Informations médicales
Inès MEISELS* Anne-Marie MUSSET** Damien OFFNER***
*Collège national des chirurgiens-dentistes universitaires en santé publique (CNCDUSP)
**Université de Strasbourg, Faculté de chirurgie dentaire
***Hôpitaux universitaires de Strasbourg (HUS), Pôle de médecine et chirurgie bucco-dentaire
****Strasbourg
*****Collège national des chirurgiens-dentistes universitaires en santé publique (CNCDUSP)
******Toulouse
*******Université de Strasbourg, Faculté de chirurgie dentaire
********Hôpitaux universitaires de Strasbourg (HUS), Pôle de médecine et chirurgie bucco-dentaire
*********INSERM UMR1260 Nanomédecine régénérative, FMTS
**********Strasbourg
***********Collège national des chirurgiens-dentistes universitaires en santé publique (CNCDUSP)
************Toulouse
*************Université de Strasbourg, Faculté de chirurgie dentaire
**************Hôpitaux universitaires de Strasbourg (HUS), Pôle de médecine et chirurgie bucco-dentaire
***************INSERM UMR1260 Nanomédecine régénérative, FMTS
****************Strasbourg
Plus de 50 % des vidéos présentes sur YouTube s'intéressant au domaine bucco-dentaire sont de mauvaise qualité informative. C'est ce qu'a montré une étude évaluant 100 de ces vidéos. Ce travail a mené à la création de l'AVASN (Agence de veille et d'actions sanitaires numériques) afin de mieux encadrer ces informations.
Facebook, Twitter, Instagram ou encore YouTube pour n'en citer que certains, voici des médias qui ont révolutionné nos sociétés au cours de ces dix...
Plus de 50 % des vidéos présentes sur YouTube s'intéressant au domaine bucco-dentaire sont de mauvaise qualité informative. C'est ce qu'a montré une étude évaluant 100 de ces vidéos. Ce travail a mené à la création de l'AVASN (Agence de veille et d'actions sanitaires numériques) afin de mieux encadrer ces informations.
Facebook, Twitter, Instagram ou encore YouTube pour n'en citer que certains, voici des médias qui ont révolutionné nos sociétés au cours de ces dix dernières années.
Leur montée en puissance s'est accompagnée de l'avènement des « influenceurs », des personnes vivant de leurs publications sur ces plates-formes [1]. Ce métier est de plus en plus populaire, notamment auprès des plus jeunes [2]. On retrouve ainsi de nombreuses publications faisant la course au buzz, que l'émetteur soit un « influenceur » ou non. C'est en partie de cette façon que les informations virales sont nées... ainsi que les fakes.
Un fake est aujourd'hui un terme très large allant d'une simple vidéo humoristique truquée à une véritable fausse information que les populations s'approprient et en laquelle ils peuvent réellement croire [3].
Le rapport à l'image est central sur la plupart des réseaux sociaux, les internautes s'y sentent donc très investis. De cette façon, ils sont particulièrement sensibles aux informations qu'ils y trouvent et ceci facilite la propagation de fakes. La médecine et la santé bucco-dentaire n'échappent pas à cette dynamique qui leur apporte un nouvel aspect et a une influence tout à fait considérable sur les populations [4, 5]. Entre autres, on retrouve des vidéos « astuces » pour se blanchir les dents ou des story-time (histoires personnelles racontées sur les réseaux) sur les dents de sagesse ou les dispositifs d'orthopédie dento-faciale. De ce fait, il semble indispensable de pouvoir maîtriser les publications lorsqu'elles sont d'ordre médical [6] : qu'en est-il de leur qualité scientifique et informative alors qu'elles émanent d'« influenceurs » ou de personnes qui ne sont pas des professionnels de santé ?
Pour évaluer la qualité informative de ces publications et, par conséquent, leur influence sur les internautes-patients, nous avons décidé de mener une étude sur les vidéos de la plate-forme YouTube, le nombre de vues de beaucoup de ces publications s'y comptant en milliers, voire en millions [6].
