Et ce fréquent décollement partiel aboutit à un risque majeur de lésion carieuse ainsi qu’à la nécessité de réintervention [35]. Ce phénomène pourrait expliquer en grande partie le taux de survie significativement supérieur des cantilevers à mono-ailette [36]. En conséquence, une seule et unique dent pilier doit être préparée (préférentiellement l’incisive centrale, même si on peut aussi préparer dans certaines conditions la canine, voire plus rarement la latérale). Identiquement à la facette, la préparation doit être maintenue au maximum au sein du tissu amélaire, tout en ménageant suffisamment d’espace pour la pièce prothétique. La préservation de la jonction amélo-dentinaire permet de s’assurer de l’excellente rigidité de la coque d’émail coronaire et, ainsi, de l’absence de flexibilité du support lors des sollicitations occlusales de l’intermédiaire. Le congé cervical est supra-gingival afin de faciliter les étapes d’empreintes, d’essayage et d’assemblage. La préparation homothétique à la surface palatine se termine en deçà de 2 à 3 mm du bord libre afin d’éviter que l’ailette ne modifie la perception de cette zone par opacification. Un hémisphère de stabilisation réalisé à la fraise boule dans la région du cingulum peut potentiellement faciliter le centrage correct de l’ailette lors de l’assemblage. Ce type d’artifice de préparation est cependant optionnel, voire obsolète en présence d’une clef de positionnement. En revanche, l’adjonction de tranchées verticales sur la surface palatine (historiquement décrites pour les pins des cantilevers métalliques [37]) est totalement inutile et n’améliore nullement le taux de survie des pièces cantilevers collées [38]. La surface disponible de la boîte proximale va déterminer le type de céramique employé. Une surface importante et une épaisseur suffisante de céramique dans cette zone vont minimiser les risques de fracture [39].
La vitrocéramique renforcée est une alternative à la zircone à la condition sine qua non d’une épaisseur de la connexion ailette/pontique importante [40, 41]. Les propriétés optiques remarquables des vitrocéramiques et leur aptitude au collage font partie des arguments forts dans la réalisation du cantilever mais la situation clinique ne permet pas toujours cette option [42, 43].
• Vitrocéramique possible si : surface de connexion 12-16 mm2 recommandée (hauteur 4 mm, largeur 4 mm) ; épaisseur de l’ailette de 0,8-1 mm [44].
• Zircone possible si : surface de connexion 6-8 mm2 (hauteur 3 mm, largeur 2 mm) ; épaisseur de l’ailette de 0,5-0,8 mm [45, 46].
Une boîte proximale conséquente et une épaisseur importante d’ailette peuvent s’avérer difficiles à obtenir pour diverses raisons : majorer la préparation peut compromettre l’économie tissulaire (avec un risque d’exposer la dentine) et l’occlusion peut interférer de manière néfaste avec l’ailette ou la connexion du pontique. L’application de forces vestibulo-palatines est considérée comme la principale cause responsable de décollement [47]. L’occlusion doit donc être la plus minime possible au niveau du pontique (à distance de la connexion sur l’intermédiaire), en particulier lors des mouvements dynamiques (les contacts en OIM sont eux conservés) [48]. Pour cet ensemble de raisons, la zircone qui nécessite des épaisseurs de préparation moindres, peu mutilantes, correspond au choix le plus souvent conseillé [49]. L’avantage majeur est la réintervention aisée en cas de complications, le décollement de la pièce imposant une simple procédure de réassemblage et non sa réfection [50].
La zircone couplée à un revêtement de céramique vitreuse pressée à chaud au sein de l’ailette peut aussi être recommandée dans la conception des cantilevers mais ne bénéficie actuellement que de peu d’études dans la littérature [51, 52].
Le conditionnement tissulaire dans le cadre du collage d’un cantilever repose sur les mêmes principes que celui d’une facette. Le mordançage de l’émail quel que soit le choix du système adhésif, M&R3 ou Universel ou l’utilisation du primer dentaire spécifique aux colles complexes avec potentiel adhésif (Superbond, Sun Medica ; Panavia, Kuraray Noritake), reste donc un préambule incontournable à l’assemblage du cantilever.
