Clinic n° 07 du 01/07/2020

 

De bouche à oreille

Frédéric BESSE  

frbesse@hotmail.fr

Nous, chirurgiens-dentistes, n'existons jamais pour aucune administration ni aucun politique.

La manière dont cette crise a été gérée est une véritable faillite d'État. Faillite des politiques bien sûr, complètement débordés, mais surtout des milliers de hauts fonctionnaires dirigeant les différentes agences chargées de gérer ce type de crise, parfaitement prévisible et hautement probable. Dans n'importe quelle démocratie digne de ce nom, on virerait sec ces milliers de crânes d'œuf toxiques et inutiles, obsédés par leur carrière et incapables d'accomplir correctement les tâches pour lesquelles ils sont (très bien) payés.

Parmi les confrères, encore une fois, ceux qui s'en sont le mieux sortis étaient les mieux organisés et les meilleurs gestionnaires, donc disposant d'une trésorerie suffisante pour faire le dos rond pendant deux mois et repartir sur de nouvelles bases. D'où l'intérêt de travailler en société (SEL, SELARL, SELAS) et de se former à l'organisation.

La reprise du travail à mi-régime, avec des attentes de vingt à trente minutes entre chaque patient, et peu de rendez-vous, est un vrai régal. Moins de stress, des actes rémunérateurs, du temps pour vivre au cabinet... reste le problème des urgences, très difficile à gérer, surtout dans les zones sous-dotées.

Quelle joie de découvrir les masques FFP2 après en avoir tant entendu parler ! Au moins on sera bien entraînés cet été pour les sorties en apnée...

Je ne sais pas qui est le crétin qui a fait circuler la rumeur selon laquelle nous ne serions autorisés, lors de la reprise, qu'à faire des soins d'urgence et sans instruments rotatifs, mais si je l'attrape, vu l'angoisse que cela a provoqué chez moi, je lui fais faire le tour du Périgord à coups de pompe dans le c...

Quel plaisir également de découvrir que nous, chirurgiens-dentistes, nous n'existons jamais, pour aucune administration (sauf le Trésor public !!!) ni aucun politique. Nos syndicats et l'Ordre ont dû se battre pour que nous ayons notre quota d'EPI, des indemnités, une reconnaissance pour notre travail. Nous sommes d'ailleurs régulièrement rangés tantôt dans la case des professionnels de santé (ce que nous sommes) tantôt dans celle des paramédicaux (ce que nous ne sommes en aucun cas). Un déficit d'image que nous devrons corriger à l'avenir.

Parmi la myriade de protections Covid que nous avons mises en place dans nos cabinets, certaines resteront (les surblouses lors des soins salissants, les écrans plexiglas, voir photo) au moins dans mon cabinet. Pas les FFP2.

Le Conseil national de l'Ordre, en nous demandant de cesser de travailler tout de suite, n'a pas outrepassé ses droits, puisqu'il s'est appuyé sur l'article R4157-204 du CSP. Il s'est juste « un peu » fait manipuler par les autorités, qui ont eu beau jeu, par la suite, d'arguer de la spontanéité de notre arrêt pour refuser de nous indemniser... et une fois les procédures de protection des patients mises en place, nous aurions parfaitement pu reprendre le travail plus tôt, et soigner nos patients en souffrance, si nous avions disposé des EPI ad hoc (voir premier chapitre). Notons que ni les ophtalmologues ni les ORL n'ont cessé leur activité.