Cette étude a eu pour objectif d'évaluer la qualité de 100 vidéos YouTube sur le thème de la médecine bucco-dentaire [7]. Les vidéos étaient pour moitié de langue française et pour l'autre de langue anglaise. Ces vidéos ont été recensées selon des critères d'inclusion et d'exclusion que nous avons déterminés.
Critères d'inclusion :
• la vidéo doit avoir été postée sur la plate-forme YouTube ;
• le contenu vidéographique aborde un sujet sur le thème de la dentisterie (quel qu'il soit : chirurgie, esthétique, orthodontie, etc.) ;
• le titre de la vidéo suscite une thématique traitant de dentisterie ;
• la vidéo a été postée pendant ou après l'année 2010 (année charnière dans l'avènement des youtubeurs) ;
• le contenu est présenté en langue française ou anglaise ;
• la vidéo est réalisée et présentée par un youtubeur « amateur » d'un point de vue médical/scientifique.
Le format des vidéos devait d'abord être standard, c'est-à-dire sous forme de chronique classique en facecam (le facecam représente un format dans lequel l'essentiel de la vidéo est présenté par une personne parlant face à une caméra) mais nous nous sommes rendu compte que les youtubeurs variaient de plus en plus les modèles. Nous n'avons donc pas bridé les formats de présentation par un critère d'inclusion ou d'exclusion.
Critères d'exclusion :
• la vidéo est présentée par un youtubeur se revendiquant professionnel de santé ;
• le contenu vidéographique présente un caractère humoristique (type sketch) ;
• la vidéo sert uniquement de support pour un diaporama ;
• la vidéo est en ligne depuis moins d'un mois au moment du visionnage ;
• la vidéo comptabilise moins de 1 000 vues.
Les vidéos ont été recherchées aléatoirement sur YouTube en partant de mots clés simples : dents/dentiste/appareil dentaire/etc. [8].
Une fois recensée, la vidéo était évaluée à l'aide d'une grille d'évaluation. Celle-ci a été conçue à l'aide d'un modèle existant se concentrant sur des vidéos de professionnels de santé à destination de patients dans un exercice exclusif d'orthopédie dento-faciale [9]. Ce modèle a été retravaillé et testé plusieurs fois afin d'obtenir une version finale s'adaptant à toutes les vidéos YouTube traitant de santé bucco-dentaire. De cette façon, nous avons obtenu une liste d'items permettant d'attribuer un score à chaque vidéo, les items pouvant attribuer + 1 point ou – 1 point au score.
Le youtubeur :
• donne des notions d'hygiène bucco-dentaire de base et/ou motive à l'entretien du sourire/des dents (+ 1) ;
• conseille de consulter un chirurgien-dentiste (ou un professionnel de l'art de la santé bucco-dentaire dentaire comme, par exemple, un hygiéniste ou un orthodontiste) (+ 1) ;
• a pris contact au préalable avec son chirurgien-dentiste/orthodontiste (pour s'informer)/est suivi par un orthodontiste (+ 1) ;
• cite une source de donnée scientifique (+ 1) ;
• réalise une vidéo à but préventif (+ 1) ;
• maîtrise le sujet, vocabulaire scientifique adapté (+ 1) ;
• explique un mécanisme d'action/un protocole opératoire/un plan de traitement/une méthode/la cause d'un problème cohérente et reconnue (+ 1) ;
• donne des précautions d'emploi et/ou des recommandations reconnues (+ 1) ;
• expose différents produits ou différentes options de traitement/méthodes reconnues et en motive un(e) (+ 1) ;
• réalise une vidéo à thématique exclusivement dentaire, ne s'égare pas (+ 1) ;
• expose des indications claires et reconnues du traitement/produit et/ou expose le but des conseils donnés (+ 1) ;
• expose des contre-indications claires et reconnues et/ou expose les limites des conseils donnés (+ 1) ;
• énonce des effets indésirables/complications du produit/de la pratique/de la méthode/des conseils (+ 1) ;
• cite une méthode/pratique ou un produit/conseil dont l'efficacité (ou bien l'utilité) est reconnue (+ 1) ;
• appuie ses dires par des images (photos/vidéos/gestes) (+ 1) ;
• diffuse des informations erronées ou mauvaises (– 1) ;
• produits/concentrations utilisés/pratique illégales/contournement de recommandation ou de loi dans le pays d'origine de la vidéo (– 1) ;
• non-respect de la déontologie de l'art dentaire ou des professionnels de santé (– 1).