« So the answer to the question “can we bond to zirconia?” clearly is: Yes, we can! » Pr Matthias Kern.
Dans la mesure où la céramique mise en œuvre est en zircone, plusieurs types de conditionnements prothétiques sont répertoriés dans la littérature (stratégies de collage par traitements micromécaniques ou purement chimiques). La zircone peut être contrainte à devenir silanisable par action tribochimique via une projection de billes de silice (Cojet ou Rocatec, 3M). Les protocoles contemporains diffèrent et mettent à profit les capacités de collage chimique de la zircone traitée au 10-methacryloyloxydecyl dihydrogen phosphate (10-MDP) (Z-Prime, Bisco ; Clearfil Ceramic Primer Plus, Kuraray Noritake ; G-Multi Primer, GC ; MonoBond Plus, Ivoclar) [54-56]. L’un des systèmes de collage mis en œuvre le plus référencé au sein de la littérature reste le Panavia F 2.0 (Kuraray Noritake). Le débat des meilleures performances d’adhésion obtenues si le 10-MDP est contenu au sein de la résine de collage ou du primer (Clearfil Ceramic Primer Plus en prétraitement du Panavia V5, Kuraray Noritake) n’est pas encore tranché et porte à controverse. Cependant la tendance va vers la simplification des procédures. Ainsi le concept APC (air particule Abrasion – zirconia Primer-adhesive Composite resin) recommande de procéder en trois étapes distinctes simples [57] :
– microsabler l’intrados de l’ailette prothétique à 50-60 µm d’Al2O3 à moins de 2 bars ;
– appliquer un primer spécifique à la zircone contenant des adhésifs monomères phosphates en particulier (10-MDP) ;
– utiliser une résine de collage duale ou purement photopolymérisable. Éviter toutefois la résine de collage photopolymérisable si la zircone choisie est opaque (3YTZP) et d’épaisseur supérieure à 0,8 mm.
Il est recommandé de faire ce sablage directement au fauteuil après essayage afin d’avoir les meilleures performances de collage [58]. Si, malgré tout, cette tâche est confiée au laboratoire, l’intrados de l’ailette doit impérativement être décontaminé après essayage à l’aide d’un produit dédié, tel Ivoclean (Ivoclar), ZirClean (Bisco), Katana Cleaner (Kuraray Noritake) [59, 60].
Une jeune patiente consulte suite à un trauma ayant causé la perte de 11. Une phase d’aménagement dento-gingival permet, par adjonction d’une résine composite en mésial de 12 et une chirurgie par conjonctif enfoui sur le site extractionnel, d’obtenir une situation propice à la symétrie de la future prothèse (figures 22 et 23). Une temporisation à l’aide d’une gouttière thermoformée remplit un double objectif : rétablir rapidement une certaine esthétique en comblant la perte dentaire et sculpter le berceau gingival à l’aide du pied de la dent du commerce (figures 24 et 25). La couleur dentaire est enregistrée et transmise au laboratoire dentaire par le procédé eLab prime (emulation.me, Bio-Emulation) grâce à une photographie « croisée-polarisée » (appareil reflex dont le système de flashs et l’objectif sont munis de filtres polarisants polar_eyes), standardisée par une charte de gris neutre (carte white balance) (figure 26). La 21 est préparée à l’aide des fraises du coffret cantilever antérieur du Dr Gil Tirlet (TD3538, Komet) (figures 27 et 28). Une boîte proximale mésiale de 8 mm2 est obtenue et le choix de réaliser un bridge cantilever en zircone est retenu (figure 29). L’empreinte est prise à l’aide de silicones par addition à double viscosité. Une fois le cantilever confectionné par le prothésiste, celui-ci est essayé en bouche, puis l’intrados de l’ailette est conditionné par micro-sablage suivi d’application du Clearfil Ceramic Primer Plus (Kuraray Noritake) avant enduction de la colle Panavia V5 (Kuraray Noritake) (figure 30). Un champ opératoire de type digue caoutchoutée (Nictone blue, Bisico) de prémolaire à prémolaire est mis en place. Les surfaces des dents adjacentes sont protégées à l’aide de bandes de téflon et un crampon accessoire W00 