Clinic n° 04 du 01/04/2020

 

Juridique

Audrey UZEL  

Avocat au barreau de Paris

Les soins médicaux ne sont pas soumis à TVA. Pourtant, en matière de collaboration, il existe plusieurs hypothèses où la TVA est due sur la rétrocession d'honoraires.

Principe

Au regard du droit fiscal, la collaboration s'analyse en une prestation de services assujettie à la TVA. En effet, c'est la mise à disposition de locaux équipés, voire de la patientèle, qui constitue une opération taxable. Le titulaire du cabinet est donc en principe tenu de verser la TVA à l'administration fiscale. Toutefois, comme pour toute prestation de services soumise à TVA, le principe de la franchise de base trouve à s'appliquer. Ainsi, les sommes perçues par le titulaire ne donneront pas lieu à TVA dès lors qu'elles ne dépassent pas la somme de 33 200 € (HT).

Comment ça marche ?

L'application de la TVA dépend de la situation fiscale du titulaire du cabinet.

• 1er cas – Le titulaire du cabinet exerce sous le régime de franchise de base : le chiffre d'affaires à prendre en compte pour l'application de la franchise est le montant, réputé HT, des honoraires rétrocédés de l'année civile précédente (en cas de création d'activité, le montant est calculé au prorata temporis). Si, en cours d'année, le montant des honoraires rétrocédés dépasse les 33 200 € tout en restant inférieur à 35 200 €, le titulaire du cabinet paye la TVA à partir du 1er janvier de l'année suivante. En revanche, si le montant des honoraires rétrocédés dépasse les 35 200 €, le titulaire paie la TVA dès le premier jour du mois du dépassement. Le titulaire doit informer le service des impôts de ce franchissement de la limite de 35 200 € (HT). Dans ces deux situations, la TVA est due sur le montant intégral de la rétrocession. Ce principe s'applique que le titulaire exerce à titre individuel ou en groupe (société d'exercice).

• 2e cas – Le titulaire du cabinet exerce sous le régime d'assujettissement à la TVA en raison d'un dépassement de la limite de 33 200 € (HT) qui a eu lieu l'année précédente. Dans ce cas, les rétrocessions d'honoraires s'entendent TTC. Il conviendra dès lors de retrancher le montant de la TVA (20 %) de la rétrocession pour apprécier si celle-ci dépasse ou non le seuil de franchise de 33 200 € (HT).

• 3e cas – Le titulaire du cabinet a choisi l'assujettissement à la TVA. Cette option est conseillée par les services fiscaux lorsque le titulaire est susceptible de connaître des variations de régime d'imposition à la TVA. Il est toujours loisible au titulaire de renoncer à cette option, quand le montant des honoraires rétrocédés qu'il perçoit, montant ramené HT, est inférieur à la limite de 33 200 €. En cas de franchissement du seuil, la TVA est applicable sur la totalité des rétrocessions.

Quid de la SCM ?

Une attention particulière doit être portée à ce cas. Si un membre d'une SCM se fait assister par un collaborateur libéral, les rétrocessions versées au titulaire par le collaborateur sont évidemment soumises à TVA. Or, si le pourcentage des rétrocessions soumises à TVA excède 20 % par rapport aux recettes du titulaire, c'est la société dans son ensemble qui risque d'être soumise à la TVA. L'exonération de TVA est donc remise en cause pour l'année suivant le dépassement.

Quid de l'associé minoritaire d'une SEL ?

La rigueur s'impose ici aussi car, en cas d'intégration d'un associé minoritaire (c'est-à-dire possédant moins de 5 % du capital de la SEL), la société s'expose au risque d'une requalification en « collaboration libérale déguisée ». L'administration fiscale considère qu'il y a abus si le contrat a pour unique objectif la réduction du montant de l'impôt (impôt sur le revenu, sur les bénéfices, TVA, droits d'enregistrement, impôt sur la fortune...). Une telle requalification entraîne une remise en cause de l'exonération de la TVA sur la fraction des honoraires conservée par la société après rétrocession aux associés minoritaires.

À RETENIR

Le contrat de collaboration est utile en cas de surcharge temporaire d'activité ou pour préparer sa succession. Cependant, le niveau trop bas du plafond des rétrocessions non soumises à TVA, résultant de l'article 293 B du code général des impôts, est un frein au recours à ce contrat, qui reste donc un contrat temporaire.