Le score final permettait alors de classer la vidéo dans l'une des catégories suivantes :
• de – 3 à 3 points sur 15 : la vidéo est de mauvaise qualité et présente un danger potentiel pour la santé bucco-dentaire de l'internaute-patient ;
• de 4 à 7 points sur 15 : la vidéo est de moyenne qualité et présente un impact néfaste sur la santé bucco-dentaire de l'internaute-patient par manque d'informations notable ;
• de 8 à 11 points sur 15 : la vidéo est de qualité acceptable et présente un impact bénéfique sur la santé bucco-dentaire de l'internaute-patient malgré un manque d'informations notable ;
• de 12 à 15 points sur 15 : la vidéo est de bonne qualité et présente une prévention potentielle ou un apport bénéfique pour la santé bucco-dentaire du patient.
Les résultats de cette étude montrent que 58 % des vidéos sont de qualité informative faible (contre 42 % de qualité informative correcte) (fig. 1). D'après les thématiques abordées au travers des vidéos, il a été possible de distinguer 3 catégories principales : esthétique/orthopédie dento-faciale (appelée plus communément orthodontie dans les vidéos)/chirurgie. Le score moyen des vidéos était de 6,6/15, toutes catégories confondues, mais nous avons constaté des variations de résultats au travers des thématiques. Les scores moyens des vidéos ont été de 5,3 pour l'esthétique (fig. 2), 7,8 pour l'orthodontie (fig. 3) et 8,3 pour la chirurgie (fig. 4).
Les vidéos traitant d'esthétique semblent tirer les scores généraux vers le bas, au vu des scores moyens donnés ci-dessus, puisqu'elles sont significativement (p < 0,01 après un test t de Student) de plus mauvaise qualité que les deux autres thématiques (orthodontie et chirurgie).
Afin de préciser davantage les résultats, nous avons également analysé les vidéos en fonction de la langue d'émission. Le score moyen des vidéos francophones était de 6,3 contre 6,9 pour les anglophones. L'analyse statistique n'a pas montré que cette différence était significative.
Nous avons ensuite observé l'évolution des résultats en fonction du temps, les vidéos évaluées ayant toutes été mises en ligne sur YouTube entre 2011 et 2016. Le score moyen de ces vidéos suit une amélioration progressive, de 4,6 en 2011 à 9,2 en 2016, marquant ainsi une amélioration significative (p < 0,01 après un test du Chi2) de la qualité des vidéos au fil du temps (tableau 1).
Il a été intéressant de s'attarder sur les résultats en fonction du nombre de vues des vidéos puisque, en effet, les vidéos les plus vues ne représentent malheureusement pas celles de meilleure qualité (tableau 2).
Enfin, l'étude ayant porté sur des vidéos de non-professionnels de santé (largement majoritaires sur YouTube), nous avons tout de même souhaité évaluer un plus petit nombre de vidéos émanant de personnels soignants. Onze vidéos ont donc été évaluées sur les mêmes modalités que celles vues précédemment et les résultats montrent l'absence de vidéos de mauvaise qualité et un score moyen de 10,6/15 (fig. 5), ce qui est bien supérieur au score des vidéos des non-professionnels de santé (6,6/15).
Une disparité de qualité des vidéos est donc notable. Dans l'ensemble, elles se répartissent majoritairement entre une qualité moyenne et acceptable mais le score moyen (6,6/15) laisse apparaître des lacunes flagrantes quant aux informations diffusées.
À elles seules, ces 100 vidéos représentaient, en 2017, plus de 160 millions de vues : l'impact sur la population, notamment sur les plus jeunes, est tout à fait considérable. On peut ainsi envisager deux options à l'utilisation et à l'avenir de YouTube et des médias sociaux en santé.
• Ils pourraient représenter un danger à grande échelle de par leur influence et la qualité informative globalement mauvaise des contenus.