sans ailette vient assurer la rétraction maximale des tissus gingivaux sur la 21, afin d’obtenir visibilité et étanchéité des marges de préparation (figure 31). L’émail est mordancé avec acide orthophosphorique 37 % (figure 32), puis rincé et séché (figure 33), et le tooth primer Panavia V5 est appliqué à la microbrush et laissé en place 20 secondes avant d’être séché (figure 34). Le cantilever est assemblé à l’aide d’une clef de positionnement dont le design permet l’élimination facilitée des excès au pinceau dans l’embrasure interdentaire (figure 35) puis sur l’ensemble des marges (figure 36). Une première photopolymérisation, guide en place, permet de « fixer » la pièce dans sa correcte position ; une seconde est conduite sans la clef afin de s’assurer de l’insolation de l’intégralité de la colle (figure 37). Une photopolymérisation terminale sous film de glycérine miscible à l’eau nous assure l’élimination de la couche superficielle inhibée par l’oxygène (figure 38). Les finitions incluent plusieurs étapes distinctes : le polissage des marges à l’aide d’un polissoir ogive monté sur contre-angle (figure 39), le passage d’un strip interdentaire au niveau de l’embrasure (figure 40) et le polissage grâce à une roue en poils de chèvre de la surface interproximale de la 21 et du bridge cantilever (figure 41). Une fois le champ opératoire déposé, l’occlusion est vérifiée en statique et en dynamique. Les gestes spécifiques au maintien de l’hygiène en présence d’un cantilever sont expliqués à la patiente (passage des brossettes et du fil dentaire) (figure 42). Le design du pied du pontique, convexe, en forme de « balle de fusil », la correcte élimination des excès de colle et le polissage des surfaces rendent possible une maturation de la gencive autour de la pièce prothétique (figure 43). Un fil de contention discontinu en palatin sans contact avec le pontique est collé pour assurer la pérennité du résultat obtenu (figures 44 à 46) (encadré 1).
Les auteurs déclarent n’avoir aucun lien d’intérêts.
Les auteurs tiennent à remercier Kilian Mathieu et Émilie Truong pour leur aide apportée dans la coordination au CHU de Nice des cas cliniques présentés.
Facette
• La préparation doit ménager les épaisseurs nécessaires à la céramique, être uniforme, sans angle vif et se terminer au bord incisif en butt margin.
• La présence de larges plages de dentine nécessite un traitement par IDS.
• Le conditionnement prothétique implique une attaque AF 9 % (feldspathique 60-90 secondes, vitrocéramique renforcée 20 secondes), un rinçage/séchage et l’application d’une couche de silane idéalement chauffée.
• Une colle sans potentiel adhésif de type résine composite fluide photopolymérisable offre le meilleur temps de travail mais impose une polymérisation de qualité en durée suffisante.
Cantilever
• Une préparation supra-gingivale facilite grandement l’assemblage et les finitions des marges.
• La préparation peut s’arrêter par un léger épaulement à 2-3 mm du bord libre (et évite de perturber le flux lumineux à travers celui-ci). Si la surface de collage n’est pas primordiale au niveau de la face palatine, elle l’est en revanche au niveau de la boîte proximale de connexion.
• Le traitement de la zircone implique un micro-sablage de la pièce à 50-60 µm d’Al2O3, < 2 bars, suivi d’un primer de zircone ou d’une colle avec présence de 10-MDP.
• Si l’ailette est sablée au laboratoire et non au fauteuil, son nettoyage doit s’effectuer après essayage avec un produit dédié (mais surtout pas à l’acide orthophosphorique !)
Les préparations doivent être calibrées afin d’être maintenues au maximum dans l’émail.
Le système adhésif sélectionné doit permettre un mordançage préalable de l’émail (M&R3 ou Adhésif Universel).
Le respect des protocoles, la mise en place d’un champ opératoire étanche et l’emploi d’une lampe à photopolymériser de qualité sont les conditions sine qua non d’un résultat pérenne dans le temps.