RÉFORME DES RETRAITES
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Édouard Philippe a exposé le 11 décembre dernier les grandes lignes du futur système de retraite « universel par points » qui s'appliquera progressivement « à tout le monde ». Malgré ses propos qui se veulent rassurants sur les réserves, les libéraux s'opposent au texte.
Il n'y aura pas de « siphonage » des réserves constituées par les caisses de retraite des professions libérales, a affirmé Édouard Philippe. « Les réserves resteront au sein de ces régimes et les caisses pourront ainsi les utiliser pour accompagner la transition vers le nouveau système, notamment en prenant en charge une partie des cotisations afin de soutenir l'acquisition de points pour les cotisants et de faciliter la convergence des anciens régimes vers le système universel », précisent les documents explicatifs.
Dans le cadre du système à points, les professions de santé continueront de bénéficier de la prise en charge par l'Assurance maladie d'une partie des cotisations vieillesse. Les modalités de cette prise en charge resteront déterminées dans le cadre conventionnel les liant à l'Assurance maladie. La contribution de l'Assurance maladie « ne baissera pas ».
L'intégration des professions libérales au sein du système universel sera « progressive », à travers la convergence de leurs règles en matière d'assiette et de taux de cotisation. La transition sera donc « adaptée aux spécificités des professions » avec, selon les cas, une adaptation du plafond de cotisation, du taux de cotisation ou du taux de rendement. L'assiette sociale sera rapprochée de celle des salariés. L'augmentation de cotisation pour la retraite sera compensée par une baisse de la CSG.
Dans le futur dispositif, le niveau de cotisation sera le même qu'actuellement jusqu'à 120 000 € de revenus bruts annuels. Il sera fondé sur des points (et non plus des trimestres), de telle sorte que « chaque heure travaillée ouvrira des droits ». Le Premier ministre s'est voulu rassurant sur la valeur du point qui ne sera pas fixée « au gré des difficultés budgétaires ». Ce sera « aux partenaires sociaux de fixer sa valeur et son évolution sous le contrôle du Parlement ». Et cette valeur ne pourra pas baisser et sera indexée « sur les salaires » qui, a précisé le Premier ministre, augmentent « plus vite que l'inflation ». Le projet prévoit par ailleurs la garantie d'un seuil de pension minimale de 1 000 € nets pour une carrière complète au SMIC.
Ce système « universel par points » entrera en vigueur pour les jeunes nés à partir de 2004. Il s'appliquera aussi aux actifs ayant moins de 50 ans (personnes nées après 1975) dès la fin 2024. Les règles de ce nouveau système ne sont pas rétroactives. Pour les personnes déjà « actives », l'ancien système coexistera.
Édouard Philippe a aussi avancé l'idée de la fixation d'un âge d'équilibre de départ à la retraite de 64 ans en 2027. L'âge légal de départ à la retraite est maintenu à 62 ans, mais un système de bonus-malus inciterait à ne partir qu'à 64 ans.
Les syndicats réformistes, et en particulier la CFDT jusque-là favorable au régime universel à points, ont rejoint l'opposition, refusant la fixation d'un âge d'équilibre.
Le projet de loi doit être présenté en Conseil des ministres le 22 janvier. Les débats à l'Assemblée commenceront à la fin du mois de février pour un vote prévu d'ici l'été. Le texte contiendra des grandes mesures mais renverra à des ordonnances ou à des décrets pour les précisions sur les transitions. Des négociations avec les partenaires sociaux se prolongeront dans les deux ans qui viennent sur les questions de pénibilité, de prise en compte des carrières longues, de travail des seniors et d'aménagement des fins de carrière, des modalités de conversion des droits, « sur lesquelles la loi aura donné des garanties, mais qu'il faudra définir par régime ».
L'UNAPL estime ne pas avoir été entendue « sur l'essentiel ». Elle s'oppose à cette réforme qui « gomme les spécificités du monde libéral et détruit les régimes autonomes ». L'UNAPL pointe quatre points négatifs :
– la fixation d'un périmètre du régime universel à 3 PASS (plafonds annuels de sécurité sociale, soit à 120 000 €) ;
– s'il n'y a pas de « hold-up » sur les réserves, la question de leur gestion « reste entière » car elles doivent être utilisées à financer la convergence entre l'actuel et le nouveau régime pendant la période de transition d'au moins 15 ans ;
– la gouvernance confiée aux partenaires sociaux mais sous contrôle strict de l'État ;
– le recours aux ordonnances sur les modalités précises des transitions et convergences dans le cadre du projet de loi est « peu propice à la négociation ».
Mais l'UNAPL attend la réunion de son conseil national le 9 janvier pour décider les modalités d'actions à engager.
Les CDF restent mobilisés
À l'instar de l'UNAPL, Les CDF s'opposent à un périmètre du régime universel à 3 PASS « qui condamne les caisses complémentaires ». Et plaident pour un régime limité à une assiette de 1 PASS. Ils demandent « un éclaircissement sur l'utilisation transitoire des réserves des caisses autonomes ». Et jugent « inacceptable » qu'elles ne soient pas gérées par les chirurgiens-dentistes. Ils regrettent également le recours aux ordonnances.
Aux côtés de l'ensemble des professions libérales, « Les CDF entendent poursuivre leur mobilisation ». Ils comptent sur une rencontre prévue le 14 janvier pour que leurs revendications aient une chance d'aboutir.