• À l'inverse, ces médias pourraient devenir des outils de santé publique grâce à des publications encadrées par des professionnels de santé ou des recommandations claires concernant leur conception. Il s'agirait là d'un nouveau moyen de prévention en plus d'informations. La qualité croissante des vidéos au fil du temps observée dans notre étude semble déjà amorcer cette voie mais pour des raisons probablement autres : professionnalisation du métier de youtubeur, « influenceur », intervention de marques et de sociétés dans les vidéos, etc.
C'est cette deuxième voie que nous avons décidé de développer en créant, en 2019, l'AVASN : l'Agence de veille et d'actions sanitaires numériques (fig. 6). Cette agence a pour but de promouvoir les bonnes informations en santé sur les réseaux sociaux afin d'en tirer tous les profits préventifs possibles en matière de santé bucco-dentaire, mais pas seulement ! Le second but de cette agence est de lutter contre les fakes et la « mésinformation » médicale.
À l'AVASN, nous pensons que, pour développer le potentiel maximal des réseaux sociaux, il faut en respecter les « codes » : pas de censure au programme. Cela n'est de toute façon pas possible à notre niveau.
Nous allons au-devant des mauvaises informations en relayant des publications (dites posts) de comptes et sources fiables (posts documentés et vérifiés, articles scientifiques, post de sociétés savantes, etc.) ou bien en proposant du contenu de notre création (nous seuls ou bien en collaborations avec des « influenceurs » qui sont professionnels de santé). Ces posts contrebalancent des fakes en se fondant sur des sources fiables et des informations de qualité. D'autres projets sont en train de germer et/ou de se déployer dans le même champ de la santé et des réseaux sociaux.
Pour amorcer cette dynamique, un long travail de plus d'un an a été nécessaire afin de contacter les instances intéressées et de pouvoir débloquer un minimum de fonds, l'AVASN étant une société qui a débuté sans rampe de lancement. Après des encouragements initiaux du Collège national des chirurgiens-dentistes universitaires en santé publique (CNCDUSP), nous avons ensuite pu rencontrer le Conseil départemental de l'Ordre des chirurgiens-dentistes du Bas-Rhin qui a accueilli notre projet avec beaucoup d'enthousiasme. S'en est suivie une présentation au Conseil National de l'Ordre des chirurgiens-dentistes et de nombreux autres rendez-vous : ARS, CNCDUSP, Health On the Net, avocats spécialistes en propriété intellectuelle, etc. En parallèle de ces rendez-vous, nous avons anticipé et travaillé nos premières vidéos et premiers posts, notamment le projet « Dr.M » sur YouTube et Instagram (fig. 7), tout en réfléchissant à la façon dont nous pourrions intervenir en tant que « AVASN » sur les différentes plates-formes. En effet, s'ils sont accueillants et léchés en apparence, les réseaux sociaux sont des mondes bien loin d'être gentils quand on y pose les pieds. Par exemple, la teneur d'un message peut très vite être mal interprétée et le business de nombreux comptes est prioritaire par rapport à la qualité des posts présentés. L'AVASN veille à s'inscrire dans une démarche positive, en mettant toujours à l'honneur la qualité et la fiabilité des informations partagées.
Actuellement, ce travail est porté par les deux auteurs principaux de l'étude vue précédemment : Dr Inès Meisels et Dr Damien Offner. Il s'agit d'un travail d'échanges quotidiens pour pouvoir produire du contenu à un rythme relativement soutenu, ce qui est nécessaire pour gagner en visibilité sur les réseaux. Ainsi, nous publions une vidéo sur YouTube ou Instagram toutes les semaines, en alternant la plate-forme chaque semaine, et une à deux publications hebdomadaires supplémentaires sur Instagram et Facebook. Nous répondons également à la demande d'instances ou de sociétés savantes comme nous l'avons fait pour les recommandations du CNCDUSP dans la gestion des urgences au cabinet dentaire face à l'épidémie du coronavirus (Covid-19) que nous connaissons [10, 11]. Tous les tournages et montages vidéo sont réalisés à l'heure actuelle par nos propres soins avec du matériel qui est le fruit de nos investissements personnels dans la société.
