AMÉLIORER VOS PHOTOGRAPHIES DENTAIRES EN 5 POINTS CLÉS
Dossier
PH, CHU Rennes. Helix, groupe de recherche & de formation en odontologie. Exercice libéral à Laval.
La photographie numérique s’est imposée depuis plusieurs années comme un outil incontournable en odontologie. Malgré la qualité et la diversité de l’équipement photographique disponible, la réalisation de photographies de haute qualité n’est pas facile. Cet article détaille 5 points clés pour améliorer sa pratique : faire des photographies de portrait ; modeler la lumière ; faciliter les prises de vues intra-orales ; faciliter les photos de petites pièces ; comprendre la technique.
La réalisation de photographies a pris une place importante dans la pratique dentaire moderne. Véritable examen complémentaire au même titre que les radiographies ou les modèles, les photos présentent de nombreux intérêts dans le cadre de la pratique quotidienne du chirurgien-dentiste.
Les images sont particulièrement intéressantes pour :
– réaliser un bilan à visée de diagnostic, d’analyse ou de réflexion sur les thérapeutiques possibles ;
– communiquer efficacement avec les patients sur les pathologies présentes et les traitements possibles associés ;
– communiquer avec les prothésistes sur la forme, les caractérisations, les couleurs des dents ;
– illustrer des travaux de recherche ou des cours ;
– réaliser une analyse critique de sa pratique clinique et progresser [1].
L’avènement des appareils photos numériques et du matériel « accessoire » (optiques, flashs, diffuseurs) a largement facilité la prise de clichés de haute qualité. Le niveau d’exigence dans les publications scientifiques et les communications est maintenant très élevé. Cinq points clés sont détaillés dans cet article afin de tirer parti au mieux des photos dentaires et de faciliter leur réalisation.
Les photos de portrait permettent d’analyser le sourire à l’échelle du visage. C’est un outil incontournable d’analyse et de réflexion lors des traitements d’orthopédie dento-faciale, de réhabilitation orale étendue et d’amélioration « du sourire ». Il est nécessaire de standardiser les clichés afin de pouvoir les comparer. Pour réaliser une photo de portrait, le cadrage est vertical depuis la base du cou jusqu’au sommet du crâne. Les cheveux du sujet sont attachés (ce qui permet de visualiser les pavillons des oreilles), la tête est droite (plan de Francfort horizontal), la ligne bi-pupillaire horizontale et la mise au point est réalisée sur les yeux [2] (figures 1 et 2).
Un fond photo noir ou gris est le plus facile à mettre en œuvre : il s’agit simplement d’une toile ou d’un tissu positionné à au moins 50 cm à l’arrière du patient. L’obtention d’un fond blanc, esthétiquement attractif, est plus complexe : il est nécessaire de placer une boîte à lumière avec flash à l’arrière du patient afin d’avoir une image correcte et d’éviter les ombres projetées [3] (figure 3).
Des images extra-orales rapprochées à l’échelle dento-labiale peuvent être réalisées de la même manière (figures 3 et 4). Moins formels, ces clichés permettent de visualiser les dents dans « l’écrin des lèvres » ; c’est à cette échelle que le patient juge son sourire généralement.
L’équipement généralement utilisé pour faire des photographies intra-orales comprend : un boîtier reflex, un objectif macro de 100 mm de focale et un flash annulaire (figure 5). Celui-ci permet d’envoyer de la lumière à l’intérieur de la cavité buccale et d’obtenir une image correctement exposée. Le défaut de ce type de flash est « d’écraser » les reliefs sur les dents antérieures (figure 6). Depuis plusieurs années, des systèmes de double flash – dits à double déflecteur – permettent de modeler la lumière et d’obtenir un rendu plus doux mettant en valeur les reliefs (figures 7 et 8). Ces flashs peuvent être montés sur un bras afin d’orienter les sources lumineuses selon les besoins. Des diffuseurs de flash associés vont contribuer à une meilleure diffusion.
Cet équipement permet de modeler au mieux la lumière et ainsi de « capturer » sur les images la macro et la micro-géographie des dents (figure 9), particulièrement importantes dans la réussite de l’intégration esthétique d’une restauration directe ou indirecte.