Toute la réussite du projet repose donc sur un travail très chronophage : brainstormings quotidiens, 2 à 3 jours complets de travail par semaine, préparation de scripts puis tournage et montage des vidéos, publications et réalisation de leurs visuels, rendez-vous et collaborations hebdomadaires, etc.
La mise en place d'un réseau de qualité est également primordiale. En dehors de la chirurgie dentaire, en kinésithérapie ou en pharmacie par exemple, il existe déjà des personnalités que l'on peut qualifier d'« influenceurs » santé et qui comptent leurs followers en dizaines de milliers, voire en centaines de milliers pour certains. La plupart de ces « influenceurs » ont accepté de collaborer avec l'AVASN pour nous aider, bénévolement, en nous rapportant des fakes ou en collaborant sur des publications avec nous. Leur collaboration est aussi indispensable pour s'ancrer dans les médias sociaux afin de faire connaître nos actions et notre utilité au plus grand nombre.
Cette grande charge de travail menée par quelques personnes seulement est sans doute la grande limite du projet : tout repose actuellement sur des actes bénévoles en plus de nos activités respectives, hospitalo-universitaire ou libérale, qui nous passionnent également et nous permettent de vivre financièrement.
Pour obtenir des financements permettant la survie, et au mieux le déploiement de l'AVASN, nous espérons donc des subventions et des collaborations. Ces fonds étant à investir pour un projet de santé publique, ils tardent souvent à se trouver et nous réfléchissons à mettre en place une campagne de crowdfunding (cagnotte en ligne) car nos actions sont au bénéfice de tous. Il serait toutefois idéal d'obtenir une reconnaissance plus officielle de la part d'instances comme l'ARS, Santé Publique France ou encore le ministère de la Santé afin de faire vivre durablement ce projet indispensable au présent et au futur de la santé connectée.
Notre visibilité dans les médias est également un facteur de réussite sur lequel nous devons miser. Les chiffres et leur croissance nous laissent optimistes mais ils sont encore actuellement trop faibles pour avoir un impact considérable sur les internautes-patients. Pour nous aider, rien de plus simple qu'un like ou un partage ! L'AVASN est ainsi active en tant que telle sur Facebook (AVASN) et sur Instagram (@avasn_).
Voyons à présent ce qui se passe réellement sur les réseaux sociaux en santé.
L'un des gros avantages que nous observons est celui de la pluridisciplinarité des publications : nous savons déjà que la chirurgie dentaire n'est pas réduite à une discipline qui a pour but de soigner uniquement les caries mais qui peut, par exemple, intervenir dans des pathologies générales (diabètes, risques infectieux...). C'est ce versant qui est mis en avant dans de nombreuses publications et qui semble plaire aux internautes-patients. Nous espérons tendre vers le même principe qu'un pôle de santé sur le terrain mais en version numérique, sans objectif de soin direct mais plutôt avec un objectif de prévention et d'accompagnement en santé de qualité. On retrouve ainsi parmi les comptes soutenus par l'AVASN des pharmaciennes parlant de fertilité, des kinésithérapeutes parlant du port du masque, des ostéopathes abordant la psychologie... dans le respect des compétences de chacun. Ceci amène des discussions et des échanges interdisciplinaires extrêmement constructifs. L'AVASN s'attèle justement à mettre en avant la qualité résultant de ces échanges au travers de la plupart de ses publications.
Au sein de ce programme de travail de l'AVASN s'est développé un concept plus ludique et qui progresse rapidement : Dr.M (Dr.M sur YouTube et Facebook/@le.monde.du.dr.m sur Instagram).
Ce personnage a les mêmes objectifs que l'AVASN mais s'articule plus spécifiquement autour de la santé bucco-dentaire en suivant les codes des « influenceurs » d'aujourd'hui : de la vulgarisation médicale présentée de façon ludique et attrayante (vidéos, story, collaborations avec d'autres « influenceurs », quizz Instagram, etc.).
Le Dr M est un personnage réellement incarné par le Dr Inès Meisels. On peut alors se demander s'il est possible d'être sur les réseaux sociaux en tant que professionnel de santé affiché tout en respectant les codes de santé publique et de déontologie auxquels nous sommes soumis. La réponse est OUI ! À condition de connaître les règles. Ceci faisait d'ailleurs l'objet de nos prises de contact avec les instances ordinales. Le Conseil de l'Ordre a d'ailleurs récemment publié un article très complet à ce sujet dans sa revue La lettre [12]. Parmi les règles les plus importantes, il faut retenir que cet affichage doit servir un but de prévention et d'information : il ne doit en aucun cas servir à l'augmentation d'une patientèle (article R. 4127-251 du code de la santé publique). Ainsi, il convient de proscrire l'affichage du cabinet et de son adresse et encore plus les prises de rendez-vous en ligne par l'intermédiaire des réseaux. Par exemple, la publication de photos de cas cliniques avant/après (en esthétique notamment) est tendancieuse : est-ce à visée d'informations ou bien est-ce pour mettre en avant une activité au cabinet ? C'est aussi pour veiller à ce genre de publications que l'AVASN a vu le jour. Il n'est pas rare de trouver des professionnels de la santé sur les réseaux sociaux pour des fins professionnelles personnelles plutôt que pour l'intérêt général et la prévention. Nous nous permettons alors de les informer des obligations auxquelles nous sommes soumis lorsque nous en avons l'occasion, mais n'avons bien sûr en aucun cas pour rôle de nous substituer aux autorités compétentes en la matière.
L'AVASN et Dr.M sont des projets naissants qui suscitent un grand intérêt de la part du public. L'accueil au niveau de la profession dentaire est parfois plus mitigé, probablement par manque de (re)connaissance de l'utilité des réseaux sociaux qui peut pourtant s'avérer très efficace.
Si les propos sont toujours scientifiquement « sourcés », le format exige parfois de passer outre certains détails qui ne remettent pourtant pas en cause la validité scientifique des contenus. Les vidéos étant à destination des patients, certains professionnels de santé perfectionnistes pourraient parfois s'en émouvoir. Il faut alors garder en tête la cible de ces posts et se souvenir que l'AVASN encourage toujours à demander conseil aux professionnels de santé pour toute précision.
De nombreux articles pointent l'influence des médias sociaux en santé [2, 13, 14] et nous pensons que les conséquences de cette influence, si les informations ne sont pas un minimum encadrées, peuvent être dévastatrices. Il suffit de poser la question des habitudes orales des patients pour être surpris du nombre d'entre eux ayant déjà eu recours aux produits et tutoriels recommandés sur les réseaux sociaux : par exemple, l'utilisation de citron ou de charbon pour se blanchir les dents alors que des études scientifiques ont mis en évidence l'inefficacité et les risques liés à l'usage de ces techniques [15-17].
En plus d'être un nouveau moyen d'information et de prévention, les atouts des médias sociaux pourraient, à terme, permettre de gagner du temps lors des consultations au fauteuil. Nous n'outrepasserons jamais le lien patient-praticien et la confiance qui en découle qui sont primordiaux pour une bonne prise en charge, mais l'AVASN pourrait permettre par exemple de faciliter l'éducation à la santé, et notamment à la santé et à l'hygiène bucco-dentaire. En effet, le patient s'informant par lui-même et par un moyen qu'il connaît bien sera d'autant plus réceptif, en termes d'écoute et de compétences, aux informations qu'il reçoit et qu'il recevra en complément [5].
Les patients pensent assez souvent être bien informés par les informations qu'ils trouvent sur internet (les réseaux sociaux en faisant partie) [18]. Très nombreux sont ceux qui y cherchent presque systématiquement des informations en santé avant ou après une consultation médicale. Ces nouveaux comportements ont logiquement émergé avec l'avènement d'internet et des réseaux sociaux et la facilité d'accès aux connaissances qu'ils proposent. Ce phénomène étant inéluctable, autant travailler sur des moyens de diffuser et d'encadrer des informations de qualité, non ? C'est précisément le but de l'AVASN.
Les auteurs déclarent n'avoir aucun lien d'intérêts concernant cet article.