Les prises de vues intra-orales sont parfois difficiles à réaliser. La vue de face en occlusion est la plus courante : elle nécessite obligatoirement la mise en place d’un écarteur correctement positionné afin d’éverser les lèvres qui, ainsi, n’apparaîtront pas sur l’image. Le cadrage horizontal permet d’enregistrer l’ensemble des 2 arcades, le centre de l’image se situant à peu près au niveau du point de contact entre les deux incisives centrales maxillaires. La mise au point est faite sur les canines maxillaires permettant d’avoir toutes les dents nettes [4]. L’appareil photo est positionné perpendiculairement au plan d’occlusion afin d’éviter les cadrages en plongée ou contre-plongée impossibles à corriger sur logiciel. La salive est aspirée et le cliché réalisé avec un réglage adapté (cf. point 5) afin d’avoir une bonne exposition. De manière très simple sur un logiciel adapté, un recadrage en format 16:9 peut être conduit avec une légère rotation si besoin pour corriger « l’horizontalité » de l’image (figure 10). Ainsi, les éléments qui perturbent la lecture (lèvre, écarteur, corridor labial…) sont éliminés. Une légère retouche d’exposition peut aussi être apportée si besoin à ce moment. La photo doit être prise au départ en suivant les standards de prise de vue permettant d’éviter les retouches trop importantes qui sont chronophages et ne peuvent pas régler les problèmes trop importants.
Les miroirs avec manche sont indispensables pour mettre en œuvre les photos occlusales maxillaires, occlusales mandibulaires et latérales sans avoir les doigts gantés de l’aide-opérateur sur les images [1]. L’utilisation d’un écarteur plastique modifié (figure 11) simplifie les prises de vues occlusales maxillaire ou mandibulaire au miroir (figure 12) ou les vues du secteur antérieur avec un contrasteur noir (figure 13).
Les petites pièces occupent une place importante dans la pratique des chirurgiens-dentistes : fraises, petite instrumentation, prothèses, attachements, vis implantaire… Ces pièces sont souvent tout ou partie en métal particulièrement difficile à photographier à cause des reflets. Des fonds photo noir mat en polystyrène (Schulcz Scale Model Parts® par exemple) permettent d’obtenir facilement des images de qualité (figures 14 et 15). La pièce est simplement posée sur la feuille de polystyrène. Pour le fond blanc, un flash est placé sous la feuille afin d’avoir un blanc homogène [5] (figure 16). L’utilisation de flashs à double déflecteur associés à des diffuseurs de lumière (cf. point 2) évite les reflets trop importants et disgracieux sur les pièces métalliques (figures 15 et 16). L’utilisation de bagues allonges, de soufflets (par exemple, Novaflex BAL-EOSR®) ou de certains objectifs spécifiques (par exemple, Laowa 100 mm f/2,8 2X ultra macro®) permet d’augmenter le rapport d’agrandissement généralement obtenu avec les objectifs macro standard. Les petits détails des objets sont ainsi mis en valeur (figures 17 et 18).
L’avènement de la photographie numérique a permis de largement simplifier les connaissances techniques à acquérir afin de réaliser des images. Il est cependant nécessaire de comprendre quelques bases fondamentales de photographies afin de pouvoir utiliser le matériel de photographie correctement. L’exposition, c’est-à-dire la quantité de lumière reçue par le capteur photosensible numérique, dépend de 3 facteurs principaux : la vitesse d’obturation (temps pendant lequel la lumière arrive sur le capteur), l’ouverture du diaphragme (diamètre du diaphragme laissant passer plus ou moins de lumière) et de la sensibilité du capteur (amplification du signal reçu). Ces trois facteurs sont liés par une loi de réciprocité représentée par le triangle d’exposition [6] (figure 19). Les réglages adaptés à la photographie intra-orale avec flash sont :
– vitesse d’obturation 1/125 permettant de figer le mouvement et d’éviter les flous ;
– ouverture à f/22 permettant d’avoir une bonne profondeur de champs (PDC), c’est-à-dire une zone de netteté étendue ;
– sensibilité à ISO 100 permettant d’avoir un signal peu amplifié et une qualité d’image non dégradée (faible bruit).
L’exposition est généralement exprimée sur les appareils numériques et dans les logiciels de retouches photos en IL (indice de lumination).
Un outil intéressant pour juger l’exposition correcte d’une image est l’histogramme retrouvé aussi sur les appareils numériques et les logiciels de retouche. Il permet de visualiser le nombre de pixels (en ordonnée) en fonction de l’exposition (en abscisse). Pour une photographie correctement exposée, les pixels sont situés à peu près au milieu de l’histogramme ; pour une photo sous-exposée, les pixels sont regroupés à gauche ; inversement, pour une photo surexposée, les pixels sont à droite. Cet outil permet de visualiser très rapidement si l’exposition réelle ou corrigée est correcte (figure 20).
La photographie numérique s’est imposée depuis plusieurs années comme un véritable examen complémentaire en odontologie. Malgré l’évolution du matériel et les progrès techniques, la réalisation de photographie de haute qualité reste assez difficile. Les 5 points clés détaillés dans cet article permettent d’améliorer sa pratique et de tirer parti au mieux de son équipement.
L’auteur déclare n’avoir aucun lien d’intérêts.